| SCIENCE, subst. fém. I. − Littér. ou vieilli, au sing. Somme de connaissances qu'un individu possède ou peut acquérir par l'étude, la réflexion ou l'expérience. A. − Connaissance approfondie des choses dans ce qu'elles sont. Synon. savoir2. 1. [Cette connaissance n'est pas directement rapportée à un individu particulier] a) Courant
α) [Sans spécification ni évocation dir. du domaine ou de l'objet] En politique, chacun prend parti selon sa passion et son intérêt (...); il n'y a point de science, il n'y a pas même un commencement de certitude. Aussi l'ignorance générale produit-elle la tyrannie générale (Proudhon,Propriété,1840, p. 199).J'ai vu de jeunes pianistes, et qui savent pourtant ce que c'est qu'apprendre, venir en foule à des cours du soir, tant il est agréable de s'emplir de science comme une cruche s'emplit d'eau (Alain, Propos, 1921, p. 241).Verbe + avec science.Les grands dîners (...) où l'on parlait de mangeaille, avec science et volupté; car il n'y avait là que des connaisseurs (Rolland,J.-Chr., Antoinette, 1908, p. 835).« Qu'est-ce qui se vend, qu'est-ce qui ne se vend pas? » Énigme que M. Robert Ganzo (...) débrouille devant vous avec science et brio (Fargue,Piéton Paris,1939, p. 81).Puits* de science. Expérience passe science (proverbe). L'expérience est supérieure à la connaissance abstraite. (Besch. 1845, Lar. 19e-20e). − [Avec caractérisation de nature ou de degré] Science infinie, inépuisable; demi-science, fausse science; science de fraîche date, de pacotille. Un père (...) en qui il voyait une grande science accompagnée d'un raisonnement fort net et fort puissant (Bremond,Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 344).Montherlant fait penser à ces grimauds frais émoulus du collège, encore tout farcis d'une science purement livresque et mal digérée (Paulhan,Fleurs Tarbes,1941, p. 203).Gaie science. V. gai I B 2. ♦ [En fonction de déterm. ou de compl. adv.] Quand je l'invitais à dîner à Balbec, il commandait le repas avec une science raffinée (Proust,Sodome,1922, p. 1083).Grande revue trimestrielle d'une science élevée et de haute érudition (Civilis. écr.,1939, p. 34-7).Savoir de science certaine. Avoir sur quelque chose des informations sûres que l'on ne peut mettre en doute. Je n'aurais absolument pas pu décrire les délices ineffables dont je savais, de science certaine, qu'une âme d'élite est inondée par les aveux mutuels d'un amour vertueux (Gobineau,Pléiades,1874, p. 34).Je sais, de science certaine, quelles erreurs sont pour nous séduire dans la recherche de la génération des œuvres (Valéry,Variété IV,1938, p. 98).P. anal. (de formulation). Tuer des cochons, n'importe quel îlien, à la rigueur, l'eût fait, mais ils savaient comme cela, d'une science de légende, qu'on ne sabote pas ces animaux (Queffélec,Recteur,1944, p. 102).
β) [Avec spécification du domaine ou de l'objet de connaissance] Si la science du présent leur manque, une opinion respectable (...) leur attribue la connaissance de l'avenir (Ozanam,Philos. Dante,1838, p. 155).Étaler, à l'heure de la fin, tout un fonds de malice qui avait dormi durant la vie, toute une science de mots grossiers qu'on avait cachée (Loti,Pêch. Isl.,1886, p. 206).
γ) [Avec caractérisation par référence à une catégorie de pers. possédant une telle connaissance] ♦ Science de + subst.Si les vérités cruelles, les fâcheuses découvertes, les secrets de la société, qui composent la science d'un homme du monde parvenu à l'âge de quarante ans, avaient été connues de ce même homme à l'âge de vingt (Chamfort,Max. et pens.,1794, p. 30).C'est l'effet d'une science de garçon de bains ou de commis voyageur pour les tricots, de croire qu'un prophète est nécessairement, exclusivement, un voyant des choses futures (Bloy,Journal,1900, p. 34). ♦ Science + adj.L'Ève future de Villiers. Trop de science humaine et trop peu de science divine (Bloy,Journal,1894, p. 116): 1. Les anciens savaient qu'Arcturus, qu'on nomme aussi le Bouvier, paraît le soir au temps des labours printaniers, et disparaît quand la saison froide et pluvieuse s'avance. Cette science paysanne s'efface. Le laboureur lit le journal.
