| PASSER1, verbe . Passer des aveux est du pur charabia policier (...).
Passe-t-on des aveux comme on passe le sel à la table d'hôte?
Passe-t-on des aveux comme on passe capitaine;
comme on passe l'éponge sur une faute vénielle;
comme on passe la parole à plus bavard que soi;
comme passe un illustre moribond, passant du même coup à la postérité?
Le verbe a sans doute autant d'acceptions que faire; et ce n'est pas peu dire. Passons.
L. Piéchaud, Questions de langage, 1953ds Dupré 1972. 1reSection. [Dans l'espace ou dans un mouvement spatial] Qu'est-ce que passer? C'est à la fois être en un lieu et n'y être pas (Sartre, Être et Néant, 1943, p.262). I. A. − Aller d'un mouvement continu d'un point à un autre; parcourir, traverser un lieu. 1. a)
α) Qqn1/qqc.1passe.Passer à cheval, à pied, en voiture; passer en courant, en trombe; passer au galop; passer sans se presser; passer sans s'arrêter. Il passa sans me voir et sortit (Musset, Confess. enf. s., 1836, p.332).Des balles passaient avec un bruit mou de guêpes (Malraux, Espoir, 1937, p.540).Au loin un train passa, le balcon trembla (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.303).V. boomerang ex. 2, éclair B 2 ex. de Hugo, front C 2 ex. de Gautier. ♦ Regarder, voir qqn/qqc. passer. Financièrement parlant, Monsieur Grandet tenait du tigre et du boa (...). Personne ne le voyait passer sans éprouver un sentiment d'admiration mélangé de respect et de terreur (Balzac, E. Grandet, 1834, p.15).V. eau ex. 6.[Par un effet d'opt.] :
1. Je passai le jour et la nuit sur le pont à me pénétrer du bonheur de voir la grande mer bleue et nos vaisseaux. (...) Je regardai passer la Corse tout près de nous, traînant la Sardaigne à sa suite, et bientôt arriva la Sicile à notre gauche.
Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p.141. − Tournure impers. Le père Bonnemort (...) ouvrait des yeux surpris, car de son temps on ne se tracassait pas de la sorte: on naissait dans le charbon, on tapait à la veine, sans en demander davantage; tandis que, maintenant, il passait un air qui donnait de l'ambition aux charbonniers (Zola, Germinal, 1885, p.1276). − Empl. factitif. Qqn2/qqc.2fait passer qqn1/qqc.1La pile (...) peut fonctionner en accumulateur; il suffit, en effet, lorsqu'elle est épuisée, de faire passer un courant de sens inverse pour la régénérer (Soulier, Gdes applic. électr., 1916, p.184). − Passer son chemin. V. chemin II A 2 ex. de Cocteau et ex. 31. − Locutions ♦ Un ange passe. V. ange ex. 27. ♦ Le courant (ne) passe (pas). V. courant I C 1 ex. de L'Express. ♦ Passez muscade. V. muscade B 2 b. − Loc. adv. En passant. Synon. au passage. ♦ En cours de route. Le Sieur de La Pérouse quittera O-Taïti après un mois de séjour. Il pourra visiter, en passant, les îles de Huaheine, Ulietea, Otaha, Bolabola, et autres îles de la Société (Voy. La Pérouse, t.1, 1797, p.19).Écoute, dit-il à Jallez, si tu es libre ce soir, viens dîner avec nous. Odette n'est pas prévenue. Mais ça n'a pas d'importance. J'achèterai des choses en passant (Romains, Hommes bonne vol., 1938, p.221). ♦ Au fig. Incidemment. Qu'il me soit permis de remarquer, en passant, que cette proposition peut être inversée (Baudel., Paradis artif., 1860, p.355).M. Pottier (dont les notices, je le dis en passant, sont d'excellents mémoires d'archéologie et d'art)... (A. France, Vie littér., 1890, p.92).V. férocité ex. 3.Soit dit en passant. V. dire II C 4 b ex. de Ambrière.
