| RÉALITÉ, subst. fém. I. − [La réalité de qqc.] A. − 1. Aspect physique (des choses). Synon. matérialité.Dans cette fatigue d'émotions perpétuelles, après le dîner, sur le boulevard, assis sur une chaise, la réalité des choses, du boulevard, des passants perd de sa présence et de son relief, et tout prend à nos yeux des effacements de rêve (Goncourt, Journal,1865, p. 197).V. masse1I A 1 ex. de J.-R. Bloch. − [À propos d'une perception auditive] Sans la réalité de sa voix, il se fût demandé encore si elle était auprès de lui (Genevoix, Raboliot,1925, p. 263). − Au plur. Depuis, Ernest est fou d'amour. Fou d'amour, assis sur son pauvre petit lit, devant son cruchon, il se tord les mains. Il se remémore infiniment et sans cesse les réalités de la superbe colonelle Nina (Jouve, Scène capit.,1935, p. 76). 2. Manifestation concrète, contenu (d'un processus, d'un événement). Il est également impossible de prononcer pour ou contre la réalité future d'un événement, qui ne se réaliserait qu'à une époque où l'espèce humaine aurait nécessairement acquis des lumières dont nous pouvons à peine nous faire une idée (Condorcet, Esq. tabl. hist.,1794, p. 222): 1. Le monde est tellement complexe et les interconnexions entre les faits sont si nombreuses que, pour agir correctement, il faut être informé d'une foule de faits, dans leur réalité mouvante; ceci a donné naissance à une science nouvelle: la science de la documentation.
Fourastié, Gd espoir du XXes.,1969, p. 335. − Fréq. au plur. En bas, dans la batterie calfeutrée, c'était la tempête avec ses dessous de misère, avec ses réalités pitoyables (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 138).Toutes les réalités les plus brûlantes de l'amour sont pour nous faire oublier ce qu'il est au fond. Car tout ce qui existe est la prison de ce qui est (J. Bousquet, Trad. du sil.,1935, p. 18). 3. Ce à quoi réfère une désignation, une représentation. Synon. entité, fait.Des nombreuses réalités que peut désigner « concentration », retenons la fusion de plusieurs firmes de dimensions inférieures à l'optimum pour fonder une firme de dimension optimum (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 216): 2. Saussure a beau dire que l'idée de « sœur » n'est pas liée au signifiant s-ö-r; il n'en pense pas moins à la réalité [it. ds le texte] de la notion. Quand il parle de la différence entre b-ö-f et o-k-s, il se réfère malgré lui au fait que ces deux termes s'appliquent à la même réalité [it. ds le texte]. Voilà donc la chose, expressément exclue d'abord de la définition du signe, qui s'y introduit par un détour et qui y installe en permanence la contradiction.
Benveniste, Probl. de ling. gén.,Paris, Gallimard, 1966, p. 50. ♦ [+ adj. précisant l'ordre de réalité] C'est pour cela qu'on peut dire que la science est impersonnelle, en ce sens que les faits découverts ne sont pas des inventions; ce sont des réalités naturelles (Cl. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p. 256).Ainsi les hypothèses sur l'électricité, le magnétisme expliquent les phénomènes; elles sont un lien commode entre les faits; mais on ne les prend pas comme ayant une valeur absolue et correspondant à des réalités physiques (Renan, Avenir sc.,1890, p. 499). − Au plur., vieilli. Synon. de choses, données.Les colonies gagneraient beaucoup à la présence de ces savans, qui, cessant de voyager en esprit, ne s'occuperaient que de choses vraies, et qui, substituant aux tableaux de leur imagination souvent dangereuse ceux de la nature, rapporteraient des réalités souvent précieuses (Baudry des Loz., Voy. Louisiane,1802, p. 154). B. − 1. Caractère établi ou fondé de ce qui constitue une accusation, une hypothèse. Réalité du fait incriminé. Il n'y aurait rien à en conclure contre la réalité de l'hypothèse de Copernic (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 6).Ce branle-bas militaire, dans son ambiguïté de jeu qui pouvait d'un instant à l'autre devenir sérieux, apportait à son tour consistance et réalité à la douteuse apparition de la veille (Gracq, Syrtes,1951, p. 62). 2. Caractère non fictif d'un personnage, d'un récit. Synon. authenticité.J'engage donc le lecteur à être convaincu de la réalité de cette histoire dont tous les personnages, à l'exception de l'héroïne, vivent encore (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p. 1). ♦ Réalité d'un mariage. Sa consommation. On ne tarda pas à concevoir des doutes sur la réalité de son mariage (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 221). 