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PAYER, verbe
I. − Empl. trans. dir.
A. − Qqn paye qqc. (à qqn)
1.
a) S'acquitter, par un versement, de ce qui est dû. Synon. régler.Payer une amende, une taxe, un procès; payer ses dettes, ses impôts, ses intérêts, ses échéances. Le jour où il [le contribuable] paie ses contributions est le meilleur de sa vie. Cela expie son égoïsme et sanctifie son bien souvent mal acquis et dont il fait mauvais usage (Renan,Avenir sc.,1890, p.511):
1. ... ne voit-on pas un extracteur comme Chambeyron, qui exploite certaines mines pour le compte de Mmede Chatellus, faire sortir une partie du charbon par une galerie qui rejoint une mine dont il est propriétaire, pour éviter de payer le quart franc porté au contrat. E. Schneider, Charbon,1945, p.129.
Expr. Les battus paient l'amende. V. amende A 2.
Proverbe. Qui paie ses dettes s'enrichit. V. enrichir A.
Loc. fig.
Payer ses dettes à la justice, à la société. V. dette C 1.
Payer le tribut (à qqc.). Subir les pénibles conséquences (de quelque chose):
2. L'absorption accidentelle de liquides caustiques acides ou alcalins provoque au niveau de l'oesophage des brûlures profondes, étendues (...). Ce sont malheureusement les enfants qui paient le plus lourd tribut à cette affection. Quillet Méd.1965, p.136.
Payer son tribut à la nature. Mourir. (Dict.xixeet xxes.).
b) En partic. [Le compl. désigne le montant de la somme à verser pour s'acquitter] Donner. L'ouvrier qui, pour un revenu de 1000 Fr., paye 125 Fr. au fisc, rend à l'ordre public une demi-part, soit un huitième de son revenu (Proudhon,Syst.contrad. écon., t.1, 1846, p.269).Pour un achat d'à peu près douze mille francs, Germaine a dû verser cinq mille, et elle paie six pour cent d'intérêt sur le reste (Romains,Hommes bonne vol.,1932, p.123).
2.
a) Verser une somme d'argent en échange de quelque chose (objet, travail, loisir). Payer une marchandise, sa place de cinéma, sa chambre d'hôtel, des travaux dans sa maison; payer qqc. cher, bon marché; payer sa part (de qqc.); travail bien, mal payé; c'est bien payé. Les élèves sont des apprentis qui prennent part à la vie et à la gloire des maîtres, et non des amateurs qui se sentent libres sitôt qu'ils ont payé la leçon (Taine,Philos. art, t.1, 1865, p.212).Colbert donna des instructions strictes, déclarant que le roi ne se chargeait de payer que les chemins ou les ouvrages importants, laissant les autres au budget des villes (P. Rousseau, Hist. transp.,1961, p.156).Un épicier achète du sucre pour une somme de 5000 F; mais il n'a pas dans l'immédiat les fonds nécessaires pour payer son sucre. Il demande un délai (Lesourd, Gérard,Hist. écon.,1968, p.63).
Congé payé. V. congé B 2.
Payer le prix de qqc. La clientèle peut payer le prix élevé des places [de voyage en avion] (Albitreccia,Gds moyens transp.,1931, p.139).
Proverbe. Qui casse les verres les paie. V. casser I A 1.Payer la casse, les pots cassés. V. casser I A 1.
Loc. fig. Payer les violons (du bal). Faire les frais de quelque chose sans en avoir le profit. (Dict.xixeet xxes.).
b) En partic. [Le compl. second. désigne le montant de la somme versée en échange de qqc.] Acheter. J'ai plus de profit à vendre (...) des oeufs, quoique je les paie déjà six sous pièce (Maurois,Silences Bramble,1918,p.109).Le fauteuil d'orchestre que l'on payait 15 Fr. à l'Opéra de Paris en 1914, coûte aujourd'hui 60 Fr. (Arts et litt.,1936, p.80-12).
Empl. pronom. passif. S'acheter. Le beurre se paie 700 francs le kilo (Vailland,Drôle de jeu,1945, p.41).
c) Au fig.
Acquérir par l'effort et malgré les difficultés. À mon avis, la perfection coûte très cher: on la paye de tout son être, et pour la posséder il faut cesser d'exister (A. France,Thaïs,1890, p.181).C'est le prix dont il faut payer la liberté (Vedel,Dr. constit.,1949, p.246).
