| PELLE, subst. fém. A. − Outil composé d'une palette de fer, de bois ou de matière plastique, plus ou moins concave et parfois munie de rebords, ajustée par une douille sur un manche, qui sert principalement à ramasser les matières pulvérulentes, friables, pâteuses ou en morceaux. On combla la fosse et à grands coups de pelle on tassa la terre par dessus (Bosco, Mas Théot., 1945, p.233).Les femmes viennent ensuite et balayent l'aire de son blé que les enfants mettent en sac avec des pelles de bois (T'Serstevens, Itinér. esp., 1963, p.264): 1. Elle [la neige] formait entre la maison et l'étable des talus hauts de cinq pieds qu'il fallait attaquer à la pelle pour frayer un chemin...
Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p.117. SYNT. Charger, jeter, ramasser à la pelle; pelle à charbon, à chaux, à feu, à neige, à poussière, à ordures; pelle de débardage, d'épuisement; pelle de boulanger, de chauffeur, de jardinier, de maçon, de terrassier; pelle en bois, en tôle; pelle arrondie, ronde, trapézoïdale; manche de pelle. − Loc. adv., fam. À la pelle. En grande quantité. On devait, disait-il, trouver là de l'or à la pelle (Zola, Germinal, 1885, p.1201).Les vendeurs d'orviétan, les discoureurs philosophiques, qui remuaient à la pelle des idées générales, avec le paradis social au bout (Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p.767). − Loc. verb. pop. Ramasser à la pelle. Ramasser en piteux état. Un misérable, s'écriait-il, et un crétin! Un froussard, par-dessus le marché! À Waterloo il avait fait dans son fameux pantalon de casimir blanc, c'est bien connu. Il était à ramasser à la pelle (L. Daudet, Phryné, 1937, p.44). − Expr., vx. La pelle se moque du fourgon (Ac. 1798-1878). [S'emploie pour indiquer qu'une personne a les mêmes défauts que ceux dont elle se moque chez un autre] − Pop., arg. ♦ Vx. Recevoir la pelle. Être éconduit (d'apr. Carabelli, [Lang. pop.] s.d.). Mon rival, J'en suis convaincu, Va recevoir la pelle au cul (Larchey, Excentr. lang., 1865, p.243).Donner la pelle. Être éconduit (d'apr. Carabelli, loc. cit. et Littré). ♦ (Ramasser, se prendre) une pelle. [Le suj. désigne un piéton, un cycliste, un skieur, etc.] (Faire une) chute, assez violente. Synon. bûche, gadin, gamelle.M... alors...; j'ramasse une pelle... C'est c'cul-là qui m'a poussé (Fustier, Suppl. dict. Delvau, 1889, p.575).Au fig. Subir un échec (d'apr. Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896). ♦ Rouler une/des pelle(s) (à qqn). Donner (à quelqu'un) un baiser lingual. Synon. rouler un patin*.Et ça se roulait des pelles. Ça se pelotait à l'aise devant moi (É. Hanska, La Mauvaise graine, 1978, p.83 ds Cellard-Rey 1980). B. − P. anal. et spéc. 1. Planche mobile d'une vanne servant à fermer la retenue d'eau d'un moulin. Synon. pale.Marcelle franchit le pont rustique qui servait en même temps de pelle au réservoir du moulin (Sand, Meunier d'Angib., 1845, p.44).On a oublié de lever les pelles du moulin (Renard, Journal, 1896, p.370). 2. ART CULIN. − Pelle à + subst. désignant un mets.Instrument destiné à prendre les mets fragiles. Pelle à asperges, à gâteaux, à tarte. Service de table pour glaces et sorbets. −Il comprend une large pelle à glace et un couteau à large lame (Lar. mén.1926, p.632).La même donation Niarchos comprend encore (...) la pelle à pâtisserie de Madame Mère, par Claude Odiot (Grandjean, Orfèvr. XIXes., 1962, p.111): 2. ... un buffet à deux corps et dont la vitrine était pleine de vaisselle multicolore et d'objets inutiles dans un modeste ménage, pinces à sucre, à asperges, pelles à poisson, cuillers de tout modèle...
R. Bazin, Blé, 1907, p.295. − Instrument destiné à faire du caramel et à le lisser. Au passage de la pelle rougie qui étalait du caramel, le flanc grésillait (Adam, Enf. Aust., 1902, p.7). 3. AVIRON a) Extrémité large et aplatie d'un aviron, qui plonge dans l'eau lorsqu'on rame. V. lourd ex. de Gracq, Syrtes, 1951, p.90. b) P. méton. Fausse pelle. Coup d'aviron fautif résultant du fait qu'un rameur attaque le plan de l'eau en orientant sa pelle selon un angle fermé, ce qui la fait ressortir sitôt qu'elle y est entrée (d'apr. G. Guillabert, Aviron, Paris, Amphora, 1970, p.95). 4. Région. (Vendée). Rame. Les courses [de bateaux plats] se sont déroulées dans la bonne humeur. Peu d'incidents graves à signaler, sinon quelques «pelles» qui ont cassé net en cours de parcours (Ouest-France, éd. Vendée-Est, 6 août 1982, p.12, col. 4 ds Réz. Ouest 1984). 5. TRAV. PUBL. Pelle mécanique, hydraulique. Engin de terrassement automoteur sur roues ou sur chenilles, comportant un godet fixé à l'extrémité d'un bras articulé mis en mouvement soit par câbles, soit par transmission hydraulique (d'apr. Choppy 1975). De puissantes pelles mécaniques (...) enlèvent d'une bouchée le contenu de dix brouettes (Alain, Propos, 1932, p.1076).Pour l'enlèvement des stériles il est également fait usage de pelles mécaniques et de bulldozers (Lambertie, Industr. pierre et marbre, 1962, p.82). Prononc. et Orth.: [pεl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. a) xies. pele «pelle à four» (R. Levy, Les Gloses françaises chez Simson de Sens ds R. des ét. juives, t.1, p.106); b) 1622-33 remuer les escus par pelle (Tabarin, Opuscules, 431 ds IGLF); 1640 remuer les écus à la pelle (Oudin Ital.-Fr.); 2. 1831 pelle d'aviron (Will.); 3. 1926 pelle à asperges, à tarte, etc... (Lar. mén.); 4. a) 1461 frapper au cul la pelle «traiter durement» (Villon, Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 1900); b) 1889 ramasser une pelle «tomber» (Fustier, loc. cit.); 1896 «échec, insuccès» (Delesalle, loc. cit., p.209); 5. 1932 pelle mécanique (Alain, loc. cit.). Du lat. pala «bêche, pelle». Fréq. abs. littér.: 434. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 249, b) 714; xxes.: a) 975, b) 663. Bbg. Gredig (S). Essai sur la formation du vocab. du skieur fr. Davos, 1939, pp.37-38. (Thèse Zurich). _Quem. DDL t.5, 6, 27. |