3. Rare. Ressemblance exacte avec le modèle. Synon. réalisme.V. nature I D 1 a ex. de Baudelaire. C. − DR. FISCAL. Réalité de l'impôt (p. oppos. à personnalité de l'impôt). Fait que l'assiette de l'impôt repose sur la quantité de matière imposable, et non la situation personnelle des contribuables (d'apr. GDEL). II. − [La réalité] A. − 1. PHILOS. Ce qui existe indépendamment du sujet, ce qui n'est pas le produit de la pensée. Il y a (...) les philosophies qui nient le réel au profit du vrai ou plutôt veulent réduire la réalité à la vérité. Le type en est la construction d'Hamelin. Le vrai, qui épuise le réel, est le système des catégories: le monde s'identifie aux lois de l'esprit (Lacroix, Marxisme, existent., personn.,1949, p. 65). ♦ Réalité empirique, sensible/réalité intelligible. La pensée conceptuelle marque donc bien un détachement par rapport à la réalité empirique, c'est-à-dire telle qu'elle m'apparaît dans l'expérience sensible, mais c'est un détachement fécond, car par ce détour elle saisit, semble-t-il, au sein de l'existence sensible encore confuse et superficielle une réalité intelligible plus précise et plus profonde: son essence (L. Sève, Une Introd. à la philos. marxiste,éd. soc., 1980, pp. 38-39). ♦ Jugement de réalité. Jugement qui énonce un fait (ex. nous sommes huit). Synon. jugement d'existence, existentiel; anton. jugement de valeur (d'apr. Foulq.-St-Jean 1962 s.v. jugement). − [Dans la tradition idéaliste] Réalité objective. Ce que nous appelons la réalité objective, c'est, en dernière analyse, ce qui est commun à plusieurs êtres pensants, et pourrait être commun à tous; cette partie commune, nous le verrons, ce ne peut être que l'harmonie exprimée par des lois mathématiques (H. Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 9). 2. [Désignant l'univers matériel, objet d'étude des sciences physico-chimiques] Le monde devant lequel nous nous trouvons est donc infiniment plus riche que ne l'imaginait Pascal lorsqu'il admettait une même structure de l'infiniment grand à l'infiniment petit (...). La réalité est beaucoup plus riche; chaque étage nouveau où l'expérience nous permet de descendre nous apporte des vérités nouvelles (P. Langevin, La Phys. nouv. de l'atomeds La Pensée et l'action, 1964 [1939], p. 114): 3. On peut remarquer d'ailleurs que le succès des raisonnements de la théorie quantique des champs pour l'interprétation de ces phénomènes pouvait suggérer qu'au-dessous du niveau de la réalité microphysique où se manifestent les corpuscules, existe un niveau de la réalité plus profond et plus caché encore, niveau avec lequel les corpuscules du niveau microphysique seraient constamment en interaction, pouvant à certains moments s'y engloutir ou en émerger.
Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 2, 1964, p. 145. 3. P. anal. [Désignant un champ de connaissance, l'objet d'une science ou d'une discipline] La réalité économique et sociale. La conscience collective ou commune (...) n'a pas pour substrat un organe unique; elle est, par définition, diffuse dans toute l'étendue de la société; mais elle n'en a pas moins des caractères spécifiques qui en font une réalité distincte (Durkheim, Divis. trav.,1893, p. 46).La morale est rapprochée ici de la religion, du langage, des institutions sociales en général: elle est conçue par conséquent comme un ensemble de faits, comme une réalité donnée, objet d'une science ou d'un corps de sciences analogues à la physique (Lévy-Bruhl, Mor. et sc. mœurs,1903, p. 102). − PSYCHANAL. Réalité psychique. L'idée de réalité psychique est liée à l'hypothèse freudienne touchant les processus inconscients; non seulement ceux-ci ne tiennent pas compte de la réalité extérieure, mais ils la remplacent par une réalité psychique (Lapl.-Pont.1967): 4. ... il reste notamment le fait que c'est le malade qui a créé les événements imaginaires; et, au point de vue de la névrose, ce fait n'est pas moins important que si le malade avait réellement vécu les événements dont il parle. Les fantaisies possèdent une réalité psychique, opposée à la réalité matérielle, et nous nous pénétrons peu à peu de cette vérité que dans le monde des névroses c'est la réalité psychique qui joue le rôle dominant.
