| * Dans l'article "RECULER,, verbe" RECULER, verbe A. − Empl. intrans. Qqn, qqc. recule 1. [Indique un mouvement dans l'espace] a) Aller en arrière. Anton. avancer.Se mettre à reculer. Les dents inférieures avancent et reculent alternativement sur celles de devant (Cuvier,Anat. comp., t. 3, 1805, p. 35).Le train s'arrêta dans un grand bruit de freins. Puis, se mit à reculer (Triolet,Prem. accroc, 1945, p. 31): 1. Je recule donc (...), le dos tourné vers le but où je tendais, et plié en deux pour voir entre mes jambes les inégalités qu'il me fallait éviter. Je reculais, mais avec une lenteur et des efforts incroyables: c'est que les pieds que je traînais en sens contraire sur deux poutres scabreuses, avaient un mouvement convulsif...
Dusaulx,Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 135. − [Avec un compl. indiquant la distance, introd. par une prép.] Il recula d'un pas, tourna sur lui-même et s'enfuit (Duhamel,Suzanne, 1941, p. 257).Vieilli. [Avec un compl. indiquant la distance, en constr. dir.] Agnès recule quelques pas, lui présente son glaive (Cottin,Mathilde, t. 1, 1805, p. 281). − Empl. pronom. réfl. Annette, effrayée, se recula de quelques pas (Balzac,Annette, t. 2, 1824, p. 122).La fenêtre s'emplit soudain du son des musiques foraines, et l'on vit Lucie se reculer vivement et fermer la fenêtre (Abellio,Pacifiques, 1946, p. 421). − Reculer pour mieux sauter. Aller en arrière afin de prendre de l'élan pour mieux sauter. Au fig. Éviter un inconvénient présent pour devoir y faire face plus tard, alors que la situation s'est aggravée; faire des concessions pour être en meilleure position à l'avenir. Le chancelier d'Ambray y conduisant son fils et sa bru, Louis XIII conseilla que le fils fît lit à part. Le but, c'est sans doute de reculer pour mieux sauter (Michelet,Journal, 1860, p. 541). b) En partic. − [Le suj. désigne une armée] Revenir sur ses pas, abandonner le terrain. Synon. battre en retraite, se replier.Nous avancions par colonnes à travers l'Alsace; les Autrichiens reculaient et prenaient position en avant de la Lauter (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 280): 2. ... on ne change pas sur place des vaincus en vainqueurs. Quand on parle d'une armée qui d'abord recule, puis résiste, il ne s'agit là que d'un raccourci de langage, car les troupes qui ont reculé, et celles qui maintenant engagent la bataille, ne sont pas les mêmes. L'armée qui reculait n'était plus une armée.
Saint-Exup.,Pilote guerre, 1942, p. 330. − [Le suj. désigne une arme à feu] Avoir du recul. Le canon recule en tirant (Ac.). c) P. ext. S'éloigner, s'estomper. Nous frémissions aux coups de tonnerre, écoutant si l'orage avançait ou reculait (Pesquidoux,Livre raison, 1932, p. 36).Avec la fin du jour recule le bruit et jusqu'au matin il n'y a plus rien à attendre de cette intimité terrible qui étreint la ville (Morand,Chron. homme maigre, 1941, p. 172). 2. Au fig. a) Renoncer à ses intentions, à ses ambitions; faire marche arrière. Synon céder, se dérober, flancher (fam.).Que de liens, mon ami, rompus en quelques heures! J'en étais effrayé (...); mais la nécessité me poussait en avant, et il n'y avait plus moyen de reculer (Renan,Souv. enf., 1883, p. 393).Pour lui, c'était un devoir de conscience. − Je me briserai les reins s'il le faut, me dit-il un jour. À mon âge, c'est terrible. Mais je ne reculerai pas. L'histoire dira qu'il n'a pas reculé (Clemenceau,Iniquité, 1899, p. v). − Vieilli. Reculer à.Renoncer à, ne pas oser. J'entre chez Vaton, je recule à l'interroger. Il ne me dit