| * Dans l'article "PEUREUX, -EUSE,, adj. et subst." PEUREUX, -EUSE, adj. et subst. I. − Adjectif A. − [Corresp. à peur A] 1. Qui prend facilement peur (même dans des situations ou devant des objets peu effrayants). Synon. couard, lâche, poltron; (fam.) froussard, trouillard.Peureux comme un enfant, une femme; peureux comme un lièvre. Mon oncle était peureux comme la lune et avait une vague terreur d'un duel avec le mari (Goncourt,Journal,1870, p.548).Si j'avais été peureuse, murmura-t-elle, j'aurais eu bien peur, dans les premiers temps (Zola,Faute Abbé Mouret,1875, p.1355).V. constitutionnel ex.3, femmelette B ex. de Reider: 1. ... je dormais tout habillé, la fenêtre ouverte, en plein hiver, pour pouvoir, à la première alerte, foutre le camp par le toit, sans faire de bruit... Je ne suis pourtant pas peureux (...) je n'ai pas la chiasse quand je me promène les poches pleines de documents militaires au milieu des rafles...
Vailland,Drôle de jeu,1945, p.94. − [P. méton. du déterminé] Avoir un naturel peureux. Les caractères débiles et peureux sont les plus déplorables et la cause des plus cruelles souffrances (M. de Guérin, Corresp.,1835, p.225).Le théâtre, un endroit particulier pour la fabrication des imaginations anxieuses, peureuses (Goncourt,Journal,1888, p.866). − P. anal. [En parlant d'un animal] Les chiens timides et peureux restent timides et peureux toute leur vie (Carrel,L'Homme,1935, p.304). 2. Qui est pris de peur. Synon. apeuré, effrayé.C'est un vieil enfant à l'école, qui épelle d'une voix cassée, peureux, tremblotant entre le fouet et les férules (Michelet,Journal,1849, p.39).Chrysis s'avança dans le plus grand silence, peureuse à chaque pierre qui craquait sous ses pas (Louys,Aphrodite,1896, p.208). − [P. méton. du déterminé] ♦ [Le déterminé désigne une partie du corps, un comportement] Qui dénote de la peur. Attitude, voix peureuse; frisson, ton peureux. C'étaient des terreurs, des reculs peureux, des fuites de corps, des abritements sous les draps (Goncourt,Journal,1870, p.564): 2. On ne rencontrait dans les rues que des figures effrayées ou farouches (...) des regards peureux et baissés se détournaient de vous, ou d'âpres regards se fixaient sur les vôtres pour vous deviner et vous percer.
Chateaubr.,Mém.,t.1, 1848, p.371. ♦ [Le déterminé désigne une action, un moment de temps] Qui est vécu, accompli dans la peur. Fuite peureuse. Au sein des nuits peureuses, Faites entrer la foule aux ailes ténébreuses Des songes messagers de terreur et d'effroi (Chénier,Bucoliques,1794, p.197).Leurs pensées, ne s'arrêtant pas, les avaient promenés ensuite dans les angoisses, dans l'attente peureuse qui avait suivi l'assassinat (Zola,Th. Raquin,1867, p.138). − P. anal. [En parlant d'un animal] Comme un chevreau peureux et qui cherche un abri, Souré-Ha, tressaillant à ce nom tout entière, En trouble, se tourna (Dierx,Poèmes,1864, p.27). B. − 1. [Corresp. à peur B; constr. avec un compl. prép. de suivi d'un verbe à l'inf.] Vieilli. Qui appréhende, craint la réalisation de l'événement (désigné par le compl. prép.). Il était trop défiant et trop peureux de se voir refuser pour dire franchement: «Je vous aime !» (Champfl.,Avent. MlleMariette,1853, p.24).Je me sens si mal en train, si peureux de tomber malade hors de chez moi, que j'écris à la princesse qu'elle ne m'attende pas (Goncourt,Journal,1885, p.482). − [P. méton. du déterminé] [Des] mains gantées de frais, un peu peureuses de salir leurs gants (Goncourt,Journal,1892, p.305). − Rare. [Constr. avec un compl. prép. pour désignant la pers. ou l'objet pour lesquels on éprouve de l'inquiétude, de la crainte] Dans la tribune étaient les hommes et les femmes qui couvraient cela, avec leurs ventres, avec leurs gants, avec leurs pelisses (...) mais là-dessous prêts à mordre, peureux pour les pelisses et les places (Montherl.,Olymp.,1924, p.351). 2. P. ext. a) Qui montre une très grande timidité dans son comportement. Synon. craintif.Elle entra, peureuse, de l'air d'une fille qui se coule dans un endroit respectable (Zola,Assommoir,1877, p.775).Le jardinier était modeste et poli, presque peureux (Barrès,Cahiers,t.1, 1897, p.208). − [P. méton. du déterminé] Jérôme en retard s'assit, le dos rond et peureux, mais l'oeil vif et il osa avouer que le curé l'avait retenu (Mauriac,Baiser Lépreux,1922, p.159). b) Qui montre une très grande pusillanimité dans ses actions. Synon. faible, pusillanime, timoré.Les honnêtes gens, autrement dit la masse peureuse, qui voit que le résultat sera la perte d'un dixième de revenu sur les rentes du grand livre, commence à être moins morale, moins religieuse, moins monarchique que par le passé (Delécluze,Journal,1825, p.90).