Empl. pronom. passif. [Un] monde où chaque pas en avant se paie d'un effort douloureux (Bernanos,Soleil Satan,1926, p.146).
Subir les conséquences de ses actes, expier. V. badauderie ex.4:
3. Les armées alliées occupent toute l'Allemagne et le peuple allemand a commencé à payer les crimes horribles commis sous le commandement de ceux que, dans l'heure de la victoire, il a approuvés ouvertement et auxquels il a obéi aveuglément. Charte Nations Unies,1946, p.143.
Locutions
Payer cher qqc. Obtenir un avantage apparent ou momentané à un prix qui se révèlera très élevé. C'est vilain, la vie: Si on y trouve une fois un peu de douceur, on est coupable de s'y abandonner et on le paye bien cher plus tard (Maupass.,Pierre et Jean,1888, p.422).V. aussi cher ex. 11.
Il me le paiera, il me la paiera (fam.). Je lui ferai subir violemment les conséquences de ses actes afin de me venger. M. Tancogne n'avait pas l'air trop content. Il faisait comme ça avec son poing, en criant: «Il me la paiera, celle-là! Pour sûr qu'il me la paiera!» (Genevoix,Raboliot,1925, p.213).
Payer qqc. (une faute, un crime) de sa tête, de sa vie. Expier quelque chose (une faute, un crime) en mourant. Nous sommes réduits au silence lorsqu'on nous rappelle que les clercs doivent payer de leur tête le moindre mot que la passion politique leur inspire et qu'au talent se mesure le crime (Mauriac,Bâillon dén.,1945, p.484):
4. Il y a moins de vingt-cinq ans, des européens (l'un au Vietnam, l'autre en Thailande) (...) ont failli payer de leur vie le fait, étant doublement profanes aux yeux des profanes indigènes, d'avoir surpris l'existence de secrets impénétrables. Cuisinier,Danse sacrée,1951, p.108.
3. Le plus souvent fam.
a) Offrir ou proposer d'offrir (quelque chose à quelqu'un). Payer un verre, le cinéma, le restaurant, des fleurs à qqn; payer à boire, à dîner à qqn. Allez au Havre, vous arriverez encore à temps pour voir une pièce, je vous paye le spectacle (Balzac,Modeste Mignon,1844, p.40).Je paie une tournée, cria Mimar. Lucie, un petit quinquina? (Dabit,Hôtel Nord,1929, p.182).Je t'emmène avec moi. Je te paie une cure à Vichy (Cendrars,Bourlinguer,1948, p.43).
b) Empl. pronom. réfl. indir. Il n'avait pas même fait ce fameux voyage à Marseille, que tout bon Provençal se paie à sa majorité (A. Daudet, Tartarin de T.,1872, p.21).Nombre de petites ouvrières nipponnes seraient bien en peine de se payer tous ces peignes de luxe (Rousset,Trav. pts matér.,1928, p.73).
Au fig. S'offrir quelque chose d'agréable. Se payer du bon temps; se payer une tranche de bonheur. Je me suis payé [après l'examen] quatre ou cinq jours de repos, de vagabondages aux Matignons (Colette,Cl. école,1900, p.244).Au fig. S'en payer (une tranche) (pop.). Paraît qu'il s'en est payé dans sa jeunesse (La Varende,Amour sacré,1959, p.7).
Locutions
Se payer le luxe de + inf. V. luxe A 2 b.
Se payer la tête de qqn. Se moquer de lui. Il avait même laissé entrevoir qu'il pourrait bien retenir sur la solde du coupable une partie du prix des fagots. Conan était sorti du bureau tout écumant de rage, en hurlant dans les corridors qu'on ne se paierait point sa tête pour trois bouts de trique (Vercel,Cap.Conan,1934, p.91).
Se payer une femme, un homme (vulg.). Payer pour avoir des rapports sexuels (avec une femme, un homme) et p.ext. avoir des rapports sexuels (avec une femme, un homme). Synon. se farcir, s'offrir, se taper.[Un certain viveur] se paie les femmes les plus haut cotées à la bourse de la galanterie (Bourget,Pastels,1889, p.8):
5. −Dix mille francs en trois mois! gueulait-il. Nom de Dieu! Qu'en as-tu fait? Hein? Réponds!... Tout ça passe à ta carcasse de tante, hein? Ou tu te paies des hommes, c'est clair... Veux-tu répondre! Zola,Nana,1880, p.1305.