Alain,Propos,1910, p. 82. b) THÉOL. CHRÉT. − [Avec caractérisation] ♦ Science infuse*. ♦ Science de vision. ,,Connaissance que Dieu possède (...) par laquelle il voit ce qui existe et se fait effectivement`` (Foi t. 1 1968). Science de simple intelligence. Connaissance ,,par laquelle Dieu connaît les possibles (êtres, actes, jugements des hommes, etc.)`` (Foi t. 1 1968). Science moyenne. ,,Connaissance que Dieu aurait des libres déterminations de ses créatures, en fonction desquelles il leur donnerait ou non une grâce efficace`` (Bouyer 1963). Descartes admet la science moyenne (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 1248). − [En fonction de déterm.] ♦ Arbre de la science (du bien et du mal). Arbre du paradis terrestre dont Dieu avait défendu à Adam et Ève de cueillir les fruits. Une loi est prescrite à l'homme, qu'il ne peut observer que par obéissance pure, car elle semble un décret arbitraire du créateur: ne pas manger du fruit de l'arbre de la science (Weill,Judaïsme,1931, p. 108): 2. Cette mort que Dieu avait annoncée à Adam, comme sa peine inévitable, s'il mangeait du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal, est le résultat naturel de la connaissance. Les bêtes n'ont point de connaissance: aussi peut-on dire qu'elles ne connaissent pas la mort; car la mort n'existe que par la connaissance, elle est un fruit de la connaissance.
P. Leroux, Humanité,1840, p. 542. ♦ Don de science. ,,Sens divin des choses humaines, des motifs humains, qui est un don du Saint-Esprit`` (Foi t. 1 1968). c) MAR. Ligne de science. ,,Ligne courbe que l'on trace sur la carène d'un navire, pour marquer la limite supérieure du doublage en cuivre de la carène de ce navire`` (Bonn.-Paris 1859). 2. [Cette connaissance est directement rapportée à un individu particulier] a) [Sans spécification ni évocation dir. du domaine ou de l'objet] Vos façons étant comminatoires, j'aurais refusé d'obtempérer, n'eût été votre ami, que sa science met mieux à même que vous d'apprécier la valeur des révélations que je vais vous faire (Benoit,Atlant.,1919, p. 136).Une question de droit canon? Gabriel Le Bras intervenait, avec sa science vivante et allègre (L. Febvre, Bloch et Strasbourg, [1947] ds Combats, 1953, p. 399). b) [Avec spécification du domaine ou de l'objet de connaissance] M. Brunetière a l'esprit naturellement philosophique. Sa grande science des livres et de l'histoire, en lui permettant des comparaisons perpétuelles, a développé en lui cet esprit (Lemaitre,Contemp.,1885, p. 218).Il est curieux de voir que tous ceux qui impriment, en Comté, au XVIesiècle, paraissent avoir la coquetterie de donner quelques marques de leur science du français (L. Febvre, La Nationalité, [1926], ds Combats, 1953, p. 193). c) [Avec caractérisation par recours à une catégorie de pers. possédant cette connaissance] Nous avions Lucien Loisy auprès de nous qui ne s'y trompait pas (...) et qui nous ouvrait avec gentillesse les trésors de sa science paysanne (Ambrière,Gdes vac.,1946, p. 367). B. − Connaissance approfondie des règles et des techniques propres à une activité; p. méton. adresse, habileté dans la pratique, compétence qui résulte de cette connaissance. Synon. savoir-faire. 1. [Cette connaissance n'est pas directement rapportée à un individu particulier] a) [Sans spécification ni évocation dir. du domaine] L'instrumentation est d'un art raffiné; mais tant de science n'alourdit point l'ouvrage (Dumesnil,Hist. théâtre lyr.,1953, p. 207): 3. ... la porcelaine est remplacée en Europe par une céramique formée d'un mélange de divers éléments; on la nommera porcelaine tendre parce que, contrairement à la porcelaine chinoise, elle se raye au couteau. Sa fabrication exige une science et une virtuosité bien supérieures.