β) [Avec une idée d'oeuvre accomplie au cours de l'action] L'être qui aimait n'existe plus. Là aussi il y a la mort qui a passé, a rendu tout aisé et tout inutile (Proust, Fugit., 1922, p.603).
γ) En partic. [Le suj. désigne des oiseaux migrateurs] [La chasse à la passée] est (...) une chasse peu fatigante en raison même de sa brièveté; mais elle demande des réflexes prompts, car les bécasses «passent» vite (Vidron, Chasse, 1945, p.62): 2. ... au fond du ciel clair, au-dessus des immobilités tapies, les oies sauvages passaient toujours, les pattes collées au ventre, (...) le long de la grande route migratrice, semblable aux routes invisibles qu'il y a sur la mer pour les vaisseaux, ou à celles que suivent les astres.
Montherl., Célibataires, 1934, p.903. b) P. méton. Être, avoir passé. Avoir fini de passer, avoir disparu. Les hirondelles traçaient sur le bleu du ciel de grandes lignes courbes qu'on croyait voir encore quand elles étaient passées (Maupass., Bel-Ami, 1885, p.366). 2. a) [Avec adv. de lieu ou compl. prép. désignant l'espace parcouru ou un point du parcours]
α) Passer dans, en.Passer dans une rue; passer dans un corridor, une coursive. Tous ceux qui passaient dans ces parages demandaient à voir le château (Barb. d'Aurev., Memor. pour l'A... B..., 1864, p.439).Nous passions dans une ruelle herbeuse, entre deux hauts murs de jardin (Vercors, Sil. mer, 1942, p.18).V. allonger ex. 11. ♦ Tournure impers., avec ell. possible de dans. Il ne passe pas une chaise de poste tous les dix ans rue des Postes (Hugo, Misér., t.1, 1862, p.538). − P. anal. Sentir qqc. passer dans son esprit. L'homme ne répondit pas d'abord. Une inquiétude passa dans son regard, et aussitôt une lueur aiguë, courageuse, dardée aux yeux de Malcourtois: −T'es ben curieux, dis donc... et si je te demandais qui tu es? (Genevoix, Raboliot, 1925, p.198).Un souffle d'annonciation lointaine passait en moi qui m'avertissait que la ville avait trop vécu et que son heure était venue (Gracq, Syrtes, 1951, p.59).V. dans I A 1 ex. de Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.156: 3. Il avait une supplication dans la voix, cet homme si fier, en disant cette dernière phrase, et elle fut si bien sentie qu'un murmure passa dans la foule quand le président lui répondit: −«À mon grand regret, monsieur, je ne peux vous accorder ce que vous demandez...»
Bourget, Disciple, 1889, p.237. − P. métaph. Passer (dans la vie de qqn). Ainsi, j'aurai passé dans votre destinée comme un orage pour la flétrir et la briser, moi qui verserais avec joie tout mon sang pour y faire germer une fleur! (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p.318).−J'emporterai votre souvenir (...). −Mais vous m'oublierez, j'aurai passé comme une ombre (Flaub., MmeBovary, t.1, 1857, p.171).
β) Passer devant.On passe un peu plus loin devant un poste de soldats, puis, le long d'un tout petit cimetière (Farrère, Homme qui assass., 1907, p.25).V. bécot A ex. ♦ Passer devant la glace. V. glace II B pop., vx.
γ) Passer entre.Elle se recula (...) comme si la mort avait passé entre eux (R. Bazin, Blé, 1907, p.219).Des gardes à cheval (...) passaient entre des rangées de fenêtres closes (Camus, Peste, 1947, p.1309): 4. [Le petit bateau à vapeur] partit en soufflant (...), passa entre les deux tours antiques qui gardent le port, traversa la rade, sortit de la digue construite par Richelieu (...); puis il obliqua vers la droite.
Maupass., Contes et nouv., t.1, Épave, 1886, p.717.
δ) Passer outre.V. outre2II A.
