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* Dans l'article "PROMENER,, verbe"
PROMENER, verbe
I. − Empl. trans.
A. − [Le suj. désigne une pers.] Mener dehors pour prendre l'air, pour distraire, pour voir des choses, pour flâner.
1. Qqn1promène qqn2.C'est moi qui suis chargé de promener les étrangers dans Paris et de leur détailler les beautés de la capitale (Meilhac, Halévy,Vie paris., 1867, i, 7, p.9).MmePichon promenait Lilitte, alors âgée de dix-huit mois, dans une petite voiture d'osier (Zola,Pot Bouille, 1882, p.62).Il me promenait avec lui dans Paris, en me tenant par la main, lui vieux garçon coureur et sanguin, moi petit gamin qui en avais grand peur (Léautaud,In memor., 1905, p.215).
Loc. verb. [Le compl. d'obj. désigne un attribut de qqn1] Synon. de parcourir.Promener sa personne. Nous promenions nos pas dans les sentiers solitaires de ces forêts inconnues (Crèvecoeur,Voyage, t.1, 1801, p.82).En France, en Allemagne, en Angleterre, en Amérique, j'ai promené ma carcasse d'un bout du monde à l'autre (Zola,Travail, t.2, 1901, p.247).
P. anal. Emmener dehors. Une grosse poule gloussante promenait un bataillon de poussins (...) à travers le petit jardin (Maupass.,Contes et nouv., t.2, Reine H., 1883, p.831).
2. Qqn promène un animal. Il y avait du monde, sur les bancs, (...) des flâneurs qui regardaient les navires, (...) des vieilles femmes qui promenaient en laisse leur compagnon à quatre pattes (Van der Meersch,Empreinte dieu, 1936, p.245).
Promener un cheval. Faire marcher lentement un cheval soit en le montant, soit en le tenant par la bride. L'aga déjeunait. Ses esclaves promenaient ses chevaux (Lamart.,Voy. Orient, t.2, 1835, p.64).
B. −
1. [L'agent se déplace] Faire aller (d'un côté, de l'autre); déplacer, emmener avec soi (d'un endroit à un autre).
a) Qqn1promène qqn2.C'était Marcoux. Du matin au soir, il promenait des gens à travers les services (Péladan,Vice supr., 1884, p.206).Il avait l'héroïsme court; promener Andrée dans les réunions, plutôt mourir (Montherl.,J. filles, 1936, p.956).
Empl. factitif. Il est encore fréquent, dans les [mairies des] villes importantes, de promener les gens de guichet en guichet, d'étage en étage (Fonteneau,Cons. munic., 1965, p.133).
Au fig. Emmener avec soi par l'imagination. Ce genre de poésie est vénéneux (...). Le volume commence par l'érotisme pour finir par le suicide, et promène le lecteur de la sensualité oublieuse au désespoir morne (Amiel,Journal, 1866, p.57).Le Londres de Shakespeare, où l'action nous promène de Westminster à Whitehall (Morand,Londres, 1933, p.13).
b) Qqn promène qqc.
[Qqc. désigne un inanimé concr.] On se contente, dans les grands logis comme dans les églises, de promener un chariot de feu, chargé d'une braise de charbon de bois (Faral,Vie temps st Louis, 1942, p.161):
1. ... un professeur de cosmographie, pour expliquer à des enfants la rotation de la terre autour du soleil, promène une orange autour du poêle central de la classe, qui représente le soleil, il reconstitue à sa façon le mécanisme réel... Ruyer,Esq. philos. struct., 1930, p.237.
En partic. [Qqc. désigne une partie, un attribut de qqn sur lequel on attire l'attention] Roubaud promène entre les tables son petit ventre rondelet (Colette,Cl. école, 1900, p.197).Après leur tour de chant, ces dames doivent promener leur grâce et leur sourire dans le jardin ou autour des tables où sautent les bouchons de champagne (G. Leroux,Roul. tsar, 1912, p.82).La servante ne s'éveillait que deux heures après s'être levée. Elle promenait sa voix de somnambule par toute la maison. Mithridate. −«Mithridate est mort», criait-elle (Jouhandeau,M. Godeau, 1926, p.145).
[Qqc. désigne un inanimé abstr.] Ce vetéran de la fatuité va de boudoir en boudoir promener d'insipides hommages que plusieurs jeunes femmes écoutent encore par respect pour la mémoire de leurs grand'mères (Jouy,Hermite, t.3, 1813, p.83).Elle promène tous les petits racontars de son quartier de maison en maison (Larbaud,Barnabooth, 1913, p.159).
En partic. [Qqc. désigne un affect de qqn] Je promenais partout ma peine vagabonde (Gautier,Comédie mort, 1838, p.44).Parvenu à son grade à coups de rengagements, de larmoiements et de platitudes, il promenait à travers la vie l'âpre conscience de sa non-valeur (Courteline,Train 8 h 47, 1888, 1repart., ii, p.16).Son train était à neuf heures. Où promener jusque-là sa mélancolie? (Benjamin,Gaspard, 1915, p.105).
c) P. métaph. Qqc. promène qqc.2[Qqc.2désigne une partie de qqc.1]Les scènes calmes et splendides où la lune promenait ses lueurs au-dessus des eaux et des neiges (Lamart.,Confid., 1849, p.300).
