| PIE1, subst. fém. et adj. inv. I. − Subst. fém. A. − ORNITH. Passereau de grande taille des régions tempérées de l'hémisphère Nord, à plumage noir et ventre blanc, qui jacasse bruyamment et vit dans les grands arbres à la cime desquels il construit son nid où il accumule des provisions et parfois de petits objets brillants. Les pies, sautillant sur la terre brune avec leur queue plantée dans leur croupion comme un éventail fermé, (...) jacassaient à l'aspect du chariot comme si elles se fussent communiqué leurs réflexions sur les comédiens et dansaient devant eux d'une façon dérisoire (Gautier, Fracasse, 1863, p.141).Et la pie, dont la voix est retentissante, qui aime à se percher à la pointe des peupliers, crie vers les quatre horizons: «À l'assassin!» (Pesquidoux, Chez nous, 1923, p.137): 1. ... il y avait une fois une servante qui fut mise en prison, pour avoir volé à ses maîtres un couvert d'argent. Deux mois après, comme on abattait un arbre, on trouva le couvert dans un nid de pie. C'était une pie qui était la voleuse. On relâcha la servante.
Zola, Th. Raquin, 1867, p.59. ♦ Pie agasse. V. agace ex.3, 4.Pie-grièche*. ♦ Pie de mer. Synon. huîtrier*.Nos chevaux écrasaient des coquilles au bord des flots; nous tirions des cormorans et des pies de mer (Flaub., Corresp., 1849, p.112). B. − Loc. et proverbes 1. Locutions a) [P. allus. au jacassement bruyant de la pie] ♦ Pie borgne. Personne qui parle beaucoup. Lorsque je t'écris, je suis pie borgne de mon naturel et je quitte ma taciturnité ordinaire (Balzac, Corresp., 1821, p.103).Cette pie borgne n'a-t-elle pas raconté je ne sais quelle histoire à propos du pain qui manque dans les paniers et de notre petite invention d'y suppléer (Frapié, Maternelle, 1904, p.143).V. borgne ex.6. ♦ Bavard comme une pie. [Il] était gai et bavard comme une pie (G. Leroux, Roul. tsar, 1912, p.126). ♦ Jaser/jacasser/bavarder comme une pie (borgne). Mon illustre amie, Mme Sand, m'a quitté samedi soir. (...) le soir nous bavardions comme des pies jusqu'à des 3 heures du matin (Flaub., Corresp., 1866, p.246).Jusqu'à Beuzeville elles furent seules et jacassèrent comme des pies (Maupass., Contes et nouv., t.1, Mais. Tellier, 1881, p.1185).Il jasait, en ce moment-là, comme une pie borgne, et s'écoutait lui-même, les yeux au plafond (Villiers de L'I.-A., Contes cruels, 1883, p.209).Catherine: (...) Vous n'aimez pas les femmes bavardes, il est heureux que vous ne l'ayez pas épousée, elle jacasse comme une pie (A. France, Com. femme muette, 1912, ii, p.2). b) [P. allus. au goût de la pie pour les objets brillants] Voleur comme une pie. Larron comme une pie (Ac. 1835, 1878, Littré).Masséna (...) était voleur comme une pie, ce qui veut dire par instinct (Stendhal, H. Brulard, t.1, 1836, p.444). 2. Proverbes a) Donner à manger à la pie (vieilli). ,,Se dit D'un joueur qui, pendant le jeu, met dans sa poche une partie de son gain, afin que ce qui en reste devant lui paraisse moins considérable`` (Ac. 1835, 1878). b) Avoir/tenir/trouver la pie au nid. S'imaginer avoir découvert quelqu'un/quelque chose d'extraordinaire, d'important, de rare. Je commence à croire, dit au jeune Lord le savant transporté de joie, que nous tenons véritablement la pie au nid, et je retire l'opinion défavorable que j'avais émise sur le compte de ce brave Grec (Gautier, Rom. momie, 1858, p.163).Le plus sage aurait été d'aller au bourg chercher les camarades. Mais si les oiseaux s'envolaient durant ce temps-là? Tant tourner lorsqu'on avait la pie au nid! (Pourrat, Gaspard, 1925, p.159): 2. [Gaspard] donnait à M. Levrault des leçons d'équitation (...). Il avait dressé pour Laure un joli cheval qui s'agenouillait devant elle, et la suivait comme un mouton bridé. Chaque jour, il inventait une distraction nouvelle. Bref, après avoir commencé par se rendre utile, il avait fini par devenir indispensable. M. Levrault (...) pensait avoir trouvé la pie au nid...