ε) Passer par.Passer par le boulevard. De Genève pour aller en Italie on passe par Lausanne (Stendhal, Chartreuse, 1839, p.74).En passant par les champs, il ne faut que trois quarts d'heure de marche pour gagner les sablonnières (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p.277). ♦ Passer par là. V. là I B 4 b ex. de Nerval: 5. ... François Paradis (...) dit (...) qu'il allait gagner le grand lac en suivant les rivières, la rivière Croche d'abord, et puis la rivière Ouatchouan, qui tombe près de Roberval. −C'est correct, dit le père Chapdelaine. Ça peut se faire. J'ai passé par là.
Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p.140. − P. anal. Passer par la tête, par l'esprit de qqn. Soudain une idée, dont tu riras, me passa par la tête (Krüdener, Valérie, 1803, p.133).Les premières journées s'écoulèrent (...) à parcourir la maison, suivi du fidèle Arcangeli, lequel écrivait à mesure, tout ce qui passait par l'esprit du maître, pour singulariser et embellir (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p.115). − Au fig. Révélé en 1839 par l'exposition industrielle de Paris, (...) [François-Désiré Froment-Meurice] est loué à l'envi par l'élite littéraire du moment, de Delphine de Girardin à Théophile Gautier, en passant par Balzac, Victor Hugo et Eugène Sue (Grandjean, Orfèvr. XIXes., 1962, p.83).
ζ) Passer sous.Tous les jours, sortant vers trois heures d'une maison voisine, elle descendait la rue et passait sous ma fenêtre (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p.141).Passant sous l'Arc de triomphe, (...) [le soleil] allongeait à hauteur d'homme une lumière roussâtre, qui faisait étinceler les moyeux des roues, les poignées des portières (Flaub., Éduc. sent., t.2, 1869, p.10).V. gué1ex. de Giono et journée A 3 ex. de France. ♦ Passer sous les fourches caudines. V. fourche C 3. ♦ Passer sous le joug. V. joug II. ♦ Expr. Laisser passer l'eau sous les ponts. V. pont I A 2 b.Tournure impers. Il passera de l'eau sous les ponts (avant que); il a passé de l'eau sous les ponts (depuis que). V. eau I A 2 c loc. fig., pont I A 2 b. − P. anal. Passer sous les yeux de qqn. Une petite fille de sept à huit ans, disait la note, qui avait été confiée par sa mère à un aubergiste du pays, avait été volée par un inconnu (...). Cette note passa sous les yeux de Javert, et le rendit rêveur (Hugo, Misér., t.1, 1862, p.564). ♦ P. métaph. Ce bon Monsieur Duvivier (...) avait vu passer sous ses yeux trois générations de reines tragiques (Jouy, Hermite, t.4, 1813, p.35).Empl. factitif: 6. ... en ces siècles d'avant notre ère, nous devons nous borner à faire passer rapidement sous les yeux du lecteur les vues prises çà et là sur le monde méditerranéen. Après l'activité maritime d'Athènes, puis celle d'Alexandrie, c'est la marine carthaginoise qui nous sollicite maintenant.
P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p.102. − Au fig., fam. Passer sous le nez de qqn. V. nez II. − Fam. Passer sous une voiture, sous un train. Se faire renverser et être écrasé par un véhicule. (Dict.xxes.).
η) Passer sur.Perturbation qui passe sur la France; révolution qui passe sur un pays. Une grande femme brune passait sur le chemin qui suit la mer en allant vers le cap (Maupass., Contes et nouv., t.1, MmeParisse, 1886, p.730).Le vent passait sur la plaine... (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1450). − P. anal. Sa voix frémit à peine sur ces derniers mots, tandis qu'un sourire indéfinissable passait sur ses traits (Bernanos, Joie, 1929, p.703).Madame de Sannis souriante paraissait dormir en marchant; ses yeux passèrent sur moi sans me voir (Jouve, Scène capit., 1935, p.203). − En partic. ♦ Passer sur (le corps, le ventre de) qqn. Écraser quelqu'un. Cela, de nouveau, ne faisait aucun doute: on culbuterait les Prussiens, on leur passerait sur le ventre (Zola, Débâcle, 1892, p.573).Ils s'étaient embrochés mutuellement, et puis la charge de la cavalerie argyenne leur avait passé dessus. Ils étaient en bouillie, Antigone, méconnaissables (Anouilh, Antig., 1946, p.189).V. turcophage, s.v. -phage I A 1 c ex. de Chateaubriand.Au fig. V. corps II B 2 c.P. métaph. La reine (...) entendit rouler dans la cour, le phaéton dont les roues légères ne s'éloignaient jadis qu'en lui passant sur le coeur (A. Daudet, Rois en exil, 1879, p.421). ♦ Vulg. Passer sur (le ventre d') une femme. Avoir des rapports sexuels avec elle. Ça, c'est la femme dont Y... me disait, un jour d'expansion, que tous ses amis lui avaient passé sur le ventre! (Goncourt, Journal, 1894, p.678).Du diable si je choisirais une ribaude sur laquelle a passé l'armée (Arnoux, Roi, 1956, p.79). − ESCR., vieilli. Passer sur qqn. ,,Avancer sur lui en portant le pied gauche devant le pied droit`` (Petiot 1982).
