| REMONTER, verbe I. − Empl. intrans. A. − [Le suj. désigne un être vivant] 1. [Remonter s'entend dans une accept. spatiale] a) Monter à nouveau; se déplacer à nouveau dans un mouvement ascendant. L'oiseau qui descend puis remonte. Le poisson qui remonte à la surface dès que cet ingrédient [la graine du Levant] est jeté (Dussort, Preuves exist.,1927, dép. par Esnault, 1938, p. 118). ♦ P. métaph. M. Thibault semblait s'être assoupi. Avant l'arrivée de l'abbé Vécard, il avait fait, ainsi, plusieurs plongées dans l'inconscient. Mais ces subites absences étaient brèves; il remontait à la surface, d'un seul coup, retrouvait son épouvante et recommençait, avec des forces neuves, à se démener (Martin du G., Thib.,Mort père, 1929, p. 1255). − [En parlant de l'Ascension du Christ, des âmes des morts] Remonter au ciel. Et le siècle futur, s'asseyant sur la pierre De notre siècle, à nous, et la voyant entière, Joyeux, ne dira pas: Il est ressuscité, Et dans sa gloire au ciel comme Christ remonté (Gautier, Poés.,1872, p. 215).Il vaudrait mieux qu'il remontât au ciel [l'enfant hydrocéphale] (Vallès, J. Vingtras,Bachel., 1881, p. 309). b) Se rendre à nouveau dans un endroit situé plus haut que là où l'on se trouve. Remonter dans son appartement, dans sa chambre, au grenier; remonter chez soi. Au bout de deux heures, comme le soleil ne me réchauffait plus, je remontai sur la terrasse, m'assis dans un fauteuil, ouvris un journal (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 174). − Remonter + inf. (avec ou sans prép.).Elle remonta travailler et la journée s'écoula vite (Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 37).Je vais remonter chercher ta casquette, c'est une pièce à conviction (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 229). c) S'élever à nouveau − pour se trouver plus haut (au propre et au fig.). Remonte aux vrais regards! Tire-toi de tes ombres, Et comme du nageur, dans le plein de la mer, Le talon tout-puissant l'expulse des eaux sombres, Toi, frappe au fond de l'être! Interpelle ta chair (Valéry, Alb. vers anc.,1900, p. 91).Sous l'apparente culture, faite uniquement de méditations sur quelques idées virulentes trouvées au hasard des livres et des conversations, le Chinois inculte, le Chinois qui ne sait pas lire les caractères, remonte et commence à dominer celui qui lit les livres français et anglais (Malraux, Conquér.,1928, p. 103). − pour reprendre une place en vue. Remonter sur les planches, sur le trône. M. l'abbé Le Cloud voulut bien remonter en chaire pour dire un mot d'exhortation (Stendhal, Lamiel,1842, p. 31).En remontant à la tribune pour répondre ce 19 juin, Jaurès déclare qu'il est « tout hérissé des flèches que son contradicteur lui a décochées » (Barrès, Cahiers,t. 5, 1906, p. 36). d) HORTIC. Pousser de nouveau après une floraison normale. Donnez de l'air aux racines de vos asperges pendant l'hiver, elles cesseront de remonter (Gressent, Potager mod.,1863, p. 637). e) Se déplacer à nouveau pour se retrouver à un endroit stratégique, à une place décisive pour l'action engagée. Remonter en piste; remonter en ligne, au front. Absol. Ça faisait un bruit du côté de Verdun! C'était noir comme du café avec des tressauts de feu comme une charbonnière qui s'enflamme. Et on disait on va remonter (Giono, Gd troupeau,1931, p. 97). f) [En parlant de provinciaux se rendant notamment dans la capitale] Aller de nouveau du Sud vers le Nord. Remonter à Paris. Comme je ne suis pas « remonté » à Paris depuis que je me tiens prisonnier volontaire dans mon taudis d'Aix-en-Provence et m'adonne à mes écritures, je ne sais pas comment ni de quoi Chadenat est mort (Cendrars, Bourlinguer,1948p. 330). g) Prendre place à nouveau sur un animal ou dans un véhicule. Remonter en auto. Je remontai dans ma voiture avec Hyacinthe (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 243).Après un repos, on est remonté à cheval, quelques semaines plus tard, et on est reparti vers le Nord (Céline, Voyage,1932, p. 40). h) Accéder à nouveau à un degré supérieur d'une hiérarchie, à un rang meilleur. Remonter à la classe supérieure, en première division. ♦ Remonter dans l'estime de qqn. Être considéré par quelqu'un de façon plus favorable. Absol.: 1. ... d'Argenson s'indigne que la France baisse, que sa marine se délabre de plus en plus (...). La politique bourgeoise du cardinal de Fleury, à laquelle il adhérait l'année précédente, et dans laquelle il espérait sa part, est rejetée bien loin maintenant: Chauvelin remonte...
Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 14, 1859, p. 254. ♦ Remonter sur la bête (pop.). Rétablir ses affaires, sa fortune, son bonheur (d'apr. Delvau 1883). Ensuite, je me suis cru remonté sur la bête, et, naïf, bravement, j'ai exhumé d'un tas les très vieux projets d'une chose (...) Je ne sais pas te la décrire (Valéry, Lettres à qq.-uns,1945, p. 121). i) Aller à contre-courant, suivre une direction opposée à celle du courant. Remonter le long d'un fleuve. ♦ MAR. Remonter au vent, dans le vent. Naviguer au plus près et particulièrement louvoyer (d'apr. Gruss 1978). Remonter contre le vent. Regarde! cria Jourdan. Il pointait son bras vers les lisières de l'horizon. Là-bas un cheval galopait. Il était nu et sans cavalier. Il disparut en soulevant la poussière de la lande. Alors ils virent arriver un vol d'oies sauvages. Elles remontaient contre le vent (Giono, Que ma joie demeure,1935, p. 369). 2. [Remonter s'entend dans une accept. temp.] Revenir en arrière dans le temps. Remonter aux sources. Plus nous remontons dans le passé, plus elle se réduit à peu de chose. La femme de ces temps reculés n'était pas du tout la faible créature qu'elle est devenue avec les progrès de la moralité (Durkheim, Division trav.,1893, p. 20). − Loc. Remonter au déluge. [En parlant d'une pers. qui raconte qqc.] Remonter aux circonstances les plus lointaines, à des événements souvent trop anciens pour expliquer quelque chose. La plaisanterie qui reproche aux Allemands de commencer tout exposé en remontant au déluge ne doit pas nous cacher qu'il y a là un besoin profond de ne point dissocier arbitrairement les choses organiquement liées (Arts et litt.,1936, p. 48-2). B. − [Le suj. désigne une chose] 1. [Dans une accept. spatiale] a) Au propre et au fig. Monter de nouveau; revenir à la surface. La gloire d'un homme ne remonte pas; elle descend (Chateaubr., Mém.,t. 2, 1848, p. 297).Quand l'eau remue, la vase remonte (Sartre, Diable et Bon Dieu,1951, i, 1ertabl., p. 30). − En partic. [En parlant d'un vêtement] Se relever. Un pantalon qui remonte. Allez, dit-elle, je saurai mourir. Elle s'agenouilla auprès du corps de son amant, en lui baisant les lèvres, et le pressant contre son sein; puis, s'apercevant que sa robe était quelque peu remontée, Giulia se rajusta (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 322). b) Augmenter de nouveau en quantité, en intensité, en valeur. La bourse remonte; la fièvre, le fleuve remonte. − (...) je vais me laisser descendre avec le reflux, comme ça, en attendant que la vague remonte, si elle doit jamais remonter. Elle rougit un peu, hésita, puis le fixant tout à coup: − N'est-ce pas? Elle ne remontera jamais (Bernanos, Joie,1929, p. 695).En temps de dépression économique, il y a évidemment mévente et dévaluation temporaire, mais comme la production est comprimée pendant ce temps, les prix remontent automatiquement dès la période qui suit la « reprise » (Metta, Pierres préc.,1960, p. 115). − P. métaph. Il y a eu un moment, toutefois, où il s'est vu assez en faveur et où son baromètre académique semblait remonter (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 1, 1862, p. 402). c) Suivre à nouveau un mouvement ascendant. M. le comte est très mal (...) On croit qu'il ne passera pas la nuit, la goutte est remontée au cœur (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 310).La manche de son peignoir était brève, flottante, fort large. Mon regard s'engagea involontairement dans cette manche et remonta le long du bras, jusqu'à l'ombre moite et touffue de l'aisselle (Duhamel, Confess. min.,1920, p. 199). − Empl. pronom. Revenir à la bouche avec une impression nauséeuse. − Qu'est-ce que vous avez donc, jeune homme? s'écria la dame couperosée; vous tournez de l'œil comme un lapin dans une cage. − Madame... c'est que j'ai... j'ai... l'eau de vie qui me remonte... j'ai eu tort d'en boire! (Kock, Compagn. Truffe,1861, p. 113). − P. métaph. Le nom de mademoiselle Mars: nous lui dédions cette comédie. Le succès remonte à sa source (Dumas père, Mllede Belle-Isle,1839, post-scriptum, p. 98). 