| SPECTACULAIRE, adj. A. − 1. [En parlant d'une chose, d'un événement] Qui frappe la vue, l'imagination par son caractère remarquable, les émotions, les réflexions suscitées. Évasion, accident, résultat, technique spectaculaire. Les masses sont plus sensibles aux événements spectaculaires qu'aux arguments. Pearl Harbour les émeut plus que mille éditoriaux (Maurois, Journal, 1946, p. 219).Je tenais à ramener vivant un de ces oiseaux spectaculaires [un sept-couleurs], (...) pour que l'enfant des Batignolles qui habitait près du tunnel (...) saisît sur le vif sa voix, son cri (Cendrars, Lotiss. ciel, 1949, p. 18). − Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Les plaidoiries et le verdict annoncé pour aujourd'hui [aux Assises de Seine-et-Oise] ont attiré beaucoup plus d'auditeurs que la veille. On aime bien le « spectaculaire » (L'Œuvre, 20 févr. 1941). 2. [En parlant d'un phénomène, d'un processus] Qui suscite la surprise, l'admiration par son importance, son ampleur, sa rapidité. Amélioration, changement, croissance, développement, essor, métamorphose, récession, redressement, remontée, réussite spectaculaire. Le XXesiècle a vu des progrès spectaculaires, grâce à la préparation chimique d'hormones qui ont permis une expérimentation beaucoup plus précise (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 647).Ce seul traitement rétablit souvent de façon spectaculaire l'état général et le chirurgien peut alors opérer dans de bien meilleures conditions (Quillet Méd.1965, p. 161). − Péj. Qui fait beaucoup d'effet sans être de grande portée. Pouchet va donc soumettre ses bocaux de culture à l'action d'un ventilateur et, comme il aime d'opérer sur grande échelle, avec des moyens « spectaculaires », il choisira un ventilateur capable, en moins de six heures (...) de remplir d'air toute la vaste nef de Notre-Dame de Paris (J. Rostand, Genèse vie, 1943, p. 92).Nous revînmes au système paternel des fouilles effectuées par le personnel de Kobjercyn, c'est-à-dire à des formalités spectaculaires et ennuyeuses, mais de tout repos (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 330). B. − 1. a) Qui concerne les spectacles, les représentations théâtrales, musicales, chorégraphiques. Dans les foires de la région parisienne, la partie réservée aux attractions « spectaculaires » diminue d'année en année au profit d'entreprises commerciales, telles que loteries, jeux d'adresse ou de hasard (Arts et litt., 1935, p. 76-13).Tant que la mise en scène demeurera (...) un simple moyen de présentation, une façon accessoire de révéler des œuvres, une sorte d'intermède spectaculaire sans signification propre, elle ne vaudra qu'autant qu'elle parviendra à se dissimuler derrière les œuvres qu'elle prétend servir (Artaud, Théâtre et son double, 1938, p. 126). b) Qui produit, qui cherche à produire un effet visuel, émotionnel. Décor spectaculaire. S'il fallait sur la scène aimer comme l'on aime (...) regarder comme on contemple, notre langage resterait chiffré. Les silences ici doivent se faire entendre. L'amour hausse le ton et l'immobilité même devient spectaculaire. Le corps est roi (Camus, Sisyphe, 1942, p. 111).On peut tenir cette philosophie pour vraie. Ce qui la dépasse est au delà du spectaculaire, et ne peut plus être évoqué que dans un théâtre non spectaculaire, comme celui que je me suis pour ma part efforcé d'édifier (G. Marcel, Heure théâtr., 1959, p. 122).Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. V. supra ex. de G. Marcel. 2. [En parlant d'une discipline sportive] Qui est assimilé à un spectacle par la performance, le sens artistique présenté, les émotions provoquées. Les sports, qui comportent une partie proprement spectaculaire, depuis les courses de chevaux jusqu'aux compétitions internationales de boxe, de football ou de tennis, réunissent depuis le début du siècle un public (...) de plus en plus nombreux (Arts et litt., 1935, p. 76-1).Le footballeur moderne, s'il manifeste son esprit de solidarité et son enthousiasme, doit permettre au jeu de s'améliorer tant sur le plan sportif que spectaculaire (J. Mercier, Footb., 1966, p. 77). C. − Qui appartient au spectateur, qui concerne le spectateur. Au théâtre, nous trouverons l'attitude spectaculaire sous une autre forme: le spectateur, tout yeux tout oreilles, immobile sur son fauteuil (Hist. spect., 1965, p. 11).Dans tous les cas, la croyance spectaculaire est aussi incompatible avec la croyance au réel, qu'imaginer avec percevoir (Hist. spect., 1965, p. 13). Prononc.: [spεktakylε:ʀ], [spe-]. Étymol. et Hist. 1. 1907 « qui concerne les spectacles » almanach spectaculaire (Lar. pour tous); 2. 1933 « propre à constituer un spectacle »(Lar. 20e); 1936 p. ext. « sensationnel » (Arts et litt., p. 3004), classé comme ,,mot pompeux à la mode`` (par R. Georgin, Lang. de l'admin. et des affaires, 1954, p. 25). Dér. de spectacle* d'apr. l'étymon lat.; suff. -aire*. Fréq. abs. littér.: 73. DÉR. Spectaculairement, adv.De manière spectaculaire, de manière à produire beaucoup d'effet. a) [En parlant d'un phénomène] Sa découverte décisive est l'adjonction au milieu utilisé d'extraits embryonnaires qui favorisent spectaculairement la croissance des cellules (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 620).b) [En parlant d'un événement, d'une action] Jésus frustré n'est qu'un innocent de plus, que les représentants du Dieu d'Abraham ont supplicié spectaculairement (Camus, Homme rév., 1951, p. 53).− [spεktakylε
ʀmɑ
̃], [spe-]. − 1reattest. 1946 (Prévert, Paroles, p. 285); de spectaculaire, suff. -ment2*. BBG. − Blochw.-Runk. 1971, p. 493. − Dub. Dér. 1962, p. 50. |