| * Dans l'article "RACHETER,, verbe trans." RACHETER, verbe trans. A. − Empl. trans. 1. [Ce qu'on rachète est une chose] a) Acheter de nouveau quelque chose. Faudra-t-il racheter de la viande pour ce soir? (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p. 106). b) Acheter quelque chose qui a déjà été acheté par un autre ou plus rarement par soi-même. Il rachetait les éditions de ses œuvres, à des prix cinq fois supérieurs à ce que ses œuvres lui avaient rapporté (Rolland, J.-Chr., Amies, 1910, p. 1194).Le vétérinaire lui consentit des avances d'argent à plusieurs reprises et, « pour éclaircir les affaires », lui racheta à bas prix la maison paternelle et les champs (Aymé, Jument, 1933, p. 35). − BOURSE: 1. En France, il faudrait acquérir plus de 38 000 entreprises. Or, les conditions de ce rachat seraient fort différentes de celles qui ont permis de reprendre à des intérêts privés les grandes sociétés nationales actuelles. On peut racheter progressivement les actions d'une société, on peut les transformer en obligations amortissables sur une longue période.
Pineau, S.N.C.F. et transp., 1950, p. 48. c) Se libérer d'une obligation moyennant le versement d'une indemnité. Racheter des cotisations, sa retraite, une rente. On réserva le sort du droit d'aînesse et des prérogatives honorifiques, tandis que l'obligation de racheter les redevances promettait longue durée à celles-ci (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 149). 2. [Ce qu'on rachète est une pers.] Délivrer à prix d'argent un captif, un prisonnier. À peine m'aviez-vous quitté à Saint-Augustin que des méchants m'accusèrent: des colons puissants à qui j'avois enlevé quelques Indiens esclaves en les rachetant à un prix élevé, se joignirent à mes ennemis (Chateaubr., Natchez, 1826, p. 190).J'ai lu que Saint Ambroise n'hésita point à vendre les vases sacrés de l'Église pour racheter les captifs (Duhamel, Journal Salav., 1927, p. 63). − En partic., vieilli. Délivrer à prix d'argent du service militaire. Racheter son fils. Jupillon venait de tomber au sort. L'argent que la mère avait mis de côté pour le racheter avait été mangé par six mois de mauvaises affaires (Goncourt, G. Lacerteux, 1864, p. 138). 3. Au fig. a)
α) Assurer le salut, relever d'une déchéance morale au prix d'un sacrifice. Eh bien, répondit le jeune homme radouci (...) n'était-ce pas me montrer peu d'estime que de me proposer de racheter ma vie par l'abandon de mon Éthel (Hugo, Han d'Isl., 1823, p. 497).Crois-tu que le Christ (...) d'une Vierge soit né?... Crois-tu que, versé par sa mort volontaire, Son sang ait racheté les crimes de la terre? (Dumas père, Caligula, 1837, iv, 2, p. 101).La guerre, jugulée peut-être... La révolte, la fraternisation, l'armistice!... « Et même si ça ne réussit pas, quel exemple! Quoi qu'il arrive, ma mort est un acte... relever l'honneur... être fidèle... fidèle, et utile... utile, enfin! racheter ma vie, l'inutilité de ma vie... et trouver la grande paix... » (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 715). − RELIG. Sauver par la Rédemption. La mort du Rédempteur, qui a racheté le genre humain, est l'image de ce que nous devons faire pour nous-mêmes (Balzac, Curé vill., 1837, p. 143): 2. Patrick se débattait contre elle depuis ces cinq mois sans vouloir se l'avouer, et toujours il retombait, comme jadis son père, sur cette évidence de la dette contractée par le coupable, qu'il ne saurait ni désavouer, ni acquitter. Que de fois la parole de Mgr Rougier lui était revenue, et son geste pour lui montrer le crucifix: « Quand nous ne pouvons pas racheter nous-mêmes nos fautes et qu'il faut un supplément d'expiation, Il est là ».
Bourget, Actes suivent, 1926, p. 167.
β) Obtenir le pardon (d'une faute), expier. Racheter ses péchés par l'aumône. Rachetons nos fautes! rachetons nos erreurs! rachetons nos crimes! Tout est rachetable, le catholicisme est dans cette parole (Bourget, Actes suivent, 1926, p. 167). b) Compenser, faire oublier. Les statues placées dans les niches, quoique courtes et trapues, ont un caractère de force et de puissance qui rachète bien leur défaut de sveltesse (Gautier, Tra los montes, 1843, p. 51).Il en est ici de même que dans la poésie: la platitude des grands rhétoriqueurs, de Deschamps ou de Crétin, est rachetée par quelques réussites comme Les Djinns de Victor Hugo (Jeux et sports, 1967, p. 754): 3. [Louÿs] était mou, comme en guimauve; sa main fondait dans celle qu'on lui tendait. Une sorte de génie respirait sur son front et dans ses regards, rachetant ce qu'il avait d'un peu bellâtre.
