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* Dans l'article "STRATÉGIE,, subst. fém."
STRATÉGIE, subst. fém.
A. − [P. oppos. à tactique]
1. ART MILIT.
a) Art d'organiser et de conduire un ensemble d'opérations militaires prévisionnelles et de coordonner l'action des forces armées sur le théâtre des opérations jusqu'au moment où elles sont en contact avec l'ennemi. Tous ses plans de bataille [de Napoléon] sont faits pour le projectile. Faire converger l'artillerie sur un point donné, c'était là sa clef de victoire. Il traitait la stratégie du général ennemi comme une citadelle, et il la battait en brèche (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 375).Les bretteurs ordinaires du duc (...) traversaient le fossé dans la barque afin d'opérer une sortie et de prendre l'ennemi en queue. Stratégie savante et digne d'un bon général d'armée! (Gautier, Fracasse, 1863, p. 405).
b) Partie de la science militaire qui traite de la coordination des forces armées (en intégrant les aspects politiques, logistiques et économiques) dans la conduite d'une guerre ou dans l'organisation de la défense d'une nation, d'une coalition. Les moyens d'attaque et de défense changeant, les idées les plus justes, en stratégie, peuvent bien devenir avec l'âge des âneries (...). Devant un ennemi inventif et qui sut rénover ses méthodes et moyens d'attaque, rien de pire que des chefs routiniers (Gide, Journal, 1940, p. 36).Il n'est pas impossible que la guerre soit, au début au moins, une guerre limitée sans (...) usage d'armes nucléaires, mais même dans ces conditions, la stratégie devrait à chaque instant tenir compte d'une possibilité d'utilisation brusque de l'arme nucléaire par un des adversaires (Goldschmidt, Avent. atom., 1962, p. 184).V. dissuasion ex. de Beaufre.
SYNT. Stratégie aérienne, atomique, défensive, générale, navale, nucléaire, offensive, opérationnelle; stratégie de dissuasion, de guerre froide, de représailles; cours, traité de stratégie; erreur, problème, question de stratégie; apprendre, enseigner, étudier la stratégie; changer de stratégie; déployer une stratégie.
2. P. anal., PHILOS. MARXISTE. Science de la direction de la lutte révolutionnaire, qui détermine l'orientation d'ensemble du combat de classe en fonction des objectifs essentiels et des données fondamentales de la situation historique objective. Élaboration, évolution, mise en œuvre de la stratégie; stratégie autogestionnaire, politique, révolutionnaire. D'une façon générale, le développement inégal des différentes contradictions au sein du tout se traduit par le déplacement du décisif, déplacement qui constitue par excellence l'objet de la tactique politique, alors que le fondamental constitue la base de la stratégie (L. Sève, Introd. à la philos. marxiste, Paris, éd. soc., 1980, p. 498).
B. − P. ext.
1. Ensemble d'actions coordonnées, d'opérations habiles, de manœuvres en vue d'atteindre un but précis. Stratégie amoureuse, électorale, littéraire, parlementaire; stratégie fine, froide, instinctive, irréprochable, puérile; opposer (à qqn) une stratégie; se livrer à, déployer toute une stratégie. Il savait mieux que personne qu'il y a, dans la vie des femmes (...) des heures pour ainsi dire sans défense (...). M. de Monthélin, dans sa stratégie savante autour de madame de Maurescamp, attendait depuis longtemps cette heure fatale (Feuillet, Paris., 1881, p. 121).V. manifestaille rem. s.v. manifestation2ex. de Queneau:
... Durtal ne pouvait douter que des Hermies n'eût pratiqué la littérature, car il la jugeait avec la certitude d'un homme du métier, démontait la stratégie des procédés, dévissait le style le plus abstrus avec l'adresse d'un expert qui connaît, en cet art, les plus compliqués des trucs. Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 37.