G. Fontaine, Céram. fr.,1965, p. 90. Verbe + avec science/avec une science + déterm.Un Omer astucieux rongeait l'os de veau avec science afin de détacher le vernis de graisse sublimée par la cuisson et collée en suc croustillant le long de la côtelette (Adam,Enf. Aust.,1902, p. 8).La puissante volonté de Beethoven élit, étreint et maîtrise la forme de la fugue, avec une science presque diabolique (Rolland,Beethoven, t. 1, 1937, p. 290).Patience passe science (proverbe). La patience donne plus de résultats que l'habileté et la connaissance. (Ds Rey-Chantr. Expr. 1980, s.v. patience). b) [Avec spécification du domaine] − Science de + subst. désignant une activité ou son résultat.L'admirable chose que le « métier », le « sens artiste », la science des procédés du style, l'adresse à arranger les mots, l'art de la composition! (Lemaitre,Contemp.,1885, p. 91).Ils se reposent comme des paysans qu'ils sont pour la plupart (...) dans une détente totale des muscles, avec cette science de l'appui qui réussit à faire supporter au sol, à la chaise, à la table, le poids total du corps (Vercel,Cap. Conan,1934, p. 47).[L'activité est rapportée à un individu particulier] Le snob ne se risque pas à discourir; son grand art (...) est de composer et parer son silence; toute la science de son jeu est de ne point s'expliquer, de s'en tenir à une attitude, à une expression, à un geste, tout au plus à quelque adjectif (Gaultier,Bovarysme,1902, p. 88).Ce boxeur (...) qui corrige méthodiquement sa technique, ses réactions, ses réflexes, ses reparties, son doublé fulgurant, renouvelle la science de son coup de poing (Cendrars,Bourlinguer,1948, p. 186). ♦ [En fonction de déterm.] Metz a apporté un dessin d'un esprit, d'une furie, d'une science de dessin, d'un mouvement ou d'un heurt de lignes stupéfiants (Goncourt,Journal,1860, p. 772). − Science de + inf., rare.Il est tout simple que j'aie acquis la science de lire, sur les traits d'un visage et dans les attitudes, les sentiments qui déterminent les actes d'un homme (Villiers de L'I.-A.,Contes cruels,1883, p. 322).Cet art d'éluder les propos graves, les confessions, les aveux, cette science de vivre heureux et avec grâce (Mauriac,Nœud vip.,1932, p. 70). c) [Avec caractérisation par recours à une catégorie d'agent] Vitruve: « On n'apprécie aujourd'hui qu'une seule chose: l'éclat des couleurs. La science du peintre n'y a plus de part » (Huyghe,Dialog. avec visible,1955, p. 206). 2. [Cette connaissance est directement rapportée à un individu particulier] a) [Sans spécification ni évocation dir. du domaine] Les temples djaïns de l'Inde moyenne (...) expriment encore, il est vrai, malgré la science trop minutieuse de leurs décorateurs, une foi vivante (Faure,Hist. art,1912, p. 172).Ces coiffures majestueuses et audacieuses nous prouvent le talent, la science de nos académiciens de la coiffure (Stéphane,Art coiff. fém.,1932, p. 132). b) [Avec spécification du domaine] − Science de + subst. désignant une activité ou son résultat.Il est vrai que ma profonde science de l'escrime m'assure des chances, et que mon épée est presque infaillible (Gautier,Fracasse,1863, p. 471).Il fait entrer la couleur dans la pâte, l'incorpore au glacis des silicates vitrifiés, y projette (...) ses chères campagnes engraissées où fleurit sa science des ciels, des vents et des cultures (Faure,Hist. art,1912p. 