Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
PERFECTION, subst. fém.
Qualité, état de (ce) qui est parfait, sans défaut. Anton. imperfection.
A.− [Corresp. à parfait1I A; le compl. désigne un volume, un processus, etc.] Qualité, état de ce qui a atteint sa plénitude, de ce qui a été poursuivi jusqu'à son terme, de ce qui est parvenu à son achèvement. Synon. achèvement, épanouissement, fin, intégralité, plénitude, totalité; anton. début.Les armes des animaux atteignent leur perfection en même temps que les organes de la génération. Si on leur retranche ces organes avant leur développement, le corps n'atteint plus à sa perfection (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 326).Parvenir à la perfection de l'union dont elle [la connaissance par foi] est un commencement (Lacroix, Marxisme, existent., personn.,1949, p. 111):
1. Pour Aristote même, c'est à la politique que (...) tout demeure subordonné comme à la fin dernière. La cité n'est pas un étage dans l'édifice humain, c'est le couronnement universel. Et là où nous ne voyons plus qu'un degré ou un moyen, il trouvait le terme suprême et la perfection de l'activité humaine. Blondel, Action,1893, p. 275.
Loc., vx. Mener à perfection. Achever, terminer. Synon. parfaire.À présent le barbier, pour mener à perfection son ouvrage, étalait (...) une mousse onctueuse et, du clair d'un second rasoir (...), raffinait (Gide, Caves Vatican,1914, p. 798).
Rem. Les textes où perfection est employé dans le sens A ne sont pas sans évoquer les autres sens du mot, peut-être parce que le sens A commence à vieillir.
B.− Qualité, état de ce qui présente pleinement tous les caractères typiques.
1. [Corresp. à parfait1I B 1] Qualité, état de (ce) qui réalise pleinement les propriétés attendues, de (ce) qui répond à une norme idéale.
a) [Critères d'ordre quantitatif, physique, matériel] Synon. adéquation; anton. défectuosité, ébauche, esquisse, grossièreté.Perfection de l'organisation, du travail. En observant l'enchaînement de tous les phénomènes de la nature et leur progression hiérarchique, depuis ceux qui ont le plus de simplicité, (...) jusqu'à ceux qui offrent le plus de complexité et de perfection organique (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 608).Une de ces créatures médiocres qui ont besoin de la perfection des éléments et auxquelles il faut l'air le plus pur, l'eau la plus pure (Giraudoux, Sodome,1943, ii, 2, p. 98).Un modèle de perfection technique et de progrès médical (Le Monde,19 janv. 1952, p. 4, col. 2).
Absol. Dans ces maisons que ne trouble aucun écho du dehors, le silence atteint à une qualité, une perfection véritablement extraordinaires (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1034).V. perfectionnement ex. de Decaux.
P. méton. Chose parfaitement réalisée. Notre souper (...) avait cependant pour base une superbe volaille truffée. (...) c'était une perfection. Les truffes surtout étaient délicieuses (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 98).
b) [Critères d'ordre esthétique, intellectuel, affectif, éthique, social] Synon. correction, exactitude, impeccabilité, parachèvement, précision; anton. approximation, imprécision, incorrection, inexactitude, laideur, médiocrité.Perfection intellectuelle; perfection de l'/des art(s), de la/des forme(s), de l'œuvre, du style, des traits. Plan qu'il achèvera avec ce fini et cette perfection de détails qui caractérisent sa manière (Gautier, Fracasse,1863, p. 352).Un beau vers a cette plénitude, cette perfection, cette réconciliation merveilleuse du rythme, de la rime et du sens (Alain, Propos,1930, p. 911).V. bon1ex. 5 :
2. Le chef-d'œuvre, ce fut un livre parfait (...). Un livre qui, d'emblée, s'imposa comme un modèle. Si bien que peut-être, dans sa perfection, il est responsable de l'attachement un peu exclusif que les géographes français ont marqué, après lui, pour la monographie régionale. Du beau travail français, cette thèse, fignolée avec amour jusque dans ses petits détails. L. Febvre, J. Sion, A. Demangeon,[1941] ds Combats, 1953, p. 381.
Absol. C'est un objet parfait. Mais le goût de la perfection va se perdant et je pressens venir un temps où même elle fera sourire, (...) où (...) la pondération harmonieuse, la nuance, l'art enfin, céderont aux qualités « de choc » (Gide, Journal,1943, p. 243).V. perfectible ex. 2 :
3. Un homme de génie disait que la vue de l'Apollon du Belvédère ou d'un tableau de Raphaël, le rendait meilleur. En effet, il y a dans la contemplation du beau, en tout genre, quelque chose qui nous détache de nous-mêmes, en nous faisant sentir que la perfection vaut mieux que nous... Constant, Princ. pol.,1815, p. 132.
