| ROULOTTE, subst. fém. A. − 1. Voiture ou remorque aménagée en logement, tirée par un cheval ou par une automobile, utilisée par les nomades et les forains (et à date plus récente comme habitation occasionnelle pour passer des vacances). Le grand Meaulnes se précipita vers la roulotte, escalada le marchepied, frappa à la porte, mais tout était clos déjà. Déjà sans doute, dans la voiture à rideaux (...), tout le monde était rentré et commençait à dormir (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 175).Sur le chemin du bord du fleuve lentement Un ours un singe un chien menés par des tziganes Suivaient une roulotte traînée par un âne (Apoll., Alcools, 1913, p. 112). ♦ Loc. Femme de roulotte. Bohémienne. Belle vieille encore, figure de sorcière aux traits nets, ou de vieille femme de roulotte, avec ses cheveux blancs ondulés (Renard, Journal, 1909, p. 1241). ♦ En compos. Il souhaite aller à Prague avec elle (...), ils entreprendront ce parcours dans un petit camion-roulotte, un motor home, mais ils ne parviendront jamais à destination (Le Nouvel Observateur, 26 avr. 1976, p. 87, col. 1). − [Comme symb. de vie libre, sans contrainte, parfois péj.] Scarron, Goethe et Gautier ont tous trois été séduits plus ou moins par cette image de liberté, d'aventure, de vie à la fois pittoresque, sensuelle, esthétique, que réalisent, pour l'imagination des sédentaires, les comédiens en voyage. Nous avons tous rêvé roulotte dans notre enfance (Thibaudet, Réflex. litt., 1936, p. 238).La propreté est la base de la vie en collectivité (...). Conservez donc votre dignité, votre attitude civique. Montrez que vous n'êtes pas sortis d'une roulotte de tziganes et conservez la tradition de vos foyers (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 110). − P. plaisant. ou péj. Habitation, maison. Je ne me montre qu'aux heures de la parade ou du numéro. Je m'en excuse auprès de ceux qui habitent ma roulotte et qui en déduisent que je leur réserve le pire, car ils n'assistent qu'à mes misères (Cocteau, Diff. d'être, 1947, p. 174).Je connais sa famille. Une mère bécasse, une sœur aînée peu recommandable, un père qui n'a le temps que de gagner de l'argent pour faire marcher la roulotte. Pas de traditions, pas de culture (Montherl., Ville dont prince, 1951, I, 3, p. 871). 2. Voiture aménagée pour la vente ou d'autres usages. Elle aperçut la roulotte familière du marchand de tabac, un vieux de la campagne, de qui Azarius achetait un produit fort et amer (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 302). − En compos. Dans sa roulotte-bureau, posée sur l'esplanade qui s'étend devant le Fort carré d'Antibes (...) le grisonnant Enis Togni brandit, toujours furieux, le télex du ministère qui lui a valu, les 3 et 4 juillet, de rester bloqué à la frontière franco-allemande (Le Nouvel Observateur, 19 juill. 1980, p. 46, col. 1). B. − Arg., pop. Voiture de toute espèce, charrette. − Vois-tu ce vieux? − Quel vieux? − Là, dans la première roulotte de la noce, de notre côté (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 635).C'est ça qui est amusant, [un déménagement en juillet], la roulotte à bras sautant sur les pavés qui flambent (Richepin, Pavé, 1883, p. 63).C'est tout d'mêm' chouette [en chemin de fer] d's'embarquer Dans les roulottes d'premièr' classe (Bruant1901, p. 395). ♦ Roulotte à trèpe (« foule, public »). Omnibus (Ds France 1907). Roulotte du grand trimar. Wagon de chemin de fer (Ds France 1907). − Loc. Vol à la roulotte. Vol dans les voitures en stationnement. Synon. roulottage.Depuis le vol à l'étalage, à la roulotte, au flair, à l'esbroufe, au poivre, au rendez-moi, jusqu'aux entreprises plus périlleuses (Carco, Nostalgie Paris, 1941, p. 98). REM. 1. Roulottage, subst. masc.,arg. Vol dans les voitures. (Ds France 1907, St-Riquier-Delp. 1975). Synon. vol à la roulotte (supra). 2. Roulotter, verbe trans.Voler (dans une voiture); voler (une voiture). Incarcéré à la prison de Bois-d'Arcy pour avoir tué un Nord-Africain qui lui « roulottait » sa voiture (L'Événement du Jeudi, 15-21 janv. 1987, p. 52). Prononc. et Orth.: [ʀulɔt]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. [1625 sens indéterminé (Pièces justificatives ds B. doc. Archéol. Lorraine, VII, 46: A Genin Brugeres, chirurgien, une roullote de chesne)]; 1. 1800 arg. « charrue » (P. Leclair, Hist. brig. et assass. Orgères, p. 130); 2. a) 1821 « voiture attelée » (Ansiaume, Arg. bagne Brest, f o14 r o, § 405); b) 1821 travailler à la roulotte « voler sur les voitures » (Id., ibid., f o15 v o, § 472); 1844 vol à la roulotte (Dict. arg. « Myst. Paris », p. 105); 3. a) 1878 « grande voiture où logent les forains, les nomades » (Rigaud, Dict. jargon paris., p. 302); b) 1898 « voiture automobile ou remorque aménagée en logement » une roulotte automobile (L. Baudry de Saunier, in Le Monde mod., numéro 46, oct., p. 573 ds Quem. DDL t. 21). Dér. de l'a. fr. ruele, roele, v. rouelle; suff. -otte*. Fréq. abs. littér.: 161. DÉR. Roulottier, -ière, subst.a) Vx. Charretier. (Ds Esn. 1966). b) Gén. péj. Celui, celle qui vit dans une roulotte; nomade, bohémien. La route de Corbeil, un soir d'automne. Une roulotte qui passe (...) Le pain qui manque (...) Et voilà qu'à l'entrée de Soisy, le bel orphelinat (...) donne à ces roulottiers l'idée de laisser là un de leur brame-la-faim, la plus jeune (A. Daudet, Pte paroisse, 1895, p. 289).J'ai l'air d'une vieille roulottière (Colette, Chatte, 1933, p. 112).c) Arg. Spécialiste du vol dans les voitures; voleur de voiture. − L'homme qui t'a assommé était peut-être un simple voleur de voiture, un... un... comment appelles-tu ces gens-là, déjà? − Des roulottiers, m'man (San-Antonio, Des Gueules d'enterrement, 1957, p. 52 ds Cellard-Rey 1980).Pour un amateur, les deux armes sont fabuleuses. Elles ont été volées à Besançon par un « roulottier », dans la voiture d'un employé municipal, près du stand de tir, où s'entraînaient d'ailleurs de nombreux policiers (Libération, 5 sept. 1984, p. 11).− [ʀulɔtje], fém. [-jε:ʀ]. − 1reattest. a) 1821 « charretier » (Ansiaume ds Esn. 1966), cf. 1847 (Dict. arg., p. 134), b) 1835 « voleur à la roulotte » (Raspail ds Esn. 1966), cf. 1836 (Vidocq, Voleurs, t. 2, p. 71), c) 1895 « celui qui habite une roulotte, nomade » (A. Daudet, loc. cit.); de roulotte, suff. -ier*. BBG. − Sain. Arg. 1972 [1907], p. 79, 285, 293. − Quem. DDL t. 33. |