197). − Science + adj. évoquant un domaine.Quant aux effets de ton enseignement dans les siècles à venir, je les vois par ma science prophétique (L. Ménard,Rêv. païen,1876, p. 55).La colonne aurélienne est moins riche en représentations urbaines (...). Elle oppose (...) à la science architecturale des Romains les pauvres bourgades sarmates avec leurs cabanes rondes couvertes de paille (P. Lavedan, Urban.,1926, p. 183). c) [Avec caractérisation par recours à une catégorie d'agent] [Gilliatt] était pilote né (...). Sa rare science de matelot éclata singulièrement un jour qu'il y eut à Guernesey une de ces sortes de joutes marines (Hugo,Travaill. mer,1866, p. 76).Il se confine bientôt dans des séries de motifs et de sujets identiques (...), ne se souciant plus que d'orner ces prétextes de toute sa sensibilité et de sa science de coloriste (Arts et litt.,1935, p. 84-8). II. − Ensemble structuré de connaissances qui se rapportent à des faits obéissant à des lois objectives (ou considérés comme tels) et dont la mise au point exige systématisation et méthode. A. − Au sing. [Avec art. déf. (ou sans art.), sans déterm. spécifiant ou suggérant un domaine ou une catégorie de faits] 1. Ensemble de toutes les connaissances humaines systématisées. En résumé, le but de la science est partout identique: connaître les conditions matérielles des phénomènes (Cl. Bernard, Introd. ét. méd. exp.,1865, p. 106).La science, en somme, est une construction qui tend à l'impersonnalité, mais chacun des actes de ses constructeurs est l'acte d'une personnalité (Valéry,Entret. avec F. Lefèvre,1926, p. 133): 4. Ainsi fait-il de la croyance que « tout est explicable, même l'inexpliqué », la condition même de la science: « Pour la science, dit-il, une explication surnaturelle n'est ni vraie, ni fausse, ce n'est pas une explication (...) »
Massis,Jugements,1923, p. 81. (Faire qqc.) pour la science. En faveur de la science. Quand il est là, elle ne le quitte pas d'un instant, elle boit ses paroles. Et tout cela pour la science, alors? Allons donc! Ce n'est pas la science qu'elle aime, c'est le savant! (Pailleron,Monde où l'on s'ennuie,1869, i, 7, p. 29).[En rapport ou p. oppos. avec d'autres systèmes de pensée ou d'action] Science et art, science et technique. La morale et la science ont leurs domaines propres qui se touchent mais ne se pénètrent pas (H. Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 3).L'abus des moyens merveilleux d'agir et de sentir que la science a créés et l'industrie multipliés (Valéry,Variété IV,1938, p. 151).♦ [Avec déterm. renvoyant à une époque, une région, un groupe humain] Science ancienne, contemporaine, de demain, du temps de, moderne; science européenne, française, occidentale, d'outre-Rhin; science bénédictine, islamique, officielle. C'est le côté pratique de la science américaine, son sens du concret et de l'efficace qui l'ont inclinée à se tourner vers les aspects psychiques des phénomènes sociaux (Hist. sc.,1957, p. 1523): 5. Il y a, bien sûr, science bourgeoise et science prolétarienne, tant pis pour ceux qui rient; en biologie, le conservateur a tendance à être fixiste, le « front populaire » évolutionniste, les radicaux demeurant dans la pure tradition darwinienne, les socialistes réformistes séduits par le lamarkisme et le dialecticien communiste fatalement attiré par les Weismann, de Vries, Giard...