2. [Dans une accept. temp.] Remonter à.Rétablir dans le passé l'origine d'un fait, d'un événement, etc. Elle courut chercher le médecin qui, s'étant rendu avec elle à la maison, constata le décès, qui remontait à quelques heures (A. France, Vie fleur,1922, p. 546): 2. Cette erreur a été certainement plus de mon fait que du tien: elle remonte à l'époque où je pataugeais consciencieusement parmi tes tendances, avec la confiance que donne, seulement au début, l'emploi d'une analyse générale.
Valéry, Corresp.[avec Gide], 1899, p. 360. II. − Empl. trans. A. − [Remonter implique une notion d'élévation] 1. Parcourir de nouveau en s'élevant, regrimper, refaire l'escalade de. J'étais à bout de forces, au point de me résigner au jeûne complet: descendre et remonter mes six étages pour aller chercher du pain et du lait? Jamais, j'aurais mieux aimé mourir là (Frapié, Maternelle,1904, p. 38): 3. Quelle auto? Pas trace d'auto sur le chemin où il ne passe pas quarante charrettes par an. Elle aurait donc attendu sur la route? Et pour remonter la côte, à travers tout le village? Personne ne l'a vue ni entendue, votre auto, mon cher!
Bernanos, Crime,1935, p. 823. − Au fig. Remonter la pente. Améliorer une situation critique; se ressaisir. Synon. fam. reprendre du poil de la bête.Notre tâche est de persévérer dans cette direction, car on ne remonte pas la pente de l'histoire (Béguin, Âme romant.,1939, p. 146). ♦ P. anal. Remonter un concurrent, un score. Arriver à hauteur de l'adversaire et le dépasser. Les Japonais remontent trois balles de set, égalisent, prennent la tête (L'Auto,19 juin 1933, p. 1 ds Grubb Sports 1937, p. 62).Di Paco mène le sprint. Lapébie ne parvient pas à le remonter (L'Auto,6 nov. 1933,p. 2, ds Grubb Sports 1937, p. 62).Empl. pronom. Le handicap ne se remonte pas (Arnoux, Gentilsh. ceinture,1928, p. 197). 2. Aller à contre-courant. a) [Dans une accept. spatiale] Remonter le courant. Dans la Loire, de petites barques allaient et venaient, leur grand filet au bout de la perche et l'homme au fond avec son chapeau de paille; aux environs des villes, des bateaux pleins de grains et de marchandises descendaient ou remontaient le fleuve (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 2, 1870, p. 164).Ah! un caïque à deux paires, très élégant, qui remonte la rivière et qui va passer tout près de moi (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 81). − Au fig. Remonter le courant. Synon. de remonter la pente (supra II A 1).Il fallait au plus vite remonter ce courant et mettre l'armée belge en état de coopérer à la manœuvre contre l'aile droite allemande (Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 466). − THÉÂTRE. Aller de la rampe vers le fond du théâtre. Madame de Vertyré, remontant la scène et allant vers la fenêtre. Un peu couvert (Dumas père, Mari veuve,1832, 4, p. 251). b) [Dans une accept. temp.] Ainsi, c'est la mémoire que tu regrettes? Prends garde: remonte la chaîne de tes souvenirs (Ménard, Rêv. païen,1876, p. 150): 4. Partant de Jésus, il va rechercher Jésus, la race temporelle de Jésus, jusque dans le premier Adam, l'Adam de chair. Il remonte le temps. Il remonte la race temporelle. Il effectue comme une recherche, une requête, une remontée charnelle verticale...
