| PYRAMIDE, subst. fém. A. − ARCHÉOLOGIE − [Dans l'anc. Égypte] Grand monument à base rectangulaire et à quatre faces triangulaires se terminant en pointe qui servait de tombeau aux pharaons. Pyramide à degrés; les pyramides de Gizèh. La bataille des pyramides. Donc, hissé par devant, aidé par derrière, j'arrivai fort essoufflé, au bout d'un quart d'heure, sur la plate-forme qui termine la pyramide de Chéops. Cette plate-forme a trente-neuf mètres trente centimètres de tour, et, vu d'en bas, le sommet semble aigu (Du Camp,Nil,1854,p. 66).18 février. − Brumaire. Est-il bien vrai que le Bonaparte de ce coup d'état est si loin de ressembler à celui de Rivoli ou des pyramides? (Bloy, Journal, 1907, p. 338): 1. « ... Mais pensez à ces millions de malheureux dont les guerriers et les prêtres ont fait des bêtes de somme! et pourquoi? par vanité imbécile! » Il regardait avec hostilité ces pyramides qui jadis s'élançaient vers le soleil et qui nous semblaient aujourd'hui accabler la terre; je ne partageais pas sa colère, peut-être parce que jamais je n'avais eu à suer pour manger et parce que tout ce malheur était trop ancien.
Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 427. − [Dans d'autres civilisations] Monument de forme semblable, parfois à plusieurs niveaux ou étages, servant de tombeau royal ou de temple. Pyramide pré-colombienne; les pyramides du Mexique, du Pérou. C'est à Palenque que se trouve la seule véritable crypte connue en Amérique précolombienne. Construite sous une pyramide, sa découverte, en 1952, a remis en question l'opinion jusque-là admise selon laquelle la pyramide américaine n'est pas un monument funéraire, mais simplement la base d'un temple (Encyclop. univ.t. 101971, p. 643). − P. métaph. Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans (...). Cache moins de secrets que mon triste cerveau. C'est une pyramide, un immense caveau, Qui contient plus de morts que la fosse commune (Baudel., Fl. du Mal, 1857, p. 115).Charade à ceux qui vont mourir Égypte noire Sans pharaon qu'on puisse implorer à genoux Profil terrible de la guerre Où sommes-nous Terrils terrils ô pyramides sans mémoire est-ce Hénin-Liétard ou Noyelles-Godault Courrières-les-Morts Montigny-en-Gohelle Noms de grisou Puits de fureur Terres cruelles Qui portent çà et là des veuves sur leurs dos (Aragon, Crève-cœur, 1941, p. 47). B. − GÉOM. ,,Polyèdre dont les faces latérales sont des triangles ayant le même sommet et dont la base est un polygone quelconque`` (Bég. Dessin 1978). ♦ Pyramide régulière. Pyramide dont la base est un polygone régulier et dont la hauteur passe par le centre de cette base. Une pyramide régulière est celle qui a pour base un polygone régulier et dont la hauteur tombe au centre de la base (Hadamard, Géom. ds espace, 1921, p. 69). ♦ Tronc de pyramide ou pyramide tronquée. Portion de pyramide comprise entre la base et un plan coupant toutes les surfaces latérales. On appelle tronc de pyramide (...) la portion d'une pyramide comprise entre la base et une section parallèle à la base (Hadamard, Géom. ds espace, 1921, p. 87). C. − P. anal. 1. En (forme de) pyramide. V. pyramidal.Il aperçut, à la clarté de plusieurs lampes d'or et d'argent, la statue de Jagrenat, la septième incarnation de Brama, en forme de pyramide, sans pieds et sans mains, qu'il avait perdus en voulant porter le monde pour le sauver (Bern. de St-P., Chaum. ind., 1791, p. 80).Tantôt elles portoient leurs cheveux ras, lissés sur le front, et recouverts d'un petit bonnet entrelacé de rubans; tantôt elles le bâtissoient en pyramide haute de trois pieds (Chateaubr., Ét. ou Disc. hist., t. 3, 1831, p. 444).Derrière la porte, à gauche, se dressait le fourneau de fonte en pyramide, et sur la table se trouvaient cinq ou six petits gobelets et la cruche de grès à fleurs bleues (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 45). 2. ANAT. Toute structure rappelant par sa forme une pyramide: 2. ... il paroît que la portion de cette masse qui fut productrice des autres est réellement la moelle allongée; car c'est de cette portion que partent les appendices médullaires (les jambes et les pyramides) du cervelet et du cerveau, la moelle épinière, enfin, les nerfs des sens particuliers.
Lamarck., Philos. zool., t. 2, 1809, p. 197. ♦ Pyramide antérieure du bulbe. ,,Chacun des deux cordons blancs de la face antérieure du bulbe rachidien qui, de chaque côté du sillon médian antérieur, paraissent prolonger les cordons antérieurs de la moelle`` (Méd. Biol. t. 3 1972). Pyramides postérieures. ,,Reliefs de chacun des deux faisceaux graciles au niveau du bulbe supérieur`` (Méd. Biol. t. 3 1972). ♦ Pyramide de la caisse du tympan. ,,Petite saillie conique de la paroi postérieure (ou mastoïdienne) de la caisse du tympan`` (Méd. Biol. t. 3 1972). ♦ Pyramides de Malpighi. ,,Huit à dix masses coniques formant la substance médullaire du rein`` (Méd. Biol. t. 3 1972). D. − P. ext. Entassement d'objets reposant sur une base assez large et se terminant en pointe. Ces corbeilles contenaient deux pyramides de fruits magnifiques (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 398).Conduit par les religieux du couvent de Jaffa dans les sables au sud-ouest de la ville, j'ai fait le tour de la tombe, jadis monceau de cadavres, aujourd'hui pyramide d'ossements (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 351): 3. Il hâta le pas et emmena Durtal, en bas, dans le cloître, mais là encore, il se cogna contre des casiers, contre des pyramides d'objets hétéroclites descendus des greniers et déposés sous les arcades, en attendant qu'on les emballât.