rien (Goncourt,Journal, 1877, p. 1177). − Reculer devant.Ne pas vouloir faire face à; fuir, s'effacer devant. Ne reculer devant aucun danger, aucun sacrifice; reculer devant la défense. Marius avait beau reculer devant la réalité, refuser le fait, résister à l'évidence, il fallait s'y rendre (Hugo,Misér., t. 2, 1862, p. 660).Beaucoup reculent devant les perspectives de l'égalité, hors desquelles il n'est pas d'humanité réelle (Alain,Propos, 1934, p. 1211). − Ne reculer devant rien. Être prêt à tout, employer tous les moyens permettant de parvenir à ses fins. Une femme, quand sa curiosité impatiente est en éveil (...), aura toutes les audaces, ne reculera devant rien (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Avent. paris., 1881, p. 761).M. Rohner, qui ne recule devant rien, a fait d'étonnantes démarches pour que le président Fallières ne vienne pas à la Sorbonne (Duhamel,Maîtres, 1937, p. 206). b) Ne pas faire de progrès, être en régression. Synon. rétrograder.Épidémie qui recule; l'ignorance a reculé au XIXes.; qui n'avance pas, recule; reculer de trois places dans un classement. Il faut avancer ou reculer, il faut abolir ou reconnaître et légaliser des privilèges iniques et insociaux (Sieyès,Tiers état, 1789, p. 78).Pas le moindre progrès!... Elle recule plutôt!... Elle ne peut même pas jouer une valse dans le mouvement (Gyp,Souv. pte fille, 1927, p. 165). B. − Empl. trans. 1. [Indique un mouvement dans l'espace] Qqn recule qqc. a) Porter, faire aller en arrière. Celui-ci recula sa chaise au lieu de l'avancer, mit à terre son chapeau qu'il avait jusque-là tenu entre ses genoux (Gobineau,Pléiades, 1874, p. 198).Je regarde, et recule aussitôt la tête: une cinquième balle vient de frapper la portière (Malraux,Conquér., 1928, p. 140).Rare. Qqc. recule qqc.Le vent apporte ou recule ces sons alpestres (Senancour,Obermann, t. 1, 1840, p. 148). b) P. ext. Mettre à une certaine distance, plus loin par rapport à une position initiale. Reculer une cloison, une clôture. Je reculerai la porte là. Ah! si vous saviez, c'était une masure, il y avait des brouettes dans le salon (Goncourt,Journal, 1858, p. 508). − En partic. Reculer les bornes, les frontières, les limites d'un État. ,,Les porter plus loin, accroître le territoire de cet État`` (Ac.). Par sa politique hardie et habile, par des conquêtes et des réunions, elle [Catherine II] recula de toutes parts ses frontières (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t. 2, 1862, p. 219). ♦ Au fig. Les hommes (...) s'efforcent, par leurs travaux, de reculer les limites des connoissances humaines (Lamarck,Philos. zool., t. 2, 1809, p. 450).[Élisabeth] essayait de rendre la vie impossible par un excès de ridicule, de reculer les bornes du vivable (Cocteau,Enfants, 1929, p. 185). 2. [Indique un mouvement dans le temps] Qqn ou qqc. recule qqc. a) Rendre plus lointain, éloigner dans le temps. Le savant conservateur de cette partie du Museum (...) m'a montré (...) le squelette d'un homme fossile dont l'âge reculerait singulièrement l'apparition du règne humain sur notre planète (Michelet,Chemins Europe, 1874, p. 183).[La préhistoire] recule à l'infini la naissance du génie humain (T'Serstevens,Itinér. esp., 1963, p. 308). b)
α) Remettre à plus tard, différer. Reculer une visite. Elle se flattait de reculer les aveux qu'il exigeait d'elle (Staël,Corinne, t. 2, 1807, p. 169).Tous ces discours pour reculer l'échéance d'une petite réforme dangereuse et qu'on va escamoter, l'impôt sur le revenu (Alain-Fournier,Corresp.[avec Rivière], 1906, p. 144).
