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SPÉCULER, verbe trans. indir.
A. − [Le compl. d'obj. indir. peut ne pas être exprimé] Faire des opérations financières, commerciales pour tirer profit des variations du marché. Synon. accaparer, agioter (vieilli), boursicoter (fam.).Spéculer sur le coton, sur les grains, sur les mines d'or, sur le sucre; spéculer sur le prix de qqc.; spéculer sur la misère publique; spéculer en Bourse. Le père Grandet spéculait sur les tonneaux ou sur les monnaies, selon l'occasion (Alain, Propos, 1932, p. 1060).Comme l'argent appelle l'argent, il avait pu profiter de l'essor industriel du Nord, spéculer sur les achats et les reventes de vieux matériel et d'usines à démolir (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 151).V. agioteur ex. 6.
Spéculer à la baisse, à la hausse. Faire des opérations financières, commerciales pour tirer profit des variations du marché à la baisse, à la hausse. D'Israëli, qui jugeait la hausse téméraire, résolut de spéculer à la baisse (Maurois, Disraëli, 1927, p. 32).
B. − Gén. péj. Compter sur quelque chose pour en tirer un profit, un avantage. Spéculer sur l'amour, la bêtise, la crédulité, la cupidité, la sottise de qqn. Le chicaneur spécule sur l'obscurité des lois (Say, Écon. pol., 1832, p. 463).Le capitaine (...) avait spéculé sur l'action bénéfique de l'air de la mer pour me ravigoter (Céline, Voyage, 1932, p. 229).
C. − [Le compl. d'obj. indir. peut ne pas être exprimé] Se livrer à des études, des recherches abstraites, théoriques. Synon. méditer, penser, réfléchir.Spéculer sur des abstractions, sur Dieu, sur l'essence de qqc., l'existence de qqc., sur l'infini, sur le réel. La philosophie spéculant à l'aide des catégories, Dieu est demeuré à l'état de conception transcendentale (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 20).Dommages [que] subissent (...) la théologie et la théodicée, dès qu'on permet à l'intelligence humaine de spéculer sur l'absolu (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 1285).
Prononc. et Orth.: [spekyle], (il) spécule [-kyl]. Ac. 1694, 1718: spe-, dep. 1740: spé-. Étymol. et Hist. A. 1. a) Mil. xives. trans. « observer, considérer, chercher à pénétrer par l'esprit » ([Jean d'Arkel] Li ars d'amour, éd. J. Petit, II, IV, IX, t. 2, p. 29: regardant, avisant et especulant cele science); 1370-72 id. (Nicole Oresme, Ethiques d'Aristote, éd. A. D. Menut, X, 20, p. 539: speculer et cognoistre la multitude et congregacion des loys); b) 1404 speculer sus aucune chose « réfléchir, méditer sur » [dom. de l'astron.] (Christine de Pisan, Fais et bonnes meurs Charles V, éd. S. Solente, III, 67, t. 2, p. 170: speculer sus plus occultes choses si comme des passions de la lune, comme sont eclipses); c) ca 1550 intrans. c'est spéculé (Farce du Cousturier ds Anc. théâtre fr., éd. Viollet Le Duc, t. 2, p. 166); 2. 1509 trans. « observer une réalité, des phénomènes physiques » speculer toute la pourprise à l'environ (Lemaire, Illustr., I, 21 ds Hug.); 1610 speculer les astres (Beroalde, Parvenir, Epistre I, 270, ibid.). B. 1. 1792, 2 déc. « chercher à obtenir un gain grâce à; chercher à tirer profit de » spéculer sur la misère publique (Robesp., Discours, Subsist., t. 9, p. 115); 2. 1798 spéc. spéculer sur les matières de banque (Ac.). Empr. au lat.speculari « observer, guetter, épier; regarder d'en haut ». Fréq. abs. littér.: 245. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 342, b) 260; xxes.: a) 402, b) 365. Bbg. Quem. DDL t. 16.