| PRUDENT, -ENTE, adj. et subst. I.− Adjectif A.− [Corresp. à prudence A] Qui a de la prudence, qui fait preuve de prudence. Synon. avisé, circonspect, mesuré, prévoyant, réfléchi, sage; anton. imprudent, audacieux, hardi, intrépide, imprévoyant, téméraire, fou. 1. [En parlant d'une pers.] La science le rendra justement [le médecin] plus prudent et plus circonspect; il s'abstiendra dans le doute, au lieu de se livrer d'une manière inconsidérée à l'empirisme (Cl. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p. 31).Il se promettait d'être prudent avec Philomène, ne voulant pas en arriver à une guerre ouverte, sur cet étroit plancher mouvant qui les emportait, lui et son chauffeur (Zola, Bête hum.,1890, p. 261): 1. Dans l'exercice du pouvoir, Baudouin II nous apparaît en effet comme un administrateur appliqué et ponctuel (...), un capitaine consciencieux et méthodique (...), un chef d'état prudent, sans la fougue de tempérament de Baudouin Ier, sans non plus ses coups de joueur.
Grousset, Croisades,1939, p. 113. ♦ P. anal. [En parlant d'un animal] Cheval prudent. Ceux que nous croyons les plus étourdis, la mouche, le papillon à la tête légère (...) se montrent tout à coup prudents, prévoyants, habiles (Michelet, Insecte,1857, p. 45). − [Constr. avec un compl. locatif désignant une activité ou un domaine d'activité] Prudent en affaires, dans ses affaires; prudent au jeu. O'Penny est un grand chef vaillant au combat, prudent au conseil, comme le serpent bleu son ancêtre (Ponson du Terr., Rocambole,t. 4, 1859, p. 32).Les habitants de ce pays sont en général silencieux, froids, calculés et prudents dans leur conduite (Vigny, Mém. inéd.,1863, p. 154).La presse devint plus modérée et plus prudente dans ses appréciations (Joffre, Mém.,t. 2, 1931, p. 385). 2. [En parlant d'un comportement, d'une activité] Les recommandations de conduite prudente, de bon sens et de bon goût qu'on peut attendre d'un tel père (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 510).C'est seulement après un long, patient, attentif et très prudent travail que la nouvelle drogue est proposée à l'utilisation humaine (R. Schwartz, Nouv. remèdes et mal. act.,1965, p. 15): 2. La Garde nationale (...) faisait des reconnaissances très prudentes dans les bois voisins, fusillant parfois ses propres sentinelles, et se préparant au combat quand un petit lapin remuait sous des broussailles...
Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Boule de suif, 1880, p. 115. − [P. méton. du déterminé] Main, œil, regard prudent(e). Le gardien fauchait le gazon, d'une faux prudente entre les pierres (Giraudoux, Simon,1926, p. 179).Il considérait l'abbé, subitement immobilisé, observateur et près de la parade (...). Sa prudente paupière inférieure était en place devant sa pupille (Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 446). 3. [Qualifie un inf., une prop. dans une tournure impers.] Il serait plus prudent pour elle et pour moi que je reste dans le palais (Barrès, Jard. Oronte,1922, p. 149).À cause des lions, il n'est pas prudent de circuler la nuit (Gide, Retour Tchad,1928, p. 913): 3. J'ai gagné, il y a quelques jours, une forte grippe et quoique ce ne soit pas grave, il est prudent à moi de ne pas négliger une petite maladie de cette espèce après les grandes maladies qui me sont survenues durant les dernières années dans les organes de la respiration.
Tocqueville, Corresp.[avec Gobineau], 1855, p. 229. SYNT. Homme, femme, esprit prudent(e); geste, habitude, marche, silence, vie prudent(e); avisé, circonspect, méthodique, patient, pondéré, précautionneux, prévoyant, vigilant, sage et prudent. B.− [Corresp. à prudence B] Vieilli. Qui a de la prudence. Synon. sage.L'homme léger est entraîné par le charme de faire écouter ses paroles; l'homme prudent est entraîné par les charmes du silence (Saint-Martin, Homme désir,1790, p. 354).Ne vous irritez pas contre moi, honnête et prudent lecteur; je l'ai payé assez cher pour ne devoir intéresser que votre pitié! (Restif de La Bret., M. Nicolas,1796, p. 53). II.− Substantif A.− Personne prudente. 1. [Corresp. à supra A] Cette évocation des puissances redoutées de tous mettait les prudents en fuite (Hamp, Champagne,1909, p. 128).Beaucoup de femmes redoutent la jeunesse de l'homme : ce sont les prudentes. Elles ont appris, quelquefois à leurs dépens, que la jeunesse est dévoratrice, que l'amour du jeune homme consume son objet (Mauriac, J. homme,1926, p. 45). 2. [Corresp. à supra B] Il y a uniformité dans les mœurs, quand les proverbes sont cités, avec la même révérence, par les prudents de toutes les classes de la société (Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 372). B.− Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. [Corresp. à supra A] J'ai été indigné du mal qu'en dit [des tableaux de Serre] M. Millin, mais cet homme était antiquaire juré et membre de 44 académies (...). Un tel être doit connaître le prudent, l'utile, le plat, mais non le Beau (Stendhal, Mém. touriste,t. 3, 1838, p. 231). Prononc. et Orth. : [pʀydɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. a) 1ertiers xiies. « sage, avisé » (Alberic, Alexandre, 3, 21, éd. ds Elliott Monographs, 38, p. 38); b) 1455 « qui est empreint de sagesse » (Mielot, Adv. direct. ds Cheval au Cygne, I, 234 ds Gdf. Compl. : prudente circonspection). Empr. au lat. prudens « qui prévoit, qui sait d'avance, réfléchi, avisé » (issu de providens, de providere, « prévoir »). Fréq. abs. littér. : 1 701. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 107, b) 2 873; xxes. : a) 2 268, b) 2 531. |