| * Dans l'article "SOLIDAIRE,, adj." SOLIDAIRE, adj. A. − DROIT 1. [En parlant d'une obligation] Où sont intéressées plusieurs personnes contractantes qui sont chacune tenues pour le tout ou qui peuvent chacune exiger le tout (d'apr. Barr. 1974). Le créancier qui consent à la division de la dette à l'égard de l'un des codébiteurs, conserve son action solidaire contre les autres, mais sous la déduction de la part du débiteur qu'il a déchargé de la solidarité (Code civil, 1804, art. 1210, p. 217). − DR. CIVIL. Obligation solidaire. V. obligation A 1 b. − Dette solidaire. V. dette A 3 f. 2. [En parlant d'une pers.] Qui est coobligé avec une ou plusieurs autres personnes dans un tel acte, un tel engagement. Codébiteur, créancier solidaire. Comme il s'agit de vos loyers, vous êtes vis-à-vis de moi solidaire avec votre débiteur. Si votre fils ne me paye pas ces frais-là, vous me les payerez, vous (Balzac,Illus. perdues, 1843, p. 615).La société en commandite se contracte entre un ou plusieurs associés responsables et solidaires, et un ou plusieurs associés simples bailleurs de fonds (Jaurès,Ét. soc., 1901, p. 251). − [Avec un subst. coll. désignant une pers. mor.] Vous savez, mon cher ami, que toute la Compagnie est solidaire, lui dit-il à mi-voix. Je me permets donc de vous demander très confidentiellement si vous êtes couvert (Druon,Gdes fam., t. 2, 1948, p. 112). B. − [En parlant de pers.] 1. Qui est lié à une ou plusieurs autres personnes par des intérêts communs, des responsabilités communes. Être étroitement solidaire de qqn; se sentir solidaire de qqn. Vous ralliez et vous groupez autour de la haute pensée du progrès cette immense famille solidaire de ceux qui travaillent, de ceux qui souffrent et de ceux qui pensent (Hugo,Corresp., 1851, p. 18): 1. Nous ne sommes pas seuls. C'est un fait. Nous naissons appartenant à un groupe, et l'instinct vital développé dans ce groupe exerce une pression sur nous. C'est un autre fait. Cette pression, je l'appelle le devoir. Être solidaire de la société, c'est, en toute première ligne, être solidaire de son père.
Bourget,Actes suivent, 1926, p. 64. − Solidaire dans + compl. déterminatif précisant le domaine d'application de la dépendance réciproque.Nous sommes tous solidaires dans la Rédemption. Chacun de tous fait partie de ce corps mystique, qui a racheté sur la Croix nos misères. C'est à cette solidarité-là qu'il faut arriver (Daniel-Rops,Mort, 1934, p. 416). 2. Qui a conscience d'un devoir moral de soutien et d'assistance morale et matérielle à quelqu'un ou à un groupe dans le besoin; qui met en acte cette aide, ce soutien. Solidaire(s) de collègues, de grévistes; se déclarer solidaire de qqn: 2. Par quel miracle ces demi-fous, prisonniers d'un rêve, ces dormeurs éveillés semblent-ils entrer plus avant chaque jour dans l'intelligence des misères d'autrui? Étrange rêve, singulier opium qui, loin de replier l'individu sur lui-même, de l'isoler de ses semblables, le fait solidaire de tous, dans l'esprit de l'universelle charité!
Bernanos,Journal curé camp., 1936, p. 1112. 3. P. ext. [En parlant d'une pers.] Qui est responsable de quelqu'un, eu égard aux actes; qui se porte garant de quelqu'un et p. méton., d'un aspect de son comportement moral. Les démarches que faisait MmeCaroline (...) lui avaient ensuite fait entrevoir les effrayantes responsabilités qui l'accablaient. Il allait être solidaire des moindres illégalités commises, jamais on n'admettrait qu'il en ignorât une seule, Saccard l'entraînait dans une déshonorante complicité (Zola,Argent, 1891, p. 407). − Rare. Solidaire à.Il ne se sentait à aucun degré solidaire à cet homme et lui en voulait d'avoir vu dans la collaboration un moyen de soumettre la France (Aymé,Uranus, 1948, p. 33). C. − [En parlant de choses] 1. [En parlant de choses abstr.] Qui se trouve dans un rapport d'étroite dépendance réciproque ou de causalité avec une autre chose. Notre liberté est solidaire de l'équilibre du monde et c'est là ce qu'il faut comprendre pour ne pas s'étonner du profond mystère de la Réversibilité qui est le nom philosophique du grand dogme de la Communion des saints (Bloy,Désesp., 1886, p. 108).Ce qui est complet, systématique, précis, vif, c'est l'action, grosse de ses conséquences et solidaire avec elles [les sciences] (Blondel,Action, 1893, p. 101). 