| ROCAILLEUX, -EUSE, adj. A. − Qui est couvert de rocaille. Synon. caillouteux, pierreux.Je monte à petits pas le sentier rocailleux de Milly (Lamart., Confid., 1849, p. 13).L'étrange séduction de ces paysages rocailleux où l'arbre est pourchassé comme un hérétique (T'Serstevens, Itinér. esp., 1963, p. 236). − P. anal. Qui présente une surface irrégulière, bosselée. Le trajet de la gare de Lyon au Point-du-jour, dans un vieux taxi, sur le pavé rocailleux des quais, l'avait rompu (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 774). − P. métaph. [Son père] m'embrassa plusieurs fois en silence. À mon habitude j'avais serré son corps dans mes deux bras et je le tenais contre moi. Il était dur, rocailleux de tous les côtés (...). Soudain je sentis qu'il flottait entre mes bras et je compris que ce que je touchais, c'était ses os (Giono, Eau vive, 1943, p. 203). B. − Au fig. 1. [En parlant d'un style, d'un texte] Qui n'est pas harmonieux; qui est dur et heurté. [Les lettres de Piron] sont rudes, obscures, d'une prose rocailleuse et en quelque sorte capricante, hérissées de dictons qui demanderaient des commentaires à chaque ligne (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 7, 1867, p. 456).Au lieu d'un très beau vers, une phrase à la fois rocailleuse et banale (Green, Journal, 1949, p. 233). − Rare, vieilli, empl. subst. Chateaubriand disait (...) « J'ai toujours su me garder du rocailleux (...) ». M. de Goncourt aurait-il tout à fait tort de blâmer à son tour le rocailleux de quelques jeunes écrivains? (A. France, Vie littér., 1891, p. 284). 2. [En parlant d'une voix, d'un son ou d'un ensemble de sons] Qui est rauque, dur, saccadé. Nous sommes tout étonnés de sa voix, sa voix de ville, rude, rocailleuse, populaire et commune auprès de sa voix de théâtre si fine, musicale, caressante, spirituelle (Goncourt, Journal, 1851, p. 45).Du haut des grandes orgues, au-dessus de la porte d'entrée, un cri rocailleux, mais vibrant, explosant en une flamme, ébranlait l'église: Magnificat! (Huysmans, Foules Lourdes, 1906, p. 114). REM. Rocailleusement, adv.,rare. De manière heurtée, saccadée. René Ghil, qui prétendit mettre, ou plutôt instrumenter, en vers rocailleusement scolaires, l'évolution du monde et de l'humanité (Thibaudet, Hist. litt. fr., 1936, p. 488). Prononc. et Orth.: [ʀ
ɔkajø], [-kɑ-], fém. [-ø:z]. Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, Warn. 1968, Lar. Lang. fr.: [-ɑ-]. Martinet-Walter 1973: [-a-], [-ɑ-] (13, 4). Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1. a) 1692 « rugueux (en parlant de la peau) » (Dufresny, Opéra de campagne, III, 4 ds DG); b) 1767 « plein de petits cailloux » (Diderot, Salon, Vernet, éd. R. Desné, p. 111); 2. fig. 1788 « dur, heurté (en parlant du style) » (Fér. Crit.). Dér. de rocaille*; suff. -eux*. Fréq. abs. littér.: 100. |