| * Dans l'article "PRÉCOCE,, adj." PRÉCOCE, adj. I. A. − [Appliqué à un produit de la terre] 1. Qui atteint son stade de maturité avant les autres variétés de son espèce. Synon. hâtif, primeur; anton. tardif.Blé, petit pois, raisin précoce. La récolte commence fin août, première semaine de septembre pour les houblons précoces et deuxième quinzaine de septembre pour les variétés tardives (Industr. fr. brass., 1955, p.4).Le vigneron pratique une sélection de certains types [de greffons], les plus rustiques, les mieux aoûtés, les plus précoces ou les plus productifs (Levadoux, Vigne, 1961, p.26): 1. C'était un soir sans lune, un soir sans étoiles, un de ces soirs brumeux où l'air semble gras d'humidité. Une odeur vague de pommes flottait auprès des cours, car c'était l'époque où on ramassait les plus précoces, les pommes «euribles» comme on dit au pays du cidre.
Maupass., Contes et nouv., t.1, Père Amable, 1886, p.219. − Empl. subst. Les premiers et les plus beaux raisins sont déposés sur l'autel de la Vierge (...). C'est l'hommage de la «précoce» (Brie, Champagne), grappe de raisin fixée à la main de la Mère de Dieu (Menon, Lecotté, Vill. Fr., 2, 1954, p.73). − P. méton. [Appliqué à un arbre, un plant, une plantation] Qui produit ou porte des fruits, des fleurs, des feuilles précoces. Cerisier, pommier précoce. Cépages précoces. Ce sont ceux qui [viennent] à maturité 8 à 10 jours au moins avant le chasselas (Levadoux, Vigne, 1961, p.36). 2. Qui apparaît, fleurit ou mûrit avant les autres individus issus du même végétal ou de la même espèce. Toute sa joie naissante gela d'un coup, comme les pousses trop précoces (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p.547).Par instants, un fruit précoce tombe et jaillit de sa cosse dans un éclatement mat (Martin du G., Vieille Fr., 1933, p.1100). 3. Qui pousse ou mûrit tôt dans la saison. Combien tout cela l'enivrait, ce vent taquin, ce jeune azur, ces fleurs précoces, cette verdure nouvelle (Coppée, Bonne souffr, 1898, p.27). − P. méton. [Appliqué à un arbre] Qui bourgeonne ou fleurit avant les autres. On ne voit pas encore aux arbres les plus précoces ces premiers boutons que Bernardin de Saint-Pierre appelle des gouttes de verdure (M. de Guérin, Corresp., 1838, p.345). − En partic. Fruit précoce. Qui atteint sa maturité avant d'autres espèces de fruits, généralement au printemps (p.oppos. à fruit tardif qui mûrit en automne). Un déficit important subsiste de février à juin (...) il pourrait être comblé notamment par (...) l'accroissement de la production des fruits précoces (fraises, cerises) (Boulay, Arboric. et prod. fruit., 1961, p.15). ♦ Au fig. Personne dont les aptitudes intellectuelles ou physiques se sont manifestées de bonne heure. Il est (...) dangereux de faire marcher les enfants de trop bonne heure. Ne précipitons jamais rien: un fruit précoce n'est souvent qu'un fruit avorté (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p.254). B. − [Appliqué à un phénomène naturel gén.] 1. [Lié aux saisons] Qui survient plus tôt que de coutume. Hiver précoce. Quelques cerisiers, touchés par les gelées précoces, semblaient revêtus d'un rouge éclatant (...) qui détonnait dans la nudité des campagnes (Moselly, Terres lorr., 1907, p.19).À l'hiver mou avait succédé un printemps précoce, déjà tiède, bien que coupé de brusques coups de vent froid (Daniel-Rops, Mort, 1934, p.431): 2. ... sous le ciel livide chargé de neige, malgré le froid précoce qui succédait aux averses de la semaine, il balançait son tricorne, la tête nue, embroussaillée d'épais cheveux roux grisonnants.