2. [En parlant de choses concr.] Qui est étroitement lié à une autre chose; qui est dans un rapport de dépendance réciproque avec une autre chose. Les pieux, pointus à leur extrémité supérieure, qui fut durcie au feu, avaient été rendus solidaires au moyen de traverses boulonnées (Verne,Île myst., 1874, p. 287).Le plus petit grain de poussière est solidaire de notre système solaire tout entier (Bergson,Évol. créatr., 1907, p. 271). ♦ P. anal. Il semble qu'aucune partie des centres nerveux ne fonctionne isolément. Viscères, muscles, moelle, cerveau sont solidaires les uns des autres. Les muscles, quand ils se contractent, dépendent non seulement de régions étendues du cerveau, et de la moelle, mais aussi de nombreux viscères (Carrel,L'Homme, 1935, p. 114). − MÉCAN. [En parlant d'un organe, d'une pièce mécan.] Qui dans son fonctionnement, est lié d'une façon généralement réversible soit par contact soit par un intermédiaire (engrenage, chaîne, courroie) à un autre organe. Anton. indépendant.Le piston est solidaire d'une colonne de tiges ou d'un câble qui lui communique son mouvement de va-et-vient (Chartrou,Pétroles natur. et artif., 1931, p. 59). Prononc. et Orth.: [sɔlidε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1584 dr. obligation solidaire (J. Duret, Commentaire aux coustumes du duché de Bourbonnois, § 35, p. 274); 2. id. « se dit des personnes liées par un acte solidaire » (Id., ibid.); 3. 1739-47 « se dit des personnes qui ont une communauté d'intérêts ou de responsabilités » (Caylus,
Œuvres badines, X, 41); 4. 1834 « se dit des choses qui dépendent l'une de l'autre » (Béranger, Acad. et Cav. ds Littré); 5. 1861 mécan. « se dit des pièces d'un engrenage dont le fonctionnement est lié » (M. Cournot, Traité de l'enchaînement des idées fondamentales dans les sc. et dans l'hist., t. 1, p. 80). Dér. de solide*; suff. -aire1*, pour rendre compte du lat. jur. in solidum « pour le tout », « solidairement ». Fréq. abs. littér.: 436. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 358, b) 277; xxes.: a) 947, b) 829. DÉR. 1. Solidairement, adv.D'une façon solidaire. a) Dr. [Corresp. à supra A] De façon que chacune des personnes coobligées réponde pour le tout. Être solidairement responsable de tel ou tel acte; être obligé solidairement avec qqn; solidairement ou conjointement; solidairement et indivisiblement. Elle prouverait d'abord qu'il était tenu solidairement à payer tout le passif de la Compagnie, puisqu'il avait déclaré comme dettes collectives des dettes personnelles (Flaub.,Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 252).P. plaisant. Ma sœur vous dit un million de choses tendres, et nous vous aimons tous solidairement, comme on dit au Barreau (J. de Maistre,Corresp., 1793, p. 40).P. ext., dans le domaine pénal.On ne voit plus (...) les habitants des villages frappés solidairement des peines applicables à un réfractaire (Chateaubr.,Mém., t. 2, 1848, p. 502).b) [Corresp. à supra B; en parlant de pers.] Ensemble avec une ou plusieurs autres personnes et en partageant les intérêts et les responsabilités. Être engagé solidairement avec qqn. Notre salut ne se poursuit et ne s'achève que solidairement avec la justification de toute la « masse élue » (Teilhard de Ch.,Milieu divin, 1955, p. 181).c) [Corresp. à supra C; en parlant de choses abstr. ou concr.] Dans un état de dépendance réciproque très étroit. La matière et la vie, telle que nous la définissons, sont données ensemble et solidairement (Bergson,Deux sources, 1932, p. 271).− [sɔlidε
ʀmɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. − 1resattest. a) 1462 dr. (Mémoires de Messire Philippe de Comines, Preuves, par Lenglet du Fresnoy, II, 364 ds Bartzsch, p. 2, 40), b) 1771 « par une dépendance réciproque » (Voltaire, Dict. philos., art. Jésuites, Questions sur l'Encyclop., éd. Garnier, 1879, p. 500); de solidaire, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér.: 45. 2. Solidarisme, subst. masc.,philos., socio-pol. Doctrine fondée sur le principe de la solidarité, en tant que devoir social, entre les hommes. Dans l'esprit de l'instituteur,l'utilitarisme s'en alla rejoindre sur l'horizon le déisme, le kantisme, le solidarisme, toutes les morales que les savants et les hommes politiques lui avaient tour à tour expédiées de Paris pour remplacer sa morale traditionnelle (Barrès,Cahiers, t. 8, 1910, p. 45).Débarrassé des mythes et des scories des impérialistes inconscients ou obscurs, le solidarisme que réclament la justice et la raison est condamné à trouver des types d'action au niveau des exigences de notre temps (Les Lettres fr., 17 juin 1970, p. 9, col. 4).− [sɔlidaʀism̭]. − 1reattest. 1905 (C. Bouglé, Solidarisme et libéralisme ds H. Mazel, in Mercure de France, n o186, 264 ds Quem. DDL t. 12); dér. sav. de solidaire, suff. -isme*. 3. Solidariste, adj. et subst.,philos., socio-pol. a) Adj. et subst. (Personne) qui est partisan du solidarisme. Smith, Comte, Sutherland, les solidaristes et Sorokin arrivaient à une morale altruiste (Traité sociol., 1968, p. 139).b) Adj. [En parlant d'inanimés abstr.] Qui concerne le solidarisme. Suivre les indications des trade-unions; elles consentent à exprimer leurs désirs sous une forme qui sera parfaitement claire pour l'auditeur, mais qui pourra être présentée au tribunal comme étant un sermon solidariste (Sorel,Réflex. violence, 1908, p. 325).− [sɔlidaʀist]. − 1reattest. 1904 subst. masc. « partisan de la solidarité » et adj. « qui a trait au solidarisme » (Nouv. Lar. ill.); dér. sav. de solidaire, suff. -iste*. BBG. − Dub. Dér. 1962, p. 35 (s.v. solidarisme); Pol. 1962, p. 424. − Quem. DDL t. 28; 12 (s.v. solidarisme). |