| PENSIONNAIRE, subst. A. − [Corresp. à pension A] Personne qui reçoit une pension. 1. Vieilli. Personne qui reçoit une pension (d'un souverain, d'un État, d'un particulier...). Synon. mod. pensionné.La foule innombrable des pensionnaires du prince (Marat,Pamphlets,Dénonc. Necker, 1790, p.112).[En 1825] de grandes dissemblances existaient entre la réglementation concernant les pensionnaires de l'administration des finances et celle propre aux fonctionnaires des autres services publics (Pradelle,Service P.T.T. Fr.,1903, p.184). − P. plaisant. Pensionnaire du roi. ,,Prisonnier, homme détenu qui est nourri aux dépens du roi`` (Hautel 1808). − DR. CANON. Personne qui jouit d'une pension sur un bénéfice. Cet évêque a des pensionnaires qui diminuent son revenu. Cet abbé a un pensionnaire (Ac.1798-1878). − HIST. (Provinces-Unies). Chef de l'administration civile de chacune des sept provinces aux xviieet xviiies. C'étaient les pensionnaires qui portaient la parole dans l'assemblée des états (Ac.1835, 1878).Chaque province de la république avait (...) son Pensionnaire. Ces magistrats étaient (...) un obstacle aux projets d'usurpation de la maison d'Orange (Pol.1868). ♦ Le grand pensionnaire (de Hollande). Titre donné par les auteurs français au chef du pouvoir exécutif de Hollande lorsqu'il n'y avait pas de stathouder. En 1652, Jean de Witt est nommé grand pensionnaire de Hollande (...) il (...) tâche de circonscrire la guerre à l'océan (Du Camp,Hollande,1859, p.54).En appos. avec valeur d'adj., rare. L'assemblée des états qui élisait ce magistrat, lui conférait dans l'acte de sa nomination le titre de conseiller pensionnaire (Pol.1868). 2. De nos jours a) Artiste, étudiant, chercheur qui poursuit ses travaux, ses études, ses recherches aux frais de l'État dans une fondation, une école. Pensionnaire de la Fondation Thiers. La nomination des pensionnaires est faite pour une année et peut être renouvelée; celle des chargés de mission est faite pour une mission déterminée. Leurs travaux consistent en études, explorations ou fouilles relatives aux civilisations qui se sont succédé en Égypte et dans les régions voisines (Encyclop. éduc.,1960, p.249). − Lauréat du grand prix de Rome pendant son séjour à l'Académie de France à Rome. Pensionnaire de l'École de Rome, de la Villa Médicis. Le colossal répond à la fois aux doctrines de Quatremère et aux goûts de Napoléon. (...) les candidats au grand prix, les pensionnaires de l'Académie multiplient les colonnes, les arcades, les fenêtres (Hautecoeur,Art sous Révol. et Emp.,1954, p.31). b) THÉÂTRE. Comédien(ne), généralement engagé(e) à l'année, qui dans une association théâtrale reçoit un traitement fixe et ne participe pas aux bénéfices de la société. Pensionnaire du Théâtre Français. Les actrices étaient des professionnelles, appartenant à l'Odéon ou à d'autres théâtres parisiens, et il y avait parmi elles deux pensionnaires de la Comédie-Française (A. France,Vie fleur,1922, p.548).Le Théâtre de la Renaissance, dirigé par Hostein, jouait l'opérette et comptait au nombre de ses pensionnaires Jeanne Granier (L. Schneider, Maîtres opérette fr.,1924, p.178). − En appos. avec valeur d'adj., vx. Comédien pensionnaire (Ac.1878). B. − 1. a) Personne qui prend pension dans un restaurant, une pension de famille ou chez un particulier en général moyennant paiement. Prendre, recevoir des pensionnaires; les pensionnaires d'une auberge, d'un hôtel, d'un restaurant. Je fus placé chez un professeur de médecine qui tenait des pensionnaires (Constant,«Cahier rouge»,1830, p.11).Les maisons familiales de vacances. Ce sont de petits hôtels mais les pensionnaires y participent au service (Tour. Fr.,1960, p.46): . ... j'ai bien assez perdu depuis cinq jours que le guignon s'est logé chez moi. J'aurais donné dix écus pour que ce bonhomme-là fût parti ces jours-ci (...). Ça frappe mes pensionnaires. Pour un rien, je le ferais porter à l'hôpital. Enfin, mettez-vous à ma place. Mon établissement avant tout, c'est ma vie, à moi.