Freud, Introd. psychanal.,trad. par S. Jankélévitch, 1959 [1922], p. 396. B. − 1. Ce qui constitue le monde de l'homme. Tant que je vis, je me contente d'un va-et-vient, d'un compromis. Quoi que j'en dise, je me sais l'individu d'une espèce et, grossièrement je demeure d'accord avec une réalité commune; je prends part à ce qui, de toute nécessité, existe, à ce que rien ne peut retirer (G. Bataille, Exp. int.,1943, p. 112).Le langage re-produit la réalité. Cela est à entendre de la manière la plus littérale: la réalité est produite à nouveau par le truchement du langage. Celui qui parle fait renaître par son discours l'événement et son expérience de l'événement (Benveniste, Probl. de ling. gén.,Paris, Gallimard, 1966p. 25). − LING. Réalité extra-linguistique. La réalité extra-linguistique dans laquelle baigne le discours, l'entourage général ou particulier que supposent les paroles prononcées dans chaque cas, la situation, en y comprenant − cas-limite − cette situation que crée le discours même au fur et à mesure qu'il se déroule: le contexte (Bally, Lang. et vie,1952, p. 76). 2. Environnement concret et matériel de l'homme. Perdre la notion de la réalité. Il ne faut pas croire que tous ces phénomènes se produisent dans l'esprit pêle-mêle, avec l'accent criard de la réalité et le désordre de la vie extérieure (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 377).Vers neuf heures la brume se dissipe; la réalité rentre en scène; tout se précise et se durcit. La chaleur s'établit (Gide, Journal,1942, p. 127). − [Désignant une production de l'imagination] Nul ne marche seul la nuit, dans la forêt sans tremblement. Ombres et arbres, deux épaisseurs redoutables. Une réalité chimérique apparaît dans la profondeur indistincte (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 469). 3. Somme des événements sociaux qui constitue la situation dans laquelle se trouve une personne. Synon. existence, réel, vie.La réalité quotidienne; la réalité de tous les jours; une réalité agressive, banale, fascinante, morne, passionnante; la dure réalité. C'est étonnant, le matin, lorsqu'on a à passer du sommeil dans une certitude douloureuse, dans une réalité hostile, comme machinalement, la pensée, qui commence à s'éveiller, retourne au sommeil (Goncourt, Journal,1861, p. 890).Pourtant cela est. Et c'est à peine si je m'étonne... Tant la réalité a d'évidence... Tant cette évidence s'impose!... Dès que les choses sont arrivées, nous ne pensons même plus qu'elles auraient pu ne pas être (Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 830). ♦ [Opposé à l'idéal, aux aspirations subjectives, au rêve] Rappeler, revenir à la réalité; fuir, oublier la réalité. Le jour où il [l'homme] se voit méprisé, le moment où la réalité de la vie est en désaccord avec ses espérances, il se tue et rend ainsi hommage à la société (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 701): 5. Ce brave poëte, qui dans ses vers ne chantait que les déesses aux blancheurs marmoréennes et les hétaïres aux yeux fauves, semblait dans la réalité singulièrement sensible aux charmes bourgeois d'un teint frais et d'un nez retroussé.
Theuriet, Mariage Gérard,1875, p. 90. − Au plur. Faits et événements caractéristiques ♦ d'une existence individuelle. [Deux horloges sonnèrent] C'étaient le séminaire et le collège. Ce brusque rappel aux réalités dérisoires du lendemain écrasa ma douleur (Fromentin, Dominique,1863, p. 122). ♦ d'un milieu. Cet homme (...) eut très peu le sens des réalités paysannes et même, d'un mot plus large, des réalités terriennes (L. Febvre, A. Mathiez,[1932] ds Combats, 1953, p. 346).Ils étaient retirés pour un temps de l'atmosphère du front, des réalités du front (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 220). ♦ d'une époque historique. Les vieilles réalités malsaines et vénéneuses se couvrirent d'apparences neuves. Le mensonge épousa 1789, (...) les préjugés, les superstitions et les arrière-pensées (...) se vernirent de libéralisme. Changement de peau des serpents (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 425): 6. [Voici Coppée] tout entier: virtuose impeccable, songeur délicat, très habile et très sincère, capable de raffinement, de mièvrerie, et aussi de franche et populaire émotion, peintre savoureux et fin des réalités élégantes et vulgaires et, pour tout dire, poète excellent des « modernités ».