Sandeau, Sacs, 1851, p.11. C. − P. anal. 1. d'aspect a) [Avec le plumage noir et blanc de la pie] ART CULIN. Fromage à la pie. Fromage blanc maigre garni de fines herbes. Qu'est-ce que c'est que cela? (...) Pouah! de l'herbe au fromage à la pie! allons donc! (Dumas père, Dame Montsoreau, 1846, iii, 5, p.208).Du fromage à la pie écrasé sur du pain et semé de hachures de ciboule verte (Huysmans, À rebours, 1884, p.222). b) [Avec le nid de la pie] MAR. Nid de pie. Synon. de nid d'agace (v. ce mot B 2). ♦ OEil-de-pie*. ♦ Queue* de pie. 2. de comportement. Femme curieuse et bavarde. Madame Vauquer avait bien vu, de son oeil de pie, quelques inscriptions sur le grand-livre qui, vaguement additionnées, pouvaient faire à cet excellent Goriot un revenu d'environ huit à dix mille francs (Balzac, Goriot, 1835, p.27).Sans aucun doute il avait fait parler cette pie bavarde de Priscilla (Jouve, Paulina, 1925, p.116). II. − Adj. inv., p. anal. (avec le plumage noir et le ventre blanc de la pie). [En parlant d'un cheval] Dont la robe est de deux couleurs séparées par plaques dont l'une est blanche. Pie noir, pie alezan, pie bai. Des femmes couvertes de voiles jaunes, montées à califourchon sur des chevaux pie (Flaub., Tentation,1856, p.582).C'est beau, un alezan clair (...) suivi du tonnerre de l'escadron (...), des étalons blancs des trompettes aux juments pie des serre-files (Giraudoux, Électre, 1937, ii, 7, p.171): 3. Il ne restait plus trace du traîneau, ni du cocher; les deux chevaux étaient éventrés, deux magnifiques chevaux pie, (...) auxquels le général tenait beaucoup.
G. Leroux, Roul. tsar, 1912, p.18. − P. ell. en empl. subst. Un pie, une pie: 4. J'étais réduit à monter à la dérobée deux grosses juments de carrosse ou un grand cheval pie. La pie [ital. ds le texte] n'était pas comme celle de Turenne, un de ces destriers (...) façonnés à secourir leur maître; c'était un Pégase lunatique qui ferrait en trottant, et qui me mordait les jambes quand je le forçais à sauter des fossés.
Chateaubr., Mém., t.1, 1848, p.83. − P. anal. [En parlant de bovins] Pie rouge de l'Est. Déjà le décor familier des haies vendéennes, les chemins creux, les talus couronnés de souches, les vaches pie qui ont le beurre si jaune (H. Bazin, Vipère, 1948, p.162): 5. La Frisonne Pie Noire est une race lentement élaborée aux Pays-Bas par une sélection sûre et exigeante (...). À l'origine, on distinguait la Néerlandaise (...) et la Frisonne (...); les associations provinciales d'élevage se sont regroupées (...). Cette race a un rameau français (Française Frisonne Pie Noire) qui constitue la base du troupeau en Lorraine, en Champagne, en Brie et dans la Région du Nord...