Gide, Journal, 1942, p. 136. c) ARCHIT. Corriger un défaut, le rendre moins sensible, compenser. Le monte-bois [sert] pour racheter une différence de niveau considérable qui sépare, du plâtre du puits, le plan d'arrivée des charrettes (Haton de La Goupillière, Exploitation mines, 1905, p. 243). d) Synon. de rattraper.Racheter un candidat; racheter une mauvaise note. Voilà qui rachète quelques articles stupides et coups d'ongles au détour de mauvaises feuilles (Valéry, Corresp., [avec Gide], 1891, p. 94). B. − Empl. pronom. réfl. Mériter par une bonne conduite le pardon d'une mauvaise action antérieure; compenser ses fautes ou ses torts. Synon. se réhabiliter.Tout être se rachète et tout être se vend. Bien et mal (Hugo, Dieu, 1885, p. 203).Le péché originel ayant jeté hors de l'Éden l'homme tremblant et nu, il lui avait fallu se racheter par toutes les épreuves des histoires (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 193). Prononc. et Orth.: [ʀaʃte], (il) rachète [-ʃ
εt]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1135 rachater « acheter de nouveau, ou en plus » (Couronnement Louis, éd. Y. G. Lepage, réd. A/B, v. 321, p. 51); 1690 « acheter d'occasion, à un particulier » (Fur.); 2. ca 1165 « obtenir la libération de quelqu'un en payant une rançon » (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 26540); 1694 racheter une rente (Ac.); 3. a) 1remoit. xiies. « sauver les hommes (en parlant de Dieu) » (Psautier Cambridge, 24, 20 ds T.-L.); b) 1694 racheter ses pechez « en obtenir la rémission » (Ac.); c) 1734 « compenser, faire oublier un défaut » (Voltaire, Adél. du Guesclin, I, 1 ds Littré); 4. 1510 archit. « joindre par raccordement deux voûtes de coupes différentes » (Lille, ap. La Fons, Gloss. ms., Bibl. Amiens ds Gdf. Compl.); 1855 « compenser une différence de niveau » (E. Grangez, Voies navigables de France, p. 180 ds Littré). B. 1. Ca 1165 verbe pronom. « se libérer par le paiement d'une rançon » (Benoît de Ste-Maure, op. cit., 25208); 2. 1823 fig. « réparer par sa conduite une faute, une mauvaise action passée » (Boiste). Dér. de acheter*; préf. re-*. Fréq. abs. littér.: 998. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 792, b) 1 444; xxes.: a) 1 162, b) 1 232. DÉR. 1. Rachetable, adj.a) [En parlant d'une chose négociable] Qui est susceptible d'être racheté. Dîme, fond, redevance rachetable. En l'an III, l'avilissement de l'assignat provoqua une ruée des débiteurs empressés à se libérer à peu de frais, non seulement des contributions publiques ou du prix des biens nationaux, mais aussi des rentes foncières rachetables par restitution du capital (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 562).b) Au fig. [En parlant d'une pers. ou d'un de ses actes] Qui peut faire l'objet d'un rachat. Supra ex. 2.− [ʀaʃtabl]. Ds Ac. dep. 1694. − 1resattest. 1347 raccataule (Recette de G. de Panthegnies, CC 2, f o38 v o, A. Valenciennes ds Gdf. Compl.), 1428 rachetable (doc. ds Rec. gén. des anc. lois fr., éd. Decrusy, Jourdan, Isembert, t. 8, p. 744); de racheter, suff. -able*. 2. Racheteur, -euse, subst.Personne qui rachète. Après avoir racheté pour quelque cent mille francs d'anges déchus, je me suis aperçu que les vierges folles sont encore moins folles que vierges (...) et que le racheteur n'est pour elles qu'un acheteur plus naïf (Augier, Post-scriptum, 1869, p. 121).− [ʀaʃtœ:ʀ], fém. [-ø:z]. − 1resattest. a) 1remoit. xiies. rachatere « rédempteur » (Psautier Oxford, 77, 39 ds T.-L.), b) 1533 rachapteurs de rentes (Rabelais, Pantagrueline Prognostication, éd. M. A. Screech, p. 15); de racheter, suff. -eur2*. |