Zola, Terre, 1887, p.53. − [Appliqué à une circonstance liée aux saisons] Le vieil écumeur ne pensait point à l'hiver approchant que les migrations précoces de ramiers et de geais (...) annonçaient prochain et rigoureux (Pergaud, De Goupil, 1910, p.59).À une table voisine vinrent s'asseoir deux femmes également jolies, en précoce toilette d'été (Abellio, Pacifiques, 1946, p.187). 2. [Appliqué à un événement, à une coutume, à un mécanisme physiol.] a) Qui survient chez une personne avant l'âge généralement admis. Maternité précoce. J'aurais cru qu'une mort précoce et volontaire aurait déraciné cet homme de la terre (Lamart., Jocelyn, 1836, p.785).Tu es une fille nerveuse, d'hérédité alcoolique, pubère depuis deux ou trois ans, souffrant d'une grossesse précoce (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p.110): 3. ... ce qu'il y a de meilleur contre tous les égarements de la sensualité, c'est encore et toujours la femme. Le vrai guérit des emportements dangereux de la chimère et des folies malsaines de l'exagération. Au point de vue de la pureté, rien ne vaut le mariage précoce.
Amiel, Journal, 1866, p.375. b) PÉDAG. Scolarisation précoce. Scolarisation d'un enfant avant l'âge normal. La scolarisation précoce peut avoir pour beaucoup d'enfants des effets désastreux (Foulq.1971). ♦ Enseignement précoce des langues. Enseignement d'une langue vivante étrangère à de jeunes enfants (d'apr. D. D. L. 1976). II. − [Appliqué à une pers., ou à l'un de ses attributs] A. − [Appliqué à un enfant, à un adolescent] Dont le développement physique ou psychique se produit plus tôt que chez les autres enfants. Synon. avancé.Enfant précoce pour son âge. Tu es trop jeune encore pour bien me comprendre, malgré la maturité précoce de ton esprit (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p.253).Il était très enfant, et en même temps terriblement dégourdi et éveillé: un peu en retard pour le corps, très en avance pour l'imagination. Il n'était pas un adolescent, il était un enfant précoce: ce n'est pas la même chose (Montherl., J. filles, 1936, p.991). − En partic. Dont la puberté survient plus tôt que la moyenne d'âge habituelle; qui a une connaissance, une certaine expérience de la sexualité malgré son jeune âge. Il tenait à savoir si Lucile fréquentait des garçons, si son éducation sexuelle était avancée ou non. Pensez donc qu'elle avait à peine quatorze ans! Nous en avons parfois, je ne le nie pas, des enfants trop précoces, qui retrouvent des garçons dans les rues, surtout l'hiver, quand il fait noir (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.136): 4. Ce n'était plus une enfant, ce n'était pas encore une femme; elle était grasse et formée, tout en gardant un air de gamine précoce, poussée vite, presque mûre.
Maupass., Contes et nouv., t.2, Pte Roque, 1885, p.1039. ♦ Empl. subst. Avide d'être plus fort, l'infériorisé veut tout avoir: il est avare, curieux, méticuleux par angoisse souvent; pour se réhabiliter à ses propres yeux, il devient un précoce sexuel. La vive conscience de sa faiblesse déclenche le mécanisme de compensation (Mounier, Traité caract., 1946, p.598). ♦ Puberté, développement sexuel précoce. L'hypergénital, qui se révèle dès l'adolescence par un développement sexuel précoce, présente (...) une excitation de l'humeur parfois poussée jusqu'aux troubles maniaques (Mounier, Traité caract., 1946, p.169). − [Appliqué à une manifestation particulière de la précocité] Génie, talent précoce. Étant âgé de neuf ans, −il était déjà d'une intelligence extraordinairement précoce et porté à la résolution des problèmes les plus bizarres, les plus difficiles (G.Leroux, Parfum, 1908, p.19): 5. Sa sagesse, sa raison précoce, le sérieux de son esprit, son goût pour l'étude la désignaient, d'ailleurs, pour des fonctions que nous espérions alors faire tourner au profit de la morale publique et de l'éducation de la nation.