Péguy, V.-M., comte Hugo,1910, p. 737. 3. Porter, mettre de nouveau a) dans un endroit plus élevé, à une plus grande hauteur. Remonter une malle au grenier, remonter un tableau sur un mur. b) à un niveau plus haut; relever. « Hé! l'artiste (...) la lampo qui filo! » Vivement le malheureux s'interrompait pour remonter la lampe, humble, soumis, attentif à éviter la scène qu'il craignait (A. Daudet, Femmes d'artistes,1874, p. 75). ♦ Remonter la mèche (au propre et au fig.). Puis, elle apparaissait entre la muraille et le battant de la porte, la figure endormie et éclairée en plein par une lampe dont elle remontait la mèche avec une épingle (Reider, MlleVallantin,1862, p. 44).Parfois la conversation s'éteint comme une lampe. On remonte la mèche. Quelques idées jettent encore quelque éclat, mais il n'y a décidément plus d'huile (Renard, Journal,1888, p. 16). ♦ Remonter son pantalon. Rajuster à la taille. La vue de Pauline, si belle, si propre, lui fit traverser la chaussée, sans casquette, la blouse déchirée, le pantalon tombant et montrant la chemise, dans le débraillé d'un galopin de sept ans (...). Celle-ci (...) fit mine de rentrer. Alors, il fut très doux; il remonta ses culottes, en homme du monde (Zola, Ventre Paris,1873, p. 815). − Spécialement ♦ COUT. Remonter une jupe, une manche. Diminuer par le haut. (Dict. xxes.). ♦ HORLOG. Remonter une horloge. [Pour les mécanismes à poids] Remonter les poids qui donnent le mouvement. P. anal. [Pour les mécanismes à ressort] Tendre de nouveau le ressort d'un mécanisme. Remonter une pendule, un réveil, une montre. M. Rézeau répondait, souvent de biais. Puis il remontait le gramophone et nous accablait d'aphorismes (H. Bazin, Vipère,1948, p. 111).Empl. pronom. Une jambe de coureur, légère et douce, une jambe de plume et qui se remonte comme un réveil! (Prévert, Paroles,1946, p. 32).Au fig., fam. (Se) remonter la pendule. Synon. de (se) remonter le moral.[Le docteur] soupire (...) On aide un homme à remonter la pente et une fois lâché, crac, Sisyphe redégringole, écrasé par son rocher (...) Alors (...) on « remonte la pendule » à je ne sais combien de bonnes volontés (H. Bazin, Fin asiles,1959, p. 105). 4. Au fig. Rendre plus fort, plus actif; redonner de la vigueur, de l'énergie, du cœur. Remonter le courage, le moral de qqn. Synon. réconforter.Mais sur notre route de Saumur à Nantes quelque chose devait nous remonter le cœur; nous devions apprendre que nos braves représentants de la Montagne ne tremblaient pas (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 2, 1870, p. 167): 5. [Casaubon] se trouve du premier jour, à cette Cour de Henri IV, placé entre l'enclume et le marteau, comme on dit; entre Du Perron qui le convie, qui le presse, qui le travaille, et le ministre Du Moulin qui le chapitre, qui le remonte et le semonce.
Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 14, 1860, p. 397. − Empl. pronom. réfl. ou passif. Se remonter (le moral, et fam., le bourrichon, le coco, etc.); boire qqc. pour se remonter. Il m'arrive encore assez souvent de penser en latin, ou d'appeler le latin à mon aide pour me remonter le coco (L. Daudet, Monde images,1919, p. 172).Nous sommes des enfants. Nous voilà tout remontés, parce qu'on nous annonce que Pétain prend le commandement (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 100). − Spécialement ♦ FAUCONN. Remonter un oiseau. Lui redonner santé et force (d'apr. Baudr. Chasses 1834). ♦
ŒNOL. Remonter un vin. Augmenter son degré d'alcool. (Dict. xixeet xxes.). ♦ PEINT. Remonter une couleur. Lui donner plus d'intensité. Vous feriez après, ce que je ne fais pas, ce que je devrais faire: vous [Flaubert] remonteriez le ton du tableau tout entier et vous sacrifieriez ce qui est trop également dans la lumière (Sand, Corresp.,t. 5, 1866, p. 155). B. − [Remonter implique une notion d'agencement, d'assemblage, de mise au point] Assembler à nouveau les divers éléments d'un objet en vue de son utilisation. Remonter une armoire. Au fig. Tout le mécanisme a été démonté, détourné, remonté à l'envers (Péguy, Notre jeun.,1910, p. 150). − Spécialement ♦ BIJOUT. Remonter un diamant. Qu'est-ce qui lui manque? Si elle veut faire remonter ses diamants, je ne m'y oppose pas; en veut-elle de nouveaux, qu'elle en achète (Fiévée, Dot Suzette,1798, p. 166). ♦ CHAUSS. Remonter des bottes, des chaussures. En changer les semelles et l'empeigne. (Dict. xixeet xxes.). ♦ COUT. Remonter des poignets de chemise, une robe, un chapeau. Remodeler. J'aime mieux supposer (...) que vous êtes occupée à déployer, défriper, remonter toutes les robes et tous les chapeaux que MmeX. vous aura apportés (Mérimée, Lettres ctessede Montijo,t. 1, 1846, p. 180). ♦ THÉÂTRE. Remonter une pièce. La difficulté était de faire remonter la pièce, qui avait perdu une partie de ses acteurs primitifs (Nerval, L. Burckart,1839, p. 311).Je sens très bien le plaisir qu'a dû avoir M. Antoine à remonter ces trois pièces (Léautaud, Théâtre M. Boissard,1926, p. 234). C. − [Remonter implique une notion d'équipement] Pourvoir à nouveau de tout le nécessaire. Je remontai ma maison sur un ton à la fois économique et fastueux (Picard, Avent. E. de Senneville,1813, ii, p. 249).Quand Léon eut remonté sa garde-robe, fait rembourrer ses trois fauteuils (...) il ajourna de semaine en semaine, jusqu'à ce qu'il reçût une seconde lettre maternelle où on le pressait de partir (Flaub., MmeBovary,t. 2, 1857, p. 135).Empl. pronom. En revenant [du Louvre], il entra chez Desforges, commanda une toile de 100, choisit des brosses, se remonta de couleurs (Goncourt, Man. Salomon,1867, p. 92). − Remonter (un cavalier). Lui fournir une nouvelle monture. La proclamation de Démétrius lue sur la place du marché émut les habitants de Kalouga; ils coururent aussitôt à sa rencontre lui porter le pain et le sel et lui remontèrent un équipage (Mérimée, Faux Démétrius,1853, p. 363).Empl. pronom. ou passif. On se remonta en chevaux et harnachements de luxe (Sand, Beaux MM. Bois-Doré,t. 2, 1857, p. 241).Le duc avait toujours été remonté par des chevaux du domaine qui le rejoignaient en lentes et patientes étapes à travers l'Europe (La Varende, Homme aux gants,1943, p. 344). Prononc. et Orth.: [ʀ
