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* Dans l'article "SABRER,, verbe trans."
SABRER, verbe trans.
A. −
1. [Gén. avec un compl. plur. ou sing. coll.] Frapper quelqu'un à coups de sabre. Sabrer l'ennemi, le peuple; sabrer les Prussiens. Si un cavalier ennemi galope sur toi pour te sabrer, tourne autour de ton arbre et ne lâche ton coup qu'à bout portant (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 51).L'armée musulmane (...) apprenait que la petite troupe de Richard, avec une folle insouciance, campait hors des murs de Jaffa. Sabrer ces piétons semblait facile (Grousset, Croisades, 1939, p. 279).
Empl. intrans. Donner des coups de sabre. Les carabiniers accourent, les dragons sabrent, la foule se disperse dans tous les sens, une rumeur de guerre vole aux quatre coins de Paris (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 284).
Part. prés. en empl. adj. C'est là que Maxence se proposait d'organiser sa troupe, afin qu'elle fût bien sabrante et bien volante, allégée de tout ce qui est commodité matérielle (Psichari, Voy. centur., 1914, p. 14).
Empl. pronom. réciproque. Se battre au sabre. Quoi! pour des vanités, des bibus, des sornettes Se sabrer, s'éventrer avec des baïonnettes (Pommier, Crâneries, 1842, p. 125).Ces fanatiques danubiens qui se sabrent (Péladan, Vice supr., 1884, p. 48).
Sabrer le champagne. Ouvrir la bouteille de champagne à l'aide d'un sabre. Déboucher une bouteille de champagne est plus facile qu'on ne le pense parfois (...). La distinction commande la discrétion: point trop de bruit. Sabrer le champagne? Affaire de tempérament (Les Vins de France, Paris, Hachette, 1989, p. 127).
2. P. anal.
a) Sillonner, marquer de traits, de hachures, rayer quelque chose. [Une femme] avait des bottines en satin cramoisi, à boutons d'or, et des bas noirs sabrés de vert (L. Hennique, Soir. Médan, Affaire Gd 7, 1880, p. 248).Des rides nouvelles sabraient ses joues. Mais les yeux avaient reconquis leur calme, et la bouche s'était résignée (Rolland, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1425).
b) Tracer, barrer à grands coups, à grands traits. Mais maintenant quelqu'un en son propre nom prenait la parole, − celui dont la signature indéchiffrable sabrait le bas de la feuille (Gracq, Syrtes, 1951, p. 148).
En partic. Exécuter rapidement, à grands traits une esquisse. Et bientôt de ce travail sabré, sous le tâtonnement et la confusion des lignes, des contours (...) des repentirs (...) il commença à sortir comme l'apparence d'une jeune femme et d'un homme (Goncourt, Man. Salomon, 1867, p. 345).
3. Couper, raser quelque chose. Le visage de Pradonet qu'elle voyait reflété dans la glace avec une joue gonflée, tendue pour mieux sabrer le poil (Queneau, Pierrot, 1942, p. 33).Au fig. L'important personnage sabra l'air avec une baguette d'ivoire. Alors un orchestre invisible de cuivres tonna comme une canonnade (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 183).
4. MUS., part. passé en empl. adj. Accord sabré. Accord produit par un grand coup d'archet au violon. Çà et là, de grands accords sabrés interrompent le flux régulier des croches (La Laurencie, Éc. fr. violon, 1922, p. 98).
B. − Au fig.
1. Éliminer, supprimer radicalement quelque chose, évincer quelqu'un. Sabrer le droit de penser. Le Gouvernement n'a rien de mieux à faire que de tenir la Société en état de siège, (...) de tomber sur les prolétaires et de sabrer les républicains, jusqu'à ce que l'équilibre soit rétabli et que l'ordre règne! (Proudhon, Confess. révol., 1849, p. 427).Une nouvelle mesure sabra les deux tiers des survivants, et Napoléon, couronné empereur, ne conserva pour chanter ses louanges que quatre quotidiens (Coston, A.B.C. journ., 1952, p. 13).
Fam. Se faire sabrer. Être licencié, renvoyé d'un emploi, d'un établissement scolaire. (Dict. xxes.).
Arg. scol. Mettre de mauvaises notes, traiter avec sévérité, sans ménagement. (Dict. xxes.). Synon. saquer.
2. En partic. Diminuer, écourter un texte. Dès qu'il recevait un manuscrit, il le sabrait à coups de crayon (Zola, Doc. littér., Crit. contemp., 1881, p. 283).Ses contemporains [de Malauve] stupéfaits le virent tenter une renaissance de la tragédie antique avec des chœurs alternés, tandis qu'il sabrait les parties touffues de ses œuvres antérieures (L. Daudet, Astre noir, 1893, p. 190).