θ) Passer à côté (de qqc.) (au fig.). V. côté III A 2 a ex. de Druon et ex. 17.
ι) Passer à la portée de. Elle errait de pièce en pièce comme un chien perdu, emboîtant le pas à tous ceux qui passaient à sa portée (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1273).
κ) Passer au travers de (au fig.), région. (Canada). Passer au travers (d'un livre). Parcourir en entier. Marguerite qui (...) avait pris l'habitude de lire, suivait la ligne jusqu'au bout et passait au travers du livre (J. Ferron, La Charrette, 1968, p.82 ds Richesses Québec 1982, p.1731).
λ) Passer par-dessus (au fig.). V. dessus1I B 2 a ex. de Estaunié. ♦ Passer par-dessus la tête de qqn. Être trop difficile à comprendre pour quelqu'un. Ce discours du 10 mai 1907 passa par-dessus les têtes (Barrès, Cahiers, t.5, 1907, p.109).
μ) Passer à fleur de corde, passer à la corde − JEU DE PAUME. Passer à fleur de corde. ,,La balle a passé à fleur de corde, elle a légèrement touché la corde, de sorte que peu s'en est fallu que le coup ne fût perdu`` (Littré, s.v. fleur). ♦ Au fig. ,,Cette affaire n'a passé qu'à fleur de corde, peu s'en est fallu qu'elle s'échouât`` (Littré). P. iron. Mon vieux, si tu avais eu affaire à un type plus service, tu n'y coupais pas de biribi! T'as passé à la corde! (Vercel, Cap.Conan, 1934, p.104). b) Spécialement
α) ASTRON. Passer au méridien. V. méridien B 1 a ex. de Soé-Dup. 1906.
β) MARINE ♦ Passer à la bande (v. bande3). ,,Ranger un bâtiment en rendant les honneurs, l'équipage aligné sur le pont`` (Gruss 1978). ♦ Passer à poupe*. ♦ Passer au vent. ,,Laisser sous le vent un cap, un écueil, un autre navire`` (Gruss 1978). ♦ Passer sous le vent. Laisser au vent un cap, un écueil, un autre navire (d'apr. Gruss 1978). c) P. anal. [En parlant d'une entité linéaire continue] La Seine passe à Paris; un tunnel passe sous le Mont-Blanc; un pont passe au-dessus du fleuve; un fil qui passe sur une poulie. Une allée (...) montait à flanc de coteau, passait entre des groupes de chênes, et redescendait vers la Vaucreuse (R. Bazin, Blé, 1907, p.146).La canalisation passe dans la chaudière où elle forme une spirale chauffée directement par le foyer (Lar. mén.1926, p.319).V. large II B ex. de Duhamel: 7. ... à l'est et au sud d'une ligne passant environ par Amiens, Albert, Bapaume, Cambrai et Le Cateau, la physionomie de la contrée limoneuse à sous-sol de craie atteint sa pleine expression.
Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p.91. ♦ Au fig. Il est malaisé, à coup sûr, d'indiquer où passe la frontière qui sépare l'«artiste» du poète (Faure, Espr. formes, 1927, p.132). − MATH. Passer par un point, une droite. ,,On dit (...) qu'une droite, une courbe, une surface, etc., passe par un point A si ce point est un élément de cette droite, de cette courbe, ou de cette surface`` (Bouvier-George Math. 1979). Par une droite donnée D, passent une infinité de plans (Hadamard, Géom. ds espace, 1921 [1901], p.3).Considérons dans le plan P un faisceau de droites passant par le point C; les points qui passent par le point S et ces diverses droites contiennent tous la droite SC, parallèle au plan Q (E. Borel, Paradoxes de l'infini, 1946, p.47). B. − [L'action implique un obstacle à franchir, une difficulté à surmonter; ceux-ci sont désignés ou non] 1. a)
α) Qqn1/qqc.1passe.Le coeur me disait que c'était Carmen. Cependant je criai: au large! on ne passe pas! (Mérimée, Carmen, 1845, p.46).V. gué1ex. de Verne et passage ex. 14: 8. Comment se lancer sans guides, au hasard, dans cette plaine inondée? Il le faut cependant, sous peine de ne plus passer demain; car la pluie continue, et les torrents versent de toutes parts leurs eaux dans le désert.
Lamart., Voy. Orient, t.2, 1835, p.243. ♦ HIST. [Slogans milit. de la guerre de 1914-1918] On ne passe pas; ils ne passeront pas. Mon petit, m'écrivait Robert, je reconnais que des mots comme «passeront pas» ou «on les aura» ne sont pas agréables (...). Mais, et c'est pour cela qu'il faut s'habituer à «passeront pas», tous ces gens-là, comme mon pauvre valet de chambre, comme Vaugoubert, ont empêché les Allemands de passer (Proust, Temps retr., 1922, pp.752-754).Dans la boue et dans le froid, dans l'horreur de chaque tranchée, et dans les risques mortels de chaque instant, les «Poilus» eurent le courage de tenir coûte que coûte et d'appliquer par les armes la fière consigne «On ne passe pas». C'est à ceux-là que la foule, pressée au coeur de Verdun, pensait en regardant le dernier carré des survivants (L'Est Républicain, 16 juin 1986, p.1, col. 1). − Laisser passer.Qqn2/qqc.2laisse passer qqn1/qqc.1.Permettre à quelqu'un/à quelque chose de passer. À peine avions-nous ouvert la porte (...) que nous fûmes forcés de nous arrêter pour laisser passer Marguerite et le duc qui s'en allaient (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p.77).Au sommet du Panthéon, une ouverture circulaire laisse passer la lumière du ciel (Faure, Hist. art, 1909, p.146).V. effacer ex. 9. ♦ En compos. V. laissez-passer. − Loc. Passer comme une lettre à la poste. V. lettre III A 1.
β) [Avec compl. prép. ou adv. de lieu] De part et d'autre, cette route aboutissait à des sentiers où l'on ne pouvait passer qu'à mulet (Brunhes, Géogr. hum., 1942, p.58).−On verra ça quand on traversera le Sahara à motocyclette! dit Nadine gaiement. −On le traversera! dit Lambert. Une moto ça passe partout! (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.215).V. fenêtre ex. 1. − Passer dans (p.exagér.).La Palferine avait donné le mot à un petit Savoyard (...) lequel le sert pour rien et duquel il dit: «Je n'ai jamais vu tant de niaiserie réunie à tant d'intelligence, il passerait dans le feu pour moi...» (Balzac, Prince Bohême, 1840, p.368). − Passer entre.Une pompe consiste (...) en un tuyau cylindrique (...) dans lequel un piston (...) glisse en le remplissant exactement et de façon que ni l'air, ni l'eau ne puissent passer entre le cylindre et le piston (Poisson, Mécan., t.2, 1811, p.372).Les trajectoires véritables [des étoiles filantes] sont sensiblement parallèles, mais elles paraissent diverger d'après la même loi qui nous montre comme divergents les rayons du soleil couchant passant entre les nuages (Flammarion, Astron. pop., 1880, p.676). − Passer par.Le (...) buffet (...) n'est jamais trop grand pour ne pouvoir pas passer par la porte (Nosban, Manuel menuisier, 1857, p.86). ♦ Au fig. Passer par (l'intermédiaire de) qqn; passer par une agence de voyage. Le chef du personnel (...) ne dirige directement qu'un petit nombre d'employés, et, pour commander les autres, il doit passer par l'intermédiaire de leur chef hiérarchique (Villemer, Organ. industr., 1947, p.252): 9. ... si vous avez quelque chose à communiquer à Louise, enfin quand je dis à Louise... Vous me comprenez... Il y a la boîte-à-lettres, à Lyon. Cette adresse est secrète, je n'ai pas besoin de vous le dire... Mais je crois bien faire en vous la communiquant: si votre liaison passait par Louise, vous devez être coupé...
