| POLICE1, subst. fém. A. − 1. Vx. Organisation politique et administrative (d'une société, d'un État). Ce peuple [la Chine], dont on vante tant la police, n'ose point s'étendre au-delà de sa muraille (Voy. La Pérouse,t.3, 1797, p.16). 2. P. ext., vieilli ou littér. Organisation rationnelle, discipline. Le défrichement des forêts, la multitude des grands chemins (...) font régner une sorte de police naturelle qui maintient l'ordre à la surface de la société (Chateaubr.,Polém.,1818-27, p.20).Un homme, quelque pudibond que vous le supposiez dans la police de sa bouche, ne saurait se défendre d'un excès quand l'appétit ne s'exerce complètement qu'une fois par jour (Balzac, OEuvres div.,t.2, 1830, p.43).Des actions qui sont toujours à portée, comme de régler l'emploi du temps; (...) par cette humble police de soi, l'esprit se trouve délivré sans qu'on s'en doute (Alain, Propos,1929, p.878). B. − 1. Organisation rationnelle de l'ordre public dans un groupe social donnant souvent lieu à une réglementation. Exercer, faire la police; mesures, ordonnance, règlement de police; police des cultes, des établissements de boisson, de jeux; police des prix. Souviens-toi de la police maintenue jusques ici, sans baïonnettes, par la seule vertu populaire (Robesp., Discours,Guerre, t.8, 1792, p.200).Pour veiller à la police, quatre compagnies, de mille hommes chacune, faisaient nuit et jour le guet à Amiens (Barante, Hist. ducs Bourg.,t.2, 1821-24, p.40).Muselier vient d'être chargé par Giraud des pouvoirs de police à Alger (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p.488). − En partic. ♦ Police administrative. V. infra C 1 a. ♦ Police municipale. Ensemble des ,,mesures d'ordre, de salubrité et de sûreté applicables dans la circonscription de la commune`` (Réau-Rond. 1951); pour un autre sens, v. infra C 3 a. ♦ Police rurale. Ensemble des ,,mesures destinées à assurer dans les campagnes la sécurité publique, la salubrité et le maintien du bon ordre notamment en ce qui concerne la protection des récoltes et la surveillance des animaux`` (Réau-Rond. 1951); pour un autre sens, v. infra C 3 c). ♦ Police sanitaire vétérinaire. ,,Ensemble des textes réglementant la lutte contre les maladies légalement réputées contagieuses et la surveillance des établissements classés comme dangereux, insalubres ou incommodes`` (Lar. agric. 1981). 2. P. ext. Organisation de l'ordre dans un lieu, dans un organisme privé ou public. Du reste, ils offraient que l'on prît quelles précautions on voudrait pour la police de ce lieu de réunion (Barante, Hist. ducs Bourg.,t.3, 1821-24, p.363). − Loc. verb. fam. Faire la police. Faire régner l'ordre. Elle veut qu'on se taise à temps, elle fait la police de son salon (Sainte-Beuve, Caus. lundi,t.2, 1850, p.317): 1. Les petites se poussent pour voir, et des bourrades s'échangent déjà, ainsi que des plaintes aigres. −Assez! crie Mademoiselle. Croyez-vous que j'ai le temps de faire la police?