P. antiphr., fam. Accomplir ou subir quelque chose de compliqué ou de pénible. Synon. fam. se farcir, se taper.Se payer le travail le plus ingrat; se payer un platane en conduisant sa voiture. Dès que la matière lui résistait, il se payait une épilepsie (Céline,Mort à crédit,1936, p.407):
6. Un président américain, si populaire soit-il, ne peut se payer impunément à trois mois de distance l'échec d'une offensive de paix et l'échec d'un protégé symbolisant son offensive politico-militaire sur le même front. Le Monde,14 avr. 1966, p.4, col. 3.
B. − Absol. Qqn paye.Verser une somme d'argent, pour s'acquitter de ce qui est dû ou pour acheter quelque chose. Entrer, sortir sans payer; payer d'avance, par mensualités, par termes; payer par chèques, en espèces, en liquide, en petite monnaie. Pour les rubans, allez-y gaiement, faites des folies, c'est moi qui paie! (Colette,Cl. école,1900, p.261).C'est toujours le client qui a raison parce qu'il paie (Hamp,Champagne,1909, p.161).La cotisation ouvrière est un vol, les patrons devraient payer (Reynaud,Syndic. en Fr.,1963, p.75).
1. Expressions
Payer (argent) comptant. V. comptant II.
Payer à crédit. V. crédit C 1.
Payer à l'ordre* de.
Payer recta, rubis sur l'ongle (fam.). Payer intégralement et sur le champ. Nous sommes des gens carrés en affaires! Nous payons rubis sur l'ongle (Farrère,Homme qui assass.,1907, p.44).
2. Payer de
Loc. Payer de ses deniers, de sa poche. Payer avec son argent. Le particulier qui paye de ses propres deniers est parfaitement libre de s'adresser, pour élever la bâtisse, à un jardinier ou à un peintre décorateur (Viollet-Le-Duc, Archit.,1872, p.101).L'oncle et le médecin, n'ayant plus à payer de leur poche, payaient de leurs personnes. Ils n'en récoltèrent pas davantage de gratitude. Élisabeth se déchargeait sur eux de toutes les charges (Cocteau,Enfants,1929, p.127).
Loc. fig. Payer de sa personne. S'engager personnellement et entièrement dans une entreprise pénible et difficile, se sacrifier. Dans la carrière du barreau plus que dans aucune autre, il faut payer de sa personne (...) vous sentez-vous éloquent, monsieur le marquis? (Feuillet,Rom. j. homme pauvre,1858, p.38).V. supra ex. de Cocteau.
3. Au fig. Subir les conséquences de ses actes, expier. Il y a des gens qui ont souffert pour nous jusqu'à la mort et cela nous amusait beaucoup. À présent, il faut payer (Sartre,Huis clos,1944, 5, p.133).Tu vois où me mènent tes conneries. C'est moi qui paie, comme toujours (H. Bazin, Vipère,1948, p.169).
Payer pour qqn.Subir les conséquences des fautes commises par autrui, expier pour autrui. L'innocent va payer bientôt pour tout le monde! (Bernanos,Dialog. Carm.,1948,4etabl., 10, p.1675).Les vieux s'en tirent toujours; ce sont les fils qui paient pour eux (Montherl.,Demain,1949, iii, p.743).
C. − Qqn paye qqn (de qqc.)
1. Qqn paye qqn.Donner (à quelqu'un) ce qui (lui) est dû (le plus souvent de l'argent) en échange de quelque chose (travail, loisir, objet). Payer un commerçant, son propriétaire, ses employés, ses fournisseurs; payer qqn à l'heure, à la semaine, au mois; payer qqn au cachet; payer qqn à ne rien faire; ne pas être payé pour (cela). Il faudrait (...) établir des différences dans la manière de payer les professeurs (Condorcet,Organ. publ. instr.,1792, p.492).Nouilhac n'aurait certainement pas admis M. Fellaire dans son personnel. Il le payait toutefois, mais avec l'argent de Longuemare (A. France,Jocaste,1879, p.158).Je vous paie pour vous occuper de mes enfants et non pour les dresser contre leur mère (H. Bazin, op.cit.,p.54).
Payer (qqn) en nature*, en espèces (v. espèce).
a) Empl. pronom.
Empl. pronom. réfl. dir. Prélever soi-même la somme qui est due en échange de quelque chose. Ils ne se défient pas assez du notaire, sans lequel ils n'osent rien conclure, et pourtant les notaires se paient d'avance (Renard,Journal,1897, p.425).