Triolet, Prem. accroc, 1945, p.258. − Passer à travers.Quels cheveux sans couleur, à force d'être blonds! On dirait que le jour passe à travers (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.282).V. injecter C 1 b ex. de Campredon. ♦ Fam. ,,Échapper à un danger`` (Carabelli, [Lang. pop.], s.d.). ♦ Arg. Manquer une occasion, être oublié dans la distribution (d'apr. Car. Argot 1977). − Passer au travers.Passer sans se faire arrêter. Il lui faut sur place un braconnier, un gaillard assez fin pour détourner les surveillances à moins qu'il ne passe au travers (Genevoix, Raboliot, 1925, p.88). b) Avec valeur factitive
α) Qqn3/qqc.3passe qqn1/qqc.1Faire traverser, transporter. Un de ses parents (...) retournant en Corse, son pays natal (...) ne pouvait trouver de navire pour le passer (Mérimée, Colomba, 1840, p.8).Le marché fait, le contrebandier arrive, emporte son homme, le passe et le rend à destination (Gautier, Tra los montes, 1843, p.16).Frampas (Francus Passus XIIesiècle), était devenu un village sans poste de douane, où l'on pouvait passer librement les marchandises (L'Hist. et ses méth., 1961, p.696).V. atterrissage ex. 4. − P. ext. Faire accepter quelque chose frauduleusement. −Tu l'as passée [la fausse pièce]? −On ne t'a rien dit? Georges hausse les épaules: −Qu'est-ce que tu voulais qu'on me dise? −Et on t'a rendu la monnaie? (Gide, Faux-monn., 1925, p.1146).
β) Passer qqn/qqc. par dessus bord/par la fenêtre. Jeter. Allons, va-t-en, reprit Cruséo avec douceur. Je n'ai pas toute ma raison, je pourrais aussi bien te passer par la fenêtre (Aymé, Rue sans nom, 1930, p.165).V. bord I A 1 loc. 2. En partic. [L'action est d'ordre concr. ou abstr.] a)
α) Un liquide passe. Filtrer (v. ce mot II A). V. distiller A 1 ex. de Kapeler et filtre ex. de Zola. − Laisser passer. Il est nécessaire d'avoir de grandes surfaces de filtration, (...) ne laissant passer que 1 à 2 kg d'huile par heure (Chartrou, Pétroles natur. et artif., 1931, p.92).Certaines membranes organiques ont la propriété de laisser passer l'eau pure alors qu'elles arrêtent les molécules de corps dissous (Hist. gén. sc., t.3, vol. 1, 1961, p.458). − Empl. factitif. V. débéloire ex. de Giono. ♦ [Avec compl. prép.] On fait passer l'eau [à purifier] sur un filtre qui retient les matières en suspension (Ser, Phys. industr., 1890, p.227). ♦ Absol. L'extrait gras du haschisch (...) s'obtient en faisant bouillir les sommités de la plante fraîche dans du beurre avec un peu d'eau. On fait passer, après évaporation complète de toute humidité, et l'on obtient ainsi une préparation qui a l'apparence d'une pommade (Baudel., Paradis artif., 1860, p.352).