Locutions
Être la perfection (même). Être la meilleure expression ou représentation de toutes les qualités possibles dans tel domaine. C'est la perfection! l'idéal, l'oiseau rare, miss Watson!... (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie,1869, ii, 7, p. 118).Non seulement l'andante est la perfection même, mais dans tout le premier mouvement je sens une singularité élégante, (...) partout un modelé gracile et accompli (Du Bos, Journal,1928, p. 29).
Être la perfection de (+ subst.). Être la forme la plus réussie de (quelque chose). Une union qui eût été (...) la perfection du mariage (Renan, Drames philos.,Abbesse Jouarre, 1886, i, 5, p. 628).
P. méton.
Gén. au plur. Qualité portée au plus haut degré. Anton. défaut, vice.Être doué de toutes les perfections possibles. Elle réunissait toutes les perfections, la jeunesse, la beauté, la vertu, l'amitié, la tendresse, l'amour, la générosité : c'était le chef-d'œuvre de la nature (Restif de La Bret., M. Nicolas,1796, p. 200).Cette sensibilité exquise est-elle un avantage, une perfection? (Senancour, Rêveries,1799, p. 60).Une foule de délicatesses, de perfections petites mais charmantes, de raffinements particuliers auxquels l'esprit français peut seul prétendre (Gobineau, Pléiades,1874, p. 77).V. bonhomie ex. 2.
Personne ou (plus rarement) chose qui réunit toutes les qualités dans tel domaine. Synon. merveille, (fam.) [pour une pers.] ange, bijou, trésor.Personne (...) n'aurait osé soupçonner Isodore de la plus légère infraction à une loi quelconque de la morale. (...) C'était une perfection, une perle (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Rosier MmeHusson, 1887, p. 689).C'est une personne admirable, une perfection (Duhamel, Journal Salav.,1927, p. 7).Ce sont des pinceaux excellents dans la main d'un artiste parfait comme celui dont s'est servi Sesshiu quand il a dessiné ce cercle, une perfection pour toujours, sur la paroi de Kyotô (Claudel, Soulier,1929, 4ejournée, 2, p. 858).
c) MUS. ,,Depuis Francon de Cologne, p[erfection] désigne (...) la division ternaire de l'unité de mesure représentée par la longue ou le groupement par trois des brèves`` (Mus. 1976). Les signes de mesure si nombreux [dans la notation de la musique, dans la 2emoitié du XVes.] répondent aux subtils calculs rythmiques du principe impair, ou ternaire, appelé perfection, et pair, ou binaire, dit imperfection. Ils dérivent soit du cercle complet, qui est l'emblème de la perfection, soit du demi-cercle, celui de l'imperfection (BrenetMus.1926, p. 298).
d) Loc. adv. À la perfection ou (vieilli) dans la perfection, en perfection. De manière parfaite, sans défaut. Synon. le mieux du monde, parfaitement.C'est juste, c'est bien dit, c'est arrangé et concerté en perfection (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 5, 1859, p. 383).Véronique continuait d'accomplir dans la perfection tout le détail de ses devoirs. Elle commençait, régulière, sa journée à quatre heures du matin (Jouhandeau, M. Godeau,1926, p. 197).Il réussissait les ressemblances à la perfection et nul ne savait mieux que lui reproduire avec son matériau les particularités des physionomies (Queneau, Pierrot,1942, p. 64).V. chanter ex. de Maupassant.
2. Avec une valeur péj. ou p. iron.
a) [La perfection (notamment formelle, dans le domaine artistique) considérée comme signe de pauvreté intérieure ou comme source d'ennui par sa régularité classique, son manque d'imprévu] Ses traits offraient la perfection et l'insignifiance de la beauté grecque (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 266).Lu de Mérimée quelques pages dont l'ennuyeuse perfection me lasse. (...) Ce ton élégant, cette maîtrise parfaite de ses émotions, (...) cette phrase brillante et glacée (Green, Journal,1929, p. 10).V. amour ex. 273.
b) [Corresp. à parfait1I B 2 en partic.; le compl. implique un jugement négatif] Caractère de ce qui ne peut être surpassé dans un genre détestable. Par l'atroce comme par le grotesque, cela atteint l'idéal (...). Ces misérables-là sont des échantillons incomparables. Ils arrivent à la perfection de l'infamie (Hugo, Corresp.,1852, p. 43).Cette facilité musicale, qui se contente à peu de frais, cette perfection dans la médiocrité (Rolland, J.-Chr.,Aube, 1904, p. 61).