2. [L'agent ne se déplace pas] Laisser aller, déplacer (d'un côté et d'autre).
a) Qqn promène qqc.
[Qqc. désigne un obj. concr. auquel on imprime un mouvement] Un vieillard qui promenoit régulièrement sur une espèce de guitare, garnie d'une seule corde de crin, un archet grossier (Nodier,J. Sbogar, 1818, p.103).Il en avala de dépit la couleur du pinceau qu'il promenait sur une aquarelle (Goncourt,Ch. Demailly, 1860, p.242).Il promena le rasoir sur sa joue gauche (Aymé,Jument, 1933, p.248).
En partic. [Qqc. désigne une partie du corps de qqn] Promener ses regards. Elle promenait machinalement ses lèvres sur le tissu satiné de ses bras fins et dodus (Rolland,J.-Chr., Antoinette, 1908, p.837):
2. Mademoiselle de Balder était tout heureuse d'avoir provisoirement la jouissance d'un piano; depuis que Bastien était parti, elle s'était assise devant l'instrument et n'avait cessé de promener ses belles mains sur le clavier, répétant tous les morceaux qui lui rappelaient son enfance. Ponson du Terr.,Rocambole, t.1, 1859, p.326.
b) P. métaph. Qqc.1promène qqc.2[Qqc.2désigne une partie de qqc.1]L'Eurotas promenoit son cours tortueux dans cette riante solitude (Chateaubr.,Martyrs, t.2, 1810, p.187).La vallée a pris dès lors la forme et les proportions d'un grand cirque. La Seine y promène ses méandres (Vidal de La Bl.,Tabl. géogr. Fr., 1908, p.131).
C. − Au fig., vieilli. Duper par des promesses vaines. Mener enfin la vie des grandes plumes du temps, avoir des créanciers et les payer aussi peu que possible, promener mes éditeurs (Reybaud,J. Paturot, 1842, p.68).Mon oncle (...) lui avait donné rendez-vous pour régler son compte... −Voilà six mois que vous me promenez, aujourd'hui je comptais sur votre parole (Malot,R. Kalbris, 1869, p.70).
II. − Empl. pronom.
A. −
1. [Le suj. désigne une pers.] Aller dehors pour prendre l'air, se distraire, flâner. À peine étions-nous descendus de voiture pour nous promener à pied, que nous apercevons un jeune homme (Sénac de Meilhan,Émigré, 1797, p.1555).Nous nous promenons, nous jasons, nous allons au hasard; nous sommes bien quand nous sommes ensemble (Senancour,Obermann, t.2, 1840, p.211).Ce soir, pour la première fois, je me promène avec plaisir au Quartier Latin (Renard,Journal, 1906, p.1031).
Allez vous promener, va te promener! [Manifestation d'humeur adressée à quelqu'un] (Dict. xixeet xxes.). V. envoyer promener (infra III B).
[Comme réaction à une situation présentée (par l'énonciation de va te promener) comme pénible] Synon. malheureusement, hélas, va te faire fiche (pop.).J'avais repris mon petit train-train. Et puis va te promener, voilà ma femme qui tombe malade! (Barrière, Capendu,Faux bonsh., 1856, iv, 2, p.149):
3. La vieille crut qu'on voulait se moquer d'elle, et (...) tomba sur le héros à coups de parapluie. Tartarin, un peu confus, se défendait de son mieux, parait les coups avec sa carabine, suait, soufflait, bondissait, criait: −«Mais Madame... mais Madame...» Va te promener! Madame était sourde, et sa vigueur le prouvait bien. A. Daudet,Tartarin de T., 1872, p.74.
2. P. anal. [Le suj. désigne un animal] Circuler, déambuler. Vals, forêts, marécages où se promènent les buffles et les hérons (Quinet,Ahasvérus, 1833, 2ejournée, p.157).Dans une mare immobile (...) des insectes à grandes pattes se promenaient sur la feuille des nénuphars (Flaub.,Champs et grèves, 1848, p.254).
B. − [Le suj. désigne une pers.] Se déplacer d'un côté, d'un autre, en marchant. J'allais dans sa chambre (...) pendant qu'il se promenait de long en large, toujours vif, animé, tantôt s'arrêtant, tantôt précipitant le pas (Renan,Souv. enf., 1883, p.252).Il m'arrive quelquefois de me promener dans la bibliothèque de la Chambre des députés (Barrès,Cahiers, t.6, 1908, p.340).
C. − P. anal. ou au fig.
1. Littér. Se déplacer, avancer avec lenteur.
a) [Le suj. désigne un inanimé concr.] La rivière (...) paraît plus limpide, plus paresseuse: elle se promène (Gozlan,Notaire, 1836, p.97).Une vieille lune usée se promène dans le bas du ciel (Colette,Naiss. jour, 1928, p.32).
