| SALOPERIE, subst. fém. A. − Familier 1. [En parlant de qqc.] a) État d'une chose sale, malpropre. Synon. malpropreté, saleté; anton. propreté.Il salissait exprès les carreaux et gueulait que c'était d'une saloperie, mais alors d'une saloperie, cette boutique! (Aragon,Beaux quart.,1936, p. 102). − P. méton. Chose sale, malpropre. Synon. ordure.Ah! faudra ramoner le pays avec du vent et des ramilles, des genêts en fleur, pour le décrasser de cette saloperie [la suie d'un vapeur] (Arnoux,Rhône,1944, p. 208). b) Chose de mauvaise qualité, de peu de valeur. Synon. cochonnerie, merde (vulg.).M. Quernat: ... Je connais le beurre des ministres, quoique je n'en mange pas, et je n'en voudrais pas manger, Monsieur. Ça se fait avec du rocou qu'on y met pour lui donner de la couleur qui flatte, et puis un tas de saloperies que je n'oserais dire (Mérimée,Deux hérit.,1853, p. 13).Faut dire que c'était d'la saloperie: du vin à culotter les quarts comme des pipes (Barbusse,Feu,1916, p. 207). c) Chose qui peut causer du mal ou du désagrément. Il y avait (...) des balles mâchées à la cisaille. − Quand tu fais mouche avec ces saloperies, tu dois faire un sacré trou (Giono,Bonheur fou,1957, p. 89). − Saloperie de + subst.En voilà un [éclair] qui a tapé près! Ça a l'air de s'énerver là, tout autour (...). Saloperie de pluie. On ne voit pas à un mètre (Giono,Que ma joie demeure, 1935, p. 488). d) Au fig. Chose digne de mépris. L'argent, cette saloperie que les romanciers escamotent dans leurs livres (...) l'argent, ce fatum des hommes du XXesiècle et, notamment, de tous les écrivains collaborationnistes...! (Cendrars,Main coupée,1946, p. 209). − Saloperie de + subst.Fiers, certes, car, s'ils [les artistes de music-hall] ont aux lèvres, souvent, un « Cochon de métier! » ou « Saloperie de vie! » je n'ai jamais entendu l'un d'eux soupirer: « Je suis malheureux... » (Colette,Vagab.,1910, p. 47). 2. Personne méprisable, capable d'actions viles, basses. Traiter qqn de saloperie. Il faut que tu sois une fière saloperie pour oser m'aimer après tout ce que je t'ai fait (Sartre,Diable et Bon Dieu,1951, 1ertabl., 3, p. 93). − Saloperie de + subst.Saloperie de gamine. Lorsqu'on avait une saloperie de fille pareille, on la tenait sous clef (Zola,Assommoir,1877, p. 521). 3. Interj. Petite saloperie! Il marronnait, le Bic. Posséder une boîte de nuit, des putes, du pognon en banque et se trouver là [réfugié dans un bouge], coincé comme un rat. Saloperie de saloperie! (Le Breton,Rififi,1953, p. 145). B. − Au fig., fam. 1. Déchéance, abjection morale; état d'avilissement. [Armand] (...) n'est qu'un ignorant des choses de la vie, qu'il en sait ce qu'on a voulu lui en dire, comme à tous ses pareils, qui n'ont d'autre responsabilité encore dans cette immense saloperie que d'être nés de ceux-ci, et non pas de ceux-là (Aragon,Beaux quart.,1936, p. 501). 2. Acte, action méprisable ou obscène. Faire une saloperie à qqn. C'est en vain que le jeune homme détailla toutes les « saloperies » qu'il faisait avec sa femme; M. de Charlus fut seulement frappé combien ces saloperies se bornaient à peu de chose. (...) Rien n'est plus limité que le plaisir et le vice (Proust,Temps retr.,1922, p. 827). − En partic. Propos, discours obscène. Raconter des saloperies (à qqn). On sait les horreurs que les hommes peuvent se raconter sur les femmes quand ils sont seuls, entre soi; on s'imagine donc les saloperies qu'une escouade de légionnaires surexcités et aux trois-quarts ronds arrivaient à dégoiser (Cendrars,Main coupée,1946p. 20). REM. Salopage, subst. masc.,hapax. Vous finirez tous en prison !... Voilà où tous vos trucs vous mènent!... Toutes vos roueries!... vos salopages!... vos dégueulasses manigances!... (Céline,Mort à crédit,1936, p. 485). Prononc. et Orth.: [salɔpʀi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1694 « saleté, grande malpropreté » (Ac.); 2. 1790 « propos orduriers » (Jean Bart, n o79, 7 ds Quem. DDL t. 19); 3. 1803 « chose à rejeter » (Boiste); 4. 1877 saloperie de (Zola, Assommoir, p. 571: saloperie de dîner). Dér. du subst. salope*; suff. -erie*. Fréq. abs. littér.: 130. Bbg. Quem. DDL t. 19. |