Vailland,Drôle de jeu,1945, p. 18. [Avec adj. poss. renvoyant indirectement à un groupe humain] Ça et là notre science moderne même donne l'impression d'approcher d'un tournant (Doeblin,Pages imm. Confusius,1947, p. 39).Nous examinons le champ de leurs études [des Grecs], l'objet et les buts de leur science (Gds cour. pensée math.,1948, p. 230).♦ [Avec déterm. évoquant une méthode ou une visée spécifique] Ensemble des connaissances humaines systématisées relevant de telle méthode ou de telle visée spécifique. Science expérimentale, matérialiste, pure; science d'observation. Aussi la science positive, loin d'interdire le doute, l'approuve-t-elle et veut-elle lui répondre (Flammarion,Astron. pop.,1880, p. 110).Symptômes surtout ces formes rationnelles, issues de la science appliquée (Faure,Hist. art,1921, p. 246). − [En fonction de déterm.] ♦ [Avec art. déf.] Avenir, découverte, méthode de la science; prince de la science. Voir l'unique rejeton de la famille entrer dans la glorieuse carrière de la science (Toepffer,Nouv. genev.,1839, p. 196).Le témoignage des plus grands maîtres de la science et de la pensée d'aujourd'hui (Affiche Action fr.,1908ds Doc. hist. contemp., p. 68). SYNT. Amour, avancement, branche, but, champ, conquête, développement, diffusion, domaine, état, évolution, exigences, idéal, limites, marche, progrès de la science; aventurier de la science. Le monde de la science. Le domaine de la science. Il y a loin du monde de la sensation brute au monde de la science (Ruyer,Esq. philos. struct.,1930, p. 290).Usuel. L'ensemble des personnes travaillant dans ce domaine. Un comité de l'énergie atomique, composé de personnalités du monde de la science et de la technique et de hauts fonctionnaires (Goldschmidt,Avent. atom.,1962, p. 75).♦ [Sans art.] Amateur de science; objet de science. Je m'en tiens aux revues générales qui publient éventuellement des articles de science, de politique ou de philosophie, mais dont la substance ordinaire est de nature littéraire (Civilis. écr.,1939, p. 32-3).À 17 ans elle [Sophie Kovalewski] partage la soif de science de toute la jeunesse intelligente russe de l'époque (Gds cour. pensée math.,1948, p. 263).Homme de science. Celui qui travaille dans un domaine de la science. Synon. savant, scientifique.Les conditions et le résultat quotidien du travail de l'homme de science façonnent (...) son esprit à n'attribuer une idée de progrès qu'à une idée d'invention (Pasteurds Travaux,1882, p. 428).Femme de science (rare). Est-ce donc à dire, comme semble le conclure Maurice d'Ocagne dans ses Études sur les Femmes de Science et sur les Mathématiciennes, que la femme soit généralement dépourvue d'esprit inventif et de génie créateur? (Gds cour. pensée math.,1948, p. 258). 2. P. méton. Ensemble des personnes qui s'occupent de science. La science a déclaré récemment que les cheveux étaient une substance morte (Balzac,C. Birotteau,1837, p. 180): 6. L'attention que de nombreux savants accordent maintenant aux phénomènes parapsychologiques (...) confirme ce point de vue. La méfiance de la science à l'égard de la métapsychique (...) constitue, en tout cas, un appel à la prudence qui doit nous mettre en garde contre la crédulité...
Amadou,Parapsychol.,1954, p. 27. B. − Au sing. ou au plur. Ensemble de connaissances systématisées se rapportant à un même domaine. 1. [Sans déterm. spécifiant directement un domaine, une catégorie de faits] a) [Avec art. indéf. (ou dém., indéf.) et avec ou sans déterm. ou avec art. déf. et déterm.] Classification des sciences. Il y a des sciences bonnes, dont l'existence est nécessaire à la société et la culture inutile aux esprits (Joubert,Pensées, t. 1, 1824, p. 456).Toute science peut être considérée sous deux angles différents, qui se recouvrent d'ailleurs partiellement et qui présentent d'étroites connexions: la science faite (ou codification du savoir), la science qui se fait (ou prolongement du savoir) (Gds cour. pensée math.,1948, p. 350). ♦ [Avec déterm. renvoyant à une époque] La chimie est née d'hier: il y a cent ans à peine qu'elle a pris la forme d'une science moderne (Berthelot,Orig. alchim.,1885, p. 1).