| POCHER, verbe A. − Empl. trans. 1. Vx, rare. Conserver longtemps dans une poche, dans un sac. Pocher des marrons, des olives. (Dict.xixeet xxes.). V. aussi pocheter. 2. Fam. Meurtrir l'oeil de quelqu'un d'un coup (de poing) violent qui fait enfler les chairs autour du globe oculaire. Je vis cette antique carcasse se retourner, se redresser avec une énergie que je n'aurais jamais soupçonnée (...) et, avec un regard de haine qui me parut de bon augure, le malandrin décrépit se jeta sur moi, me pocha les deux yeux, me cassa quatre dents (Baudel., Poèmes prose,1867, p.218). ♦ P. métaph. Elle est (...) marquée de rose au dessous des yeux, qu'un fard gris poche voluptueusement (Colette, Entrave,1913, p.59). − Empl. pronom. réciproque, pop. Se battre (à coups de poing). Que la guerre éclate, affirmais-tu, les proprios pourront se pocher; il y a leur galette qu'ils préserveront. Moi bougerai pas: rien à défendre (Benjamin, Gaspard,1915, p.20). 3. Spécialement a) ART CULIN. Faire cuire un oeuf sans sa coquille en le plongeant dans un liquide proche de l'ébullition de telle sorte que le blanc se coagule et forme une poche qui entoure le jaune resté mollet. − P. ext. Cuire dans un liquide (eau, court-bouillon, vin...) en maintenant la cuisson proche de l'ébullition. Pocher des croquettes, des quenelles; pocher des poires dans du vin rouge. Marquer un blanc mouillé avec le bouillon des arêtes de soles; passez; liez; beurrez fortement; finir avec un jus de citron et fines herbes. Pochez les filets de soles; dressez-les sur plat d'argent avec garniture de moules et crevettes (Hamp, Marée,1908, p.67).Brider la poularde en entrée (...) et la barder. La faire pocher à court mouillement dans un fond blanc de volaille (Gdes heures cuis. fr.,P. Montagné, 1948, p.190). b) BEAUX-ARTS (dessin, peint.) − ,,Esquisser (...) d'une manière rapide`` (Bég. Dessin 1978). Avec dextérité et force, il «poche» les épaules étroites du saint, recouvertes d'une aube aux cent plis. Le petit doigt en l'air, il tapote perpendiculairement du pinceau, et rattrape brillamment la coulure (La Varende,Roi d'Écosse,1941, p.11). − Exécuter un dessin au pochoir; faire des taches comme au pochoir. P. métaph. Le soir dans une salle presque obscure, après neuf heures, il venait des soldats qui se régalaient de vin rouge, dans l'épaisse fumée des pipes qui montait au plafond, s'étendait, emplissait la pièce et pochait la lumière sanglante de la lampe (Carco, Innoc.,1916, p.69). − ,,Délayer de l'encre de chine (...) de telle sorte que le mélange obtenu soit très épais et noir`` (Bég. Dessin 1978). c) INDUSTR. DU BÂT. ,,Donner à une peinture ou un revêtement une surface grenue imitant le grain de pierre`` (Barb.-Cad. 1963). B. − Empl. intrans. Former une poche, un pli disgracieux à un vêtement. Elle promena un regard à la fois de respect et de reproche sur le pardessus de confection que portait son fils, sur le pantalon bleu marine qui commençait à pocher aux genoux (Druon, Gdes fam.,t.1, 1948, p.30). Prononc. et Orth.: [pɔ
ʃe], (il) poche [pɔ
ʃ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Trans. 1. ca 1223 pocher (un oeil) à qqn «crever (un oeil) à quelqu'un» (Gautier de Coinci, éd. V. F. Koenig, II Mir. 27, 577); 1546 «meurtrir (un oeil) par un coup violent» (Rabelais, Tiers Livre, XX, éd. M. A. Screech, p.149); 2. a) ca 1223 oef pochié (Gautier de Coinci, II Chast. 10, 191); fin xiiie-déb. xives. [ms.] trans. (Viandier valaisan, éd. P. Aebischer, p.94); b) 1833 p.ext. pocher des quenelles (Gdes heures cuis. fr., Carême, p.130); 3. ca 1485 tout poché «bien imité» (Myst. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, 48571, cf. aussi Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 146 d'apr. des éd. de 1485-89); 1587 pocher «représenter quelqu'un par un dessin» (Cholières, 6eAp.-disnée, p.262 ds Hug.); 1768 «exécuter rapidement, à la manière d'une pochade» (Diderot, Salon de 1767, éd. J. Seznec et J. Adhémar, t.3, p.295); 4. 1660 «mettre en sac» (Bail Gautier, 6 mars ds Littré); 1766 poché «(fruit) qui a été conservé longtemps dans un sac» (Desgrouais, Les Gasconismes corrigés, p.172); 5. 1866 se pocher «se battre à coups de poing» (Delvau, p.308). B. Intrans. 1835 «se déformer, faire des poches» (Gautier, Mllede Maupin, éd. Charpentier, p.86 ds Fr. mod. t.15, 1947, p.217). Dér. de poche1*; dés. -er. DÉR. 1. Pochage, subst. masc.a) Art culin. [Corresp. à supra A 3 a] ,,Cuisson sans ébullition dans de l'eau ou dans un court-bouillon à température voisine de l'ébullition`` (Clém. Alim. 1978). b) Beaux-arts (dessin, peint.). [Corresp. à supra A 3 b] ,,Passage rapide d'une teinte à l'encre, à la peinture ou au crayon`` (Bég. Dessin 1978). − [pɔ
ʃa:ʒ]. − 1reattest. 1938 art culin. (Mont.-Gottschalk); de pocher, suff. -age*. 2. Pocheuse, subst. fém.Louche destinée à la préparation des oeufs pochés. (Dict.xixeet xxes.). − [pɔ
ʃø:z]. − 1reattest. 1874 (Lar. 19e); de pocher, suff. -euse (-eur2*). |