| RUBAN, subst. masc. A. − 1. Bande de tissu, plus ou moins étroite, de longueur variable, servant de lien ou d'ornement. Le pur corsage aux tulles jaunis, aux rubans passés (Nerval,Filles feu, Sylvie, 1854, p. 606).Il tira de son gilet un monocle à ruban de moire (Duhamel,Suzanne, 1941, p. 83).V. adorner ex. 2, capeline ex. 1, chou B 2 ex. de Dumas fils, jarretière ex. 2. SYNT. Ruban fané, neuf; ruban blanc, bleu, lilas, mauve, noir, ponceau, pourpre, rose, rouge, vert; rubans multicolores, unis; ruban d'argent, d'or; ruban de coton, de fil, de gros-grain, de satin, de soie, de tulle; ruban d'un chapeau; bout de ruban; flot de rubans (v. flot2); garniture de rubans; nœud de ruban(s); bonnet garni de rubans; lettres attachées avec un ruban; paquet entouré d'un ruban; nouer un ruban; retenir ses cheveux avec un ruban. − Au sing. [Précédé d'un art. partitif] Cette bande de tissu vendue au mètre. Pièce de ruban; acheter, mesurer, vendre du ruban. Les deux amis (...) chargèrent leur hôte de leur faire coudre une vingtaine de mètres de ruban à chacun de leurs chapeaux (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 520). − HIST. DU COST. Ruban de queue. Au xviiies., ruban avec lequel les hommes attachaient leur chevelure sur la nuque. (Dict. xixeet xxes.). ♦ P. anal., vieilli. Route en ligne droite qui s'étend à perte de vue. Le maître de poste, (...) assis au point culminant de ce pont, pouvait, (...) parfaitement embrasser ce qu'en termes de son art on nomme un ruban de queue (Balzac,U. Mirouët, 1841, p. 4).P. méton. Trajet. Bon (...) maintenant au faubourg Saint-Germain (...). Plus que cela de ruban de queue, merci! − dit le cocher avec une colère contenue (Sue,Juif errant, 1844-45, p. 67). 2. En partic. a) Insigne d'une dignité dans un ordre honorifique, consistant en un petit ruban; p. méton., titre, dignité dans un ordre honorifique. Il a une calotte noire sur la tête, un ruban de la Légion d'honneur à la boutonnière (Goncourt,Journal, 1865, p. 148).La grande majorité des hommes appartenait à l'armée (...) ils plastronnaient, la tunique barrée de rubans multicolores (Martin du G.,Thib., Épil., 1940, p. 804).V. aigle ex. 51. ♦ Ruban rouge. Insigne de chevalier dans l'ordre de la Légion d'honneur; p. méton., le ruban (rouge), la Légion d'honneur. Arborer un ruban rouge; avoir, recevoir le ruban. Voilà ce que coûtait le fatal ruban rouge mis par le roi à la boutonnière d'un parfumeur (Balzac,C. Birotteau, 1837, p. 221): D'un voyage à Paris, il revint l'œil voilé, parce que Davout d'Auerstaedt, grand chancelier de la Légion d'honneur, lui avait enlevé son ruban rouge pour le remplacer par une rosette. − Tu ne pouvais pas me la demander, vieux? Je n'avais pas demandé le ruban non plus, répondit légèrement mon père.
Colette,Sido, 1929, p. 101. ♦ Ruban violet. Insigne de chevalier dans l'ordre des Palmes académiques; p. méton., les Palmes académiques. Obtenir le ruban violet. On entend à Paris des gens ornés de gants et peut-être de rubans violets dire: sette sous, cinque francs: le malheureux sait l'orthographe, hélas! et il le prouve (Gourmont,Esthét. lang. fr., 1899, p. 124). b) Le ruban bleu − [Dans une compétition] ♦ HIPP. Prix du Derby d'Epsom. Disputer le ruban bleu (Lar. 20e). ♦ MAR. V. bleu I C. − P. anal. Symbole d'une performance, d'une supériorité dans un domaine déterminé; p. méton., cette supériorité; record de quelque chose. Des millions de logements neufs ont été construits, des villes nouvelles sont nées, la France détient le « ruban bleu » de la construction (L'Express, 24 mai 1976, p. 26, col. 2). 