| RADE1, subst. fém. MAR. Bassin naturel ou artificiel de vastes dimensions, ayant une issue vers la mer, où les navires trouvent un bon mouillage. Être, mettre en rade; mouiller en rade, sur rade; rade en eau profonde; la rade de Brest, de Toulon. La Grèce possède un bon port: le Pirée; deux rades excellentes à Salamine et à Milo. La rade de Syra est médiocre: elle n'est ni assez fermée ni assez profonde (About, Grèce, 1854, p. 176).Par la fenêtre, on voyait tout Paimpol, toute la rade, avec les Islandais là-bas, au mouillage, − et la passe par où ils s'en vont (Loti, Pêch. Isl., 1886, p. 98):1. ... des lotissements dans les labours inondés (...) aux alentours des grandes usines sur rade qui vomissent des fumées noires et des scories et qui engloutissent des trains de chalands de charbon qui glissent dans leurs entrailles surchauffées sur une eau fétide et huileuse.
Cendrars, Homme foudr., 1945, p. 276. ♦ Grande rade. Plan d'eau qui sépare parfois les ports ou rades de la pleine mer, et peut servir de mouillage (d'apr. Gruss 1952). Cet établissement est au fond de l'anse qu'on appelle de bon-port, qui fait partie de la grande rade; les bâtimens peuvent y mouiller à l'abri de tous les vents (Voy. La Pérouse, t. 4, 1797, p. 96). ♦ Rade fermée. Rade qui ne possède qu'une sortie étroite et se trouve bien abritée des vents et de la houle (d'apr. Barber. 1969). ♦ Rade foraine. V. forain1A 3. − Loc. pop. ♦ Laisser qqn ou qqc. en rade, être en rade. Abandonner quelqu'un/quelque chose, être abandonné. Elle était parvenue à vendre une bonne partie des « rossignols », des guipures à franges et les lourds châles de Castille qu'étaient en rade depuis l'Empire! (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 365): 2. − Alors, qu'est-ce qu'on va foutre? demanda Hamel dont la manche déchirée laissait couler un peu de sang. Tu ne vois pas qu'ils nous laissent en rade? − Mais non, dit Gilbert (...) mais on doit attendre que l'artillerie prépare.
Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 204. ♦ [Le suj. désigne une chose ou une pers.] Être, rester, tomber en rade. Être en panne, être dans l'impossibilité de continuer. Projet qui reste en rade; voiture qui tombe en rade. [La Mouche, aux voyageurs du coche:] Si je n'étais pas là (...) Vous resteriez en rad', sans moteurs à crottin (Marcus, Quinze fables, 1947, p. 9). ♦ [En parlant d'une pers.; avec une valeur d'adj.] En rade de. Dépourvu de. Institutrice 21 ans cherche copain sympa pour garder Frédérique, 4 ans et demi, marrante et dégourdie mais en rade d'affection, le samedi matin dès la rentrée (Le Sauvage, 1eroct. 1976, p. 129, col. 1). Prononc. et Orth.: [ʀad]. Homon. rade2et 3. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1474 « partie de mer qui s'enfonce dans la terre et présente aux vaisseaux des mouillages à l'abri des vents et des lames » (Ordonnance de Louis XI pour la formation d'un port et château fort à la Hague ds Rec. gén. des anc. lois fr., par MM. Isambert et Decrusy, t. 10, p. 682); 2. [1914 d'apr. Esn.] 1919 en rade « seul, à l'abandon » supra ex. 2. Empr. au m. angl.rade att. au même sens dep. 1320, issu du vieil angl. rád « chevauchée, voyage, passage » qui est aussi à l'orig. de la forme mod. road « voie, chemin, route », v. aussi raid. |