Lemaitre, Contemp.,1885, p. 111. − En partic. [Désignant une création artist.] Flaubert a été l'inventeur d'une réalité, peut-être aussi intense que celle de son précurseur [Balzac], et incontestablement d'une réalité plus artiste, d'une réalité qu'on dirait obtenue par un objectif perfectionné, d'une réalité qu'on pourrait définir du d'après nature rigoureux, rendu par la prose d'un poète (Goncourt, Journal,1890, p. 1264). − Locutions ♦ Avoir le sens des réalités. Savoir s'adapter aux circonstances. Pauvre Paillon! Au fond, c'est un chimérique. Il n'a aucun sens des réalités de la vie (Miomandre, Écrit sur eau,1908, p. 86). ♦ Regarder la réalité en face. Se montrer lucide. Je vous demande seulement de regarder la réalité en face: vous reconnaîtrez que j'ai raison, qu'il n'y a pas d'autre solution possible [qu'une séparation] (Martin du G., Thib.,Cah. gr., 1922, p. 663). ♦ Prendre ses désirs pour des réalités. N'avons-nous pas, tous, plus ou moins, pris nos désirs pour des réalités? (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 95). ♦ Tenir compte des réalités. Ne pas s'en tenir à la théorie. Aligner les chiffres, calculer, c'est bien joli, mais si l'on ne tient pas compte des réalités, c'est de la théorie (Debatisse, Révol. silenc.,1963, p. 61). ♦ La réalité dépasse la fiction. V. fiction B. − Dans la réalité. [Compl. circ.; p. oppos. à en principe, en théorie] . La modernisation de l'agriculture, par contre, serait une condition préliminaire du développement dans les pays sous-développés et sous-peuplés, afin de libérer de la main-d'œuvre pour le secteur industriel. Le problème est, dans la réalité, plus complexe (Univers écon. et soc.,1960, p. 36-15).Dans la réalité des choses. Ainsi s'explique la place, large en apparence, faite dans les organisations patronales, aux affaires modestes et à leurs représentants (...). Bien entendu, dans la réalité des choses, divers moyens n'en sont pas moins mis en œuvre pour rétablir une hiérarchie d'influence (Meynaud, Groupes pression Fr.,1958, p. 24).Rare, var. de en réalité. [Il] écrit des centaines de lettres et dans la réalité ne fait rien (Stendhal, L. Leuwen,t. 3, 1835, p. 165). III. − En réalité, loc. adv. A. − Dans la réalité. Synon. réellement; anton. en apparence.Du Tillet tint si bien le balancier en dansant sur la corde roide des spéculations financières, qu'il resta toujours élégant et riche en apparence avant de l'être en réalité (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 362).Je crois que Renard ne se peignait pas plus fermé qu'il n'était en réalité (Gide, Journal,Feuillets, 1925, p. 814). B. − Adv. d'énonciation 1. [Dans un énoncé p en réalité q, en réalité conteste la prop. p et lui oppose la prop. q présentée comme vraie ou du moins plus conforme à la réalité] Synon. en fait.Ce prétendu démagogue de 1819 est en réalité un vassal de Rudolphe qui chante sa chanson sous le prunier sauvage et sur la tour ruinée de son seigneur (Quinet, All. et Ital.,1836, p. 45).Quand nous la longions, cette lande m'avait semblé plane: en réalité, ce n'était que trous et bosses! (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 183). − [Les 2 termes sont coordonnés par mais] Elle s'était, en apparence, défendue assez bien. Mais, en réalité, la fatigue l'avait gagnée (Gobineau, Pléiades,1874, p. 131).L'enseignement laïque, soi-disant neutre, mais en réalité hostile à toute idée chrétienne (Coppée, Bonne souffr.,1898, p. 174). 