Wolkowitsch, Élev., 1966, p.88. − P. anal. [En parlant de choses] Joseph était debout devant la commode couverte d'une plaque de marbre pie (Duhamel, Combat ombres, 1939, p.148). ♦ Voiture pie. Véhicule de couleur noire et blanche utilisé par la police. (Dict. xxes.). Prononc. et Orth.: [pi]. Homon. pi, pie2, pis. Att. ds Ac. dep. 1694. Selon Grev. 1964, § 381 bis l'adj. gén. inv. (des vaches pie-noir) peut parfois varier (des animaux rouges et pie-rouges). Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 ornith. subst. fém. (Horn, éd. M. K. Pope, 2764) souvent usité dans l'expression d'une valeur minimale, v. aussi Möhren, Le Renforcement affectif de la négation, p.188; 1563 parler comme pies en cage (Calvin, Serm. sur l'Ep. aux Galates, 16 −L, 480 −ds Hug.); 1625 jaser comme une pie (Stoer, Grand dict. fr.-lat.); d'où 2. 1640 «femme bavarde» (Oudin Curiositez: vne Pie .i. une cajolleuse); 1737 (Marivaux, Pharsamon ds OEuvres compl., éd. N. Duviquet, t.10, p.367: vous me permettrez de babiller un peu avec vous [dit Cliton à Fatime]. Je suis un peu pie de mon naturel, les femmes le sont tout-à-fait; et si nous nous mettons à parler...); 3. 1549 (Est.: On appelle aussi ung cheual pie, quand il est en partie blanc, en partie d'une autre couleur, pource qu'en ce il ressemble à l'oiseau nommé Pie); 1636 subst. (Monet); 4. 1680 fromage à la pie (Rich., s.v. fromage). Du lat. pīca «pie», également att. au sens de «bavard», forme fém. de pīcus «pic», d'orig. onomat., les formes masc. et fém. ayant servi à distinguer deux oiseaux différents, v. André Oiseaux. Pie a supplanté agace*. DÉR. 1. Piat, subst. masc.,fam. Petit de la pie. (Dict. xixes. et xxes.). − [pja]. − 1reattest. ca 1393 (Ménagier, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p.155, 20); de pie1, suff. -at*. 2. Piolé, -ée, adj.,région. (Centre). Qui est marqué de taches de rousseur. −Oui, mais c'est que MlleMinxit est rousse. −Elle n'est que blonde, Benjamin, je t'en donne ma parole d'honneur. −On dirait, tant elle est piolée, qu'on lui a jeté une poignée de son par la figure (C. Tillier, Mon oncle Benjamin, 1843, p.23).Il aperçut le petit gosse (...). Il l'embrassa sur sa joue piolée où tombait une mèche de cheveux roux (Renard, Journal, 1910, p.124).− [pjɔle]. Att. ds Ac. 1694, 1718. − 1resattest. ca 1225 pielé «marqué comme une pie, bigarré» (Reclus de Molliens, Charité, CLXXVII, 11, p.94), 1269-78 pïoler «bigarrer» (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 16014); de pie1, suff. -elé, -eler*, la forme en -o- faisant difficulté. 3. Piot, piote, subst.a) Petit de la pie. Tu annonceras à M. le curé que le temps me manque pour grimper à son pigeonnier. Il saura bien tuer les pigeons, sachant tuer les piots (Fabre, Barnabé, 1875, p.272).b) Région. (Meuse). Petit garçon, petite fille. Les «piots» meusiens à têtes rondes (...) suivent (...) la leçon du maître (Genevoix, Seuil guitounes, 1918, p.72).− [pjo], [pjɔt]. − 1reattest. 1250-70 pïot (Chastelaine de Saint Gille, éd. O Schultz-Gora, I, 280, p.45); de pie1, suff. -ot*. BBG. −Bambeck (M.). Mittellateinische Lexikalia zum FEW. Mél. Wartburg (W. von) 1968 t.2, pp.232-233. _Clouzot (H.). R. des Ét. rabelaisiennes, 1912, t.10, p.491. _Hasselrot 20es. 1972, p.82 (s.v. piat). _Lenoble-Pinson (M.). Le Lang. de la chasse. Bruxelles, 1977, pp.319-320, 322-328. _Sain. Arg. 1972 [1907], pp.108-109. |