| REPLI, subst. masc. I. A. − [Corresp. à pli I A] Pli double; bord d'une matière souple (étoffe, papier...) rabattu une ou deux fois. Synon. (pour une étoffe) ourlet, rempli, revers.Il avait tiré de sa poche une lanterne (...) dont les replis en toile s'allongeaient comme des feuilles de soufflet qui s'écartent (Nerval, Voy. Orient, t. 3, 1851, p. 32).Ce préambule mène tout droit à la surprise qui m'attendait dans les replis de ta lettre (Valéry, Corresp. [avec G. Fourment], 1892, p. 126). − En partic., vieilli. Pli effectué au bas des lettres patentes, afin d'écrire au revers ou d'y suspendre un sceau. (Dict. xixeet xxes.). B. − [Corresp. à pli I B] 1. Ondulation, mouvement sinueux d'un tissu flottant ou trop ample. Repli d'un drap, d'une écharpe, d'une jupe, d'un rideau, d'un voile. J'arrangeai sa robe afin qu'elle coulât doucement en longs replis jusqu'à terre (Krüdener, Valérie, 1803, p. 156).P. métaph. [Des] fragments de coquillage apportés par les replis mourants des vagues (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p. 223). 2. P. anal. (d'aspect). Mouvement sinueux, enroulement. Synon. sinuosité.Ce monstrueux reptile, dont les replis étouffent les chèvres, les gazelles, les génisses, et jusqu'aux taureaux les plus vigoureux (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 342).Quelles pensées n'entretient pas le voyageur (...) avant que sa fuite ne l'emporte plus loin, dans le repli d'une lente rivière (Claudel, Art poét., 1907, p. 208). − En partic. Partie d'une chose, d'un ensemble formant un bourrelet ou un creux, une dépression. a) [À propos d'un sol, d'un terrain] Pas un arbre, pas une masure, pas un repli du sol, derrière lesquels nous puissions abriter la voiture pour passer la nuit (T'Serstevens, Itinér. esp., 1933, p. 73). b) ANAT. Repli adipeux, cardiaque, coronaire, cutané. Dans les espèces qui n'ont point de paupières, comme la plupart des poissons, la peau passe directement au devant de l'œil, sans former aucun repli (Cuvier, Anat. comp., t. 2, 1805, p. 393). 3. Au fig. Partie la plus intime, la plus dissimulée. a) Rare. [À propos d'une réalité concr.] Synon. recoin.Elle possède au plus haut degré cette science de l'existence (...) qui bannit la poussière, cloue des tapis depuis la première marche jusque dans les derniers replis de la maison (Balzac, Lys, 1836, p. 231). b) [À propos d'une réalité abstr., gén. relative à l'âme, à l'esprit humain] Il questionne adroitement sa jeune pénitente, il sonde au fond de son cœur, pénètre dans chaque repli (Cottin, Mathilde, t. 1, 1805, p. 174).À ce tutoiement imprévu, M. Baslèvre sursauta, puis reprenant aussitôt l'impassibilité directoriale, parut fouiller dans les replis les plus cachés de sa mémoire (Estaunié, Ascension M. Baslèvre, 1919, p. 11). II. A. − Action de se replier sur soi-même. 1. [À propos d'une chose] Repli d'un tissu. Le long paysage de la crucifixion sur laquelle repose l'ensemble est un linteau. Au-dessus, Dieu le Père et le Christ, exactement symétriques et même superposables par repli (Lhote, Peint. d'abord, 1942, p. 54). 2. Au fig. [À propos d'une pers.] [Elle était] redevenue assez paisible et tendre, et m'accueillant du regard, sauf de plus fréquents replis de méfiance et de tristesse (Sainte-Beuve, Volupté, t. 2, 1834, p. 127).On préférait à Bergotte, dont les plus jolies phrases avaient exigé en réalité un bien plus profond repli sur soi-même, des écrivains qui semblaient plus profonds, simplement parce qu'ils écrivaient moins bien (Proust, Temps retr., 1922, p. 893). − PSYCHOL. Repli (sur soi). ,,Phénomène caractéristique de l'autisme combinant un désinvestissement du monde et une réduction égocentrique des intérêts et des affects`` (Pel. Psych. 1976). La « dissonance intime » (...) du taciturne, du distrait, du sauvage, du rêveur (...) n'outrepasse pas une simple attitude de repli (Mounier, Traité caract., 1946, p. 480). B. − TECHN. MILIT. Retrait volontaire d'une troupe, d'un corps d'armée sur des positions moins avancées et préalablement définies. Repli des avant-postes; manœuvre, ordre, position de repli. La facilité même avec laquelle s'effectue le repli de nos troupes (...) témoigne que nous pourrions tenir toute la nuit (Foch, Mém., t. 1, 1929, p. 60): − « Vous entendez, vous autres? Il dit qu'on recule pas, lui! » − « Non! C'est un repli stratégique, qu'on appelle. Pour mieux préparer la contre-offensive... un coup épatant... On va les prendre en pincette ».
Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 741. − P. anal. Dans quelque ordre que ce fût, le brillant écrivain n'était jamais en peine de positions de repli (Montherl., Démon bien, 1937, p. 1306).Devrons-nous, par un « repli stratégique » tourner le dos à tout ce que l'art français a produit de délicat, de nuancé, de subtil? (Gide, Journal, 1940, p. 27). Prononc. et Orth.: [ʀ
əpli]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1532 repliz (d'une robe) plur. (Rabelais, Pantagruel, chap. 14, éd. V. L. Saulnier, p. 123); 2. 1539 replis plur. « ondulations des veines, des intestins, d'un serpent » (Est.); 3. 1559 « pli rentrant, dans lequel quelque chose peut être contenu » (Amyot, Vies, Timoleon, f o188 v o); 4. 1564 « sinuosité d'une rivière, d'un chemin » (Thierry); 5. ca 1590 replis plur. « partie la plus cachée, la plus secrète d'une âme » (Montaigne, Essais, II, 6, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, t. 1, p. 378); 6. ca 1916 repli allemand (Lar. univ.). Déverbal de replier*. Cf. ca 1220 reploi « courbure » (Barlaam et Josaphat, 6607 ds T.-L.), 1471 « pli fait au bas des lettres patentes, etc., afin d'écrire sur le revers » (doc. ds Gdf. Compl.), fin xves. « repli » (Jean Molinet, Chroniques, éd. G. Doutrepont et O. Jodogne, t. 2, p. 457), déverbal de reployer*. Fréq. abs. littér.: 766. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 534, b) 436; xxes.: a) 586, b) 1 361. |