3. ARTS DÉCOR. Motif décoratif en relief, figurant un ruban. Un baromètre ovale, à bordure noire, enjolivé par des rubans de bois doré (Balzac,E. Grandet, 1834, p. 28).Des décors [de porcelaine] uniquement composés de motifs ornementaux comme les croisillons, les rubans pliés, les lambrequins (G. Fontaine,Céram. fr., 1965, p. 110). − En partic. Ornement d'une moulure, représentant un ruban enroulé autour d'une baguette. (Dict. xixeet xxes.). B. − P. anal. 1. a) Mince fragment de bois, dont la forme rappelle celle d'un ruban. Un monceau de ces menus copeaux et de ces rubans de bois que les menuisiers enlèvent de leurs planches en rabotant (Sand,Compagn. Tour de Fr., 1840, p. 42).V. ételle ex. de Erckmann-Chatrian. b) Bande mince de matière souple, servant à divers usages; objet fabriqué, de forme allongée et étroite. Ruban adhésif, gradué, isolant; ruban métallique; ruban d'acier, de papier. Un rouleau de ruban caoutchouté collant et un ruban de chatterton, pour isoler les joints et branchements (Lar. mén.1926, p. 520).Les microphones (...) comportent deux éléments: un organe de commande, membrane ou ruban mobile (...) et un circuit électrique (Matras,Radiodiff. et télév., 1958, p. 18). ♦ Ruban (d'une machine à écrire, d'une imprimante). Bande de papier carbone ou de tissu imprégné d'encre grasse, servant à l'impression sur le papier des caractères frappés. Changer de ruban. Un ruban encreur qui imprime le texte sur les feuilles de papier blanc (Pethoud,Organ. industr. et comm., 1931, p. 189). − Spécialement ♦ ARMUR. Spirale d'acier, qui forme le canon d'une arme à feu. (Dict. xixeet xxe). ♦ AUDIO-VISUEL, INFORMAT. Ruban magnétique. Synon. de bande magnétique (v. bande1).L'enregistrement sur ruban magnétique de toutes les informations (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 583).Ruban perforé. Synon. de bande perforée (v. bande1).Quand nous parlons de ruban perforé, nous pensons généralement au ruban étroit, avec une ligne de trous d'entraînement (...). Ce ruban − destiné aux ordinateurs, télétypes, machines à écrire automatiques, etc. − peut contenir de grandes quantités de textes divers (Jolley,Trait. inform., 1968, p. 202).V. bande1B 2 b ex. de Électron. 1959. ♦ MÉCAN. Lame élastique qui vient s'appliquer par serrage contre le tambour d'un frein. Quand les wagonnets descendent par leur propre poids, le câble passe sur une poulie fixée solidement au sommet du plan sur l'arbre de laquelle est monté un frein à ruban normalement serré (Bresson,Manuel prospect., 1923, p. 338). ♦ MÉTALL. Fer feuillard plus mince que le feuillard ordinaire, que l'on obtient au laminoir. Généralement, le ruban laminé à chaud, en acier ordinaire, ou en acier de qualité, est destiné à être ensuite laminé à froid (Encyclop. sc. et techn., Paris, Lidis, t. 5, 1975, p. 17). ♦ MÉTROLOGIE Instrument de mesure des arpenteurs, en forme de ruban métallique portant des divisions en mètres, qui s'enroule après usage dans une boîte circulaire. (Dict. xxes.). Synon. roulette.Ruban (centrimétrique, métrique), centimètre, mètre à ruban, ou en