| SIFFLET, subst. masc. A. − 1. Petit instrument à vent, constitué d'un tube court dont l'embouchure est souvent biseautée et qui produit un son aigu: 1. Le commandant donnait un coup de sifflet. Aussitôt, un creuset, tiré du feu à l'aide d'une pince, était suspendu à la barre de fer des deux ouvriers arrêtés devant le premier four. Le sifflet commençait alors une série de modulations, et les deux hommes venaient en mesure vider le contenu de leur creuset dans le conduit correspondant.
Verne,500 millions, 1879, p. 78. ♦ Sifflet à roulette. ,,Le sifflet à roulette est un sifflet globulaire dans la cavité duquel se trouve une bille mise en mouvement par la pression de l'air et qui produit un « vibrato »`` (Mus. 1976). ♦ MAR. Honneurs du sifflet. Honneurs rendus à un officier montant à bord ou le quittant, en exécutant avec un sifflet de manœuvre un air variant selon les grades (d'apr. Gruss 1978). − Au fig. Marcher, faire marcher qqn au sifflet. Être soumis, soumettre quelqu'un à une discipline stricte. (Dict. xxes.). − En partic. Avertisseur sonore (d'une machine, d'une locomotive, d'un bateau, etc.). Sifflet à vapeur; bouée, bouilloire à sifflet. Les locomotives électriques sont munies soit d'un sifflet à air comprimé, soit d'un appareil sonore à commande électrique (Bailleul,Matér. roulant ch. de fer, 1951, p. 81). 2. Vx. Flûte de Pan, pipeau. Haydn, cherchant à amuser la société du prince, alla acheter (...) un plein panier de sifflets, de petits violons, de coucous, de trompettes de bois et de tous les instruments qui font le bonheur des enfants (Stendhal,Haydn, Mozart et Métastase, 1817, pp. 95-96). 3. Pop. Gorge, gosier. − (...) On va t'y faire goûter. Et lorsqu'on lui eut apporté [à Gervaise] un verre de vitriol, et que sa mâchoire se contracta, à la première gorgée, le zingueur reprit (...): − Hein! ça te rabote le sifflet! (Zola,Assommoir, 1877, p. 706). − Couper le sifflet ♦ Égorger, couper le cou: 2. Les aminches [« amis »] et les gigolettes, Ceux de Belleville et de la Villette, Viendront nous voir couper le sifflet Si ça leur fait pas trop d'effet.
Sellier, dit le Manchot de Montmartre, dsFrance1907. ♦ Faire taire, mettre dans l'impossibilité de s'exprimer. Synon. couper la chique (v. chique1A) et, p. ell., la couper à qqn (v. couper I B 3 c).Afin de se prouver qu'il se fiche de tout, Poil de Carotte siffle. Mais la vue de madame Lepic qui le suivait, lui coupe le sifflet (Renard, Poil Carotte,1894, p. 316).[J'accusais] sa froideur qui « me coupait le sifflet » (Jouve, Scène capit.,1935, p. 201). 4. a) En sifflet − Loc. adv. De manière oblique. Synon. en biseau.Tailler en sifflet une section, le bord d'une planche. Lors de la coupe, on a eu soin de tailler en sifflet l'extrémité de la tige, facilitant ainsi l'introduction dans les cylindres de broyage (Rouberty,Sucr., 1922, p. 77). − Loc. adj. Qui est taillé en oblique. Une greffe, un joint, une taille en sifflet. Je peux vous bâtir un canot de neuf pieds, en pin, pas trop versant, avec une pince de dix-huit pouces et le derrière en sifflet (Guèvremont,Survenant, 1945, p. 86). b) P. ell. Sifflet − Pop. Habit noir à queue, dont la forme évoque un sifflet. Ce bel habit noir, vulgo sifflet, alias queue-de-pie, avec lequel vous portez, si divinement, le deuil (Villiers de L'I.-A.,Contes cruels, 1883, p. 350). − EXPLOITATION FORESTIÈRE. ,,Entaille oblique au pied d'un arbre`` (Plais.-Caill. 1968). P. anal. [Un ingénieur] eut l'idée d'appliquer le système du sifflet, la coupe en biseau de la colonne [allusion à un épisode de la Commune de Paris], système sans lequel il eût été presque impossible de la jeter à bas (Goncourt,Journal, 1878, p. 1265). − MÉD. VÉTÉR. Évidement pratiqué dans la corne du sabot. Appliquer une ferrure appropriée à deux pinçons qui, de chaque côté de la fissure, maintiendront la paroi, en évitant, au moyen d'un sifflet dans la corne, l'appui de la paroi sur le fer (Garcin,Guide vétér., 1944, p. 165). − MINES. Rétrécissement. La tranche forme un parallélogramme à angles très aigus. Il serait difficile aux piqueurs de se glisser dans ce sifflet, pour en retirer le charbon (Haton de La Goupillière,Exploitation mines, 1905, p. 253). − EXPLOITATION PÉTROLIÈRE. Sifflet déviateur. ,,Dispositif utilisé pour opérer la déviation volontaire d'un forage (...) agissant un peu comme un coin sur le fond du trou`` (Barbier Pétrole 1980). B. − 1. Son aigu produit en sifflant avec la bouche ou avec un sifflet. Synon. sifflement.Et on entendait au loin des sifflets courts ou prolongés, ceux des trains qui versent, chaque dimanche, le peuple de Paris dans la campagne des environs, et ceux des bateaux à vapeur qui préviennent de leur approche pour passer l'écluse de Marly (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Yvette, 1884, p. 510).V. supra ex. 1. ♦ Coup de sifflet. Les coups de sifflet de l'arbitre. Sitôt qu'à un arrêt Gaspard avait réussi à en ouvrir une [une boîte de conserves], un coup de sifflet aigu redressait les hommes, et il fallait s'emplir le bec en marchant (Benjamin,Gaspard, 1915, p. 39). 2. a) Bruit par lequel le public, lors d'un spectacle, d'un match, manifeste son mécontentement, sa désapprobation. − [Au sing. ou avec spécification numérique] Des entrepreneurs de spectacles et de concerts n'ont-ils pas demandé aux tribunaux de condamner le sifflet du spectateur (...)? (Arts et litt., 1935, p. 64-11): 3. Le lever du rideau, les trois coups, ces choses solennelles que nous attendions, nous ont totalement échappé. Et puis, tout étonnés, nous entendons un sifflet, deux sifflets, trois sifflets, une tempête de cris, à laquelle répond un ouragan de bravos.