Colette, Cl. école,1900, p.288. C. − Ensemble d'organes et d'institutions de la force publique, chargés d'assurer le maintien de l'ordre public en empêchant que des infractions soient commises et en recherchant, constatant et permettant de réprimer les infractions commises; p.méton., personnes faisant partie de ces institutions (d'apr. Yam.-Kell. 1970). La police est en bas, dans la loge de la concierge (Duhamel, Notaire Havre,1933, p.221).Et voilà que la police vient me tourner autour, et qu'on finit par faire une perquisition monstre rue de l'Université! (Triolet, Prem. accroc,1945, p.337).V. brigade ex. 4 et infra ex. 2 et 3. − HIST. Lieutenant* (général) de police. − Vx. Haute police. ,,Ensemble des moyens employés, des dispositions prises ou à prendre dans l'intérêt de l'État et de la sécurité des citoyens`` (Littré). Translation à Blois, où il habiterait sous la surveillance de la haute police (Sainte-Beuve, Volupté,t.2, 1834, p.7).Juge de police. Synon. de juge* de paix. (Dict.xixeet xxes.). 1. [Finalités de la police] a) DR. ADMIN. Police administrative. ,,Ensemble des pouvoirs et des règlements tendant à assurer l'ordre et la sécurité publics et l'organisation des services publics, mais limités dans la mesure indispensable à la paix publique, par des lois réglementant l'usage des libertés`` (Barr. 1967): 2. La dépendance de certains corps de police vis-à-vis de multiples autorités, les unes attachant une importance prédominante à la police judiciaire, les autres à la police dite traditionnellement ,,administrative``, n'est pas sans créer parfois de douloureux conflits de rôles.
Yam.-Kell.1970, p.79. b) DR. PÉNAL. Police judiciaire (abrév. P.J.*). ,,Organisation qui a pour mission de rechercher les infractions en vue d'assurer leur répression`` (Yam.-Kell. 1970, p.79). Procéder ou faire procéder à toutes opérations de police judiciaire dans les conditions prévues à l'article 10 du code d'instruction criminelle (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p.554).V. supra ex. 2.(Tribunal de) police correctionnelle*, p.oppos. à tribunal* de (simple) police. c) DR. MAR. Police du bord. ,,Capitainerie d'armes du bord, chargée d'assurer l'ordre et la discipline parmi l'équipage`` (GDEL). Police sanitaire maritime. Corps de l'administration chargé de veiller à l'exécution des prescriptions du service sanitaire (d'apr. GDEL). d) Domaine milit. ♦ Bonnet* de police. Poste de police. V. poste2. ♦ Salle de police. Local où couchent les soldats punis pour des fautes légères contre la discipline. L'élève-officier Bodina, huit jours de salle de police «pour avoir tiré la langue à son maréchal des logis...» (Barrès, Cahiers,t.11, 1915, p.121).V. apprendre ex. 14. ♦ Police militaire (abrév. P.M.). Corps de militaires chargé d'assurer les missions de police au sein des forces armées. (Dict.xxes.; pour un autre sens, v. infra C 4 b). ♦ Police judiciaire militaire. Institution chargée de rechercher les crimes ou délits commis par les personnes justiciables des juridictions militaires, d'en rassembler les preuves et d'en livrer les auteurs aux tribunaux chargés de les sanctionner (d'apr. GDEL). 2. [Services particuliers de la police] a) Police de l'air et des frontières. Forces de police chargées de veiller sur le déplacement des personnes d'un État à un autre. La région mentonnaise est terrain de chasse pour les 170 hommes de la PAF (police de l'air et des frontières, détachée, depuis 1969, au service des «Renseignements généraux») du commissaire Hansemann (L'Événement du jeudi,22-28 nov. 1984, no3, p.48). b) Police des moeurs*, police mondaine*. c) Police montée. Corps de policiers à cheval. V. monté II B 1 ex. de Bernanos. − En partic. Gendarmerie royale du Canada. Du Canada, les livres français connaissent la police montée, le sentier de la guerre (via Hollywood) et la cabane au Canada (F. Leclerc, Moi, mes souliers,1955, p.130 ds Richesses Québec 1982, p.1857). d) Police de la route. Forces de police chargées de la circulation routière. e) Police secrète. V. secret1. f) Police scientifique. Synon. de criminalistique.P. ext. Ensemble des techniques de la police fondées sur le recours aux moyens modernes d'investigation et de contrôle. La sous-direction de la police scientifique et technique (...). Englobant les services de l'identité judiciaire et les laboratoires scientifiques, elle est rattachée à la direction centrale de la police judiciaire (Le Monde, 9 mars 1985, p.11, col. 3). g) Fam. La police des polices. L'Inspection générale des services de la police nationale. L'IGS, la police des polices, a été saisie et l'enquête est partie sur des chapeaux de roue (Le Canard enchaîné,24 avr. 1985, p.4, col. 2). 