Loc. Dans toute sa perfection. Synon. péj. dans tout son éclat, dans toute sa splendeur.Je n'ai rien exagéré. La tête du cocu dans toute sa perfection (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 259).
C.− Domaine mor., relig.[Corresp. à parfait1I C; le compl. ou l'adj. se rapporte à une pers. à un aspect de la vie intérieure] Qualité, état de (ce) qui a toutes les vertus. La vertu, (...) la perfection de l'homme, qui consiste à se mettre au-dessus de tous les vains désirs, (...) et à maintenir son âme exempte de plaies et de souillures (Maine de Biran, Journal,1821, p. 337).Nous sommes nés pour tendre à la perfection de l'amour, d'un amour qui enveloppe réellement l'universalité des hommes, sans laisser place à la haine contre aucun d'eux (Maritain, Human. intégr.,1936, p. 101).V. parfait1I C ex. de Billy :
4. La perfection de Bouddha est plus belle que celle du christianisme parce qu'elle est plus désintéressée. Six cents ans avant Jésus-Christ, il enseignait la charité, la vie religieuse et monastique, la contemplation (...), et par-dessus tout le sacrifice de soi aux autres sans espoir d'aucune récompense de vie future. Vigny, Journal poète,1859, p. 1346.
Absol. Si les cloîtres renferment de pures mystiques, de véritables saintes, ils tiennent aussi des religieuses moins avancées dans les voies de la perfection et qui conservent bien encore quelques défauts (Huysmans, En route,t. 1, 1895, p. 192).
SYNT. Perfection humaine, morale, spirituelle; rare perfection; chemin de la perfection; aspirer à la perfection; approcher, se rapprocher de la perfection.
RELIGION
Perfection chrétienne. ,,État le plus excellent de la vie chrétienne. Il consiste dans la charité, âme de toutes les vertus`` (Marcel 1938). V. bien3ex. 10.
État de perfection. ,,Sommet du progrès spirituel accessible en cette vie, après une première phase de purification du péché et une phase intermédiaire d'illumination à l'égard des réalités spirituelles positives (...) état religieux au sens défini par le triple vœu de pratiquer les conseils (pauvreté, chasteté, obéissance)`` (Bouyer 1963). Quand l'être humain est dans l'état de perfection, quand par le secours de la grâce, il a complètement détruit en lui-même le je (S. Weil, Pesanteur,1943, p. 36).
D.−
1. PHILOS., MÉTAPHYS. [Corresp. à parfait1I D] Gén. en empl. abs. Le bien, le bon absolu, l'infini. Synon. idéal, parfait1(v. ce mot I D empl. subst. masc. sing.).Un immense vœu de perfection et d'absolu, la quête d'un paradis promis, la restitution d'une innocence invraisemblable (Béguin, Âme romant.,1939, p. 393).Tous les obstacles, même la mort, sont enfin transfigurés (...). C'est une heureuse fortune qui nous les fait rencontrer, en nous donnant le sentiment et l'expérience de notre éternité et de notre infinitude. Désormais, nous possédons l'être et le sens de l'être, la perfection du Kosmos et l'accomplissement du moi (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 213).V. imperfection ex. de Blondel et ex. 2 :
5. Ils [les pythagoriciens] considéraient le monde comme un ordre en voie de formation, un progrès vers le bien. La limite et le nombre étaient à leurs yeux les caractères de cette perfection finie, qui réside dans l'harmonie (...). L'origine des choses devait être placée, non dans la perfection ou le bien, comme elle l'a été par la plupart des écoles, mais plutôt dans le mal, c'est-à-dire dans l'imperfection, croissante avec la série régressive des âges. Renouvier, Essais crit. gén.,3eessai, 1864, p. 167.
SYNT. Perfection absolue, idéale; absolue perfection; perfection de l'être, de la vie; amour de la perfection; besoin, désir, idéal de perfection; notion, sentiment de (la) perfection.
Proverbe. La perfection n'est pas de ce monde. Mais comme (...) le bonheur se trouve dans la perfection et pas ailleurs, que la perfection n'est pas de ce monde (...), il faut espérer une autre économie où la douleur, le mal et le désordre ne seront plus (Amiel, Journal,1866, p. 474).