Goncourt,Journal, 1865, p. 224. − Fréq. [Avec un plur. coll.] Il y a quelque chose de changé dans notre laborieux caf'-conc, un de ces heureux établissements de quartier, toujours chauds et noirs de foule, où roule, le soir, avec des sifflets, des cris, des trépignements, l'orageux rire populaire (Colette,Music-hall, 1913, p. 117).Après une minute de calme relatif, de nouveau une association de mots un peu étonnante souleva l'orage. Du groupe irlandais partirent des sifflets, des roulements de pieds et des imitations d'animaux (Maurois,Disraëli, 1927, p. 118). ♦ Au fig. Marques de rejet, d'hostilité. Vous tomberez bien bas, mon ami! Peut-être les sifflets vous chasseront-ils de ce Nancy que vous méprisez tant (Stendhal, L. Leuwen,t. 2, 1835, p. 129). b) Manifestation d'approbation pratiquée par le public américain ou à son imitation. Le concert (...) finit au bruit des applaudissements, des cris, des bravos et des sifflets, qui, en Amérique, contrairement aux usages d'Europe, sont la marque de la plus grande satisfaction (O. Comettant,Trois ans aux États-Unis, Paris, Pagnerre, 1858, p. 116): 4. Toujours curieux, le spectacle [de lutteurs] de ce qu'on pourrait appeler la sauvagerie à l'état pur. Aux hurlements de douleur des antagonistes répondent les cris d'un public qui trépigne de joie et siffle sans arrêt.
Green, Journal,1937, p. 82. 3. Cri de certains oiseaux. Synon. sifflement, chant.Je vous enseignerai à pêcher les écrevisses, à distinguer le sifflet du bouvreuil de celui du pinson (Audiberti,Quoat, 1946, 1ertabl., p. 40). 4. Rare. Bruit que produit le vent qui siffle. Synon. sifflement.Il ne peut pas dormir. Mais, là, il n'entend plus son cœur, il entend à peine le petit sifflet du vent qui se fend sur le coin de la grange, et le bruit de tous les amandiers du plateau (Giono,Gd troupeau, 1931, p. 28). REM. Siffleux, subst. masc.,région., synon. (supra A 1).Je vous apporterai mon siffleux. Je l'ai taillé dans une loupe d'érable (Genevoix,E. Charlebois, 1944, p. 144). Prononc. et Orth.: [siflε]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. A. 1. Déb. xiiies. « sifflement » faire un sifflet (Du Buffet, éd. A. Barth, 121, v. note p. 179); ca 1393 spéc. [en parlant d'un épervier] venir au sifflet (Ménagier, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, III, II, p. 151, 11); 2. 1287-88 [ms.] « improbation manifestée par des sifflements » demener ses cifflés (Thèbes, éd. L. Constans, append. III, 2433); 1692-94 siflets du Parterre (Boileau, Satires, X ds
Œuvres, éd. F. Escal, p. 74). B. 1. a) 1225-50 sifflet d'or (Vénus, 293a ds T.-L.); 1636 appeler d'un coup de siflet (Monet, p. 824b); b) 1784 p. anal. greffe en sifflet « en biseau » (Fr. Rozier, Cours complet d'agric., Paris, t. 5, p. 352); 2. a) xves. « épiglotte » (Jean de Garlande, Dict., éd. A. Scheler ds Jahrbuch rom. engl. Lit. t. 6 1865, p. 290, leçon ms. L: epiglotum est coopertorium tracheae arteriae [...] siflet); b) 1575 « luette, gorge » (Paré,
Œuvres, éd. Malgaigne, t. 1, p. 254a: les amygdales [...]: le sifflet et l'estroit de la gorge); fin xvies. couper le sifflet « étrangler, égorger » (Brantôme, Discours sur les duels ds
Œuvres, éd. L. Lalanne, t. 6, p. 442). Dér. de siffler*; suff. -et*; cf. les formes siblet (1306 « coup de sifflet » Joinville, St Louis, éd. N. L. Corblett, § 377) et sublet [de l'oiseleur des champs] (1542, Cl. Marot, Enfer, 267 ds
Œuvres, éd. C. A. Mayer, t. 2, p. 65), respectivement dér. de sibler et de subler. Fréq. abs. littér.: 616. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 294, b) 873; xxes.: a) 1 243, b) 1 152. Bbg. Gohin 1903, p. 332. − Wartburg (W. von). Cf. bbg. siffler, p. 393. |