β) Rare. Qqc. recule qqn.Éloigner (quelqu'un) du but qu'il se propose. Cet événement l'a fort reculé (Ac.1935). REM. Reculage, subst. masc.,mines et carr. Action de transporter le produit abattu du point d'abattage au lieu où on l'évacue. (Dict. xxes.). Prononc. et Orth.: [ʀ
əkyle], (il) recule [-kyl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1135 « aller en arrière » (Couronnement Louis, éd. Y Lepage, AB, 2428); b) ca 1200 trans. « faire aller quelqu'un en arrière » (Aiol, 2567 ds T.-L.); 2. ca 1209 fig. « ne pas faire ce que l'on avait résolu » (Guiot de Provins, Bible, 1638, ibid.); 1559 reculer à (Amyot, Cam., 52 ds Littré); 3. a) ca 1274 reculer por le plus loing saillir « temporiser pour mieux prendre ses avantages » (Adenet le Roi, Berte as grans piés, éd. A. Henry, 369); 1611 reculer pour mieux saulter « id. » (Cotgr.); b) 1869 id. « éviter un petit inconvénient pour tomber dans un plus grand » (Littré). Formé de l'élém. re-*, de cul* et de la dés. -er. Fréq. abs. littér.: 3 873. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4 006, b) 7 405; xxes.: a) 6 163, b) 5 376. DÉR. Reculement, subst. masc.a) Vieilli ou littér.
α) Action de reculer, mouvement en arrière. Synon. usuel recul (v. ce mot A 1).Le reculement d'une charrette (Ac.). La sorte de reculement lointain de la vision en ses immenses yeux bleus (Goncourt,Journal, 1889, p. 1014).
β) Au fig. Régression. Synon. usuel recul (v. ce mot A 2).Et vous serez de notre avis, qu'une révolution serait un reculement (Poulot,Sublime, 1870, p. 233).b) Vieilli ou littér. Endroit ou temps reculé, éloigné. Sans qu'on puisse savoir seulement ni pourquoi ni par qui ces pierres ont été ainsi élevées en gradins les unes sur les autres, ni dans quel reculement infini du temps (Lamart.,Tailleur pierres, 1851, p. 472).Il la voyait dans un reculement de brume avec un seul détail de sa figure (A. Daudet,Sapho, 1884, p. 298).c) Spéc.
α) Dr. admin. Mur en reculement. ,,Mur construit en arrière de l'alignement lorsqu'une voie publique doit être élargie`` (Barr. 1974). Servitude de reculement. ,,Servitude créée à la charge des terrains bâtis ou clos du fait de l'alignement, lorsque celui-ci se traduit par un élargissement de la voie publique, servitude qui interdit de procéder sur ces immeubles à des travaux pouvant en prolonger la durée`` (Jur. 1981).
β) Sellerie. Courroie du harnais d'un cheval qui lui permet d'entraîner l'attelage lorsqu'il recule ou de le retenir dans une descente. Comme on allait arriver au village, un des reculements de la première voiture (...) cassa; les chevaux faillirent s'emballer (Ramuz,A. Pache, 1911, p. 149).− [ʀ
əkylmɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1718. − 1resattest. a) 1remoit. xives. « action de reculer, mouvement en arrière » (Philippe de Vitri, Chapel des fleurs de lis, 705 ds Romania t. 27, p. 84), b) ca 1393 « action de retarder quelque chose, retard » (Ménagier de Paris, éd. G.-E. Brereton et J.-M. Ferrier, I, VI, p. 79), c) fin xves. « renfoncement » (Chron. et hist. saintes et prof., Ars. 5079, f o133b ds Gdf. Compl.), d) 1680 « pièce du harnais sur lequel le cheval pèse quand il recule » (Rich.); de reculer, suff. -ment1*. |