| PELOTE, subst. fém. A. − Boule formée par l'enroulement de fils, de rubans, etc. Pelote de laine, de coton à repriser; laine en pelote; mettre en pelote. Des pelotes de fil, des écheveaux de soie, des guirlandes de cordonnet complètent l'étalage (Champfl., Souffr. profess. Delteil, 1853, p.56).Cette table sur laquelle sont posés un paquet de charpie, des pelotes de bandes, une pyramide d'éponges (Goncourt, Journal, 1860, p.850): 1. J'avais obtenu d'elle l'autorisation de fixer à l'arrêtoir de son contrevent une ficelle qui traversait la rue, et venait chez moi s'enrouler en pelote sur un bâton.
Loti, Rom. enf., 1890, p.251. ♦ Loc. fig., fam. Avoir, mettre les nerfs en pelote. Être, rendre irritable. Synon. avoir les nerfs en boule*.Je venais de finir les oraux, j'avais les nerfs en pelote (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p.815).Le vent du sud qui vous met les nerfs en pelote et vous trousse à rebrousse-poil (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.263). B. − 1. Amas compact, plus ou moins en forme de boule, d'une substance quelconque. Synon. boule.Pelote de beurre, de charbon, de neige. Une pelote de plumes et de cris lui vient frapper la poitrine, tombe à terre, se partage et rejaillit de l'herbe en deux moineaux (Giono, Regain, 1930, p.102).La graisse se dépose en masse dans le tissu cellulo-sous-cutané. Il arrive que des pelotes de consistance molle se relient l'une à l'autre (Quillet Méd.1965, p.297). 2. ... je vis quatre forts chameaux de Syrie couchés à terre; leur conducteur faisait de grosses pelotes avec du maïs et du trèfle et les leur enfonçait à grand'peine, dans la bouche, malgré leurs efforts et leurs grognements.
Du Camp, Nil, 1854, p.97. − Spécialement a) ZOOLOGIE ♦ ,,Saillie spongieuse située à l'extrémité des tarses de certains insectes`` (Séguy 1967). Le dernier article du tarse porte, outre les griffes, une ou deux pelotes ou palettes adhésives (E. Perrier, Zool., t.1, 1893, p.1159). ♦ Pelote de réjection. ,,Agglomération de débris alimentaires indigestes que certains oiseaux rejettent périodiquement par le bec`` (Cuisin 1969). La formation des pelotes de réjection est régulière chez les oiseaux suivants: Chouettes et Hiboux, Rapaces diurnes... (Cuisin 1969). b) PÊCHE. Boule de terre glaise enrobant un hameçon esché. Pêche à la pelote. Les poissons fouillent la pelote pour s'emparer des asticots libres, puis finissent par trouver la bouchée principale et s'en emparent... ou pas! (Pollet1970). 2. Fam. Arrondir, faire sa pelote, une pelote. Amasser de petits profits (plus ou moins licites) de manière à constituer une somme d'argent importante. Un bonhomme comme toi et moi s'occupe pendant trente ans de sa petite besogne; il y arrondit sa pelote (Augier, Gendre M. Poirier, 1854, p.234).Ce bon salaud, hein! Ce trafiquant qui a fait sa pelote dans toutes les combines! (H. Bazin, Lève-toi, 1952, p.69). C. − 1. Coussinet sur lequel on plante des objets (épingles, aiguilles, etc.) afin de les ranger. Pelote de toilette. À leurs boutonnières de petites pelottes [sic] à épingles roses ou violettes, faisaient de loin l'effet de bouquets (Goncourt, Soeur Philom., 1861, p.101).Les broches (...) reluisaient, piquées sur une pelote de tapisserie (Chardonne, Varais, 1927, p.155). ♦ Au fig. Pelote d'épingles. [Qualifie une pers. dont l'irritabilité est désagréable] C'est une vraie pelote d'épingles (Rob.). 2. Vieilli ou dans des domaines spéc. a) Coussinet dur servant de support. Vous ne savez pas, dit Léonie, une jolie brune, en se penchant sur sa pelote où elle gaufrait des pétales de rose (Zola, Assommoir, 1877, p.716). b) Coussinet de charpie servant à faire pression sur un organe. Pelote herniaire. Le garrot se compose d'une pelote, ou d'une compresse roulée en cylindre, qu'on place sur le vaisseau à comprimer (Nélaton, Pathol. chir., t.1, 1844, p.8). D. − 1. Vieilli. Balle. Les garçons (...) vont jouer à la pelote le long des ruelles (Huysmans, Là-bas, t.2, 1891, p.9). 