| PURETÉ, subst. fém. État, qualité de ce qui est pur. A. − Domaine concr. 1. État de ce qui est sans mélange. a) [Domaine de l'animé] Pureté de la race, du sang. Tu sais qu'une touffe de poil blanc au front d'un cheval dénote la pureté du sang et la finesse de la race (Barrès,Jard. Oronte, 1922, p. 23): 1. La généalogie des grands les montre tout préoccupés de se retrouver sans cesse et de ne pas sortir de leur maison. Les cousins et les cousines, en s'épousant, croient rendre la pureté à leur race et à leur sang. C'est un filet d'eau qui s'ensable et disparaît plutôt que d'accepter les mélanges.
Guéhenno,Jean-Jacques, 1948, p. 20. b) [Domaine de l'inanimé] État, qualité d'une substance qui ne contient aucune trace décelable d'une autre substance. Pureté chimique; pureté d'un corps; degré de pureté. La pureté absolue des substances est très rarement réalisée dans la nature (Lapparent,Minér., 1899, p. 7).La transformation des concentrés en oxyde et métal de haute pureté se fait dans deux usines (Goldschmidt,Avent. atom., 1962, p. 147): 2. ... il est extrêmement difficile d'amener la potasse à un état de pureté parfaite, et presque toujours elle est altérée par quelques particules terreuses ou métalliques provenant des vases employés à sa préparation.
Kapeler, Caventou,Manuel pharm. et drog., t. 2, 1821, p. 573. − CHIM. ,,Limite supérieure de la teneur en impuretés vis à vis d'un réactif chimique ou physique donné`` (Duval 1959). 2. Qualité de quelque chose dont rien ne trouble la fraîcheur, la limpidité ou ne ternit l'éclat; que rien n'altère. a) [Domaine de l'animé et de ses attributs] Pureté du teint, de la voix. Le domino blanc (...) délicieux costume dont elle s'était parée moins pour se déguiser que pour faire ressortir avec avantage la pureté de son teint (Gozlan,Notaire, 1836, p. 156).La maîtrise [à l'église des Jésuites] était renommée pour la pureté de ses voix d'enfants qui montaient aux voûtes avec une agilité étonnante (Green,Chaque homme, 1960, p. 294).V. arrêté ex. 5. b) [Domaine de l'inanimé] Pureté de l'air, du ciel, d'un son. Il était, ce monde, d'une beauté curieuse, glacée et comme immobile, faite d'un ciel très bleu et d'un soleil éclatant sous lequel scintillait la neige; mais la pureté égale du bleu et du blanc était également cruelle et laissait deviner le froid meurtrier (Hémon,M. Chapdelaine, 1916, p. 116).L'atmosphère, ici, était d'une qualité équivalente (...). Jusqu'à cette moiteur de l'air, cette pureté du silence qu'il est impossible de trouver ailleurs que dans un couvent (Simenon,Vac. Maigret, 1948, p. 8): 3. ... des sons d'une pureté cristalline, égrenés en un surprenant et hésitant decrescendo, flottèrent comme une buée sonore traversée des éclats jaunes du soleil et rejoignirent curieusement le rythme des gouttes d'eau qui tombaient de la voûte.
Gracq,Argol, 1938, p. 111. B. − Domaine esthét. 1. Caractère de ce qui est sans défaut, conforme à un idéal, fidèle dans l'exécution. a) Perfection de l'expression; exactitude dans le choix des mots. Pureté de la langue, du langage, du style. La langue grecque perdit de sa pureté, de son caractère; mais elle conserva sa richesse, ses formes, sa grammaire; et les habitants de Constantinople pouvaient encore lire Homère et Sophocle, Thucydide et Platon (Condorcet,Esq. tabl. hist., 1794, p. 99).Au siècle de Louis XIV, la littérature atteignit un style parfait, d'une pureté, d'une justesse, d'une sobriété dont on n'a pas d'exemple (Taine,Philos. art, t. 1, 1865, p. 20). b) Netteté, élégance de quelque chose dont rien ne vient rompre ni altérer l'équilibre, l'harmonie. Pureté des lignes, du dessin. Ses traits avaient la pureté du style grec, mais non sa froideur et sa symétrie; on devinait même au galbe bien arrêté de ses lignes régulières l'impression d'une âme rêveuse et mobile, quoique soumise et timide (Nodier,Fée Miettes, 1831, p. 64).Janthe (...) est grande et svelte (...). Ses pieds et ses mains annoncent une origine aristocratique; les lignes de son visage sont d'une pureté incroyable (About,Grèce, 1854, p. 94). ♦ Pureté du goût. ,,Justesse et délicatesse du goût dans la littérature, dans les arts`` (Ac. 1835-1935). Un homme dont le beau talent, comme écrivain, surpasse encore la pureté du goût comme critique (Chateaubr.,Martyrs, t. 1, 1810, p. 106). 2. Caractère de ce qui est fidèle à une doctrine, à la pensée d'un artiste, d'un créateur, d'un maître; caractère de ce qui est en conformité avec une création de l'esprit, une forme originelle. Ceux qui sont plus près de la parole et du verbe magistral gardent la pureté de la doctrine, et font, par obéissance et par tradition, ce que le maître fait par la fatalité de son organisation (Baudel.,Salon, 1846, p. 193).Le Prince A. Galitsin fait des changements bien drôles pour la morale. En corrigeant les épreuves je rétablis la pureté du texte (Mérimée,Lettres Delessert, 1867, p. 172).Le Pape, gardien de la pureté du dogme (Arnoux,Double chance, 1958, p. 133). 3. Qualité de ce qui est sans mélange: 4. ... à l'aurore du xxesiècle, et surtout par l'influence de Debussy. Il (...) est résulté une rude atteinte à nos modes dits « majeur » et « mineur ». L'absence de sensible a rapproché certaines compositions de la modalité grégorienne, mais sans la pureté diatonique...