əmɔ
̃te], (il) remonte [-mɔ:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Intrans. 1. a) ca 1140 « monter de nouveau à cheval » (Voyage Charlemagne, éd. G. Favati, 249: remuntent li barun); b) 1176-84 « monter de nouveau » (Gautier d'Arras, Eracle, éd. G. Raynaud de Lage, 6039: l'emperere el ciel [= « au plafond orné »] remonte); 2. a) 1176 « aller de nouveau en haut (en parlant de choses) » (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 3277: la force [...] li remonte el chief); 1835 p. métaph. (Lamart., Voy. Orient, t. 1, p. 296: quelques vers [...] remontaient seuls dans ma pensée); b) 1690 « ne pas rester à sa place (vêtement) » (Fur.); c) 1770 fin. « augmenter, s'accroître » (Raynal, Hist. philos., IV, 18 ds Littré, § 4: le change remonta); 1900 remonter dans l'estime de qqn (Colette, Cl. à l'école, p. 76); d) 1842 hortic. roses remontantes (Mozin-Biber); 1870 (Littré, § 6: les rosiers ... remontent); 3. a) 1550 « avoir sa source, tirer son origine » (Ronsard, Bocage ds
Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 2, p. 188: la font remonter [ta beauté] jusqu'aus Dieus); b) 1669 fig. « aller vers l'origine, vers la source » (Bossuet, Oraison funèbre de H. M. de France, p. 528: remonter jusques au principe); c) 1669 « se reporter à une date antérieure » (ibid., p. 526); 1694 remonter jusqu'au déluge (Ac.); 1718 remonter au déluge (Ac.); 4. a) 1559 « aller vers la source, vers l'amont » (Ronsard, Meslanges II ds
Œuvres, t. 10, p. 140: les courses Des eaux remonter à leurs sources); 1636 (Monet: Remonter, aller contremont l'eau); b) 1658 p. métaph. (La Fontaine, Adonis, 152, éd. H. Régnier, t. 6, p. 241: jamais le Temps ne remonte à sa source); 5. 1797 mar. remonter au vent (Voy. La Pérouse, t. 3, p. 74). B. Trans. 1. a) ca 1165 « remettre (quelqu'un) en selle » (Troie, éd. L. Constans, 8621: l'ont remonté); b) 1260-1311 « pourvoir (un cavalier) d'une autre monture » (Auberon, éd. J. Subrenat, 64); 1572 pronom. (Corresp. de Granvelle, t. 4, p. 298 ds Fonds Barbier); c) 1377 p. ext. « pourvoir à nouveau de ce qui est nécessaire » (Gace de La Buigne, Deduis, éd. Å. Blomqvist, 784); 1573 (Larivey, Facétieuses nuits de Straparole, V, 2 ds Gdf. Compl.); 1580 pronom. (Palissy, Discours admirables, éd. A. France, p. 387); 2. a) ca 1190 « mettre à un niveau plus élevé » (Renart, éd. M. Roques, br. VIII, 7855: voz braies sus remonter); b) 1316 « porter de nouveau en haut, plus haut » (Geffroy de Paris, Chron. métrique, éd. A. Diverrès, 7340); 3. a) ca 1200 « parcourir de nouveau vers le haut, gravir » (Bueve de Hantone, éd. A. Stimming, I, 7434: li provos remonta le rochier), empl. isolé, à nouv. en 1636 (Monet: remonter les degrés); b) 1remoitié xixes. fig. remonter la pente (Lamennais, s. réf. ds Lar. 19e: une certaine pente qu'on ne remonte point; Hugo, s. réf. ds Guérin); 1899 (Clemenceau, Iniquité, p. 434: que nous remontions la pente); c) 1855 sports « dépasser (un adversaire) » (Le Sport, 22 mars ds Petiot 1982: [un cheval] fut remonté); 1901 remonter le terrain (football, rugby) (L'Auto-Vélo, 25 févr., ibid.); 1905 « regagner des places » (L'Auto, 11 juill., ibid.); 4. 