| PENSION, subst. fém. A. − 1. Allocation, le plus souvent viagère, versée périodiquement à une personne −par un souverain, un état, un organisme social, un particulier −pour assurer son existence matérielle, l'indemniser, la récompenser pour des services rendus, des travaux, des mérites. Synon. rente, revenu, subvention.Son père allait se retirer des affaires, et (...) sa retraite ne lui permettrait plus de lui continuer sa modique pension (Karr,Sous tilleuls,1832, p.44).D'ordinaire, les pensions aidant, le métier d'homme de lettres était un métier fort doux (A. France,Vie littér.,1888, p.93).Il a épousé la demoiselle, mais il n'a pas voulu de la belle-mère, à qui il a fait une pension pour qu'elle quitte le pays (Simenon,Vac. Maigret,1948, p.33).V. aussi allocation ex. de Hugo. SYNT. Pension définitive, temporaire, à vie; bonne, grosse, maigre, misérable, modeste, petite pension; pension raisonnable, ridicule; accepter, accorder, allouer, avoir, demander, recevoir, toucher une pension; attendre sa pension; payer, verser une pension à qqn; supprimer la pension de qqn; faire valoir ses droits à pension; avoir droit à une pension; être bénéficiaire, titulaire d'une pension; dossier de pension; montant, taux de la pension; cumul de pensions; titre de pension; liquidation, paiement, relèvement des pensions; législation, réglementation des pensions. − Allocation allouée aux lauréats du prix de Rome et qui consiste à payer leur séjour d'étude à l'Académie de France à Rome. Synon. bourse.Quant à ce qui concerne l'École de Rome, depuis le décret de 1863, la pension des lauréats est réduite de cinq à trois ans, et sur ces trois années les élèves peuvent en passer une bonne partie en voyage (Viollet-Le-Duc, Archit.,1872, p.163). − DROIT ♦ Code des pensions. Ensemble des textes qui régissent les pensions civiles. Le régime des pensions de retraite est aujourd'hui fixé par le Code des pensions civiles et militaires de retraite qui codifie l'ensemble de la législation applicable (Réau-Rond.1951).V. aussi infra pension de guerre. ♦ Pension «ad litem». ,,(«Par suite du procès») pension dont le service doit durer pendant le cours d'un procès et dont les arrérages doivent servir soit à assurer la subsistance du créancier pendant la durée du procès, soit à payer les frais de l'instance`` (Cap. 1936). ♦ Pension alimentaire*. Il y a, d'une part, la pension alimentaire allouée à la femme lorsque le divorce est prononcé aux torts du mari. C'est une sorte d'amende payée par l'époux coupable à l'épouse innocente et destinée en principe à lui conserver le même standing de vie. Elle ne peut excéder le tiers des revenus du mari. D'autre part, il y a la pension alimentaire destinée à l'entretien et à l'éducation des enfants (Elle,16 sept. 1968, p.6, col. 7). ♦ Pension de guerre. Pension versée aux victimes de la guerre ou à leurs ayants droit. Le régime des pensions des victimes militaires et civiles de la guerre est fixé par le Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre qui codifie (...) les décrets et les arrêtés en vigueur en matière de pensions de guerre (Réau-Rond.1951). ♦ Pension hors-guerre. ,,Les pensions dites «hors guerre» comprennent celles qui ont été accordées à l'occasion des opérations militaires menées sur les théâtres d'opérations extérieurs entre 1919 et 1939 et des opérations qui, après la deuxième guerre mondiale, ont été conduites au titre du maintien de l'ordre en Afrique du Nord`` (Le Monde, 10 oct. 1969, p.5, col. 6). ♦ Pension d'indemnisation. ,,Allocation temporaire ou viagère accordée par l'État à titre d'indemnité aux personnes ayant contracté une infirmité au service de l'État ou par suite de faits de guerre. Elle correspond donc à la réparation d'un préjudice`` (Lubrano-Lavadera, Législ. et admin. milit., 1954, p.253). ♦ Pension d'invalidité. ,,Pension dont le service a pour but de compenser la perte ou la diminution de capacité de travail provenant d'un accident, d'une maladie ou d'une infirmité`` (Cap. 1936). V. invalidité ex. de Barr. 1974, de Méd. Flamm. 