| SOUILLURE, subst. fém. A. − 1. a) Ce qui salit, ce qui souille; tache, saleté. Les voiles du Duncan avaient été soigneusement renfermées dans l'étui de toile qui servait à les garantir des souillures du charbon, car le vent soufflait du sud-ouest et ne pouvait favoriser la marche du navire (Verne, Enf. cap. Grant, t. 1, 1868, p. 43).Elle ne tenait pas à la main une rose, mais un pilon de volaille qu'elle rongeait en marchant, et son visage portait quelques souillures de graisse rôtie (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 446). − En partic. Produit de déjection, d'excrément. Pour que le malade puisse satisfaire ses besoins naturels, on prend un matelas percé; mais plus souvent un urinal et un bassin de lit. Ces ustensiles pouvant se renverser, il est indispensable de protéger le matelas et le drap du dessous contre les souillures (Lar. mén.1926, p. 768). b) Fait de souiller, d'être souillé. Synon. contamination, pollution.Un mode de pénétration analogue se trouve réalisé lors de la souillure de plaies, ou encore à la suite d'excoriations produites par un corps chargé du virus (Nocard, Leclainche, Mal microb. animaux, 1896, p. 373).À l'augmentation considérable de la consommation s'ajoute une souillure particulièrement marquée dans les zones urbaines et industrielles (certaines nuits d'été la Seine roule à Paris pour moitié des eaux d'égouts) (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 384). 2. Impureté, corps étranger présent dans un produit, une substance. Le sable ou le grès fondent et servent de véhicule aux scories qui sont expulsées sur l'enclume, sous les coups redoublés du marteau, en assurant un contact débarrassé de toute souillure (Fillon, Serrurier, 1942, p. 16).Les agrégats doivent bien adhérer à la pâte de ciment. Il faut donc qu'ils soient propres, exempts de souillures, d'argile en particulier, et il est bon lorsqu'on le peut, d'utiliser des agrégats lavés (Cléret de Langavant, Ciments et bétons, 1953, p. 167). 3. Ce qui contamine, infecte quelque chose. Cette pénétration est certainement beaucoup plus difficile que par les muqueuses des organes directement exposés aux souillures de l'air ou que par celles dont la fonction essentielle est l'absorption (Calmette, Infection bacill. et tubercul., 1920, p. 144).Ces produits [médicaux] en boîtes métalliques très bien closes, à l'abri de toute poussière et des souillures (Encyclop. éduc., 1960, p. 115). B. − Au fig. 1. Ce qui souille, salit moralement quelqu'un, ce qui est ressenti comme une atteinte à l'honneur, à la dignité. Les soldats sentirent distinctement qu'il y avait là une double souillure pour leur uniforme, attenter à des représentants du peuple (...) et tuer des hommes désarmés (Hugo, Hist. crime, 1877, p. 181).Il pleurait, mais ses larmes étaient des larmes de joie. Il se sentait lavé de toute souillure. Vingt ans d'un combat douteux, tant d'offenses subies, tant de misères, tant d'avanies, ne l'avaient pas vaincu (Guéhenno, Jean-Jacques, 1948, p. 281). − P. méton. Chose considérée comme basse, vile. Vainement les éternels ennemis des libertés publiques, ceux qui érigent en principe le viol des Assemblées, se sont efforcés d'imprimer leurs souillures et de laisser la trace de leur bave sur les pages où la représentation nationale vient d'écrire son testament (Le Petit Parisien, 21 juin 1877ds Vivac. lang. ds journ. paris., 1869-87).N'ai-je pas ainsi réussi à me débarrasser du démon qui me chevauchait: le démon de la propriété immobilière? La propriété immobilière, quelle souillure! (Larbaud, Barnabooth, 1913, p. 160). 2. Marque morale ou physique de débauche, d'avilissement. [Tom et Séphora] sortaient du même ruisseau parisien (...) ils en gardaient également la souillure et le goût de vase (A. Daudet, Rois en exil, 1879, p. 250).Devant tel corps où se constate la souillure, la veulerie (...) l'observation cruelle du peintre [Degas] nous impose l'admiration des valeurs puissantes ou nous intéresse par la préciosité de la technique (Mauclair, Maîtres impressionn., 1923, p. 98). C. − RELIG. Ce qui rend une personne impure, inapte à participer à certains rites; ce qui porte atteinte à la pureté d'une chose sacrée. Le péché véniel ne fait pas perdre l'absolution; un acte fervent de contrition en efface la souillure et permet d'approcher de la sainte table (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 229).Dans les rites païens, les purifications n'enlèvent au candidat à l'initiation que les souillures matérielles de son impureté cérémonielle; le baptême purifie vraiment l'âme du catéchumène (Théol. cath.t. 14, 11939, p. 563). Prononc. et Orth.: [sujy:ʀ]. Ac. 1694, 1718: souilleure; 1740: souillûre; dep. 1762: -ure. Étymol. et Hist. 1. 1268 souilleure [date du ms.] « marque laissée par ce qui souille » (Lapidaire prose a. fr., éd. L. Jordan, 2); 2. fin xiiies. soillëure fig. « flétrissure, impureté morale » (St Remi, éd. W. N. Bolderston, 3499). Dér. de souiller*; suff. -ure*. Fréq. abs. littér.: 345. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 627, b) 523; xxes.: a) 438, b) 387. |