Renan, Drames philos., Abbesse Jouarre, 1886, I, 5, p.627. ♦ Expérience, éducation précoce (de qqc.). Connaissance anticipée (de quelque chose). [Madeleine] surprit des groupes qui parlaient d'hommes; elle se mêla à ces conversations, avec la curiosité ardente de la femme qui s'éveille dans l'enfant, et reçut ainsi l'éducation précoce de la vie (Zola, M. Férat, 1868, p.32). ♦ Domaine intellectuel ou artist.Dont le génie se révèle de bonne heure, en particulier dans la production d'oeuvres. Écrivain, musicien précoce. Il y a des mathématiciens précoces, témoin Pascal; des poëtes, non (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p.86).Beethoven moins précoce [que Mozart] n'avait encore composé [en 1800] que deux grands ouvrages pour orchestre (Prod'homme, Symph. Beethoven, 1921, p.4). B. − ZOOTECHNIE 1. Animal élevé pour sa chair et dont la croissance rapide permet une bonne rentabilité en boucherie. Les bovins de race française Frisonne, Salers, Normande (...) sont des animaux précoces (Lar. agric.1981). 2. Femelle apte à se reproduire de bonne heure. La Jersiaise danoise est précoce (premier vêlage à 23 mois) et a une longévité analogue aux autres (Wolkowitsch, Élev., 1966, p.135). C. − MÉD. (biol., pathol.) 1. a) [Appliqué à une transformation ou à une altération physique visible] Qui apparaît prématurément. Calvitie, embonpoint, rides précoce(s). Atteint d'une alopécie précoce, il avait la figure complètement glabre. Pas un cil aux paupières, pas un vestige de sourcils, pas un poil de barbe (Theuriet, Mais. deux barbeaux, 1879, p.30).C'était un garçon atteint d'obésité précoce et qui, au réfectoire, vidait les plats (Mauriac, Pharis., 1941, p.9). b) [Appliqué à un processus biol., à une altér. organique ou fonctionnelle] ♦ Accouchement précoce. Qui se produit avant la date prévue. Synon. prématuré. ♦ Démence précoce. V. démence A. ♦ Éjaculation précoce. V. éjaculation A. ♦ Sénilité précoce. Apparition avancée des signes cliniques liés à la vieillesse. P. plaisant. D'après Élie Metchnikoff, la terreur que nous inspire aujourd'hui la mort vient seulement de ce qu'elle nous surprend avant l'heure: nous mourons tous de sénilité précoce (J. Rostand, La Vie et ses probl., 1939, p.131). 2. a) Diagnostic précoce. Détection d'une atteinte pathologique à un stade peu avancé de la maladie. La grande préoccupation lorsque s'ouvre le XXesiècle est le mode de début de la tuberculose de l'adulte, l'étude des moyens qui permettront d'établir d'une façon précise le diagnostic précoce de la maladie (Ce que la Fr. a apporté à la méd., 1946, p.100). ♦ Traitement précoce. Traitement appliqué dès le début de la maladie. Ce traitement doit être précoce et énergique, à condition que l'âge du sujet ou son état organique ne constituent pas une contre indication à certains médicaments (Quillet Méd.1965, p.340). b) [En parlant d'un signe clinique] Dont les manifestations se produisent au stade initial d'une maladie. Le rhumatisme scarlatin est précoce ou tardif. Les formes précoces sont plus fréquentes que les formes tardives (Ravault, Vignon, Rhumatol., 1956, p.520). Prononc. et Orth.: [pʀekɔs]. Ac. 1694, 1718: pre-; dep. 1740: pré-. Étymol. et Hist.1. 1651 «(fruit ou plante) qui vient à maturité avant le temps» (N. de Bonnefons, Le Jardinier françois, p.23 d'apr. R. Arveiller ds Mél. Gamillscheg (E.) 1968, p.31); 1694 «qui produit des fruits précoces» (Ac.); 2. 1688 «prématuré, fait très tôt» livres précoces (Furetière, Factums, t.1, p.191); 1690 esprit precoce (Fur.); 1762 (fille) précoce en tout (Rousseau, Émile, p.752). Empr. au lat. praecox, -ocis, de praecoquĕre «hâter la maturité de, mûrir complètement», au propre (en parlant des fruits et des plantes) et au fig. Fréq. abs. littér.: 603. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 847, b) 785; xxes.: a) 897, b) 880. DÉR. Précocement, adv.D'une manière précoce. a) De bonne heure, avant ou tôt dans la saison (supra I). Fleur précocement éclose, fruit précocement mûri. b) Avant l'âge habituellement requis (supra II). Vuillaume était, en 1900, un grand garçon de vingt-sept ans, aux cheveux précocement gris (Duhamel, Terre promise, 1934, p.125).Carlo Beneduce (...) avait conçu une sorte de timidité de sa fille, précocement femme (Aragon, Beaux quart., 1936, p.419).Ainsi, à la longue (...) sombre-t-on (...) dans une espèce d'ataraxie précocement sénile (Arnoux, Double chance, 1958, p.60).− [pʀekɔsmɑ
̃]. − 1reattest. 1839 (Michelet, Journal, p.322); de précoce, suff. -(e)ment2*. − Fréq. abs. littér.: 40. |