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* Dans l'article "SATIRE,, subst. fém."
SATIRE, subst. fém.
A. − HIST. LITTÉR. Écrit dans lequel l'auteur fait ouvertement la critique d'une époque, d'une politique, d'une morale ou attaque certains personnages en s'en moquant. À cet essai j'ai joint une étude historique, un drame sérieux (...); puis deux satires politiques et morales, déjà publiées en 1837 et 1845 (Barbier, Satires, 1865, préf., p. 2).Une satire littéraire qui serait charmante, faite par cet ironique esprit (Goncourt, Journal, 1889, p. 1047).
SYNT. (s'appliquant aussi au sens B 1). Satire amère, amusante, caustique, directe, excellente, facile, fine, gaie, gaillarde, méchante, mordante, personnelle, piquante, raisonnée, sanglante, sociale, souriante, violente, virulente (synon. libelle, pamphlet); âpre, bonne, excellente, fameuse, grande, vive satire; composer, faire une satire.
1. LITT. LAT. Œuvre en prose et en vers (mètres mêlés ou uniformes) attaquant et tournant en ridicule les mœurs de l'époque. Les satires d'Horace, de Lucilius; la satire latine. Visage gracieux comme une élégie de Tibulle, riant comme une ode d'Horace, moqueur comme une satire de Pétrone (Dumas père, Caligula, 1837, préf., p. 2).Oui, monsieur, j'ai souvent déjeuné d'une page de Tacite et soupé d'une satire de Juvénal (France, Servien, 1882, p. 13).
2. LITT. FR.
a) [Au xvies.] Écrit mêlant vers et prose et s'attaquant aux mœurs publiques. La Satire Ménippée. Pièce de vers dirigée contre la Ligue et en faveur d'Henri IV. La Satire Ménippée renferme un grand nombre de couplets, auxquels nous devons la connaissance d'une foule d'anecdotes sur la Ligue, que l'on chercherait vainement ailleurs (Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 259).
b) [À partir du xviies.] Œuvre en vers dans laquelle le poète tourne en dérision les défauts et les vices d'une personne (souvent en la nommant), d'une société, d'une institution. Les satires de Chénier, de Despréaux, de Régnier, de Voltaire. Boileau, j'ose le conjecturer d'après sa deuxième Satire, (...) Boileau, sur le style en vers de Molière, était bien autrement et plus pleinement admirateur que ne durent l'être Racine, La Bruyère et Fénelon (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 234).
3. La satire. Le genre satirique. L'épopée, l'ode, l'élégie, la satire, le drame lui-même, ont été aussi familiers aux poètes de cette période, qu'à ceux des siècles d'Auguste et de Louis XIV (Montalembert, Ste Élisabeth, 1836, p. lxxiii):
... le propre de la satire est d'attacher les travers, les vices et la sottise à un personnage véritable, ce qui nous réduit au plaisir mélangé de rire des puissants, et en tout cas de rire des autres. Or on peut bien se moquer d'un bouffon qui ne sait pas faire rire... Alain, Beaux-arts, 1920, p. 168.
B. − P. ext. Toute œuvre écrite, chantée, peinte, tout propos comportant une raillerie, une critique virulente. Ouvrage de satire; avoir l'esprit de satire. La Baigneuse [de Courbet] est une satire de la bourgeoisie: « Oui, la voilà bien cette bourgeoisie charnue et cossue, déformée par la graisse et le luxe (...) » (Zola, Mes haines, 1866, p. 32).Chacun était frappé de ses fortes qualités d'observation, de ses dons puissants de satire, de son implacable et juste ironie qui pénétrait si avant dans le ridicule humain (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 191).
Faire la satire de (qqn, qqc.). L'attaquer en la tournant en dérision. Faire la satire des femmes, des grands, des hommes, du monde politique, des vices; faire une satire contre, sur (qqn, qqc.). Les écrivains qui dans leurs romans ont peint les vices de ce temps-là, croyaient peut-être en faire la satire; et je n'ai pas envie de leur disputer cette louable intention (Marmontel, Essai sur rom., 1799, p. 314).Une femme de grande culture voulait résister à ces conversations sur les cuisinières et les femmes de chambre; dès qu'elle voyait paraître ces propos, elle en faisait une satire mordante et brillante, citant mille anecdotes (Alain, Propos, 1923, p. 461).
Trait de satire. Parole mordante et railleuse. Cette lèvre flétrie (...) d'où coulait une voix éraillée, nasillarde, qui par instants, grimpait au fausset pour lancer un trait de satire, un mot à l'emporte-pièce (Martin du G., Thib., Consult., 1928, p. 1065).
Loc. fig. Ma/sa conduite est la satire de la sienne/de la vôtre. Ma/sa conduite sans faille dénonce d'autant mieux le caractère répréhensible de la sienne/de la vôtre. Je vis que cette manière d'agir mettait en fureur le saint homme, qu'ayant partagé mes opinions, ma conduite lui semblait une satire de la sienne (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 93).