Empl. pronom. Un roman est un miroir qui se promène sur une grande route. Tantôt il reflète à vos yeux l'azur des cieux, tantôt la fange des bourbiers de la route (Stendhal,Rouge et Noir, 1830, p.357).
b) [Le suj. désigne un inanimé abstr.] Où est donc ce niveau de la loi qui, dans une république, se promène également sur toutes les têtes? (Desmoulinsds Vx Cordelier, 1793-94, p.236).
2. SPORTS, p.iron. [Le suj. désigne une pers.] Gagner avec facilité, sans faire d'efforts. À Monaco Fangio a gagné en se promenant (Trintignant,Pilote de Courses, 1957ds Petiot 1982).
III. − Empl. intrans.
A. − Synon. (vieilli) de se promener.J'ai fait ma toilette en attendant le dîner, et après nous avons été promener dans la ville (Maine de Biran,Journal, 1816, p.205).Alors, ne reste pas dans ce trou sans air, qui pue la colle... va promener un peu! (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p.717).
B. − [À l'inf., après les verbes faire, laisser, mener] Se promener. Madame de Pontcarré nous menait promener et jouer chez sa mère, qui avait un appartement au rez-de-chaussée et un jardin (Sand,Hist. vie, t.2, 1855, p.383).Les colonnes de pâles lycéens, en uniformes de prisonniers, que des surveillants d'internat mal nourris mènent encore promener, les jeudis et les dimanches dans les clairières suburbaines (J.-R. Bloch,Dest. du S., 1931, p.125).Mon boulot consistait encore, d'autre part, avant l'heure des cours, à faire promener et pisser les chiens de garde du magasin (Céline,Voyage, 1932, p.128).
Envoyer promener qqn. V. envoyer I B 1.
REM.1.
Pourmener (se), verbe pronom.,arch. plais., synon. de se promener.Je me pourmène en canot avec Achille (Flaub.,Corresp., 1844, p.150).
2.
Promener, subst. masc.,hapax. Histoire qui m'est demeurée des lectures de mon enfance et qui me revient dans mes promeners solitaires (E. de Guérin,Journal, 1838, p.234).
3.
Promenette, subst. fém.Nom donné à plusieurs systèmes différents utilisés dans l'apprentissage de la marche aux bébés; en partic., petit véhicule à roulettes à l'intérieur duquel on place le bébé qui peut alors se déplacer seul grâce à ses jambes. Ceintures à bretelles, dite promenette, pour bébé no1. On met cette ceinture aux petits enfants pour les soutenir et les empêcher de tomber, alors qu'on leur apprend à marcher seuls (La Poupée modèle, avr. 1880, p.118).
Prononc. et Orth.: [pʀ ɔmne], (il) promène [-mεn]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.A. Trans. 1. 1365 «mener, faire aller en différents lieux» (Psautier lorr., éd. Fr. Apfelstedt, 79, 1: qui moinnes et promoinnes Joseph comme une berbis); 2. 1587 promener la haine (Fr. de La Noue, Discours pol. et milit., 75 ds Littré); 3. 1639 [éd.] «déplacer, faire aller et venir quelque chose» (Mairet, Le Grand et dernier Solyman, I, 3, Paris, A. Courbé, p.12); 1668 (Boileau, Satire, VIII, éd. A. Cahen, p.115, 288: il promene sa veuë). B. Pronom. 1. a) ca 1485 «aller d'un lieu à un autre (pour se détendre, prendre l'air ou sans intention définie)» (Myst. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, indication scénique suivant le vers 42157); b) α) 1656 Qu'il se promène (Molière, Le Dépit amoureux, IV, 2, 1193, éd. E. Despois, t.1, p.481); β) 1665 envoyer promener (Id., Dom Juan, IV, 5, t.5, p.179); γ) 1676 allez vous promener (Mmede Sévigné, Lettre du 1erjuin ds Corresp., éd. R. Duchêne, t.2, p.306); 2. 1600 [éd.] «s'attacher successivement à (en parlant du regard, de la pensée)» (O. de Serres, Théâtre d'agriculture, Paris, Jamet Métayer, p.17: les yeux s'y [és montaignes] promenans à l'aise); 3. 1674 «aller çà et là (en parlant d'une chose)» (Boileau, Art poétique, chant I, 167, éd. Ch. H. Boudhors, p.86). C. Intrans. 1530 «se promener» (Palsgr., p.770b). Réfection, d'apr. les nombreux verbes commençant par pro-, de l'anc. verbe pourmener «mener, faire aller en différents endroits» (ca 1150, Thèbes, éd. Raynaud de Lage, 2763), formé à partir de pour-* et de mener*. On trouve, en 1640, dans Oudin Ital.-Fr., s.v. spasso: le François dit envoyer paistre, envoyer pourmener. Fréq. abs. littér.: 7858. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 11460, b) 15034; xxes.: a) 12007, b) 8358. Bbg. Quem. DDL t.14, 30.