| POIX, subst. fém. Matière collante, visqueuse et inflammable à base de résines et de goudrons végétaux utilisée principalement pour assurer l'étanchéité de divers assemblages. Poix bouillante, fondante; poix du cordonnier; le supplice de la poix; enduire de poix; calfater un navire avec de la poix; épais, noir comme de la poix. Les Pingouins versaient des ruisseaux de poix ardente sur les assaillants qui flambaient comme des torches (A. France,Île ping., 1908, p.143).La résine qui s'écoule après avoir subi une fusion qui sépare les matières étrangères, constitue la poix brute naturelle (Boullanger,Malt., brass., 1934, p.82):. Le mode d'adaptation des pièces hétérogènes qui entrent dans la composition d'un instrument ou d'une arme, d'une case ou d'un bateau, a été souvent une pierre d'achoppement pour les industries primitives. Des chevilles en os ou en métal ou même des enduits de poix ou de goudron ont pourvu ailleurs à ces nécessités.
Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum., 1921, p.121. ♦ Poix de Bourgogne ou poix des Vosges (obtenue par dessiccation du suc résineux de l'épicéa). Madame de C... se meurt: la paralysie gagne l'autre jambe (...). Elle vit avec un cataplasme de poix de Bourgogne qui la prend de la nuque à la chute des reins (Balzac,Lettres Étr., t.1, 1834, p.180). ♦ Poix blanche (obtenue par filtrage du galipot). ,,Matière jaunâtre ou blanchâtre produite par le pin et le sapin`` (Carabelli, [Lang. grav.], s.d.). ♦ Poix noire (obtenue par combustion lente de débris résineux). Là elle se sépare en deux parties, l'une liquide qu'on nomme huile de poix, l'autre plus solide (...): c'est la poix noire (Wurtz,Dict. chim., t.3, 1878, p.319). ♦ Poix résine (obtenue en émulsionnant le résidu de la distillation de la térébenthine avec de l'eau). Si au lieu de soutirer la collophane de l'alambic on la brasse fortement avec de l'eau, on lui fait perdre sa transparence: elle porte alors le nom de résine jaune ou poix résine (Wurtz,Dict. chim., t.3, 1878, p.317). − P. compar. Peut-on déchirer des ténèbres Plus denses que la poix, sans matin et sans soir, Sans astres, sans éclairs funèbres? (Baudel.,Fl. du Mal, 1857, p.89).Elle tremblait, des larmes roulaient sur ses joues, elle était si fiévreuse et si moite qu'il me semblait que d'ici un instant elle aurait tout entière fondu, laissant à sa place une flaque de poix, noire comme ses yeux (Beauvoir,Mandarins, 1954, p.420). Prononc. et Orth.: [pwɑ], [-a]. Homon. poids, pois, pouah. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 1635: Issi est neirs [Marsilies] cume peiz ki est demise); déb. xiies. (Benedeit, St Brendan, éd. E.G.R. Waters, 1213: Enfers jetet fu e flammes, Perches ardanz e les lammes, Peiz a sufre desque as nües); 1195-1200 (Renart, éd. M. Roques, 14797: ... une soille De poiz bolie ou de plon chaut); ca 1220 geter aige caude et pois bollant et plon [sur l'ennemi] (Anseïs de Carthage, 4346 ds T.-L.); spéc. a) ca 1200 servant à calfater, à rendre imputrescible oindre de pis boullïe [le barge d'admirail] (Destruction de Rome, 326 ds T.-L.); id. appareilher les vaissiauz de vin et les toneauz par sorespandüe piz [pice superfusa] (Li Dialogue Grégoire, 34, 13, ibid.); b) xives. servant à oindre, à confectionner des emplâtres pice poudree; pice grece [pix greca]; piche liquide (Moamin et Ghatrif, II, 12, 11; III, 10, 5; IV, 18, 32, ibid.); 1600 poix blanche de Bourgongne; poix-resine (O. de Serres, Theatre d'Agriculture, Paris, Jamet Métayer, p.957); c) 1434 servant à graisser, à lubrifier une mécanique (doc. Arch. Tournai ds Gdf. Compl., s.v. poisser); d) 1611 poix blanche de cordouannier (Cotgr.); 2. av. 1465 «voleur, malandrin» (Villon, Ballades en jargon, éd. A. Lanly, VII, 22). Du lat. pix, picis «poix»; le sens 2, parce que le malandrin fait main basse sur ce qu'il touche, comme si ses mains étaient enduites de poix, cf. poissard «voleur» (v. poissard1), poisser* au sens de «voler» et poisse3. Fréq. abs. littér.: 96. |