Prononc. et Orth.: [sati:ʀ]. Homon. satyre. Ac. 1694: satyre; 1718, 1740: -ty-: ,,quelques-uns écrivent satire``; dep. 1762: satire. Étymol. et Hist. A. Ca 1285 satres (Gloss. de Douai ds Roques t. 1, I, 2243: satira: satres). B. 1. 1355 litt. lat. « danse parodique avec accompagnement de flûte, reproduisant sur le mode risible les chorégraphies guerrières des ,,ludions`` étrusques, également assortie de couplets plaisants ou satiriques (Bersuire, Tit. Liv., ms. Ste Gen., f o113a [Ab Urbe condita, VII, 2] ds Gdf. Compl.); 2. a) 1486 id. « poème de rythme narratif [le plus souvent en hexamètres] de développement souvent dramatique, unissant la raillerie mordante à la leçon de morale » ici, en parlant d'une satire de Perse (Raoul de Presles, Cité de Dieu, sign. E 5c, ibid.); 1549 en gén. satyre « pièce de vers reprenant aigrement les vices`` (Est.); b) 1663 désigne le genre littér. (Boileau, Satires, VII, 1 ds Œuvres, éd. Fr. Escal, p. 38: quittons la satire); 3. 1593 « essai, ouvrage de forme libre, critique et mordant, fait dans le goût des ,,Satires Ménippées`` de Varron [Menippearum fragmenta ds les Satirae de Pétrone] » (Satyre Ménippée); 4. ca 1690 fig. faire la satire de (qqc.) (Boileau, Vers pour mettre au bas du portrait de mon père ds Œuvres, p. 261: Sa conduite dans le Palais [...] Mieux que leur plume si vantée Fit la Satire des Rolêts). Empr. (A étant une forme demi-sav.) au lat.satura, var. satira (d'orig. incertaine, Ern.-Meillet), terme pop. appliqué à toutes sortes de « mélanges » [plat garni de diverses sortes de fruits et de légumes; ragoût], spéc. « pot-pourri scénique [B 1]; réunion de pièces didactiques variées de sujets et de mètres [Ennius]; [dep. Lucilius, 103 av. J.-C.; B 2 a] poème critiquant les vices »; cf. Bayet 1965, pp. 97-98. La satura dramatique [B 1] connue par Tite Live, supra, et Valère Maxime, II, IV, 4, issue de la fescinnina jocatio, a été renouvelée par l'imitation, la parodie des ,,ludions`` étrusques et confiée dès lors à des professionnels, v. P. Boyancé ds R. Ét. anc. t. 34, pp. 11-25 et J.-P. Cèbe ds R. belge Philol. Hist. t. 39, pp. 26-34. Dès l'époque lat., satira subit l'infl. graph. de satyra (satyre*), également perceptible en fr. dans le mot de base et ses dér. Fréq. abs. littér.: 372. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 971, b) 706; xxes.: a) 162, b) 276.
DÉR. 1.
Satiriser, verbe trans.,peu us. Faire la satire (écrite, orale) d'une personne, d'une société, d'une institution. Synon. critiquer, railler.Les sentiments qui font les ressorts de l'intrigue [du Misanthrope], les ridicules que Molière satirise, comporteraient une peinture plus nuancée, plus délicate, et supportent assez mal ce grossissement de cette « érosion des contours » que j'admire tant dans Le Bourgeois, Le Malade, ou L'Avare (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 712).Empl. abs. Faire, écrire une satire; exercer son esprit de satire. J'essayai Juvénal, Et, le poignet armé d'une plume sévère, Aux noirs excès du temps je déclarai la guerre. Aujourd'hui, moins rigide et peut-être moins bon, Je satirise encor, mais sur un autre ton (Barbier, Satires, 1865, p. 7). [satiʀize], (il) satirise [-i:z]. Ac. 1694-1740: satyriser; dep. 1762: -ti-. 1reattest. 1544 satyriser (Scève, Délie, 104 ds Hug.); de satire, suff. -iser*.
2.
Satiriste, subst.Auteur de satires ou d'écrits satiriques. Synon. satirique.Je passe d'abord à la bibliothèque où je consulte les satiristes, pour me mettre en train (Vallès, J. Vingtras, Bachel., 1881, p. 328). [satiʀist]. 1reattest. 1683 satyristes (Fr. Spanheim, Les Césars de l'empereur Julien, trad. du gr., Paris, D. Thierry, p. 31, rem. en note); de satire, suff. -iste*.
BBG.Elliott (R. C.). The definition of satire: a note on method. In: Actes du IIIeCongrès de l'Assoc. Internat. de Litt. comp. Utrecht, 1962, p. 348.