| PROLEPSE, subst. fém. A. − PHILOS., THÉOL. 1. Anachronisme par anticipation. Beaucoup d'exégètes ont pensé que ce nom propre de Dieu avait été révélé pour la première fois à Moïse au Sinaï, et que c'est pour cette raison que les récits dits élohistes commencent seulement à partir de cette révélation à nommer Jéhovah le dieu d'Israël. Ce serait donc par prolepse ou par anticipation que les récits jéhovistes auraient employé ce mot divin à l'époque patriarcale (Théol. cath.t.4, 11920, p.951). 2. Empl. adj. Principes prolepses. ,,Principes que l'âme contient originairement, et que les objets externes réveillent seulement dans les occasions, c'est-à-dire des assomptions fondamentales, ou ce que l'on prend pour accordé par avance`` (Lal. 1968). B. − RHÉT., GRAMM. 1. ,,Figure de grammaire consistant dans l'emploi d'une épithète où se peint soit un état antérieur, soit un état futur`` (Morier 1961). V. proleptique ex. de Suhamy. 2. Figure de rhétorique par laquelle on anticipe les objections de ses adversaires en les réfutant à l'avance. Parfois, la prolepse se combine avec l'apodioxis [rejet d'un argument comme absurde] en traitant d'absurde ou de regrettable l'objection prévue: Certains vont me dire −chose détestable −qu'aider les faibles c'est affaiblir la race. Ont-ils songé que la force de l'esprit n'est pas celle du corps? (Morier1961). C. − LING. Procédé syntaxique qui consiste à placer un terme dans une construction antérieure à celle à laquelle il appartient. La prolepse (...) consiste à jeter en tête un terme de la phrase, à l'isoler au moyen d'une pause, et à le reprendre dans la phrase au moyen d'un pronom ou d'un adverbe représentant. Types: Le père −, il n'a rien dit (...). Des oeufs −, je n'en vends pas! (Wagner-Pinchon1962, p.504). Prononc. et Orth.: [pʀ
ɔlεps]. Att. ds Ac. 1762 et dep. 1835. Étymol. et Hist.1. 1564 «figure de rhétorique par laquelle on va au-devant des objections de l'adversaire» prolepsie (Rabelais, Cinquiesme Livre, éd. Marty-Laveaux, 19, p.74); 1701 prolepse (Fur.); 2. 1842 «notions généralisées a priori, dans le système d'Épicure» (Ac. Compl.); 3. 1933 gramm. (Mar. Lex.). Empr. au gr.
π
ρ
ο
́
λ
η
ψ
ι
ς «opinion qu'on se fait d'avance», spéc. terme de rhét. «réponse anticipée à une objection», dér. de π
ρ
ο
λ
α
μ
β
α
́
ν
ω «présumer, préjuger». |