2. THÉOL. Ce qui caractérise Dieu, valeur suprême de ses attributs. Perfection céleste, divine; perfection de Dieu. La perfection divine se définit en fonction de l'amour. (...) ou cette perfection est identifiée au bien en général − ce qui est ambigu et dangereux − ou bien il semble qu'elle se réduise à une sorte d'au-delà tout abstrait, sans communication aucune avec notre vie (G. Marcel, Journal,1914, p. 65).La souveraine perfection de Dieu et la bonté infinie qui s'est abaissée jusqu'à notre ordure (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 4, 1920, p. 34).V. bien3ex. 4.
Absolument :
6. Le caractère de Dieu est la perfection : tout ce qui est renfermé dans l'idée de perfection, comme l'immutabilité, la sagesse, la justice, la bonté, doit être attribué à Dieu dans un degré infini, et constitue son caractère métaphysique et moral. Lacord., Conf. de N.-D.,1848, p. 63.
P. méton.
Au plur. Qualités infinies de Dieu. Comment les joies de Dieu et celles des saints, ne seroient-elles pas universelles (...)? Elles sont le reflet continu des éternelles perfections de notre Dieu (Saint-Martin, Homme désir,1790, p. 368).
Au sing., rare. Dieu même. Merci, mon Dieu! de m'avoir humiliée à ce point (...). J'ai été ingrate, ô souveraine perfection! J'avais ton image dans le cœur et j'ai cherché l'infini dans la créature (Sand, Lélia,1839, p. 404).
3. PSYCHOPATHOL. [La perfection considérée comme facteur d'inhibition, lorsqu'elle est l'objet d'un désir démesuré, d'un souci exagéré] La répugnance aux actes particuliers se laisse prendre pour une aspiration à l'infini. (...) ce souci de perfection universelle, loin de révéler une exceptionnelle ampleur de la personnalité, dénonce une origine narcissique chaque fois qu'il aboutit à l'inaction anxieuse (Mounier, Traité caract.,1946, p. 717).La recherche de la perfection peut paralyser toute initiative, bloquer toute activité et empêcher toute avance dans la vie (VirelPsych.1977).
Rem. (relative aux empl. B, C, D). Comme parfait1(v. ce mot I D rem.), perfection peut être affecté d'une « modification en plus ou en moins ». Dans ces diverses tournures indiquant une gradation, perfection tend à prendre le sens de perfectionnement. Perfection relative; grande, haute perfection; point de perfection. Voir ce qui, dans chaque nation, a favorisé ou retardé les progrès de ces arts; par quelles causes les divers genres (...) ont atteint (...) une perfection si inégale (Condorcet, Esq. tabl. hist., 1794, p. 196). Le plus ou moins de perfection pouvant dépendre de l'habileté de l'ouvrier (Voy. La Pérouse, t. 4, 1797, p. 34). Des élaborations répétées qui leur donnent une perfection progressive (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 211). J'étais à une hauteur, à un degré de perfection et de pureté que je n'atteindrai jamais plus (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 251).
Prononc. et Orth. : [pε ʀfεksjɔ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1145 « état de plénitude dans la possession de toutes qualités et l'absence de tout défaut » (Wace, Conception ND, 412 ds T.-L.); 2. a) 1262 « état d'achèvement parfait, de réalisation idéale » (Jean le Marchand, Miracles ND de Chartres, 25, ibid.); b) 1360 « achèvement, action de finir » (Rançon du roi Jean, Arch. KK 10a, fo32 rods Gdf.); 3. a) ca 1530 (une) perfection « (une) qualité » (Songecreux, Prénostication, éd. P. Lacroix, 49 v. et 68 v. ds IGLF); b) 1791 d'une pers. (Restif de La Bretonne, Tableaux du XVIIIes., conversion subite ds Brunot t. 6, p. 1083); 4. a) 1636 en perfection « de manière parfaite, sans faute » (F. M. Mersenne, Harmonie universelle, p. 76); b) 1694 en perfection « de manière absolue, totale » (Dancourt, La Parisienne, Comédies, éd. Fr. Sarcey, 263 ds IGLF : elle hait Damis en perfection). Empr. au lat. perfectio « achèvement complet, état de ce qui est idéal en qualités et sans défauts ». Fréq. abs. littér. : 2 926. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 222, b) 3 000; xxes. : a) 2 813, b) 4 688. Bbg. Gall. 1955, p. 43, 45, 46, 86, 494.