| PERLER, verbe I. − Empl. trans. dir. A. − [Le procès concerne un solide] 1. Orner de perles. Perler un sac à main (Lar. Lang. fr.). 2. CONFIS. Fabriquer avec du sucre de petites dragées en forme de perle. (Dict. xixeet xxes.). Décorer de petites dragées en forme de perle (Dict. xixeet xxes.). 3. AGRIC. Arrondir et dépouiller de leur tégument les grains d'orge, de riz (Dict. xixeet xxes.). B. − 1. Exécuter un ouvrage, un travail en y apportant un soin minutieux. Synon. fignoler (fam.).Claudine, je vous en prie, soignez vos ourlets à point devant, vous ne les perlez pas (Colette, Cl. Paris,1901, p. 255). − Empl. abs. La seule hâte me fait travailler, comme toujours. Sinon, je perle trop (Nerval, Corresp.,1853, p. 198). 2. MUS. Exécuter un morceau en détachant chacune des notes, chacun des sons avec une grande netteté. Perler un morceau. Houfflack perle son solo avec une élégance exquise [dans le prélude du Déluge, de Saint-Saëns] (Willy, Bains de sons,1893, p. 27).Le petit détaché [au violoncelle] sert à perler certains passages rapides et incisifs (Lallement, Dyn. instrum. archet,1925, p. 207). − Perler un trille, une roulade. Sa voix, perlant tout bas ses notes argentines, Berçait mon coeur, ainsi qu'un psaume des matines (Moréas, Syrtes,1884, p. 51). ♦ Empl. abs. Cette voix, qui perle et qui filtre Dans mon fond le plus ténébreux, Me remplit comme un vers nombreux (Baudel., Fl. du Mal,1857, p. 82).Tu marchais sous le ciel nocturne, À l'heure où perlent les grillons, Près d'un compagnon taciturne (Noailles, Forces étern.,1920, p. 289). C. − Rare, littér. 1. Qqc.1perle qqc.2Conférer à quelque chose la teinte et l'éclat des perles. Elle [la Lampe du ciel] argente l'ombre au fond du ravin, Et, perlant les nids posés sur la palme (...) emplit l'horizon sans fin (Leconte de Lisle, Poèmes trag.,1886, p. 26). − Empl. pronom. Le raisin se perle, son pampre montre un voile de fils blancs dont la délicatesse fait honte aux fabriques de dentelles (Balzac, Paysans,1844, p. 8). 2. Qqc. perle à/sur qqc.Apparaître (à un endroit tel ou tel) avec la teinte, l'aspect d'une perle. Il eut honte aussitôt, et essuya la sueur à sa lèvre où perlait une moustache naissante (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 444).Elle le regarda avec méfiance et un petit sourire perla sur ses lèvres. «Oh! je ne te déteste pas toujours», dit-elle (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 95). II. − Empl. trans. indir., littér. [Le procès concerne un liquide; les indices ci-après désignent: une substance liquide (1); la surface d'un objet (2); l'aspect que prend qqc. (3)] A. − Apparaître en gouttes arrondies qui ont la forme de perles (à la surface de quelque chose). 1. a) Qqc.1perle à/sur/en qqc.2(de qqn).Une sueur glacée commençait à perler au front de MmeMalassis (Ponson du Terr., Rocambole,t. 3, 1859, p. 253).L'eau du bain perle encore en ses cheveux de jais (Moréas, Cantil.,1886, p. 183).Il fallait la voir au jardin, rose et vive, des gouttes de rosée lui perlant jusque sur le nez (Pourrat, Gaspard,1930, p. 16): . ... elle revint au chevet de la malade afin d'essuyer le petit front où perlait la transpiration.
Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 881. − P. métaph. Il semble qu'on voie perler sur sa peau satinée la douce moiteur du sommeil! (Gautier, Guide Louvre,1872, p. 34). b) Qqc.1perle à/sur qqc.2(de qqn) en qqc.3L'humidité perlait sur mon manteau en gouttelettes froides (Gracq, Syrtes,1951, p.197). − [P. méton.] Une minute plus tard, séchait encore, sur ses tempes, l'exaspération qui y perlait en sueur, quand il s'épanouit brusquement (Courteline, Ronds-de-cuir,1893, 2etabl., ii, p.68). − P. métaph. D'abord imperceptible, goutte à goutte, la conscience y perle en sueur lumineuse (Romains, Vie unan.,1908, p.68). 2. Qqc.1perle à/sur/de/en qqc.2Pose ton pied charmant sur les mousses, et fais De ta coupe perler l'onde de la fontaine (Régnier, Jeux rust.,1897, p.215).À moi, les rosées de l'aube perlant sur ces feuilles tendres (Zola, Violaine,1902, i, 1, p.556). 3. Qqc.1perle.Et d'un soir de mai, doux et frais, On sentait perler les rosées (Leconte de Lisle, Poèmes ant.,1874, p.303).Les lèvres laissèrent perler une goutte de sang (Maurras, Chemin Paradis,1894, p.162).Des euphorbes, à peine les touchait-il, laissaient perler des gouttes de suc, d'un blanc plus blanc que celui du lait (Genevoix, Rroû,1931, p.86).Près de la tempe, perlait une légère mousse, comme de la sueur sanguinolente ou de la rosée (Cendrars, Bourlinguer,1948, p.132). − En partic. Qqc.1perle de qqc.Après l'utilisation du rasoir on remarque un flux séborrhéique perlant des orifices glandulaires (Quillet Méd.1965, p.315). B. − Rare. Être sous la forme de perles à la surface de quelque chose. Qqc.3perle qqc.1(de qqn).Catherine revint par un jour d'orage terrible. (...) des gouttes perlaient son visage rose-thé (Triolet, Prem. accroc,1945, p.168). C. − Exsuder des gouttes en forme de perles. 1. Qqc.2(de qqn) perle.Le nez de Mollandeux perlait à ce moment (Goncourt, Ch. Demailly,1860, p.45).Il me dit, en s'essuyant son crâne chauve, qui perle: «Ah! j'sue déjà!» (Goncourt, Journal,1863, p.1355).Je suis au bain turc. Je perle comme un alcarazas (Morand, Homme pressé,1941, p.30). 2. Qqc.2(de qqn) perle de qqc.1Un homme dont le nez et le front perlaient d'alcool à toute heure (Goncourt, Soeur Philom.,1861, p.82). REM. Perlifier, verbe trans.,hapax. Former des perles (à la surface de quelque chose). Pratiquant les ablutions en nombre considérable à cause de (...) [l']oléigénation qu'il attribuait à la trop grande contension de ses humeurs cervicales non volatiles mais fixées et perlifiant tout partout à la surface de son corps (Queneau, Enf. du limon,1938, p.11). Prononc. et Orth.: [pε
ʀle], (il) perle [pε
ʀl̥]. Att. ds Ac. dep. 1878. Étymol. et Hist.A. Trans. 1. 1554 «orner de perles» ici, au fig. (L. Le Caron, La Poésie, fo48 ro); 2. 1833 «détailler (des sons, des notes) avec soin» (Gautier, Albertus, p.150: Le rossignol chantait et perlait ses roulades); 3. 1834 «exécuter un travail avec grand soin» ici, cout. (Land.); 4. 1836 confis. (Raymond). B. Intrans. 1. 1844 «se former en perles, en gouttes» (A. Dumas père, Les Trois Mousquetaires, éd. Ch. Samaran, p.302); cf. 1837 se perler «id.» (Balzac, C. Birotteau, p.306), attest. isolée; 2. 1918 au fig. «apparaître progressivement» (Toulet, Comme une fantaisie, p.31: Déjà le ciel n'était plus qu'une nue indistincte où perle la lumière). Dér. de perle*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 153. DÉR. 1. Perlage, subst. masc.a) Modes, habill.
α) Action de coudre des ornements de perles (sur un vêtement). Sauf l'occupation (...) qui consiste en un perlage, avec le jais, de festons de guipures, de tulle, etc., s'appliquant aux tuniques, aux tabliers (...) rien, à cette heure de renouvellement d'étoffes et de façons, qui soit très-saillant (Mallarmé, Dern. mode,1874, p.794).
β) Ensemble de perles cousues sur un vêtement, un ouvrage pour le décorer. Synon. perlure.Avec un art qui lui est tout personnel Christian Dior sait doser avec une minutieuse exactitude broderies et perlages sur tous ses ensembles (Le Monde,22 nov. 1951, p.11, col. 3).b) Technol. «Apparition de gouttelettes d'huile aux électrodes des bougies ou dans les cylindres d'un moteur à explosion par suite d'une mauvaise combustion» (Rob. Suppl. 1970). c) Confis. Ensemble des petites dragées complétant la garniture des boîtes. (Dict. xixeet xxes.). − [pε
ʀla:ʒ]. − 1resattest. a) 1874 (Mallarmé, loc. cit.), b) 1926 «perles cousues sur un vêtement» (Psyché, sept., p.22 ds Quem. DDL t.16); de perler, suff. -age*. 2. Perleur, subst. masc.,,Appareil à perler le riz`` (Lar. Lang. fr.). − [pε
ʀloe:ʀ]. − 1reattest. 1875 (Lar. 19e); de perler, suff. -eur2*. 3. Perloir, subst. masc.a) Outil gravé en creux qu'utilise notamment le ciseleur pour décorer une surface d'ornements en forme de perles. Chez les marchands qui vendent des articles spéciaux pour le travail du cuir, on trouve une série de matoirs, perloirs, outils terminés par une forme, une matrice qu'on frappe avec le marteau pour orner le fond (Closset, Trav. artist. cuir,1930, p.29).b) Confis. Entonnoir utilisé pour perler les dragées. (Dict.xixeet xxes.). − [pε
ʀlwa:ʀ]. − 1reattest. 1752 «outil servant à faire des ornements en forme de perles» (Trév.); de perler, suff. -oir*. |