appos., mètre ruban. Ruban gradué en centimètres, en toile ou en matière plastique, qui sert à prendre des mesures. Pour effectuer cette mensuration [du périmètre thoracique], on se sert, en général d'un ruban centimétrique gradué de un à cent-cinquante centimètres (Baratoux,La Voix, 1912, p. 36).Un mètre à ruban épousant le contour de l'arbre (Ambroise,Monteur mécan., 1949, p. 95). ♦ PÂTISS. Mince bande de pâte. (Dict. xixeet xxes.). ♦ [À propos d'un mélange de jaunes d'œufs ou d'œufs entiers et de sucre semoule, longuement travaillé] Couler en ruban (rare), faire/ former le ruban. Présenter une consistance lisse et homogène. Fouettez 125 g de sucre et 4 œufs (...) jusqu'à ce que le mélange fasse le ruban (Les Carnets de cuis., Paris, Hachette Pratique, 1978, n o10, p. 36).Mélanger les jaunes et le sucre avec une cuiller en bois jusqu'à ce que le mélange (...) coule en ruban (A. Bouquet,La Cuis. simple en 1000 recettes et conseils, Paris, UNIDE, s.d., p. 235). ♦ TECHNOL. Scie à ruban. ,,Scie mécanique dont la lame est un ruban d'acier fermé sur lui-même, passant sur deux poulies dont l'une est motrice`` (Dew. Mes. 1973). La scie à ruban est employée pour faire des sections minces et longues dans les pièces métalliques et dans les pièces de bois (Gorgeu,Machines-outils, 1928, pp. 129-130). ♦ TEXT. Ruban (de fil). Assemblage de fibres textiles, juxtaposées, sans aucune torsion, qui constitue le mode de présentation des matières textiles devant être filées. Le filage [des fibres de chanvre] consiste dans la torsion des rubans de gauche à droite (Galopin,Lang. mar., 1925, p. 25). c) Élément végétal ou structure organique qui affecte la forme d'un ruban. Je vis Célie (...) frissonnante comme l'algue dont les longs rubans s'enlaçaient à ses pieds (Sand,MlleMerquem, 1868, p. 217).La présence d'une carapace immobile chez les Tortues ne laisse plus subsister (...) qu'un ruban musculaire reliant les apophyses transverses des vertèbres (E. Perrier,Zool., t. 4, 1928, p. 3020). − Spécialement ♦ ANAT., vieilli. Rubans de la glotte, rubans glottiques ou rubans vocaux. Synon. cordes vocales (v. corde).Rubans de la glotte ou rubans vocaux. M. Cuvier a désigné sous ce nom les cordes vocales (Nysten1824).La partie mobile des cordes vocales ou rubans vocaux (Baratoux,La Voix, 1912, p. 6).V. glottique ex. de Arts et litt., dér. s.v. glotte. ♦ BOT. Ruban d'eau. Synon. de rubanier (v. ce mot B).Les longues herbes appelées rubans d'eau (...) tremblent incessamment dans ses petits remous silencieux [du fossé] (Sand,Valentine, 1832, p. 18). 2. a) Bande allongée qui se forme et se détache sur un fond de couleur différente ou dans l'espace. Ruban de fumée. Un coup de pistolet retentit. Un ruban de feu courut sur la poussière (About,Roi mont., 1857, p. 264).Une mer couleur thé, où traînent de longs rubans jaunâtres de vieille écume (Gide,Voy. Congo, 1927, p. 686). b) Bande mince et longue tracée sur quelque chose; marque naturelle de forme allongée et étroite. [Les molaires de l'éléphant] présentent, quand elles sont usées, des losanges dans l'éléphant d'Afrique, des rubans étroits et festonnés dans l'éléphant des Indes (Cuvier,Anat. comp., t. 3, 1805, p. 165).Plus d'un cheval avait aussi sur les flancs de ces grands rubans rouges qui montrent où la balle est entrée (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 172). 