2. [En réalité s'oppose non pas à une assertion explicite, mais à ce qui vient d'être dit; la loc. signifie « contrairement à ce qu'on dit, à ce qu'on croit, à ce que pourrait laisser supposer la situation »] Ceux qui ne raillent jamais, les gobeurs, si tu savais comme je les aime, ceux-là! (...) Bérénice, tiens, en réalité, je m'agenouille devant sa simplicité (Barrès, Jard. Bérén.,1891, p. 134).Vous l'avez vue, MelleBerthe est jolie, appétissante. Tous mes employés ont essayé de lui faire la cour. En réalité, elle est amoureuse d'Émile Duffieux (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 139). − Mais en réalité. [Mais récuse la conclusion qu'on pourrait tirer du discours antérieur, et en réalité cautionne la vérité de l'énoncé qui le contient] Tu as vingt ans, j'en ai vingt-cinq, mais en réalité je suis bien plus ton aînée que ça (Montherl., Pitié femmes,1936, p. 1222).Vous n'avez aucun des symptômes principaux de la maladie, dit-il à Panneloux. Mais en réalité, il y a doute, et je dois vous isoler (Camus, Peste,1947, p. 1314). Prononc. et Orth.: [ʀealite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. 1368 dr. realité « bien, possession » (Doc. ds Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p. 420: en tant que icelles lettres touchent realite ou biens de hiretages); 2. 1958 dr. réalité de l'impôt (Romeuf). II. A. 1. Ca 1460 « caractère de ce qui est réel » (G. Chastellain, Exposition sur vérité mal prise ds
Œuvres, éd. J. Kervyn de Lettenhove, t. 6, p. 373: la réalité mesme de nostre matière); 2. a) 1647 philos. réalité actuelle ou formelle, réalité objective (Descartes, Méditations, III, éd. F. Alquié, t. II, pp. 438-439); b) 1857 philos. de Kant réalité objective (Cousin, Philos. Kant, p. 76); 3. 1680 théol. (Rich.: la réalité de Jesus-Christ dans le Saint Sacrement); 4. 1762 litt. et art « réalisme » (Diderot, Éloge de Richardson, éd. P. Vernière, p. 31: ses personnages ont toute la réalité possible). B. 1. a) 1530 « ce qui est réel » (J. Bouchet, Triomphe de la Noble Dame, f o90 ds Gdf. Compl.); b) [xves. [date du ms.] en realté (Fauvel, éd. A. Pey, 347 ds T.-L., mais reaument ds l'éd. A. Långfors)] 1762 en réalité (J.-J. Rousseau, Émile, V ds
Œuvres, bibl. de la Pléiade, t. 4, p. 821); 2. 1657-62 « la vie, l'existence réelle » (Pascal, Pensées, éd. L. Lafuma, n o803); 3. 1657-62 « chose réelle, fait réel » (Id., ibid., n o257); av. 1660 (Scarron ds Rich. 1680: Je ne me contente pas des paroles, je veux des réalitez); 4. 1911 philos. jugement de réalité (Durkheim, Jugements de valeur et jugements de réalité ds R. de métaphys., juill. ds Lal., s.v. valeur); 5. 1922 psychanal. principe de réalité, réalité psychique, épreuve de la réalité (Freud, op. cit., chap. 22, p. 371, et chap. 23, pp. 384 et 387). I empr. au lat. médiév. realitas « bien, propriété » (1120 ds Du Cange), dér. de realis (réel*). Cf. l'angl. realty « biens immobiliers, biens immeubles ». II empr. au lat. scolast. realitas « caractère de ce qui est réel » (ca 1300, J. Duns Scot. Cf. Hist. littér. de la France, t. 25, 1869, p. 456; Théol. cath. t. 4 1920, col. 1885; J. Hoffmeister, W. der philosophischen Begriffe, Hambourg, 1955, s.v. Realität); dér. de realis (réel*). Fréq. abs. littér.: 9 579. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 5 860, b) 7 279; xxes.: a) 14 312, b) 23 232. Bbg. Charolles (M.). En réalité et en fin de compte et la résolution des oppos. Trav. du Centre de Rech. Sémiologiques. 1984, n o47, pp. 79-111. − Danjou-Flaux (N.). L'Oppos. en fr.: le connecteur adversatif au contraire et ses parad. Thèse, Paris, [1984], pp. 440-445; Réellement et en réalité. Lexique. 1982, n o1, pp. 105-143. − Schober (R.). Réalité und vérité bei Balzac und Zola. Beitr. rom. Philol. 1961, t. 1, pp. 116-142. |