| PERPÉTUEL, -ELLE, adj. A. − [Gén. en parlant d'un inanimé] Qui ne connaît pas de cesse, qui dure indéfiniment. Synon. continu, continuel, éternel, incessant, permanent.Été, flux, printemps, renouvellement, retour, suintement perpétuel; vie perpétuelle. Des vierges étaient chargées comme les vestales à Rome, du soin d'entretenir le feu sacré perpétuel (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p.34).Les arbres, dont l'humidité perpétuelle moisit les reliques du musée alpin (Peyré, Matterhorn, 1939, p.46): 1. L'homme est donc perpétuel comme la fin à qui il est adressé. Incorruptible, dans son âme comme dans son corps, qui en est l'instrument nécessaire, la mort est pour lui un accident violent.
Claudel, Art poét., 1907, p.197. ♦ Alliance perpétuelle. Alliance conclue sans limitation de durée. (Dict.xixeet xxes.). ♦ Calendrier* perpétuel. Concession* perpétuelle. ♦ Mouvement perpétuel. Mouvement qui, une fois déclenché, se continuerait toujours de lui-même, sans altération. Ne pas admettre la réalité d'un mouvement perpétuel dans l'univers comme dans la matière au niveau atomique, c'est vouloir demeurer aveugle devant la plus magistrale évidence (L.-R. Hatem, Et l'univers fut, Le Dragon Éditeur-France, 1973, p.44).Loc. verb. fig. Chercher le mouvement perpétuel. Chercher la solution d'un problème insoluble. (Dict.xixeet xxes.). ♦ Neige(s)* perpétuelle(s). ♦ Paix perpétuelle. Paix universelle et permanente entre tous les hommes dont le projet a été souvent envisagé au cours de l'histoire. Ceux qui ont voulu établir un tribunal pour juger les querelles des nations, et établir ainsi entre elles une paix perpétuelle (Bonald, Législ. primit., t.2, 1802, p.98). − HORTIC. [En parlant d'une plante cultivée] Qui fleurit ou fructifie deux ou trois fois par an. Roses perpétuelles. Comme une fraise perpétuelle, je choisis, à l'exclusion de toute autre, celle de Gaillon, excellente, très fertile, donnant depuis le mois de mai jusqu'aux gelées (Gressent, Potager mod., 1863, p.381). − RELIG. CATHOL. ♦ Adoration perpétuelle. Adoration du Saint-Sacrement exposé, par des fidèles qui se relaient pour prier devant lui, de façon que l'adoration soit continue. V. adoration ex. 9. ♦ Notre-Dame du Perpétuel Secours. Une des appellations de la Vierge. Ses yeux levés au ciel voyaient Notre-Dame du Perpétuel Secours (Mauriac, Myst. Frontenac, 1933, p.125). B. − 1. [En parlant d'une condamnation pénale] Qui dure, qui doit durer toute la vie. Bannissement perpétuel; réclusion perpétuelle. La Chambre a adopté le projet de loi avec un amendement conseillé par le roi; elle a ajouté celui de l'exil perpétuel des régicides (Maine de Biran, Journal, 1816, p.96).L'évêque fut condamné à subir une prison perpétuelle au château Saint-Ange (Stendhal, Abbesse Castro, 1839, p.230). 2. [En parlant d'une pers.] Qui remplit une charge à vie. Si vous leur permettez d'être continuellement réélus, ils deviendront bientôt administrateurs perpétuels (Le Moniteur, t.2, 1789, p.343).J'ai détaché de mes journaux quelques mémoires (...) je vous prie, M. de les faire remettre à M. de Condorcet, secrétaire perpétuel de l'Académie, et mon correspondant (Voy. La Pérouse, t.4, 1797, p.164). − HIST. DU DR. CANON, vx. Vicaire perpétuel. Prêtre chargé des fonctions de curé dans une paroisse où le titre curial appartenait à un autre. (Ds Ac. 1798). 3. DROIT a) [En parlant d'un avantage] Qui dure toute la vie. Pension, propriété, rente perpétuelle; usufruit perpétuel. Toute épargne, tout accroissement de capital, prépare un gain annuel et perpétuel (Say, Écon. pol., 1832, p.115): 2. ... le roi Hilperik prit dans sa main droite la main de sa nouvelle épouse (...) en prononçant à haute voix les noms des cinq villes qui devaient, à l'avenir, être la propriété de la reine. L'acte de cette donation perpétuelle et irrévocable fut aussitôt dressé en langue latine...