Balzac,Goriot,1835, p.300. ♦ En appos. avec valeur d'adj. Les trois ou quatre habitués pensionnaires de l'établissement (...) ont encore une heure à rester à table (Nerval,Voy. Orient,t.1, 1851, p.2). − P. ext. Personne qui est nourrie et logée dans un établissement public spécialisé. Les pensionnaires d'un hospice, d'un hôpital, d'une maison de retraite. Notre traitement [la psychanalyse] n'est applicable qu'aux pensionnaires d'établissements pour malades nerveux (Freud,Introd. psychanal.,trad. par V. Jankélévitch, 1959 [1922], p.494).Ces fous (...) pensionnaires d'un asile (Proust,Sodome,1922, p.807). − P. plaisant., fam. [Le détenu, à sa soeur:] tes enfants t'attendent (...) Ah ça! tu ne leur dis pas, j'espère, que leur nononcle est pensionnaire ici? (Sue,Myst. Paris,t.8, 1843, p.14).Je visitai une prison de femmes (...). Le directeur de cette prison touchait à l'âge de la retraite (...). Il ne se faisait pas d'illusions sur la moralité de ses trois cents pensionnaires (A. France,Crainquebille,Vol. dom., 1904, p.307). − En partic. Pensionnaire de maison close. Prostituée vivant dans une maison close. Il (...) se vantait d'entretenir des relations avec des dames de la ville, servantes de brasserie ou pensionnaires de maisons closes (Moselly,Terres lorr.,1907, p.143). b) P. anal. Animal nourri et logé chez un particulier ou dans un établissement équipé pour ses besoins et moyennant paiement. Les pensionnaires du zoo. La satisfaction d'un entrepreneur de ménagerie, au moment où il exhibe son pensionnaire dangereux, favori du public (Vogüé,Morts,1899, p.58).Sénac, la porte entr'ouverte, m'a prié de faire attention à son nouveau pensionnaire, une sorte de berger allemand d'allure famélique (Duhamel,Maîtres,1937, p.111). 2. En partic. a) Élève nourri et logé dans l'établissement où il fait ses études. Synon. interne; anton. externe.Demi-pensionnaire*; jeune, pauvre, petite pensionnaire; costume, uniforme de pensionnaire; pensionnaire de couvent, de collège, de lycée. Comme les religieuses, les pensionnaires ne voyaient leurs parents qu'au parloir (Hugo,Misér.,t.1, 1862, p.585).Il réclama la faveur d'être pensionnaire, afin de ne pas perdre le temps des allées et venues (Mauriac,Myst. Frontenac,1933, p.76). − En appos. avec valeur d'adj. [Ce texte] prévoit que ce service [de surveillance] ne peut être imposé aux instituteurs-adjoints en ce qui concerne les élèves pensionnaires, quand un internat est annexé à l'école (Encyclop. éduc.,1960, p.121). b) P. anal., fam., péj. Jeune fille, jeune femme qui a conservé l'ignorance, la naïveté d'une élève en pension. Il faudra cinq ans avant de tuer chez elle la pensionnaire (Balzac, Corresp.,1835, p.740). − P. compar. Lia demande, comme une pensionnaire, l'explication d'un tas de choses que lui refuse Saint-Victor, comme n'étant pas convenables (Goncourt,Journal,1859, p.655).Il rougit comme une pensionnaire. La timidité sied aux bruns comme les fleurs aux grands arbres (Theuriet,Mariage Gérard,1875, p.49). − Empl. adj. Avait-elle su répondre? N'avait-elle pas été trop gauche, trop pensionnaire? (Daniel-Rops,Mort,1934, p.155).La voici toute pareille à ce qu'elle était tantôt en venant. Terriblement femme, elle si pensionnaire il y a un instant. Terriblement intacte en apparence, elle qui n'est plus intacte. Terriblement jeune personne bien élevée (Montherl.,Pitié femmes,1936, p.1097). Prononc. et Orth.: [pɑ
̃sjɔnε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. a) 1323 «personne qui reçoit une pension» (Doc. ds P. Varin, Arch. admin. de la ville de Reims, t.1, 1repart., p.351); b) 1835 comédien pensionnaire, pensionnaire (Ac.); c) 1868 «étudiant ou jeune artiste qui bénéficie d'un séjour dans une fondation, une école» (Littré); 2. 1596 «personne qui prend pension chez un particulier» (Hulsius, foQQ4 ro: pensionnaire); 3. a) 1579 [éd.] «élève logé et nourri dans l'établissement scolaire qu'il fréquente» (Larivey, Les Escolliers II, 3 ds Les six premières comédies facécieuses, fo290 vo); b) 1769 fém. «jeune fille qui a conservé la candeur de l'élève encore en pension» (Mmedu Deffand, Lettre à Walpole, 2 nov. ds Ritter). Dér. de pension*; suff. -aire*. Fréq. abs. littér.: 716. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 921, b) 1746; xxes.: a) 742, b) 876. Bbg. Darm. 1877, p.197. |