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PAVOIS, subst. masc.
A. − Grand bouclier ovale ou rectangulaire, en usage au Moyen Âge. Les soldats (...) portaient de grands boucliers, nommés pavois, souvent terminés à leur extrémité inférieure par une pointe de fer qui permettait de les ficher dans le sol (Mérimée, Ét. arts Moy. Âge, 1870, p.287).
Loc. Élever, hisser, porter sur un pavois. Mettre au pouvoir, hisser sur un bouclier en signe d'accession à la royauté (d'apr. Fédou Moy. Âge 1980). Quand les Français élisaient un roi, ils l'élevaient sur un pavois, le portaient sur un pavois (Ac.1798-1878).Lorsqu'on élisait un roi, on le hissait sur le pavois (Ac. 1935).
Loc. fig. Élever, hisser, mettre sur le pavois. Glorifier, parer d'une renommée exceptionnelle. Monter sur le pavois. Parvenir à une haute situation. Monté sur le pavois grâce au succès de la Fille de Madame Angot, il [Lecocq] alla proposer à son éditeur et ami Daubels son recueil qui était intitulé Miettes musicales (L. Schneider, Maîtres opérette fr., 1924, p.182).En le mettant [Alexandre de Girardin] sur le pavois, Émile [de Girardin] reconnaissait son père (...) et cela valait mieux que l'attaquer (Morienval, Créateurs gde presse, 1934, p.34):
1. D'Albertine, en revanche, je n'avais plus rien à apprendre. Chaque jour, elle me semblait moins jolie. Seul le désir qu'elle excitait chez les autres, quand, l'apprenant, je recommençais à souffrir et voulais la leur disputer, la hissait à mes yeux sur un haut pavois. Proust, Prisonn., 1922, p.28.
B. − MARINE
1. Partie de la coque située au-dessus du pont. Le pont se remplissait, à chaque plongeon, et la nappe liquide (...) pouvait submerger le navire. Il eût été sage, pour parer à tout événement, de briser les pavois à coups de hache, afin de faciliter la sortie des eaux (Verne, Enf. cap.Grant, t.3, 1868, p.39).La muraille du bâtiment est généralement prolongée au-dessus du pont des gaillards en formant pavois de manière à protéger l'équipage contre la mer (Croneau, Constr. nav. guerre, t.1, 1892, p.6).
2. Ensemble des pavillons d'un navire. Nous avons hissé le pavois avec le pavillon argentin en tête du grand mât (Charcot, «Pourquoi-Pas?»1910, p.228).
Grand pavois. ,,Ensemble des pavillons du Code international, hissés suivant une disposition donnée, en signe de fête`` (Sizaire Marine 1972). Jour de la fête nationale de France. Sur rade de Nagasaki, grand pavois en notre honneur et salves d'artillerie (Loti, MmeChrys., 1887, p.70).Passant devant les 40 bâtiments qui arboraient le grand pavois (...) je sentais que notre marine avait dévoré ses chagrins et retrouvé ses espérances (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p.12):
2. ... trois fois de suite notre petit canon (...) a tonné pendant que le grand pavois montait dans la mâture et que, cacophonie effroyable, gramophone et phonographe sur deux tons différents luttaient de vitesse pour achever le premier la Marseillaise. Charcot, Expéd. antarct., 1906, p.176.
Petit pavois. Ensemble de pavillons nationaux hissés au sommet des mâts sur un navire de commerce (d'apr. Gruss 1978). Le petit pavois est établi pour honorer le pays étranger dans lequel on se trouve (Gruss1978).
3.
a) Vx. Synon. de pavesade (v. ce mot A).
b) ,,Ensemble de bandes de drap bleu bordées de rouge que l'on plaçait de chaque bord sur les vaisseaux, les jours de fête`` (Gruss 1978).
P. ext. Toiles ornant un bateau. V. barque ex. 1.
Prononc. et Orth.: [pavwa], [-a]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.A. 1. 1336 au plur. «grands boucliers dont on garnissait le bord supérieur des navires pour former un rempart à l'abri duquel on combattait» (Armement de la nef la Catherine de Leure, 15 déc. ds Actes normands de la Chambre des Comptes sous Philippe de Valois, éd. L. Delisle, p.149); 2. 1364 p.ext., avec changement de suff., au plur. pavas «grandes pièces de toile tendues sur le bord supérieur des navires et destinées à cacher l'équipage à l'ennemi» (Compte de J. dou Four, Arch. KK 3b, fo35 vods Gdf.); 1643 pavois (Fournier, Hydrographie, p.831); 1874 désigne les pavillons dont on orne le gréement d'un navire en signe de réjouissance (Lar. 19e); 1887 spéc. grand pavois (Loti, loc. cit.). B. 1365 au plur. pavays «grands boucliers ovales ou rectangulaires faits de bois léger recouvert de cuir ou de lames de fer» (doc. 17 janv. ds Mandements et actes divers de Charles V, éd. L. Delisle, p.138); 1remoitié du xvpavois (Le Viandier de Taillevent, ms. du Vatican, éd. J. Pichon et G. Vicaire, p.274); 1576 spéc. mettre (un roi mérovingien) sur un pavois «(le) proclamer roi» (Du Haillan, L'Histoire de France, p.11); 1827 p.ext. (Chateaubr., Mél. hist., p.46: Mgr le duc de Berry éleva un drapeau blanc, et, sur ce pavois du nouveau Champ-de-Mars, proclama le premier le monarque); 1845 au fig. (Balzac, Lettres Étr., t.3, p.26: [à propos d'une symphonie] Voilà la première fois que la fougue parisienne ne se trompe pas et n'élève pas sur le pavois une sottise). Empr. à l'ital. pavese «bouclier d'osier ou de bois recouvert de cuir» (dep. le xiiies., panvese d'apr. DEI; pavese, 1remoitié du xives. ds Tomm.-Bell.), propr. «(objet) de Pavie», du lat. pavensis «de Pavie»: Pavie fut prob. au Moyen Âge un centre réputé de fabrication d'armes (cf. heaumes Paviëis, ca 1165, Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 14370 et passim; escuz pavaiz, 1337 ds DG; lat. médiév. domaine ital. pavensis «bouclier fabriqué à Pavie» en 1275 ds Vidos, p.521 et en 1299 ds Du Cange). Fréq. abs. littér: 65. Bbg. Gougenheim (G.). Un mot pseudo-mérov.: pavois, Vox. rom. 1938, t.3, pp.237-252. _Guerlin de Guer (J.). À propos de pavois. Fr. mod. 1940, t.8, pp.318-320. _Hope 1971, p.47. _La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p.427. _Lerch (E.). Frz pavois... Neuphilol. Mitt. 1940, t.41, no1/2, pp.29-34. _Vidos 1939, p.26, 49, 520-523.