En partic. Manière d'organiser, de structurer un travail, de coordonner une série d'actions, un ensemble de conduites en fonction d'un résultat. Stratégie de recherches, d'expérimentation, d'enseignement. Une stratégie pédagogique est constituée par l'ensemble des conduites ou interventions pédagogiques articulées entre elles en fonction d'un but, d'un objectif (Thinès-Lemp.1975).
2. Spécialement
a) ÉCON., COMM. ,,Ensemble des choix d'objectifs et de moyens qui orientent à moyen et long terme les activités d'une organisation, d'un groupe`` (Gestion fin. 1979). La stratégie financière d'une entreprise n'est qu'un aspect de sa stratégie globale; elle inclut les choix à moyen et long terme d'objectifs et de moyens financiers (Gestion fin.1979).
Stratégie défensive. Politique de production qui consiste pour une firme à adopter la ligne de produits la plus complète possible afin de satisfaire au mieux distributeurs et consommateurs (d'apr. Public. 1976).
Stratégie offensive. Politique de production qui consiste pour une firme à se limiter à la fabrication d'un modèle ou d'un petit nombre de produits en recherchant à satisfaire la demande issue d'un segment particulier ou d'un petit nombre de segments (d'apr. Public. 1976).
Stratégie de communication. ,,Argumentation de base à partir de laquelle le texte et la représentation visuelle d'une publicité sont élaborés`` (Termes nouv. Sc. Techn. 1983).
b) LING. Stratégie énonciative. Ensemble des choix de production linguistique en vue de mener à bien une intention énonciative. Mon intention énonciative peut être de persuader, de faire faire, de me renseigner, etc. Pour réaliser cette intention, je suis amené à déterminer une stratégie énonciative (dite aussi parfois stratégie de discours) (D.D.L.1976, s.v. énonciative).
c) MATH. [Dans la théorie des jeux] ,,Ensemble cohérent de décisions que se propose de prendre un agent assumant des responsabilités, face aux diverses éventualités qu'il est conduit à envisager, tant du fait des circonstances extérieures qu'en vertu d'hypothèses portant sur le comportement d'autres agents intéressés par de telles décisions`` (Lal. Suppl. 1968).
Jeu de stratégie. Les jeux de stratégie peuvent faire intervenir, comme facteur de décision un phénomène (...) lié au hasard. Le jeu est alors dit « jeu de hasard » mais l'activité stratégique ne s'annule que lorsque le hasard devient total et qu'il ne reste plus de marge de décision (Bureau1972).
Prononc. et Orth.: [stʀateʒi]. Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1808 (Boiste: Stratégie, science des mouvemens d'une armée éloignée d'une autre); 1859-60 fig. (Dochez qui cite Ch. de Rémusat [1797-1875] et Villemain [1790-1870]). Empr. au gr. σ τ ρ α τ η γ ι ́ α « commandement d'une armée » d'où « aptitude à commander une armée, qualités d'un général » et « manœuvre ou ruse de guerre », dér. de σ τ ρ α τ η γ ο ́ ς, v. stratège. Cf. au xvies. strategie « gouvernement militaire d'une province romaine » (Du Pinet, Pline, VI, 9 ds Gdf. Compl.) , lat. strategia, -ae « id. ». Fréq. abs. littér.: 246. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 84, b) 190; xxes.: a) 148, b) 782.
DÉR.
Stratégiste, subst. masc.,vieilli. Synon. de stratège (v. ce mot A 2).Si le général Zurlinden est seulement capable de déployer contre les Allemands les qualités de stratégiste dont il a fait preuve contre le prisonnier du Cherche-Midi, il doit reprendre au moins l'Alsace et la Lorraine (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 246).− [stʀateʒist]. Att. ds Ac. 1835 et 1878. 1reattest. 1831 (Michelet, Introd. Hist. univ., p. 437); de stratégie, suff. -iste*. Cf. la forme stratégien « id. » 1842 (Ac. Compl.) − 1845-46 (Besch.).
BBG. − Dossiers de mots. Néol. Marche. 1976, no1, pp. 84-88. − Dub. Pol. 1962, p. 426 (s.v. stratégiste).