1975 et de Lubrano-Lavadera. ♦ Pension de veuf/veuve. Pension versée au conjoint survivant âgé de moins de 60 ans et atteint d'une incapacité supérieure à 66 % (d'apr. Sournia 1973). Comment vivre? La pension de veuve, les six cents francs qu'elle touchait, suffisait à peine aux besoins de l'enfant (Zola,L'OEuvre,1886, p.102). ♦ Pension viagère. Pension versée à une personne durant toute sa vie mais non réversible sur ses héritiers. Le comte de Chamery vous a assuré (...) une pension viagère de 12000 livres (Ponson du Terr.,Rocambole,t.4, 1859, p.67). − En partic. Pension (de retraite, de vieillesse). Allocation versée périodiquement par la caisse d'assurance et de prévoyance aux personnes qui ont atteint un certain âge et qui ont effectué des versements à cette caisse (d'apr. Cap. 1936). Synon. retraite.Sa pension de retraite payée régulièrement par l'intermédiaire d'un banquier hindou, lui donnait, avec assez d'aisance, une certaine vanité (Gobineau,Nouv. asiat.,1876, p.243).Les pensions de vieillesse ont pour objet de garantir des ressources aux personnes qui ont atteint un certain âge, au delà de 60 ans et qui ont versé plus de 15 ans de cotisations (F. Netter, Notions essentielles de sécur. soc.,Paris, Sirey, 1951, p.167).V. aussi cessation ex. 1: 1. Pour une colonie d'élégants retraités, Rye est pourtant assez endormi, malgré les familles d'ex-officiers des services civils et militaires, qui viennent, modestement, y attendre la mort, en vivant sur leur pension et leurs modiques revenus.
Blanche,Modèles,1928, p.181. ♦ Pension d'ancienneté/pension proportionnelle. Allocation versée par l'État à tout fonctionnaire ou militaire totalisant un certain nombre d'années de service et ayant cotisé régulièrement: 2. Les pensions militaires de rémunération, c'est-à-dire les pensions pour ancienneté de service (...) sont fonction de la durée des services accomplis par les bénéficiaires. Elles peuvent donc se classer en: 1 pensions d'ancienneté accordées après une carrière complète passée au service de l'État; 2 pensions proportionnelles accordées après 15 ans de services, mais alors que le bénéficiaire n'a pas atteint le terme d'une carrière complète...
Lubrano-Lavadera,op.cit.,p.255. ♦ Pension civile, militaire. ,,Pension dont le service est assuré aux fonctionnaires civils ou aux militaires admis à la retraite et dont le capital est constitué à l'aide de retenues opérées durant leur activité sur leur traitement ou solde`` (Cap. 1936). ♦ Pension de réversion, de survivant. ,,Pension versée au conjoint survivant (âgé d'au moins 55 ans) d'une personne prédécédée qui avait acquis de son vivant des droits à une retraite ou à une pension au titre de l'assurance vieillesse`` (Barr. 1974). Selon un rapport officiel, le nombre de pensionnés (y compris les bénéficiaires de pensions de reversion) dépasse désormais celui des cotisants (Meynaud,Groupes pression Fr.,1958, p.262). ♦ Région. (Canada). Retraite. Fonds de pension; être à sa pension. ,,Prendre sa pension. Prendre sa retraite`` (L. Bergeron, Dict. de la lang. québécoise, Montréal, VLB, 1980). 2. DR. CANON. Somme que l'on prenait autrefois, chaque année, sur les revenus d'un bénéfice. Il a résigné son prieuré, et a retenu six cents francs de pension. Il a obtenu trois mille livres de pension sur tel évêché. Un brevet de pension sur une abbaye (Ac.1798-1878).Un édit de juin 1671 autorisait les titulaires de cures ou de prébendes à les résigner avec réserve de pension (MarionInstit.1923). B. − P. ext. 1. a) Nourriture (éventuellement hébergement et entretien) d'une personne, d'une manière régulière et pendant un certain temps, gratuitement ou moyennant un prix convenu. L'occasion était trop belle de ce séjour sous un ciel merveilleux, avec un semblant de famille, la pension moins chère que dans un hôtel (A. Daudet, Évangéliste,1883, p.19).Tellier, vu hier un instant, me dit qu'avec 120 francs, je puis très largement avoir chambre, pension et blanchissage (Verlaine,Corresp.,t.2, 1887, p.112). − [Le plus souvent dans des loc. verb.] Être en pension au pair, chez un particulier, dans un