3. [Compétence territoriale des différents services] a) Police municipale. Ensemble des forces de police dont la compétence s'exerce sur une commune et qui sont placées sous l'autorité du maire. Le bruit courait que le directeur de la police municipale, qui dirigeait le service d'ordre sur les boulevards, avait reçu un coup de couteau (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p.410).Pour un autre sens, v. supra B 1. b) Police nationale. Ensemble des forces de police dont la compétence s'exerce notamment dans les villes de plus de 10000 habitants et qui relèvent du ministre de l'Intérieur. V. infra ex. 4: 3. La France dispose de trois organes différents de police: la Sûreté nationale, police civile de tous les départements français sauf la Seine, la Préfecture de police (le «Quai des Orfèvres»), compétente dans les seules limites de Paris et de ses départements périphériques, la Gendarmerie nationale, police militaire chargée de la tranquillité et de la sûreté des campagnes. Depuis janvier 1968, la Sûreté nationale et la préfecture de police ne forment plus qu'un corps unique: la Police nationale.
Yam.-Kell.1970. c) Police rurale. Ensemble des forces de police dont la compétence s'exerce principalement dans les campagnes et qui dépendent, dans le cas de la Gendarmerie nationale, du ministre des Armées: 4. ... la police rurale −c'est-à-dire la gendarmerie −(...) a bénéficié d'une politique systématique de recrutement, de formation, d'équipement, ce qui l'a conduite à un point d'achèvement remarquable (...). Dans le même temps, la police nationale, la police de villes, qui concerne plus de trente millions de citoyens, qui traite les trois quarts des affaires judiciaires, bénéficie, pour des effectifs comparabes, de crédits d'équipement quatre fois moins importants.
Le Monde,6 nov. 1984, p.12, col. 3 et 4. 4. [Rattachement administratif des services de police] a) Police civile. Police rattachée au ministre de l'Intérieur. V. supra ex. 3. b) Police militaire. Police rattachée au ministre des armées. V. supra ex. 3; pour un autre sens, v. supra C 1 d. 5. Loc. verb. Être dans, de la police. Faire partie d'un corps de police. Je vous donne ma parole que je ne vous livrerai pas, je pourrais être cent fois de la police, comme vous dites, eh bien! je ne vous livrerais pas (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p.222).Qui aurait pu croire tout de même qu'il était de la police? (Nizan, Conspir.,1938, p.206). 6. En empl. interj. Police! [Empl. par les policiers pour se présenter, dans le cadre de leurs missions] Deux hommes se détachèrent de l'ombre. −«Police!» articula l'un d'eux, en tirant, avec un geste de prestidigitateur, un carton de sa poche (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p.499). 7. Région. (Canada). Policier. Y'a une police qui m'a pissé dans l'front (J. Barbeau, Le Chemin,1971, p.23 ds Richesses Québec 1982, p.1857). SYNT. Agent* de police; agent* de la police judiciaire; commissaire* de police; inspecteur* de police; officier de police judiciaire (v. officier2); préfet de police; contrôle, descente, opération, rafle de police; barrage, charge, cordon, forces, patrouille de police; car, fourgon, voiture de police; archives, interrogatoire, rapport, registre de police; aller chercher, appeler, avertir, prévenir la police; collaborer avec la police; dénoncer à la police; être filé, interrogé, poursuivi, recherché, surveillé, traqué par la police; école nationale, laboratoire de police; médaille d'honneur de la police; enquêteur, espion (vx), indicateur, informateur de (la) police; commissariat, poste, préfecture de police. D. − P. anal. 1. Police parallèle*. 2. Police politique. ,,Appareil policier établi par le régime en place, spécialement chargé de la surveillance des opposants politiques et de la répression des délits d'opinion dans les régimes totalitaires`` (Debb.-Daudet Pol. 1978). Le NKVD et les polices politiques en général (Camus, Homme rév.,1951, p.295). 3. Police privée a) Organisation privée spécialisée dans les enquêtes, les recherches criminelles et les renseignements confidentiels. Dès qu'on a su que j'étais ici, votre agence de police privée l'a envoyée à Florence (Larbaud, Barnabooth,1913, p.163): 5. Petit-Pouce se pencha vers lui et murmura: −Je fais une enquête. Mésange s'est également penché pour mieux entendre. −Te voilà dans la secrète? demanda Pierrot. −Non. Non. Police privée.