[Avec déterm. évoquant une méthode, une visée spécifique] Science abstraite, appliquée, cartésienne, déductive, expérimentale, positive, pure; science de classification, de déduction, de raisonnement, de spéculation, de synthèse. Les sciences d'observation directe qui partent régulièrement de faits particuliers et travaillent méthodiquement à les condenser en faits généraux (Langlois, Seignobos,Introd. ét. hist.,1898, p. 183).La psychologie cesse d'être une science descriptive pour devenir explicative (Hist. sc.,1957, p. 1655).Science exacte (souvent au plur.). Science qui repose sur le calcul. Ceux des citoyens dont les études antérieures auroient été dirigées vers la géométrie, ou vers les autres sciences exactes (Monge,Géom. descr.,1799, p. 3).Les caractéristiques et l'état de l'édition spécialisée dans les principales branches des sciences exactes et des sciences humaines (Civilis. écr.,1939, p. 14-13). ♦ [Avec déterm. évoquant un rapport avec une/ d'autre(s) science(s)] Science autonome, satellite; sciences couplées. Une des sciences annexes de la photographie, appelée la sensitométrie, permet d'exprimer numériquement les différentes propriétés des émulsions photographiques (Arts et litt.,1935, p. 30-13).Je ne vois à retenir comme science auxiliaire [de l'histoire] que la partie de la philologie qui concerne la critique des textes (Marrou,Connaiss. hist.,1954, p. 112). − [Avec art. déf. et compl. déterminatif (ou adj. poss.) renvoyant à une pers. et évoquant indirectement un domaine] ♦ [Renvoyant à un/des individu(s) particulier(s)] Il sentit qu'il se remettrait avec plaisir à la science de Gall et de Lavater (G. Leroux, Parfum,1908, p. 62).Sur ce point la science de Cuvier paraît en retard sur celle de Buffon (Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 1, 1961, p. 510). ♦ [Renvoyant à une catégorie d'agents] Science des chimistes, du paléographe; sciences de l'ingénieur. La Science et la vie (1913), qui paraît tous les mois, est plus particulièrement consacrée à la science de l'ingénieur (Civilis. écr., 1939, p. 32-16). Les cybernéticiens considèrent que leur science englobe dans une même synthèse explicative la machine nerveuse et la machine artificielle (Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 2, 1964, p. 661). b) Au plur. [Avec art. déf. et sans déterm.] Ensemble des sciences fondées essentiellement sur le calcul et l'observation. Académie, faculté des sciences; doctorat ès sciences; philosophie des sciences; diplômé en sciences; enseigner les sciences. Les sciences l'intéressent; il apprend la géométrie et (...) suit avec enthousiasme les premières grandes découvertes médicales (Gds cour. pensée math.,1948, p. 104).L'histoire des sciences pourrait expliquer pourquoi ces conventions d'usage de la droite ont fait de cette dernière l'image d'une multitude d'êtres de la nature (Couffignal,Mach. penser,1964, p. 62).[P. oppos. à d'autres activités intellectuelles] Les humanités et les sciences. Ils avoient (...) mis à part ceux qui annonçoient du génie, afin de les initier dans les sciences et les lettres (Chateaubr.,Génie, t. 2, 1803, p. 440).Seule la création de facultés distinctes pour les sciences et pour les lettres était originale. Il était prévu pour l'ensemble du territoire (...) douze [facultés] de droit et vingt-sept de sciences et de lettres (Encyclop. éduc.,1960, p. 19). ♦ P. méton. Personnes qui travaillent dans ce domaine, en partic. les enseignants. Derrière lui, se tient l'état-major des professeurs en toge de cérémonie: les sciences ont l'hermine orange; les humanités, l'hermine blanche (A. Daudet, Pt Chose,1868, p. 97). 2. [Avec déterm. spécifiant ou évoquant nettement le domaine ou la catégorie de faits] a) [Avec déterm. adj.] Science anatomique; sciences mathématiques, philosophiques. Les sciences physico-chimiques plus simples que les sciences biologiques se dégagèrent [d'entraves philosophiques] les premières et depuis longtemps elles sont entièrement entrées dans la voie expérimentale (Cl. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p. 190).Cela n'empêche pas que Schubert n'ait puisé, dans la science historique, encore très aléatoire, de son époque, une idée extraordinairement vivante de l'essence du mythe (Béguin,Âme romant.,1939, p. 113). SYNT. Science alchimique, anthropologique, astronomique, bibliographique, chimique, ethnographique, financière, juridique, médicale, paléographique, psychologique; sciences agronomiques, commerciales, économiques, géographiques, minéralogiques, philologiques, physiques. Sciences humaines. Sciences qui ont pour objet d'étude l'homme et ses comportements. La criminologie est moins connue que les autres sciences humaines, car elle est enseignée dans les facultés de droit et non dans les facultés de lettres, comme le sont toutes les autres sciences humaines modernes (David,Cybern.,1965, p. 109).Une dernière étape à franchir qui a été, au fond, l'œuvre du gestaltisme et qui constitue ce que Lewin a appelé la révolution copernicienne des sciences humaines (Traité sociol.,1967, p. 71).Sciences morales. Sciences qui ont pour objet d'étude l'aspect moral et social de l'homme. On oppose les sciences morales aux sciences physiques (Lévi-Bruhl,Mor. et sc. mœurs,1903, p. 101).Sciences naturelles. V. naturel.Sciences occultes. V. occulte.Sciences politiques. V. politique1.b) [Avec déterm. subst. introduit par de] Science des astres, du comportement; science des cristaux, de l'hérédité, des institutions, des mœurs, des nombres, des phénomènes électriques; sciences de la matière. [L'économie politique] paraît (...) plutôt une science de faits, et pour ainsi dire empirique, qu'une véritable théorie (Condorcet,Esq. tabl. hist.,1794, p. 58).Descripteur de quelques espèces disparues de mammifères, c'est lui qui donna à la science des fossiles son nom de paléontologie (Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 1, 1961, p. 514).Sciences de l'homme (et de la société). Synon. de sciences humaines.Sciences de la nature. Synon. de sciences naturelles. ♦ [Le compl. est un adj. subst.] Science de l'animé/l'inanimé, du paranormal. L'idée étrangement séduisante d'une « science du beau », qui (...) nous ferait discerner à coup sûr ce qu'il faut aimer, ce qu'il faut haïr (Valéry,Variété IV,1938, p. 239).Pour notre auteur, l'histoire se définit une science du particulier (L. Febvre, L'Histoire historisante, [1947] ds Combats, 1953, p. 115). ♦ [Avec de d'identification] Science de l'alchimie, de l'ethnographie, de l'informatique, de la papyrologie. Bien que la science de la physiologie soit une science difficile à pratiquer, et qu'elle demande des connaissances spéciales (Tscheuschner,Prévis. temps,1919, p. 3).Nous allons commencer par quelques notions très simples et aussi très nettes (...) de sociologie juridique, avec des notions très simples où la science de la sociologie est aujourd'hui capable de nous donner beaucoup de renseignements (Scelle,Fédéralisme eur.,1952, p. 2). 3. Science chrétienne (trad. de l'angl. christian science). Doctrine selon laquelle la maladie, comme le mal moral, peut être combattue par des moyens spirituels; p. méton. secte religieuse défendant cette doctrine. [Mary Baker Eddy] allait léguer le résultat des recherches spirituelles auxquelles l'avait amenée sa guérison, et fonder l'église du Christ, scientiste, établie aujourd'hui (1956) dans quarante-cinq pays, ainsi que la très importante société d'édition de la science chrétienne (Philos., Relig., 1957, p. 44-13).Le traitement médical et la science chrétienne se mélangent mal (Philos., Relig., 1957p. 44-14). REM. 1. Scientologie, subst. fém.Église de scientologie. Secte fondée aux États-Unis par L.R. Hubbard, qui ,,propose à ses adeptes de dépasser le stade ordinaire de la conscience de soi`` et ,,recourt, pour ce faire, à toute une théorie explicative du monde et de l'homme et à des techniques prétendument psychanalytiques pour améliorer l'aptitude de ses croyants à traiter avec leurs semblables`` (Encyclop. univ. Suppl. t. 2 1980, p. 1295). Cette affaire est un des épisodes du différend qui oppose l'ex-Église de scientologie à Interpol (Le Monde,22 mai 1981, p. 27). 2. Scientologue, subst. masc.Adepte de l'Église de scientologie. La commission de l'informatique et des libertés au secours des scientologues (Le Monde,22 mai 1981, p. 27). Prononc. et Orth.: [sjɑ