hôtel; prendre qqn chez soi en pension. Et la mère l'avait mis en pension (...) chez des gens, où un médecin du quartier le soignait (Zola,Fécondité,1899, p.650). ♦ Prendre pension. Se faire servir régulièrement ses repas (et éventuellement être logé et blanchi). Il [l'apprenti] prend logis et pension chez le maître, qui, établi, «tenant chef d'hostel, c'est à savoir feu et lieu», a charge aussi bien de son logement, de sa nourriture et de son vêtement que de son instruction professionnelle (Faral,Vie temps st Louis,1942, p.70). − P. anal. Prendre un cheval, un chat, un chien en pension. Le brave jeune homme la conjure, la force de garder l'argent, pour la pension du chien auquel il renonçait (Dusaulx,Voy. Barège,t.2, 1796, p.7).Une fois rapportée de chez le praticien qui la prit en pension, la bête [la tortue] fulgura comme un soleil (Huysmans,À rebours,1884, p.57). b) Spécialement
α) HÔTELLERIE ♦ Pension (complète). Pension comprenant tous les repas et l'hébergement. Hôtels, pensions de famille et maisons meublées, sont tenus d'afficher (...) les prix de chaque chambre, les prix de pension et de demi-pension, ainsi que ceux des repas à prix fixe (Jocard,Tour. et action État,1966, p.91). ♦ Demi-pension*. V. supra ex. de Jocard.
β) Nourriture et hébergement dans l'établissement scolaire où l'on est élève. Être en pension dans un collège, un lycée. Les élèves sont internes (sauf les élèves commissaires de deuxième année) et bénéficient de la gratuité de l'enseignement, de la pension et du trousseau (Encyclop.éduc.,1960, p.237). 2. P. méton. a) Somme payée pour être nourri (et éventuellement logé et blanchi). Payer une bonne, forte, médiocre pension; une pension chère, coûteuse. Goriot payait encore douze cents francs de pension (Balzac,Goriot,1835, p.36).Ces cinq mille francs eussent suffi sans doute pour les couches de sa maîtresse, sa pension dans une clinique, les premiers soins donnés à l'enfant (Gide,Faux-monn.,1925, p.961).V. aussi infra ex. 3. ♦ Payer pension, loc. verb. Payer une somme forfaitaire pour sa nourriture et son logement. Il vivait chez sa soeur, Joséphine Mouraud. Il lui payait pension (Van der Meersch,Invas. 14,1935, p.203). − En partic. Somme payée pour la nourriture, le logement et l'instruction d'un élève. Pension payable par trimestre. Si au lieu de Chambord pour le duc de Bordeaux, on nous parlait de payer sa pension au collège (Courier,Pamphlets pol.,Procès, 1821, p.116).À titre d'exemple, le tarif d'internat d'un cours complémentaire dans le département de la Seine-Maritime était de 769 NF 50 en 1960. Le tarif de la demi-pension (5 repas par semaine) est égal au tiers de la pension (Encyclop.éduc.,1960, p.107). ♦ Demi-pension*. V. supra ex. de Encyclop.éduc. b) Lieu où l'on prend pension.
α) Établissement spécialisé où l'on est nourri (éventuellement logé et blanchi) pour un prix déterminé. Synon. hôtel, restaurant.Excellente, modeste pension; chercher, ouvrir, tenir, trouver une pension; changer de pension; les hôtes d'une pension. M. Folantin, employé dans un ministère, cherche un restaurant, un bouillon, une pension, un établissement quelconque où l'on puisse manger convenablement (Lemaitre,Contemp.,1885, p.322). ♦ Pension bourgeoise ou pension de famille. Hôtel où le service est simple, où les repas sont généralement pris à une table commune et où chaque locataire dispose d'un appartement particulier ou d'une simple chambre. Leurs habitudes changèrent, et, quittant leur pension bourgeoise, ils finirent par dîner ensemble tous les jours (Flaub.,Bouvard,t.1, 1880, p.9).Un ingénieur (...) avait pris une chambre dans une pension de famille administrée par une énorme vieille dame. Cette pension abritait une macédoine cosmopolite aussi diverse que Jérusalem au moment de la Pentecôte (Claudel, Poète regarde Croix,1938, p.277).V. aussi supra ex. de Jocard. − P. anal. Établissement où on loge et nourrit des animaux. Pension pour les chevaux. Comment, enfin, voyager en auto, en train, en avion avec son chien? Où lui trouver une pension-chenil? (L'Express,12 juin 1967, p.105, col. 1-2).
