| * Dans l'article "PLAQUER,, verbe trans." PLAQUER, verbe trans. I. − Appliquer quelque chose sur quelque chose. A. − Appliquer (un revêtement) sur quelque chose. 1. [Sous forme de feuilles; le compl. d'obj. désigne soit le support, soit la matière appliquée] Recouvrir avec une matière souvent assez précieuse une autre matière de moindre valeur. − Spécialement ♦ ÉBÉN. Recouvrir de bois rares ou teintés débités en feuilles minces des bâtis de bois plus ordinaires. Des diverses manières de plaquer les surfaces planes. La colle-forte est l'intermédiaire dont l'ébéniste se sert pour fixer les feuilles de placage sur les bâtis (Nosban, Manuel menuisier,1857, p.113). ♦ ORFÈVR. Recouvrir d'argent, d'or ou de platine laminé des bijoux, de la vaisselle, des chandeliers. On plaque l'argent sur le cuivre, et l'on fabrique ainsi une sorte de vaisselle qui prend le nom de plaqué (Havard1890). 2. [Sous forme de couches qu'on projette] ,,Plaquer du plâtre, du mortier. Appliquer ces matériaux en appuyant fortement sur la surface à laquelle ils doivent adhérer`` (Chabat t.2 1876). B. − P. ext. Faire adhérer fortement quelque chose à quelque chose. 1. Plaquer qqc.1à, contre, sur qqc.2Elle offrit bravement ses lèvres qu'il plaqua aussitôt sur les siennes (Huysmans, En mén.,1881, p.216).Les callosités que le dur travail des champs avait plaquées aux paumes de ses mains frêles (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p.169).Julia plaque sa main sur la bouche de la petite (Giono, Gd troupeau,1931, p.221). ♦ Fam., vx. ,,On dit prov. et pop. plaquer quelque chose au nez de quelqu'un, pour dire, lui faire en face quelque reproche piquant`` (J.-F. Rolland, Dict. mauv. lang., 1813, p.106). − P. anal. À signaler encore un autre tableau, un village plaquant le rouge de ses tuiles dans des feuillées d'arbres (Huysmans, Art mod.,1883, p.106).Le feu, qui entrait d'un coup, leur plaquant au fond de la gorge un goût de bois brûlé (Malraux, Espoir,1937, p.761). − Au fig. Plaquer qqc. sur qqc.Joindre deux choses alors qu'elles n'ont pas de véritables rapports. Il ne s'agit pas de plaquer une déclamation quelconque sur une musique quelconque (Rolland, J.-Chr.,Amies, 1910, p.1177). − Empl. pronom. ♦ réfl. [Elle] fait entendre son chant perlé. Une voix rieuse de femme s'y plaque (Camus, Env. et endr.,1937, p.70). ♦ réfl. indir. Un jour, j'étais triste, je me suis plaqué sur la cervelle une demi-douzaine de bouquins graves (Taine, Notes Paris,1867, p.315). 2. Qqc.1plaque à, contre, sur qqc.2Son corps amaigri, sur lequel les jupes plaquaient, pareilles à un linceul (Zola, Fortune Rougon,1871, p.136).La gaze plaquait à mes épaules moites (Péladan, Vice supr.,1884, p.253). − Absol. ,,S'appliquer exactement contre. Il est bien fait ton habit: il plaque bien`` (J. Humbert, Nouv. gloss. genev., 1852, p.103). 3. Plaquer qqn à, contre, sur, dans qqc.Il me plaqua contre lui: −Je vous veux (Beauvoir, Mandarins,1954, p.430). ♦ [Avec un suj. abstr.] Si une mitrailleuse ennemie bat de son tir l'endroit où je me trouve, la crainte me plaque à terre (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p.104). − Empl. pronom. réfl., arg. ,,Tomber`` (Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896, p.221). Oui, mais moi, v'là que j'me plaque (Chans. des Gueux, ibid.). C. − Rare. Couvrir. Le soleil s'était élevé au-dessus de la falaise (...) sous ses rayons, les mousses qui plaquaient le chaume du toit se veloutaient d'une belle couleur verte (Malot, R. Kalbris,1869, p.87).De larges taches d'ombre plaquent les vitres (A. Daudet, Nabab,1877, p.196).Des formes incompréhensibles surgissent et plaquent le bleu noir du ciel (Barbusse, Feu,1916, p.105). − Empl. pronom. passif. Sa figure, auparavant prospère, se plaquait de teintes jaunâtres (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p.206). D. − MUS. Plaquer un accord. ,,Dans le jeu des instruments à clavier, faire entendre en même temps et avec force toutes les notes d'un accord`` (Mus. 1976). Anton. arpéger un accord.Un clavier complet, comportant une rangée de dix touches par ordre décimal (...) qui permet d'écrire plusieurs chiffres à la fois, à la manière d'un pianiste plaquant un accord (Couffignal, Mach. penser,1964, p.18).Ma mère avait plaqué les derniers accords de la fantaisie-impromptu (Sartre, Mots,1964, p.106). E. − SPORTS 1. LUTTE, CATCH. ,,Faire tomber son adversaire et le maintenir le dos au sol`` (Dupré 1972). 2. RUGBY. ,,Mettre à terre l'attaquant porteur du ballon en encerclant ses cuisses dans l'étreinte des bras et en accompagnant la chute`` (Petiot 1982). Les avants (...) plaquèrent sèchement (Match,20 nov. 1934, p.5 ds Grubb Sports 1937, p.57). II. − Pop., fam. Abandonner, quitter, laisser tomber. Tout plaquer. A. − [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Plaquer ses copains. Avoir plaqué sa femme et son gosse lâchement, dit Suzanne, voilà son plus grand exploit (Queneau, Loin Rueil,1944, p.223). − Empl. abs.: . Luc soupira: «Je me demande quel jeu il joue, ce petit zazou; moi à sa place, j'aurais plaqué depuis longtemps. −Je suppose qu'un de ces jours il s'en ira, dit Henri; mais il ne fera pas le jeu des autres; j'ai tenu mes engagements, il tient les siens.»