Huysmans, Oblat, t. 2, 1903, p. 209. − En partic. ♦ DÉMOGR. Pyramide (des âges). Représentation graphique de la répartition des âges dans une population pour chacun des deux sexes: 4. Les pyramides sont dissymétriques en raison, d'une part, du taux de masculinité à la naissance qui est toujours supérieur à 0,5 (0,515 en France) et, d'autre part, de la surmortalité masculine plus ou moins élevée: ainsi, les classes masculines, plus nombreuses à la naissance, deviennent progressivement moins nombreuses que les classes féminines de même âge.
Bern.-Colli1981. ♦ ÉCOL. Pyramide écologique. ,,Représentation sous forme de bandes, dont la surface est proportionnelle à l'effectif (pyramide des nombres), à la biomasse (pyramide des biomasses) ou à l'équivalent énergétique (pyramide énergétique) des individus d'un peuplement, pendant un temps donné`` (Envir. 1976). ♦ GYMN. Pyramide humaine. ,,Colonnes composées par une troupe de sauteurs jouant les uns après les autres le double rôle de voltigeur puis de porteur`` (Giteau 1970). Je m'achemine (...) vers l'auberge la plus apparente [à Lindau] (...). Toute la maison est en fête (...) il y a (...) des saltimbanques bohèmes qui font le tour de la salle en exécutant la pyramide humaine (Nerval, Voy. Orient, t. 1, 1851, pp. 27-28). − P. métaph. et par dérision. Sa monotonie [du ménage à trois], ses aspects cirque et « pyramide humaine » ont bientôt fait, je pense, de rebuter les plus grossiers (Colette, Ces plais., 1932, p. 247). E. − Au fig. Construction d'ordre intellectuel, politique, artistique, etc., qui en impose à l'esprit par l'énormité de l'entreprise, par le défi au temps qu'elle représente,mais qui peut aussi apparaître comme l'expression d'un sentiment de vanité. Foin de l'Académie! C'est vieux, démodé, pyramide d'Égypte en diable. − Raison de plus pour y entrer, me dit Jacques. Tu leur mettras un peu de jeune sang dans les veines, à tous ces vieux Palais-Mazarin (A. Daudet, Pt Chose, 1868, p. 184).Elle ne fait pas de bruit [la pensée qui bouleverse ce que le destin nous donna], elle ne choque pas un caillou sur la route illusoire que l'on voit, mais tranquillement elle élève une pyramide, indestructible au tournant du chemin plus réel que suit la vie secrète; et soudain, tout ce qui nous arrive (...) prend une direction nouvelle (Maeterl., Temple ensev., 1902, p. 224).Au reste j'analyse mal ce que je sentais, parce que je n'en ai pas une conscience nette, mais c'était une pyramide de vérité auprès de quoi je sentais mon néant, la vanité de mes quêtes (Barrès, Cahiers, t. 4, 1906p. 153). Rem. L'image de la pyramide renversée reposant sur la pointe symbolise l'instabilité d'une construction, d'une entreprise. Car (le drame d'idées débordant l'autre, et de beaucoup, en signification, ampleur et poids) la pyramide semble poser et prendre appui sur sa pointe (Gide, Journal, 1931, p. 1092). Est-ce ou non [la Messe] la merveille suprême de l'Art, la pyramide posée sur sa pointe, le néant dispersé par tant de néants? (Valéry, Corresp. [avec Gide], 1942, p. 143). Prononc. et Orth.: [pyʀamid]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1150 archit. (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 5428); 2. 1370 géom. (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 134, note 5); 3. 1563 « amas, ce qui a une forme de pyramide » (Palissy, Recepte veritable, éd. A. France, p. 100). Empr. au lat.pyramis, -idis de mêmes sens, gr. π
υ
ρ
α
μ
ι
́
ς, -ι
́
δ
ο
ς « id. »; pour l'orig. v. Chantraine. Fréq. abs. littér.: 988. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 202, b) 2 056; xxes.: a) 791, b) 744. DÉR. Pyramidé, -ée, adj.,minér. Qui présente une forme de pyramide. Cristaux, cubes, tétraèdres pyramidés. De très beaux cristaux verts d'apatite, à structure fendillée, se rencontrent dans le terrain primitif du Canada, en prismes hexagonaux pyramidés. Les cristaux de Snarum, blancs et ternes, sont des prismes pyramidés souvent basés (Lapparent, Minér., 1899, p. 532).− [piʀamide]. − 1reattest. 1801 pyramidé « en forme de pyramide » (R.-J. Haüy, Traité de minér., Discours préliminaire, p. XLIV); de pyramide, suff. -é*. BBG. − Gohin 1903, p. 352. − Quem. DDL t. 1, 27. |