| PHILOLOGIE, subst. fém. A. − [Surtout au xixes.] Étude, tant en ce qui concerne le contenu que l'expression, de documents, surtout écrits, utilisant telle ou telle langue. Sans De Sauves, j'enseignerais la philologie, moi! (Pailleron, Âge ingrat,1879, i, 6, p.23).V. aussi infatigable ex. 2: 1. La langue n'est pas l'unique objet de la philologie, qui veut avant tout fixer, interpréter, commenter les textes; cette première étude l'amène à s'occuper aussi de l'histoire littéraire, des moeurs, des institutions, etc.; partout elle use de sa méthode propre, qui est la critique.
Sauss.1916, p.13. ♦ [Avec adj. évoquant le domaine ling.] Philologie romane, sémitique. Curtius, philologue distingué, connu surtout par ses Principes d'étymologie grecque (1879), a été un des premiers à réconcilier la grammaire comparée avec la philologie classique (Sauss.1916p.16). ♦ Rare. [Avec un adj. évoquant un niveau de lang.] Et c'est (...) un petit problème assez curieux de philologie populaire (A. France, Crainquebille,1905, tabl. i, 1). ♦ P. anal. Savoir lire [le texte musical], retrouver sous la robe de l'expression et sous ses broderies le corps vivant, le corps tout nu (...) −comme ç'a été, pour la philologie beethovenienne, le très grand mérite de Heinrich Schenker (Rolland, Beethoven,t.1, 1937, p.120). − P. ext. [Sous l'infl. du concept allemand de Realphilologie] Étude des mots, des documents (écrits ou autres) et de tous les contenus de civilisation impliqués: 2. La philologie, en effet, semble au premier coup d'oeil ne présenter qu'un ensemble d'études sans aucune unité scientifique. Tout ce qui sert à la restauration ou à l'illustration du passé a droit d'y trouver place. Entendue dans son sens étymologique, elle ne comprendrait que la grammaire, l'exégèse et la critique des textes; les travaux d'érudition, d'archéologie, de critique esthétique en seraient distraits. Une telle exclusion serait pourtant peu naturelle.
Renan, Avenir sc.,1890, p.128. − En partic. Étude scientifique d'une langue quant à son matériel formel et son économie. Philologie française: 3. On oppose (...) communément la philologie aux sciences littéraires qui ne relèvent pas de la grammaire ou de la linguistique. La philologie, dans ce sens restreint, est l'étude des langues, des formes et de leurs emplois, l'étude aussi des divers procédés qui ont amené le développement des connaissances linguistiques et du langage parlé.
L'Hist. et ses méth.,1961, p.450. ♦ Philologie comparée/comparative. Cette étude portant sur la comparaison de langues d'une même famille. Synon. plus usuel grammaire* comparée.D'une section de la philologie, la philologie comparée, elle-même issue de la découverte du sanscrit au XVIIIesiècle, une science nouvelle, la linguistique, s'est dégagée (L. Febvre, Examen de consc. hist.,[1933] ds Combats, 1953, p.14). Rem. Dans un ex., le mot semble avoir reçu le sens de «étude pratique des langues». Gall admit d'abord deux organes, un pour la facilité et le goût d'apprendre des langues, la philologie (Broussais, Phrénol., leçon 17, 1836, p.604). B. − [Surtout au xxes.] Discipline qui vise à rechercher, à conserver et à interpréter les documents, généralement écrits et le plus souvent littéraires, rédigés dans une langue donnée, et dont la tâche essentielle est d'établir une édition critique du texte. Si j'ai ici parmi mes lecteurs quelque professionnel de philologie grecque et latine, par exemple quelque éditeur des textes de la Collection Guillaume Budé (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p.230).Dès ses origines, la philologie eut recours au rapprochement de textes parallèles, d'exemples d'une expression et de ses diverses variations attestées soit dans tel auteur, soit dans toute la littérature, pour corriger un passage ou pour le défendre contre une correction (L'Hist. et ses méth.,1961, p.483). Rem. gén. ,,Comme le mot grammaire, le mot philologie est souvent employé de façon complexe et ambiguë en français`` (Lang. 1973). Prononc. et Orth.: [filɔlɔ
ʒi]. Att. ds Ac. dep. 1740. Étymol. et Hist.1. 1486 philozogie «amour des belles lettres et études des sciences libérales» (Raoul de Presles, Cité de Dieu, livre IV, Exp. sur le chap.11, fos. 1 ro); 1516 philologie (Jean Bouchet, Temple de bonne renommée, fo64 ro); spéc. 2. 1802 «étude, science des langues» (Flick d'apr. FEW t.8, p.381a); 1818 philologie du moyen âge, philologie classique (W. de Schlegel, Observations sur la lang. et la litt. prov., p.62); 1840 philologie comparée (Fr. Wey, Étude sur la langue française ds Bibl. Éc. Chartes, t.1, p.471); v. aussi J. Engels ds Neophilologus t.37, 1953, pp.14-24. Empr. au lat. philologia, -ae «amour des belles lettres» att. également chez Sénèque (Lettres à Lucilius, éd. Fr. Préchac, 108, 23) au sens spéc. de «érudition, étude comme exercice académique», du gr. φ
ι
λ
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λ
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γ
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α «goût pour la dialectique» et «goût pour la littérature ou l'érudition», dér. de φ
ι
λ
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́
λ
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γ
ο
ς, v. philologue; 2 a peut-être été empr. à l'all., mais il est difficile de déterminer l'infl. de ce dernier, sur le mot fr. en ce sens (cf. FEW t.8, p.381b). Fréq. abs. littér.: 132. Bbg. Fourquet (J.). Ling. et philol. In: Colloque «Ling. et Philol.» 1977. 29-30 avril. Amiens, 1977, pp.7-14. _Henry (A.). Exposé introductif du groupe «Philologie». In: Actes du Colloque Francqui... 28-29 nov. 1980. Bruxelles, 1983, pp.139-153. _Imbs (P.). Philologie, linguistique, Romanité. Progr. du Centre de Philol. Rom. et de Lang. et Litt. fr. de la Fac. des Lettres de Strasbourg, 1956, t.1, pp.3-9. |