Beauvoir, Mandarins,1954, p.459. B. − [Le compl. d'obj. désigne un lieu, une propriété] Ça sera bientôt la belle saison, on plaquera un peu la boutique... on ira faire les marchés (Céline, Mort à crédit,1936, p.119). − Empl. abs. Dix-huit ans d'économies! (...) c'est bien le cas de le dire! un terrain qui prend tous les jours... tu laisses tout ça aux hypothèques!... tu plaques!... tu t'en fous! (Céline, Mort à crédit,1936p.494). C. − [Le compl. d'obj. désigne une occupation] Plaquer le boulot. À ce moment je crois que si j'étais licencié diplômé, je serais capable de plaquer l'agrégation (...) pour entrer aux Affaires étrangères comme dit Barrès (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1905, p.176). Prononc. et Orth.: [plake], (il) plaque [plak]. Ac. 1694 et 1718: placquer, plaquer; dep. 1740: plaquer. Étymol. et Hist.1. Mil. du xiiies. «appliquer (de l'or et de l'argent) sur les cheveux» (Chansons et dits artésiens, éd. R. Berger, XII, 85); 1553 «appliquer (du plâtre, etc.) sur un mur» (J. Martin, trad. de J.-B. Alberti, De re aedificatoria, p.34 rods IGLF, cf. déjà av. 1272 un empl. métaph. du terme techn. dans la tournure plaquer un mur de mortier chez Jean Bretel, Jeux-partis, éd. A. Långfors, 45, 37, ici en constr. abs.); 2. a) α) 1288 intrans. «apparaître» (Jacquemart Gielée, Renart le nouvel, éd. H. Roussel, 1240);
β) ca 1385 pronom. «se mettre, se placer» (Jean Cuvelier, Bertrand du Guesclin, 22251 ds T.-L.); b) α) 1747 «jeter quelqu'un à terre» (d'apr. Esn.);
β) 1881 se plaquer (au sol, etc.) (Rigaud, Dict. arg. mod.);
γ) 1886 plaquer qqn contre, sur qqc. (Loti, Pêch. Isl., p.127);
δ) 1900 rugby, trans. (L'Auto-vélo, 19 nov. ds Petiot); c) 1838 plaquer un accord (Berlioz, Beethoven, Paris, 1941, p.69); 3. a) 1505 «appliquer (une chose plate) sur une autre» (Mémoires de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France, t.28, 1901, p.186); b) 1676 «faire un placage de bois précieux sur du bois ordinaire» (Félibien, p.186); c) 1690 «appliquer (une feuille de métal, etc.) sur quelque chose» (Fur.); 1798 plaqué masc. «métal recouvert d'un autre plus précieux» (Ac.); d) 1829 plaqué «surajouté de façon peu naturelle» (Sainte-Beuve, Corresp., t.1, p.128); 4. 1544 «abandonner quelqu'un, quelque chose» (Calvin, Instruction contre les anabaptistes [VII, 82] ds Hug.). Empr. au m. néerl. placken «enduire, rapiécer, coller». Fréq. abs. littér.: 244. Fréq. rel. littér.: xixes. a) 69, b) 348; xxes.: a) 402, b) 548. DÉR. 1. Plaquage, subst. masc.a) Action de plaquer; résultat de cette action. Sous le plaquage de la robe mouillée (Goncourt, Journal,1870, p.655).Avec leurs zébrures et leurs plaquages de boue (Barbusse, Feu,1916, p.251).Au fig. Synon. de placage (V. ce mot I B).Cette partie logique (...) est toujours un plaquage d'importance secondaire (Ruyer, Esq. philos. struct.,1930, p.206).b) Rugby. Synon. de placage (v. ce mot I C).Vilain match avec ses plaquages à retardement (L'Auto,22 mars 1937ds Petiot 1982).c) Au fig., pop. et fam. Abandon. Synon. de placage (v. ce mot II).Elle avait cru que de me dire qu'elle avait été si liée avec l'amie de MlleVinteuil retarderait son «plaquage», la rapprocherait de moi (Proust, Prisonn.,1922, p.336).− [plaka:z]. Homon. placage. − 1resattest. a) 1864 «action d'abandonner (le travail)» (d'apr. Esn.), 1869 «action d'abandonner (une personne)» (ibid.), b) 1896 sports (Le Vélo, 30 nov. ds Petiot); de plaquer, suff. -age*. 2. Plaqueur, subst. masc.a) Ouvrier qui fait des travaux de placage. Plaqueur à la presse, sur métaux; plaqueur en ébénisterie. Après 1800, cette distinction de spécialités est restée la même, avec toutefois une plus grande variété due aux perfectionnements de la technique (lamineurs et plaqueurs, tourneurs sur métaux, polisseurs) (Grandjean, Orfèvr. XIXes.,1962, p.22).b) Rugby. ,,Joueur qui excelle à plaquer`` (Petiot 1982). − [plakoe:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1835. − 1resattest. a) 1239 «maçon» (doc., Douai ds Gdf.), b) α) 1803 «ouvrier qui procède au placage des meubles» (Boiste),
β) 1832 «ouvrier qui lamine à chaud les feuilles de métal pour obtenir le plaqué» (Raymond), c) 1906 rugby (L'Auto, 2 janv. ds Petiot); de plaquer, suff. -eur2*. BBG. −Chautard Vie étrange Argot 1931, p.469. _Quem. DDL t.27. |