1411 « monter de nouveau (ce qui était démonté) » (Despence ds A. Assier, Comptes Ste Madeleine de Troyes, p. 16: [les orgues] desmontees et les remontees); 5. a) 1549 « réconforter, redonner de la force à (quelqu'un) » (Est.: Remonter ung homme, et le remettre sus), empl. au xvies., à nouv. 1814 (Constant, Journaux, 13 oct., p. 416); déb. xviiies. pronom. (Fontenelle, Bonheur ds Littré, § 32); b) 1697 fig. « raffermir, relever » (Bossuet, Etats d'oraison, I, 24 ds Littré, § 27: remonter son premier désir); 1798 remonter le courage (Ac.); 1842 remonter le moral (Flaub., Corresp., 15 mars, p. 99); 6. a) 1590 horlog. (B. archéol. du Comité des trav. hist. et sc., 1905, p. 343: une monstre [...] tirant huict jours sans le remonter); 1680 remonter une montre, une horloge (Rich.); b) 1690 « tendre de nouveau le ressort d'un mécanisme » (Fur.); 7. a) [1646 « parcourir (un cours d'eau) vers l'amont » (N. Perrot d'Ablancourt, Les guerres d'Alexandre par Arrian, l. 1, § II, p. 8: quelques galeres qui estoient [...] remontées le long du fleuve)] 1680 (Rich.: remonter un fleuve); 1829 fig. remonter le courant (Hugo, Corresp., p. 462); b) 1796 fig. « aller vers l'origine de » (Dusaulx, Voy. Barège, t. 1, p. 11: remonter le fleuve de la vie); 8. 1839 théâtre remonter une pièce (Nerval, loc. cit.). Dér. de monter*; préf. re-*. Fréq. abs. littér.: 6 752. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 8 460, b) 11 145; xxes.: a) 10 078, b) 9 457. DÉR. 1. Remontable, adj.Qui peut être remonté (supra II A 2 et B). D'abord, maman se rendait bien compte, elle se l'avouait dans les larmes, le goût des belles choses se perdait... c'était un courant pas remontable (Céline, Mort à crédit,1936, p. 333).Sous nos yeux, l'humanité vient d'accomplir le passage qui mène de l'image sensible, évocatrice, à la pièce démontable et remontable, utilisée diversement au gré de constructions propres à l'intelligence (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 33).− [ʀ
əmɔ
̃tabl̥]. − 1reattest. 1845 (Besch.); de remonter, suff. -able*. 2. Remonteur, subst. masc.Ouvrier chargé de remonter, remettre sous tension, assembler certains mécanismes (armurerie, horlogerie). Au fig. C'est une singulière machine que le monde, et qui ressemble plus qu'on ne croit à une montre: il montre le doré en dehors et cache bien des rouages, mais le remonteur ne vient pas (Sainte-Beuve, Clou d'or,1869, p. 109).− [ʀ
əmɔ
̃tœ:ʀ]. − 1resattest. a) 1577 « celui qui monte des canons » (L. Le Roy, Vicissitude, 27 v ods Fonds Barbier: fondeurs et remonteurs d'artillerie), attest. isolée dans ce sens, b) α) 1784 « ouvrier horloger qui fait le montage définitif des montres » (Inventaires Robert et fils ds Pierreh.),
β) 1875 (Lar. 19e: remonteur de bottes), c) 1869 « celui qui remonte le mouvement d'un mécanisme » (Sainte-Beuve, loc. cit.); de remonter, suff. -eur2*. BBG. − Quem. DDL t. 16. |