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RÉCUPÉRER, verbe trans.
A. − Qqn récupère qqc.
1. [Le compl. d'obj. désigne de l'argent, une valeur, un bien matériel] Retrouver la possession ou la jouissance de ce qui a été dépensé, perdu, déposé, prêté ou confié à quelqu'un. Synon. recouvrer.Récupérer son argent, ses livres, ses disques, ses cassettes; récupérer une épave. Il m'est dû onze francs dans une bonne maison (...); si je récupère cette valeur, je la consacrerai à t'acheter une feuille de vigne à la mode (Murger, Scènes vie boh., 1851, p. 188).La famille du fondateur demeure libre d'employer à faire dire des messes la somme qu'elle vient de récupérer (Barrès, Cahiers, t. 6, 1907, p. 106).
Rare, fam. [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Je songe qu'il me serait possible de récupérer un ami perdu sans en risquer deux ou trois autres (About, Roi mont., 1857, p. 281).
ASTRONAUT. [Le compl. d'obj. désigne un engin spatial et p. méton. un astronaute, un cosmonaute] Ramener au sol (sur terre ou en mer) en bon état. Récupérer une fusée, une capsule, une cabine, un satellite. Près de 5 jours − à 54 mn près − après le lancement vendredi de Valery Bikovsky, l'U.R.S.S. a récupéré hier, sains et saufs, ses deux cosmonautes (Le Populaire, 20-21 juin 1963, p. 1, col. 5 ds Guilb. Astronaut. 1967).
2. [Le compl. d'obj. désigne un inanimé concr. inutilisé, ou au rebut] Recueillir, ramasser, collecter pour en tirer parti. Récupérer de la ferraille, des chiffons, des vieux papiers, du verre perdu, des vêtements usagés, du matériel. On peut à peu près tout récupérer, même l'écologie. Du papier à l'aluminium aux matières plastiques en passant par les textiles (Le Sauvage, 1eravr. 1977, p. 40, col. 3).
TECHNOL. Recueillir (ce qui autrement serait perdu) pour réutiliser. Récupérer de la chaleur, de l'énergie, du pétrole. [Le suj. désigne un inanimé concr.] L'eau passe d'un évaporateur dans l'autre, récupérant, dans les réchauffeurs tubulaires, la chaleur qu'elle a perdue dans les évaporateurs (Romanovsky, Mer, source én., 1950, p. 63).
3. DR. DU TRAV. Accomplir des heures, des jours de travail en remplacement des heures, des jours pendant lesquels, pour diverses raisons, on n'a pas travaillé. Synon. fam. rattraper.Récupérer un jour de congé. [P. méton. du suj.] Le ministère de l'Éducation nationale a laissé aux chefs d'établissements toute liberté pour « récupérer » les cours du jeudi 21 et du vendredi 22 décembre (Le Monde, 20 janv. 1968ds Gilb. 1980).Bénéficier en totalité ou en partie de jours ou heures de repos correspondant à des jours ou heures de travail particulièrement pénibles. V. récupération A 3 ex. du Monde.
4. Récupérer des/ses forces. Reprendre des forces, retrouver ses forces après un gros effort ou une maladie. Synon. recouvrer.De plantureux festins, de multiples collations, qui lui faisaient récupérer les forces perdues, enrichissaient subitement son organisme (Pergaud, De Goupil, 1910, p. 80).
Absol., SPORTS. Récupérer facilement, vite. [Henriette] était sortie de cette crise [le divorce] assez endolorie. Quand Doisel disparut, elle commençait tout juste à récupérer, comme disent les boxeurs (Vialar, Bien-aller, 1952, pp. 12-13).
Empl. pronom. réfl. Se ressaisir, se remettre d'un effort, d'un malaise. Revenant alors sur lui-même, tentant de se récupérer, Durtal demeura stupéfait (Huysmans, En route, t. 2, 1895, p. 160).
5. Fam. S'emparer de quelque chose, faire un gain, une économie, à titre de compensation. S'il abandonnait la Rhénanie en sus de la Belgique, en récupérant la Lombardie (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 486).
B. − Qqn récupère qqn (une pers., un groupe, et p. méton., des idées)
1. Fam. Aller chercher, retrouver (une personne que l'on a quittée momentanément ou qui ne peut, seule, se tirer d'affaire). Récupérer ses enfants à l'école, une personne à la gare. Faudrait pas que je soye en retard. Si je veux récupérer la fille (Queneau, Zazie, 1959, p. 251).Le col du L. a été fermé. Deux automobilistes y ont été bloqués toute la nuit. Les gendarmes-skieurs et des moniteurs de ski sont partis les récupérer (Le Monde, 13 févr. 1970ds Gilb. 1980).
2. DÉFENSE. ,,Affecter au service armé, à la suite d'une visite médicale, des hommes placés jusque-là dans la position de réformé`` (Lar. Lang. fr.). Mon père, naguère réformé pour troubles cardiaques fut « récupéré » et versé dans les zouaves (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 138).
3. Réinsérer dans la vie professionnelle ou sociale (une personne jugée inapte par un handicap physique ou une conduite répréhensible). Synon. reclasser, recaser (fam.). (Dict. xxes.).
4. Détourner à son profit les idées d'une personne (notamment en politique), un mouvement d'opinion ou une action collective; neutraliser un individu ou un groupe ayant des objectifs opposés ou différents et parfois contestataires, en les amenant à servir ses propres desseins. Syndicat qui récupère un mouvement; mouvement qui récupère un syndicat. Je ne sais pas exactement où serait Jaurès aujourd'hui; je ne vais pas essayer de le « récupérer ». De nos jours, il ne parlerait sans doute plus tout à fait le langage de 1900 ou de 1910 (Le Nouvel Observateur, 2 févr. 1976, p. 62, col. 1):
... peur de voir récupérer ce qu'on appelait le mouvement de Mai. On se sentait « récupéré » dès que des adultes ou des politiciens reprenaient un seul mot de la Sorbonne. J. Daniel, Le Temps qui reste, 1973ds Gilb. 1980.
Rem. ,,D'une façon générale, on tend à abuser de récupérer, soit à la place de retrouver ou de reprendre (récupérer des forces), soit à la place de ramasser, emporter, acquérir, conquérir`` (Dupré 1972).
Prononc. et Orth.: [ʀekypeʀe], (il) récupère [-pε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: re-; dep. 1740: ré-. Conjug. v. abréger. Étymol. et Hist. 1495 (J. de Vignay, Mir. hist., XXV, 89, édit. 1531 ds Delb. Notes mss). Empr. au lat.recuperare « reprendre, rentrer en possession de », v. recouvrer. Cf. l'a. fr. soi recuperer « se réfugier » déb. du xives. (Aimé de Mont-Cassin, Hist. des Norm., éd. V. de Bartholomaeis, V, 27, p. 253). Fréq. abs. littér.: 165. Bbg. Quem. DDL t. 9, t. 27.