Potiron,Mus. église, 1945, p. 82. C. − Domaine mor. 1. Transparence d'un être qui est sans compromission; droiture, intégrité. Pureté parfaite, céleste. Vierge (...), Vase d'élection, étoile matinale, Miroir de pureté, Vous qui priez pour nous (Dumas père, Don Juan, 1836, ii, 1, p. 49).La pureté ne s'exprime ni par des actes, ni par des paroles. Elle ne relève pas d'un code. C'est la matière dont une âme est faite (Cocteau,Bacchus, 1952, ii, 4, p. 112): 5. La pureté est absolument invulnérable en tant que pureté, en ce sens que nulle violence ne la rend moins pure. Mais elle est éminemment vulnérable en ce sens que toute atteinte du mal la fait souffrir, que tout péché qui la touche devient en elle souffrance.
S. Weil,Pesanteur, 1943, p. 79. ♦ Pureté du cœur/pureté morale. État de l'âme qui entend la Parole de Dieu dans la droiture, p. oppos. à pureté légale qui la préfigure et la favorise. Cette cruauté, qui sera, quand il le faut, sanglante, mais qui ne le sera pas systématiquement, se confond avec la notion d'une sorte d'aride pureté morale qui ne craint pas de payer la vie le prix qu'il faut la payer (Artaud,Théâtre et son double, 1938, p. 146).Jésus a dégagé de l'ancienne Bible le meilleur de ses consignes, faisant prévaloir la pureté du cœur sur le formalisme et les observances matérielles (Philos., Relig., 1957, p. 48-15). 2. Qualité, état de celui/ce qui est sans souillure, sans corruption. Pureté des mœurs, des intentions; pureté originelle, primitive. [Jean] n'était point frappé (...) dans la pureté de son amour filial (Maupass.,Pierre et Jean, 1888, p. 413).Est-ce que l'effort par lequel nous concevons et nous affirmons la loi morale, a encore besoin d'être manifesté? N'est-il pas déjà un acte complet qui ne gagne en valeur que par l'énergie et la pureté du sentiment tout intérieur, comme une foi qui, même sans les œuvres, serait nécessaire et suffisante au salut? (Blondel,Action, 1893, p. 138): 6. De sorte qu'il n'y avait plus de pur que la moitié des anges (...).
De la pureté native, de la jeune pureté, de la pureté première, de la pureté créée, de la pureté enfant, de la pureté de la création même.
Péguy,Porche Myst., 1911, p. 213. − Spécialement ♦ RELIG. JUIVE. Pureté (rituelle). État d'une personne ou d'un objet qui, selon la Thora la/le rend apte à être en contact avec le Temple ou avec les choses saintes: 7. « Pureté » et « impureté » désignent des situations données et déterminent un comportement adéquat au regard de la loi religieuse − par exemple, à l'époque biblique, entrer dans le Temple, consommer des aliments consacrés (...) exigeaient un état de pureté.
E. Gugenheim ds M.-D. Tendler, Le Judaïsme et la vie conjugale, Paris, Fondation Sefer, 1978, préf., p. 8. ♦ RELIG. CHRÉT. Synon. de chasteté.J'ai compris combien la pureté des garçons restait précaire, alors même qu'elle paraissait le mieux préservée. De plus, je ne crois pas que les plus chastes adolescents fassent plus tard les maris les meilleurs (Gide,Faux-monn., 1925, p. 1187).Elle aimait Jean. Elle l'aimait de toute sa chair longtemps chaste, et la frénésie de son amour devait à sa longue pureté une violence particulière (Daniel-Rops,Mort, 1934, p. 174). 3. État, qualité de ce/celui qui est désintéressé, qui agit par fidélité à un dieu, à un principe, à une doctrine, et non par intérêt personnel. Le public ne croit point à la pureté de certaines vertus et de certains sentiments; et, en général, le public ne peut guère s'élever qu'à des idées basses (Chamfort,Max. et pens., 1794, p. 25).[Le précepteur d'Arjouna] lui recommande d'agir avec pureté, sans rechercher les avantages de son action, et par la simple considération du devoir, arrive ensuite que pourra (Cousin,Hist. gén. philos., 1861, p. 77). Prononc. et Orth.: [pyʀte]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. Ca 1350 « exemption de souillure » (Gillon Le Muisit, II, 144 ds Gdf. Compl.); 2. 1636 « chasteté » (Monet); 3. 1740 « qualité d'une race où n'est mêlé aucun sang étranger » (Varenne, Mém. Ravanne, t. 2, p. 212). II. 1. 1530 « qualité d'une chose qui est sans souillure » (Palsgr., p. 259); 2. 1580 « exactitude et choix dans les mots » pureté du langage (Montaigne, Essais, II, IV, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, 363); 3. 1677 « qualité de ce qui est pur dans sa limpidité » (Racine, Phèdre, V, 7); 4. 1768 « qualité d'un ensemble de lignes dont aucun élément étranger n'altère la forme » (Diderot, Salon de 1767-1768, p. 81). Réfection de l'a. fr. purté « exemption de souillure » (ca 1200, Dialogue Grégoire, 141, 5 ds T.-L.), du lat. tardif puritas « netteté, pureté ». Fréq. abs. littér.: 2 038. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 740, b) 2 214; xxes.: a) 2 403, b) 3 697. |