| RÉFRACTAIRE, adj. A. − [En parlant d'un être hum., d'un animal] 1. Qui refuse d'obéir, de se soumettre. Synon. désobéissant, insoumis, rebelle.Réfractaire aux ordres du roi. Un religieux réfractaire aux ordres de son provincial (Ac.).[Dans le cas] où un Président du Conseil renversé par l'Assemblée dans les formes constitutionnelles refuserait de démissionner (...) la révocation du Président du Conseil par le Président de la République serait la constatation juridique de l'usurpation de pouvoirs commise par le Président du Conseil réfractaire (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 438). − HISTOIRE a) HIST. RÉVOLUTIONNAIRE, empl. adj. et subst. [En parlant d'un prêtre] (Celui) qui avait refusé, pendant la Révolution, de prêter serment à la Constitution civile du clergé. Synon. insermenté; anton. assermenté, constitutionnel (v. ce mot B 5).Des prêtres et des évêques réfractaires accusés de conspiration (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 44).Louis XVI, très sincèrement catholique (...) ne voulut avoir pour aumônier qu'un réfractaire (Hist. univ., t. 3, 1967, p. 389 [Encyclop. de la Pléiade]).V. insermenté ex. de France. b) HIST. MILIT. ♦ Conscrit réfractaire. Conscrit qui refuse de se soumettre au service militaire obligatoire. Mgr le duc de Berry fit relâcher six cents conscrits réfractaires (Chateaubr., Mél. hist., 1827, p. 123).Empl. subst. Poursuivre les réfractaires (Ac. 1835-1935). ♦ Empl. subst. En 1941-44, sous l'occupation allemande en France, résistant qui refusait le travail obligatoire en Allemagne. Le stalag XII C, où, par un tour de force peut-être unique dans les annales de la captivité, des évadés et des réfractaires avaient réussi à occuper entièrement tous les services (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 128). 2. P. ext. [En parlant d'une pers., d'une collectivité] a) Qui résiste à une marque d'autorité, à une décision imposée, à une influence, qui cherche à s'y soustraire. Être réfractaire à toute innovation. Mon rêve a toujours été de vous marier, Clotilde et vous; seulement, vous me paraissiez si froid, si peu empressé, si réfractaire (Feuillet, J. de Trécœur, 1872, p. 36).En 1871 (...) la poste devint un service commun aux différents États, sauf pour le Wurtemberg et la Bavière, toujours un peu réfractaires à l'assimilation absolue (Albitreccia, Gds moyens transp., 1931, p. 148). − Empl. subst. En général, littérature ou peinture, Théophile Gautier est un Français légèrement révolté, un réfractaire (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 6, 1863, p. 327).Réfractaire, s.m. Bohème, homme de talent qui regimbe à suivre les modes morales de son temps (Delvau1867, p. 416). b) Qui est incapable de comprendre (certaines disciplines). Synon. fermé (v. ce mot II B 1), (fam.; v. bouché II C).Odieuses suppositions, hypothèses invraisemblables, qui m'ont rendue réfractaire à l'arithmétique pour toute ma vie! (Colette, Cl. école, 1900, p. 46). 3. MÉD., PHYSIOL. Qui résiste (aux effets physiques, en particulier aux infections, aux maladies). Synon. immunisé, insensible.Organisme réfractaire à la contagion, à l'infection, à la maladie; animaux réfractaires à la peste. J'en prends des doses [d'arsenic] infiniment petites, et l'effet qui devrait s'ensuivre, si je n'étais pas réfractaire, serait de me faire respirer plus à l'aise (Mérimée, Lettres Viollet-le-Duc, 1864, p. 110). − En partic. a) [En parlant d'une affection, d'une maladie] ,,Qui ne réagit pas favorablement au traitement`` (Man.-Man. Méd. 1977). Anémie réfractaire (Man.-Man. Méd. 1977). b) ,,Qui ne réagit pas ou qui réagit peu à un stimulus physique, chimique ou de toute autre nature`` (Man.-Man. Méd. 1977). ♦ Période réfractaire. ,,Temps qui s'écoule après le passage d'un influx nerveux et durant lequel la fibre nerveuse est inexcitable (...) ou moins excitable`` (Thinès-Lemp. 1975). Voir Couffignal, Mach. à penser, 1964, p. 76. B. − TECHNOL., PHYS., CHIM. [En parlant d'un matériau] Qui est particulièrement résistant aux agents physiques ou chimiques, notamment aux températures très élevées. Argile, béton, brique, ciment, mortier, porcelaine, produit, terre réfractaire; réfractaire au feu. L'espace restant libre, et qui constitue le joint du fond, est ensuite garni de mortier réfractaire fortement argileux, qui est damé avec le plus grand soin (Barnerias, Aciéries, 1934, p. 169).[Le] foyer (...) qui ne comporte plus de grille, est pourvu d'un revêtement réfractaire rendu nécessaire du fait de la température très élevée de la flamme (Bailleul, Matér. roulant ch. de fer, 1951, p. 37). − Empl. subst. Matériau qui résiste à des températures supérieures à 1500oC. Il existe un grand nombre de réfractaires (Bader-Th.1962). Prononc. et Orth.: [ʀefʀaktε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: re-; dep. 1740: ré-. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. 1546 « difficile à soumettre, qui ne se laisse pas battre » (Rabelais, Tiers Livre, XVIII, éd. M. A. Screech, p. 135); 2. a) 1587 « qui ne se soumet pas à une autorité, à une règle » réfractaire à (Vignier, Bibl. hist., III, 79 ds Gdf. Compl.); spéc. b) 1792 prêtres réfractaires (Marbot, Législ., 20 sept., Arch. Parl., 1resér., t. L, p. 151, col. 1 ds Brunot t. 9, p. 895, note 6); c) 1816 conscrit réfractaire (Courier, Pamphlets pol., Pétition aux deux Chambres, p. 7); 3. 1762 (Ac.: Réfractaire, en Chimie, se dit d'Une substance minérale qui ne peut point se fondre, ou qui ne se fond que très-difficilement); 4. 1764 « qui ne se laisse pas appréhender, qu'on ne peut intégrer à un système » (Ch. Bonnet, Contempl. nat., XI, 3 [
Œuvres, éd. 1779-88] ds Littré); 5. 1784 « réfractif » (Bern. de St-P., Ét. nature, t. 1, p. 42); 6. 1827 méd. « insensible à, qui ne peut être affecté par (une maladie) » (Encyclop. méthod. Méd. t. 12); 7. 1834 « insensible, inapte à comprendre ou apprendre » (Balzac, Gaudissart, p. 5). B. Subst. 1. a) 1560 « celui, celle qui ne se soumet pas à une autorité, à une règle, rebelle » (Lettre du roi au Parlement ds Condé, Mém., éd. Champollion-Figeac et Champollion fils, p. 552); spéc. b) 1791 « prêtre ou émigré qui ne se soumet pas au régime institué par la révolution » (Doc. Hist. Révol., Contr. Dir., p. 297 ds Brunot t. 9, p. 895); c) 1828 « celui qui se soustrait à la loi du recrutement » (St-Edme t. 5); 2. 1956 « matériau réfractaire » (Uv.-Chapman). Empr. au lat.refractarius, -a, -um « intraitable, entêté », dér. de refringere, v. réfringent. Fréq. abs. littér.: 373. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 154, b) 611; xxes.: a) 487, b) 833. Bbg. Dub. Pol. 1962, p. 401. − Ranft 1908, p. 146. − Sculpt. 1978, p. 568. |