| RECUL, subst. masc. A. − 1. Action de reculer; mouvement en arrière accompli par un être vivant ou un objet mobile durant cette action. Synon. vieillis reculade (v. ce mot A), reculement (v. ce mot dér. s.v. reculer).Ah! non, par exemple! s'écria Henriette, avec un mouvement de recul. Je ne veux pas être de la noce (Zola, Bonh. dames,1883, p. 786).Les deux premiers treuils servent à l'avancement et au recul du bateau (Bourde,Trav. publ., 1929, p. 237). − En partic. [À propos d'une armée] Synon. décrochage, repli, retraite.Recul stratégique. Tous ces endroits-là sont régulièrement et terriblement repérés. Depuis leur recul, les Allemands ne cessent d'y envoyer de vastes obus (Barbusse, Feu,1916, p. 160). − Spéc. Fait de reculer. ♦ ARMES À FEU. Mouvement en arrière, imprimé par les gaz, au moment du départ du coup. Canon sans recul. Barrès, que le recul d'un fusil aurait mis par terre (Alain, Propos,1934, p. 1219).Ces vieilles pétoires ont un recul absurde. J'ai l'épaule démanchée (Claudel, Partage midi,1949, iii, p. 1123). ♦ GÉOGR. Recul des eaux. Le paysage, sauf à Garguerin, qui apparaît derrière une palmeraie, est dépouillé de toute végétation. C'est la nudité de la pierre au lendemain du grand recul des eaux (T'Serstevens,Itinér. esp., 1963, p. 76). ♦ HORLOG. Échappement à recul. ,,Celui qui fait reculer la roue de rencontre`` (Ac.). ♦ MAR. Recul d'une hélice. ,,Rapport au pas moyen, de la différence entre ce pas et l'avance par tour de l'hélice`` (Gruss 1952). Vent de recul. Vent tournant de droite à gauche (du Nord à l'Ouest) dans l'hémisphère nord, et de gauche à droite dans l'hémisphère sud (d'apr. Gruss 1978). ♦ PHYS. NUCL. ,,Mouvement de l'un de deux corps qui se séparent après avoir été unis`` (Mathieu-Kastler Phys. 1983). Amas de recul. V. amas A 2 c.Particule de recul. ,,Particule mise en mouvement par suite d'une collision ou de l'éjection d'une autre particule`` (Nucl. 1975). 2. Au fig. a) Attitude de renoncement, de fuite. Synon. vieilli reculade (v. ce mot B 1).Lenteur de la pensée, embarbouillement de la parole, recul devant l'action immédiate (...) remontent à la même cause, un cerveau mou et un esprit trouble (Amiel, Journal,1866, p. 245).La disparition de l'appétit ou le refus de manger peuvent provenir d'un recul quelconque devant la vie, symbolisé de manière élémentaire (Mounier, Traité caract.,1946, p. 139). b) Régression. Synon. reculade (v. ce mot B 2), reculement (v. ce mot dér. s.v. reculer); anton. avancée, progrès.Recul de la civilisation, de la moralité, de la politesse; recul de la fièvre, d'une maladie. Il admet que le Parti socialiste aura des reculs, des effondrements apparents (Barrès, Cahiers,t. 5, 1907, p. 93): 1. ... toute l'évolution du règne animal, abstraction faite des reculs vers la vie végétative, s'est accomplie sur deux voies divergentes dont l'une allait à l'instinct et l'autre à l'intelligence.
Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 135. B. − 1. Action de reculer quelque chose ou de se reculer par rapport à une position initiale; distance nécessaire à cette action. Quatre mètres de recul; autant vaudrait me dire de supprimer les tourelles (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 251).Rien n'est plus adorable que la minute où M. Raimu, empêtré dans son rêve, demande à la marquise de prendre le recul nécessaire à l'exécution de sa troisième révérence (Cocteau, Foyer artistes,1957, p. 182). − SPORTS (tennis, ping-pong). Espace libre qui permet au joueur de reculer pour reprendre certaines balles. Le recul du fond [d'un court] doit être de 6,40 m au moins (Encyclop. des Sports,1961ds Petiot 1982). 2. Distance qui permet une bonne appréciation visuelle d'un objet, d'un ensemble. Dans l'imitation de l'apparence sensible [en peinture], le premier point est la connaissance des dimensions que le recul donne aux objets (Taine, Voy. Ital.,t. 2, 1866, p. 137).Nous n'entrons plus cette fois dans la gare du Grand Central, nous contentant d'admirer, avec du recul, sa coupole verte et or (Morand, New-York,1930, p. 218). C. − Temps nécessaire à une appréciation globale ou à une meilleure appréciation d'un événement. L'œuvre faite cette année (...) dans cinquante ans seulement ne sera plus qu'une curiosité qui fera sourire. La recherche des sources, le recul du temps, se réduira à bien peu de chose (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 346): 2. Aussi l'homme de génie pour s'épargner les méconnaissances de la foule se dit peut-être que, les contemporains manquant du recul nécessaire, les œuvres écrites pour la postérité ne devraient être lues que par elle...
Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 531. − P. méton. Attitude de détachement par rapport à ce qui touche de près. Avoir, prendre du recul. De mon côté, je conservais assez de recul sur moi-même pour bien me regarder agir (Romains, Hommes bonne vol.,1939, p. 184).Je peux me distinguer de ma jouissance, prendre du recul par rapport à elle, la juger, ce qui est l'exiler non plus en quelque partie du corps, mais comme corps et vie (Ricœur,Philos. volonté, 1949, p. 245). Prononc. et Orth.: [ʀ
əkyl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 2emoit. xiiies. sanz recul « sans possibilité d'esquive » (Du Prestre et des II Ribaus ds Rec. gén. des fabliaux, éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t. 2, p. 59); ca 1575 recul du canon (Blaise de Montluc, Commentaires, éd. P. Courteault, livre I, p. 407); 1752 horlog. recul d'échappement (Trév.); 1801 fig. (Mercier Néol.). Déverbal de reculer*; cf. 1450-53 n'avoir pas grand reculee « n'avoir pas beaucoup d'espace pour reculer » (Jacques Milet, Destruction de Troyes, f o70b, éd. 1544 ds Gdf.). Fréq. abs. littér.: 586. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 19, b) 293; xxes.: a) 1 053, b) 1 684. |