| ROGOMME, subst. masc. A. − Vieilli, pop. Liqueur forte, eau-de-vie. Elle-même, quand elle sifflait son verre de rogome sur le comptoir, prenait des airs de drame, se jetait ça dans le plomb en souhaitant que ça la fît crever (Zola, Assommoir, 1877, p. 736).Ils portaient des sabots et parlaient patois, d'une grosse voix roulante de paysan; mais un ou deux avaient un ton plus rauque, brûlé par le rogomme (Pourrat, Gaspard, 1922, p. 39). B. − Fam. Voix de rogomme. Voix éraillée, enrouée; voix d'ivrogne. Un gros homme très commun, à face de bourreau, (...) vint à son tour serrer la main d'Amédée, et, d'une voix enrouée, d'une voix de rogomme (...) il réclama le texte du poème qu'on venait de déclamer (Coppée, Toute une jeun., 1890, p. 182).Il était aphone en plus, il avait la voix de rogomme à force de hurler ses conneries (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 234). − Empl. adj., rare. [En parlant d'une pers.] Qui a la voix éraillée, rauque. C'est clair, comme ma voix − pas ce soir par exemple − je suis rogomme comme tout (Huysmans, Marthe, 1876, p. 19). Prononc. et Orth.: [ʀ
ɔgɔm]. Att. ds Ac. dep. 1835. DG: ,,vieilli, rogum``; Lar. Lang. fr., Rob. 1985: rogomme, rogome (1 m aussi ds Zola, supra). Étymol. et Hist. 1. Subst. 1700 rogum « liqueur alcoolique quelconque » (Mmede Maintenon, Lettre au card. de Noailles, mars ds Littré); 1735 rôgomme (Mercure de France, déc., II, p. 2814 ds Trév. 1752); 2. a) 1823 voix de rogomme (Boiste); b) adj. 1861 rogomme « rauque; rude, revêche » (Daudet, La Double conversion ds Les Amoureuses, éd. 1873, p. 90); 1876 « rauque » (Huysmans, loc. cit.). Mot d'étymol. inc. (FEW t. 21, p. 498a) dont la forme rogum suggère une orig. exotique. D'apr. Sain. Sources t. 2, p. 331 il serait issu de la rencontre de rhum et de gomme « sirop de sucre ». Fréq. abs. littér.: 23. DÉR. 1. Rogommeux, -euse, adj.,vieilli, pop. [En parlant d'une voix, de ses inflexions] Rauque, enroué, éraillé par l'abus d'alcool. Voix rogommeuse. La grande dame (...) dont la voix, quoique déguisée, apportait à son oreille des sons rogommeux (Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 572).− [ʀ
ɔgɔmø], fém. [-ø:z]. − 1reattest. 1847 id.; de rogomme, suff. -eux*. 2. Rogom(m)iste,(Rogomiste, Rogommiste) subst. masc.,vieilli, pop. Marchand d'eaux-de-vie et de liqueurs; celui qui tient un débit de boissons. Vous allez peut-être croire, vous qui êtes habitués aux jeux de mots, que cette enseigne [Aux Bas Bretons] est celle d'un marchand de bas; point du tout: c'est celle d'un rogommiste, débitant de tabac (Balzac,
Œuvres div., t. 1, 1826, p. 154).− [ʀ
ɔgɔmist]. Rob.: -mm-; Lar. Lang. fr.: -mm- ou -m-. − 1reattest. 1788 rogomiste (Mercier, Tabl. de Paris, t. 11, p. 338); de rogomme, suff. -iste*. BBG. − Gohin 1903, p. 270. − Quem. DDL t. 11 (s.v. rogomiste). − Spitzer (L.). « Rum »-« Rogomme ». Mod. Lang. Notes 1944, t. 59, pp. 243-246. |