| PRÉVALOIR, verbe I.− Empl. intrans. Prévaloir (contre, face à, sur qqn ou qqc.) A.− [Le suj. désigne une pers.] Avoir l'avantage, prendre le dessus. Synon. l'emporter, triompher.Ce fut cette fidélité au pays menacé (...) qui triompha plus tard de tout l'ascendant des généraux les plus populaires (...), quand il fut donné à un homme de prévaloir par l'armée sur le peuple et sur la France (Sainte-Beuve, Prem. lundis,t. 1, 1825, p. 56).L'un d'eux pensa, un moment, prévaloir sur le lourd Germain (...). Mais finalement (...) les peuples furent tiraillés entre deux maîtres contraires (A. France, Révolte anges,1914, p. 229). − [Sans compl. prép.] Je vous ai annoncé qu'il prévaudrait [le tentateur] prompt dans son mauvais message; que l'homme serait séduit, perdu par la flatterie, et croyant le mensonge contre son créateur (Chateaubr., Paradis perdu,1836, p. 287). B.− [Le suj. désigne une chose] Avoir plus d'importance, jouer un rôle prééminent. Synon. dominer, l'emporter, triompher.En Occident, les cloches ont prévalu sur les timbres à marteaux; elles ne s'introduisirent en Grèce que fort tard (Lenoir, Archit. monast.,1852, p. 157).Que nulle douleur en ce jour ne prévale contre notre joie (Claudel, Corona Benignitatis,1915, p. 386).V. emporium. − [Sans compl. prép.] Faire prévaloir son opinion, un point de vue. Il ne faut pas douter davantage que tout noble essort intellectuel ne tende directement à faire prévaloir les sentiments de sympathie générale (Comte, Philos. posit.,t. 4, 1839-42, p. 445). C.− Exister, se produire. [Les] journalistes (...) l'emploient de plus en plus [le verbe prévaloir] (...) : « Les conditions qui prévalent en Algérie », « La situation qui prévaudra alors... » C'est là un de ces mots pompeux qui imposent (et en imposent) aux lecteurs naïfs! (Le BidoisDélire1970, p. 270). II.− Empl. pronom. Se prévaloir (de qqc.). A.− Tirer avantage ou parti de quelque chose. Dans les grandes occasions elle aurait essayé de se prévaloir de son titre de mère (Stendhal, Nouv. inéd.,1842, p. 35). B.− Tirer vanité, alléguer afin de se mettre en valeur. Synon. s'enorgueillir, se flatter, se glorifier, se piquer, se targuer, se vanter.Se prévaloir de sa naissance : Elle avait de tous ces grands hommes des autographes, et semblait, se prévalant des relations particulières que sa famille avait eues avec eux, penser que son jugement à leur égard était plus juste que celui de jeunes gens qui, comme moi, n'avaient pas pu les fréquenter.
Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 711. Prononc. et Orth. : [pʀevalwa:ʀ], (il) prévaut [pʀevo]. Conjug. v. valoir, sauf subj. prés. : que je prévale, que nous prévalions, qu'ils prévalent. Ac. 1694, 1718 : prevaloir; dep. 1740 : pré-. Étymol. et Hist. 1. Ca 1420 intrans. « avoir l'avantage, l'emporter, dominer » (Robinet, La Complaincte des bons Fr. ds
Œuvres de Robert Blondel, éd. A. Héron, t. 1, p. 58); 1531 prévaloir à (Jean de Vignay, Miroir historial, XXVII, 6 ds Delb. Notes mss); 1669 prévaloir contre (Bossuet, Oraisons funèbres, éd. J. Truchet, p. 129); 1680 prévaloir sur (La Rochefoucauld, Réflexions diverses, X ds Maximes, éd. J. Truchet, p. 202); 2. 1570 se prévaloir de « tirer parti de » (M. de Castelnau, Mém., 148 ds Littré); 1647 « id. » « tirer avantage de » (Corneille, Héraclius, II, 2); 1690 « tirer vanité et avantage de » (Fur.). Empr. au lat. praevalere « valoir plus, l'emporter sur ». Le Bidois Délire 1970, p. 270 signale l'emploi de prévaloir au xxes., au sens de « exister, se produire », et qu'il attribue à l'infl. de l'angl. de même orig. to prevail empl. dans le sens affaibli de « se produire couramment, se répandre, être commun » (v. NED) mais ce n'est peut-être qu'un phénomène parallèle à l'angl. (cf. Las Cases, Mémor. Ste Hélène, t. 1, p. 691 : Cependant une grande agitation prévalait dans toute la terre ferme, le mécontentement se propageait avec rapidité). Fréq. abs. littér. : 779. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 344, b) 1 323; xxes. : a) 847, b) 944. Bbg. Gohin 1903, p. 303. |