β) En partic. Établissement d'enseignement où les élèves peuvent être nourris, logés et instruits moyennant une certaine somme. Synon. internat, maison* d'éducation, pensionnat.Pension religieuse; élèves, professeur de la pension; sortir de pension; diriger une pension; mettre ses enfants en pension; être élevé, envoyé en pension. Je changerai Léon de pension. J'ai désiré que la maison où je le placerai nous offrît non seulement de bonnes études, mais des garanties de surveillance, de morale et de religion aussi indispensables (Lamart.,Corresp.,1830, p.21).Son éducation avait été soignée par les demoiselles Hermeline qui tenaient une pension très bien (Aymé,Jument,1933, p.29).Ami(e) de pension. Ami(e) que l'on a connu(e) en pension. Ma soeur avait pour moi des projets de mariage avec une amie de pension (A. Dumas père, Angèle,1834, i, 10, p.121).Maître, maîtresse de pension. Personne qui surveille les élèves en pension. En recevant l'acte d'accusation du maître de pension, M. Robert crut avoir mal lu (Champfl., Souffr. profess. Delteil,1853, p.50). − P. méton. ♦ Ensemble des élèves en pension. Synon. internat, pensionnat.Pension nombreuse; pension en étude, en promenade. David et Brindot étaient de fort jolis jeunes gens, pour qui brûlait toute la pension Lepitre (Michelet,Mémor.,1822, p.204).Je tirai de mes poches quelques tablettes de chocolat et autres douceurs que j'avais apportées. −Oh! Monsieur, s'écria Jeanne, il y en a pour toute la pension (A. France,Bonnard,1881, p.415). Prononc. et Orth.: [pɑ
̃sjɔ
̃]. Homon. (nous) pensions, pansions. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. a) 1216 «paiement» (Anger, Trad. Vie St Grégoire, 1533 ds T.-L.); b) α) 1790 «allocation versée régulièrement à une personne» (Décret du 3-22 août, art. 17 ds Lois annotées ou lois, décrets, ordonnances, avis du Conseil d'État, 1resérie, p.46: Aucun citoyen [...] ne pourra obtenir de pension qu'il n'ait trente ans de service effectif, et ne soit âgé de cinquante ans);
β) 1808 pension de retraite (Décret du 17 mars, art. 123, ibid., p.777); 2. a) 1535 «nourriture (d'une personne)» (Olivetan, Bible, Exode, 21, 10 d'apr. FEW t.8, p.203a); b) 1602 «somme d'argent qu'on donne pour être nourri et logé» (Peiresc, Lettres, 12 juill., éd. Ph. Tamizey de Larroque, t.6, p.3); c) α) 1609 «maison où l'on est nourri et logé pour un certain prix» (Vittori, Tesoro de las tres lenguas francesa, italiana y espanola, s.v. pupilaje);
β) av. 1615 «établissement d'enseignement qui assure, en même temps que l'instruction, le logement et la nourriture des élèves» (Pasquier, Recherches de la France, p.792 ds IGLF: De ces Escoliers nous les appellons pensionnaires ceux qui sont à la pension du Principal, et Cameristes les autres qui sont nourris par leurs Pedagogues);
γ) 1904 pension de famille (H. Bataille, Maman Colibri, IV, 6, p.7). Empr. au lat. pensio «paiement, indemnité», propr. «pesée», part. passé de pendere «peser (en général), peser le métal pour payer» et p.ext. «payer». Fréq. abs. littér.: 1908. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2845, b) 3937; xxes.: a) 2318, b) 2178. Bbg. Quem. DDL t.11, 18. _ Sain. Arg. 1972 [1907], p.88. |