Empl. pronom. réciproque. Les membres d'un même groupe social ou politique (...) agissent les uns sur les autres par des actes réciproques, ils se commandent, se contraignent, se paient l'un l'autre (Langlois, Seignobos,Introd. ét. hist.,1898, p.209).
Loc. péj. [Le suj. désigne un homme] Se payer sur la bête. Avoir des rapports sexuels avec une femme qui ne peut s'acquitter en argent. Elle n'avait pas un sou et il s'était payé sur la bête (Arnoux,Paris,1939, p.248).
b) Locutions
Payer qqn en monnaie de singe. V. monnaie B.
Payer (qqn) de retour. Rendre (à quelqu'un) une chose, un service analogue à celui que l'on a reçu. Synon. rendre la pareille*.Il [le trombone] était en amicale liaison avec un être aimé qui le payait de retour et lui faisait tout oublier (E. de Goncourt,Zemganno,1879, p.40).Vous savez avec qui est réellement la France et (...) vous avez gardé confiance dans son avenir. Nous saurons, comme nos pères, payer de retour (De Gaulle,Mém. guerre,1954, p.611).
Payer une femme (péj.). Donner de l'argent à une femme en échange de rapports charnels. Est-ce que tu t'imagines que je t'aime pour tes formes? Quand on a une gueule comme la tienne, on paie les femmes qui veulent bien vous tolérer (Zola,Nana,1880, p.1449).
c) Expr. fam. Être (bien) payé pour savoir qqc., le savoir. Avoir appris quelque chose à ses dépens. Victor Hugo (...) savait ce que pèse une réussite (...). Il était payé pour le savoir (Péguy,V.-M.., comte Hugo,1910, p.756).
2. Qqn paye qqn de/pour qqc.Dédommager. Mais Edmond considérait ce qui venait de sa famille comme un dû: Est-ce que je ne les paie pas de la pension qu'ils me font? Et au delà! Toute ma jeunesse (Aragon,Beaux quart.,1936, p.314).
Au fig.
Consoler, récompenser. Dieu veuille qu'une larme de vous me paie un jour de celles que vous me faites répandre en ce moment! (Musset,Confess. enf. s.,1836, p.346):
7. Oui, la victoire, la puissance, la rénovation, cela coûte cher, en fait de labeur, de peines et de sacrifices. Mais c'est cela que nous voulons et c'est cela qui nous paiera de tout! De Gaulle,op.cit.,1959, p.425.
Empl. pronom., loc. Se payer de mots, de belles paroles, de (belles) phrases. V. mot I A 2.
D. − Qqc. paye qqc.
1. Rembourser, permettre de faire face à (une dépense). Je t'envoie sous ce pli une traite de 750 Fr. à ton ordre sur Mallet Frères. Cela paie la note de 724 Fr. 15 envoyée par Victor (Hugo,Corresp.,1866, p.543).La pension, quelques petites affaires de hasard, payaient les frais du ménage (Guéhenno,Jean-Jacques,1948, p.68).
2. [Le suj. désigne une marchandise] Être soumis au paiement (d'un droit). Il n'y a que les sels dénaturés et les sels exportés qui ne paient pas de droits (Ch. Durand, Industr. minér. Lorr.,1893, p.28).À Paris, une lettre simple non affranchie paye un surplus de droit de 5 centimes (Pradelle,Serv. P.T.T. Fr.,1903, p.59).
II. − Empl. trans. indir., vieilli. Qqn paye de + subst. désignant l'attitude ou la conduite d'une pers.Faire preuve de. Payer d'obéissance. C'est le moment de payer d'assurance, dit Consuelo en s'arrêtant; Joseph, faites et dites comme moi (Sand,Consuelo, t.2, 1842-43, p.324).L'aplomb est toujours un moyen de succès. Toute la soirée, je tranchai du grand seigneur, je payai d'impertinence et d'audace (Loti,Aziyadé,1879, p.207).
Locutions
Payer de mine, ne pas payer de mine. V. mine1I B.
Payer de veine (arg.). Avoir de la chance. Remarquez que ce dernier parti est, je crois, celui auquel nos chefs s'arrêtèrent après les 20 et 22 Août 1914, où nous n'avions pas payé de veine (Capitaine Z dsL'OEuvre,20 oct. 1916, p.3, col. 1 ds Esn. Poilu 1919).