3. Critiquer sans ménagement quelqu'un ou quelque chose. Synon. fam. démolir.Il nous en a lu bon nombre d'articles, les sabrant tout d'abord avec beaucoup d'esprit et de gaieté. Enfin, il a jeté le livre, disant que le nom d'un auteur n'avait jamais influé sur son opinion (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 1103).Christophe était lancé: rien ne pouvait l'arrêter; et, comme il l'avait promis, tout y passa: les auteurs et les interprètes. Les premiers sabrés furent les Kapellmeister (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 435).
Part. prés. en empl. adj. Du milieu de ce chaos, des traits de lumière jaillissaient, des coups d'épée, des mots cinglants et sabrants, des rires héroïques (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 524).
4. Fam. Bâcler un travail, expédier, précipiter une affaire. Les juges consulaires et les juges de première instance sont deux sortes de juges. Vous autres, vous sabrez les affaires! Au Palais nous avons des formes (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 252).Gambetta, comme toujours, est en retard et l'on est obligé de sabrer la fin du dîner dans l'impatience des arrivés pour la lecture (Goncourt, Journal, 1882, p. 164).
C. − Arg. [Pour un homme] Pratiquer l'acte sexuel; posséder sexuellement une femme. Pas gêné [sous les bombes] (...) il a sabré une souris, et pas à la sauvette, encore! Magistralement (Simonin, Touchez pas au grisbi, 1953, p. 76).[Son amour] datait de la première noïe [nuit] où il l'avait sabrée (Le Breton, Razzia, 1954, p. 78).
D. − TECHNOL. Soumettre les peaux à l'opération du sabrage. (Dict. xxes.).
REM.
Sabrement, subst. masc.,hapax. [Corresp. à supra B 2] Le fait de sabrer. Nous pensions à cette liberté, à ces attentions, à ce charme de brusquerie, à cette parole passionnée, colorée, à cette langue d'artiste qui ne mâche rien, à ce sabrement de tout, à ce mélange de virilité et de petites choses féminines (Goncourt, Journal, 1865, p. 191).
Prononc. et Orth.: [sɑbʀe], [sa-], (il) sabre [sɑ:bʀ], [sa:bʀ]. Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, Warn. 1968, Lar. Lang. fr., Rob. 1985 [ɑ]; Martinet-Walter 1973 [ɑ], [a] (12, 5). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1680 « frapper à coups de sabre » (Rich.); b) 1863 « marquer de traits profonds » (Gautier, Fracasse, p. 349); 2. a) 1718 « juger avec précipitation » (Ac.); b) av. 1788 « pratiquer de larges coupures dans » (Buffon, Lett. à Bexon, Recueil de M. Nadaud de Buffon ds Littré); c) 1798 « expédier une besogne sans soin » (Ac.); d) 1964 « renvoyer quelqu'un d'un poste » (Rob.); 1964 « mettre de mauvaises notes à (des copies, des candidats) » (ibid.); 3. 1964 techn. « soumettre (des peaux) à l'opération du sabrage » (ibid.). Dér. de sabre*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 140.
DÉR. 1.
Sabrage, subst. masc.a) Technol. Opération de nettoyage de la laine des peaux de mouton. (Dict. xxes.). b) Action de sabrer, de pratiquer des hachures; résultat de cette action. De près, c'est un sabrage, une hachure de couleurs qui se martèlent, se brisent, semblent s'empiéter; à quelques pas, tout cela s'harmonise et se fond en ton précis de chair, de chair qui palpite, qui vit, comme personne, en France, maintenant ne sait plus en faire (Huysmans, Art mod., 1883, p. 138). [sɑbʀa:ʒ], [sa-]. 1resattest. a) 1883 beaux-arts id., b) 1895 « action de frapper à coups de sabre » (Guérin Suppl.), c) 1904 technol. (Nouv. Lar. ill.); de sabrer, suff. -age*.
2.
Sabreuse, subst. fém.,technol. Machine utilisée pour le nettoyage de la laine des peaux de mouton. Chaque peau passe à la sabreuse: la peau, côté laine, est présentée à un tambour garni de lames hélicoïdales non coupantes (J.-E. Burlet, La Laine et l'industr. lainière, Paris, P.U.F., 1972, p. 29). [sɑbʀø:z], [sa-]. 1reattest. 1951 (Ch. Martin, La Laine, p. 27); de sabrer, suff. -eur2*, -euse.
BBG.Quem. DDL t. 27.