̃:s]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. [Ca 1100 science « aptitude, habileté acquise dans un domaine, une activité particulière » (Roland, éd. J. Bédier, 3003; sens incertain, Segre lit escïence et rattache ce mot à essïent dans estre de tel essïent que..., cf. éd. C. Segre, 1971, p. 534)]; 1269-78 (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 11409); 2. a) 1119 escience « savoir, connaissance compréhensive acquise par l'étude et la réflexion » (Philippe de Thaon, Comput, éd. E. Mall, 228); b) 1174-76 « le savoir humain (opposé ici aux préoccupations religieuses) » (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2512); c) 1532 « le savoir (en tant qu'il est différent du sens moral) » science sans conscience n'est que ruyne de l'âme (Rabelais, Pantagruel, VIII, éd. V.-L. Saulnier, p. 47); d) 1672 la science « le savoir de l'humanité dans sa recherche de la vérité ou de la compréhension de l'univers, par opposition au savoir d'un individu » (Molière, Femmes savantes, IV, 3); e) 1751 la vraie science (D'Alembert, Discours préliminaire, Encyclop., t. 1, p. XXXV); 1842 la science pure « la science pour elle-même, sans autre but que le savoir » (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 2, p. 163); 1860 la science pure « la science fondée sur des principes rationnels et la stricte observation des faits » (Flaub., Corresp., p. 399); 3. a) 1remoit. xiies. « la connaissance divine, celle que Dieu peut donner » (Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, CXVIII, 66); fin xves. (Jean Molinet, Faictz et dictz, éd. N. Dupire, t. 2, p. 460: infuse en may don de grace et science); 1456 don de science (Antoine de La Sale, Jehan de Saintré, éd. J. Misrahi et Ch. A. Knudson, p. 39); d'où b) 1646 science infuse « savoir inné, connaissances qui sont un don sans avoir besoin d'être apprises » (Du Lorens, Satires, X, p. 171); 4. a) ca 1268 « ensemble, système de connaissances dans un domaine » sing. et plur. (Brunet Latin, Trésor, éd. F. J. Carmody, p. 19, I, III, l. 1, I, II, l. 18); 1370 science politique, science speculative, science pratique, sciences mathématiques, science naturele (Oresme, Trad. des Ethiques d'Aristote, éd. A. D. Menut, p. 130; p. 105, note 11; p. 331, note 8; p. 505, note 4); 1580 sciences humaines (Montaigne, Essais, II, XII, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 559); b) 1559 les sciences « le savoir, l'ensemble des sciences » (Du Bellay, Deffence et Illustration, I, X, éd. H. Chamard, p. 68, 1, 131); c) 1751 « ensemble, système de connaissances dans un domaine fondé sur des principes et des lois établis selon la rigueur des mathématiques et l'observation des faits » (D'Alembert, op. cit., p. VI); spéc. d) 1751 sciences exactes (Ch.-P. Duclos, Considérations sur les mœurs, p. 247); 1787 science expérimentale (L.-S. Mercier, Tabl. Paris, t. 5, p. 228); 1803 les sciences appelées positives (Chateaubr., Génie, t. 2, p. 45); 1832 les sciences expérimentales (Say, Écon. pol., p. 15); 5. 1269-78 « connaissance claire et exacte de quelque chose » (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 6831); 1291 de certene science « d'une façon tout à fait sûre » (Chartes de Rethel ds Runk., p. 11); 1654 savoir de science certaine (Guez de Balzac, Les Entretiens, éd. 1657, p. 320). Empr. au lat.scientia, -ae « connaissance, savoir, connaissances théoriques ». Fréq. abs. littér.: 13 555. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 19 210, b) 22 402; xxes.: a) 23 055, b) 15 383. Bbg. Koenig (D.). Sen/Sens et Savoir et leurs synon. ds qq. rom. courtois du 12eet du début du 13es. Bern-Frankfurt, 1973, p. 128, 171, 201. − Quem. DDL t. 11, 23. − Ricken (U.). Gelehrter und Wissenschaft im Frz. Berlin, 1961, pp. 51-84; p. 111; Zur Entwicklung des frz Intellektualwortschatzes. Wissenschaftlichen Z. der Martin-Luther-Universität. Halle, 1963, t. 12, pp. 995-997. − Zumthor (P.). Note sur les ch. sém. ds le vocab. des idées. Néophilologus. 1955, t. 39, pp. 181-182. |