[Il] s'aplatissait devant tous, peureux devant l'opinion, le pouvoir et la presse, n'osant dire ce qu'il pensait, et d'ailleurs ne pensant plus (Rolland,J.-Chr.,Amies, 1910, p.1101). − [P. méton. du déterminé] Ces formes premières, le savant les recherche, par une induction lente et peureuse (...). Le poète, lui, qui sait qu'il crée, devine à travers chaque chose (Gide,Traité Narcisse,1891, p.9).Comment lutter, lui qui n'avait jamais lutté? Et une envie peureuse de ne pas sortir de sa quiétude l'étreignait (Estaunié,Empreinte,1896, p.38). C. − Région. (Canada), vieilli. [Corresp. à peur C] Pas peureux de. Qui n'est pas arrêté, gêné par le côté pénible ou désagréable de quelque chose. C'était un homme rare pour l'ouvrage, pas peureux de rien, et serviable, avec ça (Hémon,M. Chapdelaine,1916, p.144). II. − Substantif A. − [Corresp. à supra I A 1] Personne qui prend peur facilement. Gavarni faisait la remarque que la peur, qui amène d'ordinaire chez les peureux l'affaissement et le mutisme, développait chez le prince une fébrilité batailleuse (Goncourt,Journal,1892, p.231).Il y a le peureux qui regarde sous son lit, et le peureux qui n'ose même pas regarder sous son lit (Renard,Journal,1901, p.681).V. émotion ex.3. B. − [Corresp. à supra I B 1] Personne qui appréhende, craint la réalisation de quelque chose. Les peureux de la vie. Tous les peureux de l'action, en matière publique comme en matière privée, se livrent si aisément à l'attente passive du «miracle» (Mounier,Traité caract.,1946, p.403). C. − [Corresp. à supra I B 2 b] Personne pusillanime. Oh! la terreur de mon livre chez les peureux, chez les couards, chez les ménageurs de la chèvre et du chou! (Goncourt,Journal,1890, p.1246).Il y aurait la montagne des objections, imputations, calomnies, opposées aux combattants par les sceptiques et les peureux pour couvrir leur passivité (De Gaulle,Mém. guerre,1954, p.70). Prononc. et Orth.: [poeʀø], [pø-], fém. [-ø:z]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1160 pëoros «qui est dans l'anxiété sous l'empire de la peur» (Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 2765). Dér. de peur*; suff. -eux*; en a. fr. a signifié également «effrayant», v. Gdf. et T.-L. Fréq. abs. littér.: 317. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 254, b) 650; xxes.: a) 678, b) 374. DÉR. Peureusement, adv.D'une manière peureuse. a) [Corresp. à supra I A] Quand nous approchions (...) elle [une rainette] sautait à l'eau peureusement (Arène,J. des Figues,1870, p.47).Le commerce étant anéanti et les villes se tenant peureusement enfermées dans leurs remparts, à quoi pouvait-il servir [le réseau routier]? (P. Rousseau, Hist. transp.,1961, p.62).b) [Corresp. à supra I B 1] La pauvre femme, qui avait l'intuition de ce que pouvait être ce secret, s'efforçait peureusement d'en retarder l'aveu (Rolland,J.-Chr.,Révolte, 1907, p.600).Il comptait peureusement combien il en restait à passer avant lui, son ventre se serrait à mesure que son tour approchait, il espérait confusément qu'il allait se produire quelque chose (Dorgelès,Croix de bois,1919, p.300).c) [Corresp. à supra I B 2] Le dessin de violoncelle résonne forte, tandis que les autres voix font entendre peureusement le motif initial (Marliave,Quat. Beethoven,1925, p.335).La terre, tous feux éteints, renonçant à ses prétentions du jour, se donnait peureusement à son petit cabotage (Giraudoux,Bella,1926, p.20).Cette chance à laquelle j'ai toujours fait grise mine, dont je me défendais peureusement (Arnoux,Double chance,1958, p.66).− [poeʀøzmɑ
̃], [pø-]. Att. ds Ac. dep. 1878. − 1resattest. a) ca 1200 päurosement «d'une manière effrayante, qui fait éprouver de la peur» (Moralités sur Job, 344, 3 ds T.-L. [terribiliter]), seulement en a. fr. (v. Gdf. et T.-L.); b) ca 1225 pëorosement «d'une manière peureuse» (Hist. Guillaume le Maréchal, 10404, ibid.); de peureux, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér.: 51. BBG. −Cohen 1946, p.9. |