2. Balle faite d'un noyau de lanières de gomme enroulées revêtu de deux couches de cuir, utilisée dans le jeu de pelote basque. La pelote est reçue et renvoyée à l'aide d'un engin en osier: le chistéra (Pesquidoux, Chez nous, 1921, p.171).V. balle ex. 1. − P. méton. Pelote basque et, p.ell., pelote. Jeu, sport basque où les joueurs divisés en deux équipes envoient une balle rebondir contre un mur à main nue, à l'aide de la chistera ou de la pala. Comme les grands joueurs de tennis ou de pelote dès qu'ils n'ont plus de public, je jouais mal avec Paris (Giraudoux, Suzanne, 1921, p.34).Il y avait souvent des fêtes au bourg voisin; j'assistai à des parties de pelote basque (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p.253). E. − HIPPOLOGIE. Tache blanche arrondie située sur le front d'un cheval. Synon. étoile. (Dict.xixeet xxes.). Rem. 1. Pour les expr. fig. (faire la pelote, envoyer aux pelotes) v. peloton rem. 2. Région. (Canada) [Souvent sous la forme plotte] a) Fille, femme; en partic., prostituée ou petite amie. Seule une grosse femme, très courte de jambes, était enfoncée dans l'ombre, près de la porte (...). «Regardez la belle grosse p'lote!» ricana Foviolain (J. Benoît, Les Voleurs, 1969, p.109 ds Richesses Québec 1982, p.1763). Son père (...) ramenait même des plottes à coucher dans sa maison (J.-M. Poupart, Chère Touffe, 1973, p.12, ibid.). b) Organes sexuels féminins. Vous voulez voir la plotte de mademoiselle Marguerite, hein, c'est ça? (...) p'tits bâtards libidineux! (R. Athayde, Mademoiselle Marguerite, 1975, p.79, ibid., p.1762). Prononc. et Orth.: [pəlɔt]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. a) 1121-34 «objet sphérique, boule» pelute (Philippe de Thaon, Bestiaire, 1754 ds T.-L.); ca 1140 pelote (ici, une boule de métal) (Pelerinage Charlemagne, éd. G. Favati, 508); b) fin xiiies. «amas, groupe (de personnes)» (Tournoiement aus Dames, 273 ds Meon, Nouv. rec. de fabliaux et contes, I, 402); c) 1375 artill. pelotes pour charger les canons (Favé, Etud. sur l'artillerie, IV, p.XLIII ds Gay); 1579 les oranges, les grenades, les pelotes, les pots et carreaux à feu (A. Paré, Préface Des playes par harquebuses, éd. J.-F. Malgaigne, OEuvres complètes, t.2, p.123); d) 1377 en pelote «en boule» remettre en pelote «faire culbuter» (un lièvre) (Gace de La Buigne, Roman des Deduis, 8769 ds T.-L.); e) 1588 «petit coussin destiné à mettre des épingles» (Inventaire du prince de Condé ds Havard t.4); p.méton. 1589 «petit meuble, coffret comprenant tel coussin» (L'Isle des hermaphrodites, 16 ds Gay); f) 1680 (Rich.: Pelote. plote. Terme de pêcheur des environs de Paris. Petite boule composée de terre et de vers qu'on jette aux poissons pour les amorcer); g) 1770 «boule regurgitée par les oiseaux de proie» (Buffon, Hist. nat., Oiseaux, t.1, p.335); h) 1805 «protubérance de la patte d'un animal lui servant à assurer son assise ou son adhérence» (Cuvier, Anat. comp., t.1, p.455 et t.5, p.117); i) 1808 faire sa pelote «s'enrichir» (Hautel t.2); j) 1812 «coussinet d'un bandage» (Mozin-Biber); 2. a) ca 1165 «objet sphérique avec lequel on joue» (Troie, 14831 ds T.-L.); b) ca 1165 «jeu avec cet objet» jouer a la pelote (Chr. de Troyes, Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 2299); c) 1266 au fig. (Vers de la mort, 36, 1 ds T.-L.: Mors jüe a nos de le pelote); d) 1897 spéc. pelote basque (Loti, Ramuntcho, p.37); 3. a) 1270-1300 «boule formée d'un ou plusieurs fils enroulés» (Ordonnances sur le commerce et les métiers de Paris, XIX ds E. Boileau, Métiers, éd. G.-B. Depping, 390); b) av. 1901 mettre les nerfs en pelote (Bledort ds Bruant 1901, p.48). Issu d'un dimin. b. lat. *pilotta (cf. cat. pilota) du lat. pila «balle». Fréq. abs. littér.: 174. Bbg. Bambeck (M.). Mittellateinische Lexikalia zum FEW. In: [Mél. Wartburg (W. von)]. Tübingen, 1968, p.232. _Hasselrot 1957, p.170. _Quem. DDL t.5, 27. |