Thierry, Récits mérov., t.1, 1840, p.354. b) Loc. adv. À perpétuelle demeure. De la ,,manière dont un meuble doit être attaché à un fonds pour devenir immeuble par destination`` (Cap. 1936). V. demeure ex. 4. 4. HIST. ROMAINE. Édit perpétuel. Édit que publiait le prêteur romain entrant en charge et d'après lequel il jugeait pendant la durée de ses fonctions. (Dict.xixeet xxes.). 5. DR. CANON. Voeux perpétuels (p.oppos. à voeux temporaires). Voeux solennels qui engagent pour sa vie un religieux ou une religieuse. Quelquefois, le voeu de chasteté était joint à celui de l'obéissance; et remarquez que ces voeux étaient, ainsi que ceux des profès, perpétuels (Huysmans, Oblat, t.1, 1903, p.202). C. − 1. [En parlant d'un inanimé] Qui est continuel, incessant. Bruit, vent perpétuel; perpétuel mal de tête, rhume de cerveau, tremblement; cauchemar, combat, danger, désir, effort, étonnement, ravissement, souci, soupçon perpétuel; crainte, crise, peur perpétuelle. Elle était sans doute sous les platanes, près de la fontaine, dans le perpétuel frisson de cette eau murmurante (Zola, Dr Pascal, 1893, p.86).Le trait le plus saillant de son caractère était une impatience chronique, un mécontentement perpétuel qui devenait de la rage à la plus légère contradiction (Bloy, Femme pauvre, 1897, p.202): 3. Mécontents, fatigués de Naples, ils décidèrent de retourner à Rome. Un perpétuel besoin de changement les agitait, comme le malade qui dans son lit cherche en vain une place fraîche et transporte sa fièvre avec son corps.
Maurois, Ariel, 1923, p.259. 2. [En parlant d'une pers.] Qui est, de manière continue ou répétitive, dans un état ou dans une situation donnée. (Dict.xxes.). Un malade perpétuel, un perpétuel bavard, un invité perpétuel. D. − Le plus souvent au plur. [En parlant d'un inanimé] Qui se renouvelle souvent. Synon. fréquent, réitéré, répété; anton. exceptionnel, rare.Lassé par leurs perpétuelles criailleries, par leurs continuelles récriminations (Huysmans, Art mod., 1883, p.278).Tu crois que j'ai besoin de ces scènes perpétuelles? Tu te trompes drôlement! (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.264): 4. La beauté du pays, celle de la saison, celle des routes, la propreté des auberges, l'air de bonheur, de raison et de régularité des habitants, sont, pour tout voyageur qui observe, une source de jouissances perpétuelles.
Constant, «Cahier rouge», 1830, p.74. REM. Perpétualité, subst. fém.,rare. Fait d'être perpétuel, de durer. Elle se dit qu'il n'est pas temps encore de cesser de torturer, et qu'il faut auparavant donner au condamné les plausibles raisons qui déterminèrent la perpétualité du supplice (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p.314). Prononc. et Orth.: [pε
ʀpetɥ
εl]. Ac. 1694 et 1718: -petuel; dep. 1740: -pétuel. Étymol. et Hist. 1236 perpetual (Tuetey, Doc. inéd. sur la Fr.-Comté, p.8 ds Gdf. Compl.); 1251 aumone perpetuel (Chartes de Haute-Marne, éd. J.-G. Gigot ds Doc. ling. de la France, t.1, p.31); 1320 «qui remplit une charge à vie» (Cartul. d'Arras, B.N. l. 17737, fo130 rods Gdf. Compl.: capelains ... perpetueus); 1547 p.exagér. «fréquent, habituel» (Noël du Fail, Propos rustiques, éd. J. Assézat, t.1, p.104: perpetuelle inimitié). Empr. au lat. perpetualis «permanent, qui dure indéfiniment» (dér. de perpetuus «qui est continu, sans interruption»). Fréq. abs. littér.: 2423. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3523, b) 2722; xxes.: a) 3710, b) 3607. Bbg. Quem. DDL t.7. |