Queneau, Pierrot,1942, p.174. b) Entreprise de surveillance ou de protection utilisant les mêmes techniques que la police. (Ds Rob. 1985). 4. En compos. Police(-)secours. Organisation de police chargée, dans les grandes villes, de porter secours dans les cas d'urgence. Appeler Police secours. −Police-secours, S.A.M.U. [Service d'aide médicale d'urgence], médecin traitant? Qui m'envoie ce nouveau patient? s'interroge Pierre Balladur en s'élançant dans les interminables couloirs qui mènent à la «Porte» [aux urgences]. Dehors, sous la pluie, le gyrophare du S.A.M.U. tourne toujours. Sur un brancard, un homme geint (Le Figaro Magazine,9 mars 1983, p.79).Un fourgon de Police-Secours attendait, le gyrophare lançait ses éclairs bleutés (Th. Jonquet, La Bête et la belle,1985, p.70). Prononc. et Orth.: [pɔlis]. Homon. et homogr.: formes de polir et de policer. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. [Ca 1250 (copie du dernier quart du xvies.) pollice «réglementation» (doc. ds G. Espinas, La Vie urbaine de Douai au Moy. Âge, t.3, p.148)] 1365 police [ms. xves.] «bon ordre, bonne administration» (N. Oresme, Traictié des monnoies, éd. L. Wolowski, p.LXXIX); 1426 «administration, législation (d'une ville)» (doc. 4 avr. ds Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p.446); 1606 «ensemble des règles d'un état» (Nicot); spéc. 1690 Chambre de police (Fur.); 1762 juge de police (Ac.); 2. 1651 «administration veillant à l'observation des règles qui garantissent la sécurité publique» (Scarron, Le Roman comique, éd. E. Magne, 1955, p.25 d'apr. F. Siccardo, «Police», p.71); 1660 gens de police (Molière, Sganarelle, 17, éd. R. Bray, p.317); 1667 lieutenant de police (édit 15 mars d'apr. F. Siccardo, op. cit., p.80); 1797 agent de police (Laffon-Ladebat, Journal de ma déportation à la Guyane fr., 18 fructidor, pp.89-90 ds Quem. DDL t.15, s.v. agent); 1913 p.ext. police privée (Larbaud, loc. cit.); 3. 1825 milit. salle de police (Le Couturier, Dict. portatif et raisonné des connaissances milit.). Empr. au lat. tardif politia «organisation politique, gouvernement» (St Ambroise ds Blaise Lat. chrét.; désigne déjà chez Cicéron la République, traité de Platon, v. De Divinatione, 1, 60 ds OLD) accentué sur le rad., du gr. π
ο
λ
ι
τ
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ι
́
α «situation de citoyen; vie de citoyen; ensemble des citoyens; constitution républicaine ou démocratique» (v. Chantraine), dér. de π
ο
́
λ
ι
ς «cité». La forme policie, att. du xives. (Oresme) au xviiies. (Rousseau) est issue de politia accentué sur le suff. (v. FEW t.9, p.129). Bbg. Lötmarker (R.). Policier, adj. de relation. St. neophilol. 1978, t.50, pp.81-99. _Quem. DDL t.3, 11, 15, 21. _Siccardo (F.). Police. Genova, 1979, pp.7-261. |