| RUSTICITÉ, subst. fém. A. − Caractère de ce qui est rustique, de ce qui relève de la vie et des mœurs de la campagne. La nappe grossière, les assiettes à fleurs (...) tout contribuait à la rusticité de la fête (A. Daudet, Jack, t. 2, 1876, p. 184).Elles portaient toutes deux un foulard noir, sur un chapeau de paille au ruban noir, le tout d'une rusticité assez pauvre. Le tricot épais, de laine noire, qu'elles avaient mis par dessus leurs vêtements, les revêtait du deuil continu et traditionnel des paysannes (Malègue, Augustin, t. 1, 1933, p. 216). − Péj. Manque de délicatesse, de savoir-vivre. Synon. grossièreté, rudesse, rustrerie.Ma cousine (...) tenait surtout aux manières et au savoir-vivre. Comme je m'inquiétais de ma rusticité, il m'assura qu'il n'y paraissait pas quand je voulais (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 376).Presque tous les maîtres de l'école française ont un je ne sais quoi de rude et de tendu, plusieurs même une certaine rusticité (Bremond, Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 275). − P. ext. Absence de raffinement, simplicité. Je ne voulais ni traverser le lac ni entrer dans la ville de jour. La rusticité de mon costume (...) contrastait trop avec l'élégance de vêtements, d'habitudes et de vie que j'y avais montrée l'année précédente (Lamart., Raphaël, 1849, p. 309).Traîneau, le paysan nantais, sanguin, costaud, et d'une redoutable finesse sous son apparente rusticité (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 58). − P. méton., rare ♦ Personne rustique, rude et sans raffinement. La sœur Perpétue était la première villageoise venue, grossièrement sœur de charité, entrée chez Dieu comme on entre en place. Elle était religieuse comme on est cuisinière. Ce type n'est point très rare. Les ordres monastiques acceptent volontiers cette lourde poterie paysanne, aisément façonnée en capucin ou en ursuline. Ces rusticités s'utilisent pour les grosses besognes de la dévotion (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 261). ♦ Ensemble de choses grossières et frustes. Je me souviens seulement qu'après avoir parlé vendange, récolte, chasse et campagne, seuls sujets qui nous fussent communs, le nom de Paris se présenta tout à coup comme une inévitable antithèse à toutes les simplicités comme à toutes les rusticités de la vie (Fromentin, Dominique, 1863, p. 13). B. − Qualité d'une plante ou d'un animal rustique, qui demande peu de soin. Lorsqu'on possède des plantes d'une rusticité douteuse, il faut, avant le commencement des gelées, étaler sur le sol, autour du pied du végétal, des feuilles ou du fumier sec (Carrière, Pépinières, 1878, p. 127).La qualité essentielle chez l'animal de travail: la rusticité, je veux dire l'endurance à la fatigue, la résistance à la maladie, et par-dessus tout, la sobriété (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p. 227). − P. ext. Qualité d'une machine, d'un véhicule rustique, qui demande peu d'entretien. Sa rusticité [de la moissonneuse] est indispensable, étant donné le manque de notions mécaniques de l'ouvrier rural (Ballu, Mach. agric., 1933, p. 13). Prononc. et Orth.: [ʀystisite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Déb. xiiies. [ms.] « travail des champs » la seinte rusticiteit (Guillaume de St-Thierry, Epistola ad fratres de Monte Dei, éd. V. Honemann, 147, p. 253); 2. a) 1512 « manière d'être propre aux gens et choses de la campagne » (J. Lemaire de Belges, Illustrations ds
Œuvres, éd. I. Stecher, t. 1, p. 6); b) 1870 bot. (Littré); cf. 1878 (Carrière, loc. cit.); 3. au plur. a) 1829 « choses de la campagne » de délicieuses rusticités (Balzac, Chouans, p. 211); b) 1862 « manières frustes, manque de raffinement » les rusticités de la vie (Fromentin, loc. cit.). Empr. au lat. d'époque impérialerusticitas « choses ou mœurs de la campagne; gaucherie, façons campagnardes », d'où en mauvaise part « grossièreté », dér. de rusticus, v. rustique. Fréq. abs. littér.: 60. |