III. − Empl. intrans. Qqc. paye.Procurer un bénéfice, être rentable. Synon. fam. rapporter, rendre.Il aura à se poser chaque fois la question de savoir si l'aménagement nouveau qu'il préconise lui sera profitable. Si cet aménagement «ne paie pas» ou s'il «paie mal», il doit en écarter le choix (Villemer,Organ. industr.,1947, p.11).
Au fig. Procurer un avantage, être efficace. Le crime ne paie pas. La trahison paie mal; voilà quatre ans que je trahis tout le monde (...) et je n'ai pas mis un sou de côté (Vailland,Drôle de jeu,1945, p.42).Je me rendais compte qu'en Amérique, la solitude ne paie pas (Beauvoir,Mandarins,1954, p.302).
Prononc. et Orth.: [peje]; [pε-], (il) paye, paie [pεj], [pε]. Ds Fér. 1768, Mart. Comment prononce 1913, p.193, préférence aux formes sans [j], en ce qui concerne en tout cas le fut. et le cond.: [pε] (il) paie, [pε ʀ ε], [pe-] (il) paierait, etc. Att. ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist.1. 2emoitié xes. réfl. «se réconcilier avec quelqu'un» (Saint Léger, éd. J. Linskill, 108) −xiiies., v. Gdf. et T.-L.; 2. a) fin xes. «se satisfaire de» (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 208); b) 1453 (Pierre de Provence et la belle Maguelonne, éd. A. Biedermann, p.71-72: la contesse se tenoit fort pour payée des bonnes paroles que luy avoit dit l'ospitaliere); 3. a) 1170 trans. «donner ce qui est dû» (Chrétien de Troyes, Erec et Enide, éd. M. Roques, 2056); b) 1176-80 paier de cos (Id., Chevalier Lyon, éd. M. Roques, 6242); c) 1180 «rétribuer quelqu'un» (Marie de France, Fables, éd. K. Warnke, IV, 40); d) 1585 payer en monnoye de singe (Noël du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, t.2, p.298); e) 1538 payer qqc. «expier» (Est.); f) 1635 payer de sa personne «s'employer activement à quelque chose» (J. de Mairet, La Sophonisbe, II, 2); g) 1640 absol. «acquitter un droit (en parlant de marchandises)» (Journal d'un bourgeois de Paris, éd. Tuetey, p.354); 4. 1875 «rapporter, donner du profit» (L. Simonin, Rev. des Deux-Mond., 15 nov., p.90 ds Littré Suppl.). Du lat. pacare (dér. de pax «paix») «faire la paix, pacifier» qui a dû être transposé à basse époque au domaine mor. au sens de «satisfaire, apaiser», d'où le sens développé dans les lang. rom. de «satisfaire, apaiser avec de l'argent», v. REW3, no6132; payer dans ce sens, s'est répandu, peut-être du Sud vers le Nord de la France, le prov. pagar étant att. antérieurement (ca 1137, Cercamon, Tenson avec Guilhalmi, 54 ds OEuvres, éd. A. Jeanroy, p.25; v. aussi FEW t.12, p.81 et A. Stefenelli, Geschichte des Kernwortschatzes, p.60 et p.164, note 87), en évinçant l'a. m. fr. soudre att. du xiieau xives., issu de solvere, littéral. «délier» d'où «payer, acquitter» (v. T.-L.). Le sens 4 est empr. à l'angl. to pay (empr. au fr. au xiiies.) att. dep.1812 dans cet empl. intrans. en parlant d'une chose, v. NED et Rey-Gagnon Anglic. Fréq. abs. littér.: 12114. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 20560, b) 19575; xxes.: a) 17577, b) 12911.
DÉR.
Paierie, subst. fém.Bureau d'un trésorier-payeur. Certains comptables (paierie générale de la Seine) et des contrôleurs financiers ne peuvent exercer une véritable analyse des pièces qui leur sont soumises car ils en ont trop à examiner (Belorgey,Gouvern. et admin. Fr.,1967, p.209). [pε ʀi], [pe-]. 1reattest. 1949 (Nouv. Lar. univ.); de payer, suff. -erie*.
BBG. _Chautard Vie étrange Argot 1931, p.528._Darm. Vie 1932, p.61. - Dauzat Ling. fr. 1946, p.185. _Gougenheim (G.). Chercher et fouiller... In: [Mél. Harmer (L. Ch.). London-Toronto-Wellington-Sydney, 1970, pp.17-20.