3. a) Surface de forme allongée et étroite. Ruban de gazon, de verdure; ruban d'une rivière. La façade [de la maison], devant laquelle se déroulait le ruban d'une terrasse sablée, était ombrée par une galerie de bois (Balzac,Enf. maudit, 1836, p. 408).Au-dessus d'elle, entre les maisons rapprochées, s'étendait un ruban de ciel pâle, envahi par le clair de lune (Louÿs,Aphrodite, 1896, p. 149). b) En partic. − Ruban (de route, d'avenue, etc.). Route, (avenue, etc.) envisagée sous son aspect rectiligne. Elle regardait à gauche, enfilant un long ruban d'avenue, s'arrêtant, presque en face d'elle, à la masse blanche de l'hôpital de Lariboisière (Zola,Assommoir, 1877, p. 376).Un ruban de route carrossable existait de Saint-Nicolas à Randa qui n'était relié à aucun réseau routier plus considérable (Bruhnes,Géogr. hum., 1942, p. 58).V. long I A 2 a ex. de Rolland. ♦ P. méton. Trajet. J'ai encore un long ruban de route (Bernanos,Soleil Satan, 1926, p. 176). − Arg. de la prostitution. Le ruban. Le trottoir. Dès qu'ils ont deux nanas sur le ruban, les jeunots[,] vous les voyez briller (Pt Simonin ill., 1957, p. 63). c) GÉOM. Ruban de Möbius. Surface à un seul côté, non orientable. Möbius qui signale le premier exemple de surface unilatère (ruban de Möbius, 1858) (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 47).V. orientable dér. s.v. orienter ex. de Bouvier-George Math. 1979. 4. Littér. Suite de personnes ou d'animaux, série d'éléments disposés en ligne. Ruban de fourmis. Un ruban de danseurs serpentait lentement au son d'une musique effroyable (About,Roi mont., 1857, p. 117).Les courbes de la Meuse étincellent au soleil couchant et dessinent sur la plaine pâle un chemin de feu, analogue au ruban des convois automobiles dans la nuit (Bordeaux,Fort de Vaux, 1916, p. 110). REM. Rubanté, -ée, adj.,vieilli. Garni de rubans. Synon. enrubanné (usuel), rubané (vieilli).Les peignoirs sans manches, rattachés aux épaules par des pattes rubantées de soie tendre (Huysmans,Marthe, 1876, p. 35). Prononc. et Orth.: [ʀybɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1260 « bande de tissu, plus ou moins étroite, servant de lien, d'ornement, d'attache » (Étienne Boileau, Métiers, 78 ds T.-L.); b) 1802 « marque d'une décoration qui se porte à la boutonnière gauche » (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, p. 68); 2. 1690 beaux-arts (Fur.); 3. a) 1730 « bande mince et assez étroite d'une matière flexible » ici en partic. « cire réduite en petits filets plats » (Savary d'apr. FEW t. 16, p. 722a); b) 1954 ruban magnétique (Ruyer, Cybern., p. 41); 4. 1690 beaux-arts (Fur.); 5. 1765 ruban d'eau (Encyclop.). Issu par labialisation du -i- devant la labiale -b-, de riban « id. » att. à partir de 1394 (ds Gdf. Compl.), mais prob. plus anc. et lui-même issu du m. néerl. ringband « collier » (v. FEW t. 16, pp. 721b-723a). Fréq. abs. littér.: 1 795. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 247, b) 3 699; xxes.: a) 2 770, b) 2 067. Bbg. Brüch (J.). Frz. « galée »... Z. rom. Philol. 1936, t. 56, pp. 634-636. _ Gall. 1955, p. 157 (s.v. ruban bleu). − Griffin (D.). Language. 1955, t. 31, pp. 463-464. − Orr (J). Words and sounds in Engl. and Fr. Oxford, 1953, pp. 244-252. − Quem. DDL t. 4, 33. − Sain. 1972 [1907] p. 101. − Thurneysen 1884, pp. 110-111. |