β) Avec valeur factitive. Passer un liquide, une substance pulvérulente. Filtrer (v. ce mot I A), tamiser. Passer une sauce; passer un bouillon à la serviette, sur un linge; passer de la farine au tamis. On passe le liquide à travers une toile ou tamis (Nosban, Manuel menuisier, 1857, p.168).Deux fois par semaine, on balayait soigneusement l'atelier; on gardait les ordures, on les brûlait, on passait les cendres, dans lesquelles on trouvait par mois jusqu'à vingt-cinq et trente francs d'or (Zola, Assommoir, 1877, p.430): 10. −Je vais faire le café. Au bruit de la débéloire, Babette s'éveille (...). −Ah, qu'est-ce que c'est? J'ai eu peur. Comme ça sent le roussi. −C'est les Ubacs qui brûlent, dit négligemment Marguerite tout en passant le café.
Giono, Colline, 1929, p.151. ♦ Passer au crible. V. crible1A. ♦ Passer à l'étamine. V. étamine2B. − P. métaph., au part. passé. Rosalie ne savait absolument rien. Est-ce savoir quelque chose que d'avoir étudié la géographie dans Guthrie, l'histoire sainte, l'histoire ancienne, l'histoire de France et les quatre règles, le tout passé au tamis d'un vieux jésuite? (Balzac, A. Savarus, 1842, p.16). b) Un repas, un aliment passe. Être absorbé, digéré. Hélas! dit mon bon maître, mon déjeuner ne pourra point passer. J'ai le coeur retourné tant par cette horrible scène (A. France, Opinions J. Coignard, 1893, p.257).Elle avala de travers son morceau de brioche. −Ça passe pas? demanda Marcel (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.164).Même le thé de Gordeenko, avec la dernière rondelle de citron, passa difficilement. La nuit, la douleur dans le ventre devint intolérable (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.198). − Loc. pop. et fam. Ça fait du bien par où ça passe. C'est fichu [cette eau-de-vie]! elle est bonne; ça fait du bien par où ça passe (Vidocq, Mém., t.3, 1828-29, p.127). c)
α) Un texte législatif, un candidat à une élection passe. Être voté, être élu. Passer à l'unanimité, au premier tour. On commençait à croire que la liste Brécé obtiendrait plus de deux cents voix et qu'elle pourrait passer (A. France, Bergeret, 1901, p.265).Joe Chamberlain (...) avait (...) «passé» à Birmingham avec une majorité accrue (Maurois, Édouard VII, 1933, p.258). − Empl. factitif: 11. Comment se présente le vote? −Une vague d'oppositions conservatrices est en train de se créer. Il nous faudra trouver une quinzaine de voix à la Chambre des représentants et cinq ou six au Sénat pour faire passer le décret.
Cl. Cussler, Panique à la Maison-Blanche, trad. par M. Lederer, Paris, Grasset/Fasquelle, 1985 [1984], p.43.
β) Avec valeur factitive. Passer un texte, une disposition législative. Adopter par un vote: 12. ... le mépris du jeune vicomte fut trop visible même pour un provincial. −Voilà comme ils sont tous dit le député (...) ah! messieurs de la noblesse de cour, si nous pouvions nous voter nos indemnités sans passer les vôtres, vous n'en tâteriez, morbleu, qu'après nous avoir donné des garanties.
Stendhal, Armance, 1827, p.27. d)
α) Un article passe. Être publié. C'est épouvantable! (...) Avec moi, un pareil article n'aurait jamais passé (...) vous me voyez désolé (...). Mais, ce jour-là, précisément, je ne suis pas allé au journal (...) les gredins en ont profité (...) je n'ai pas revu les épreuves (A. Daudet, Trente ans Paris, 1888, p.39). ♦ P. méton. Tout cela devint une affaire d'état; le cancan passa dans les journaux. Les dames bordelaises en eurent connaissance et m'écrivirent à ce sujet la lettre qui suit (Chateaubr., Mém., t.3, 1848, p.39). − Empl. factitif. Entre le rédacteur qui veut faire passer sa copie et les linotypistes qui n'arrivent pas toujours à composer intégralement cette copie trop abondante, (...) [le metteur en pages] joue le rôle de «tampon» (A. Rival, Journ., 1931, p.25).
β) Avec valeur factitive. Passer un article. Publier. C'est dégueulasse d'avoir passé cet article sur Dubreuilh, le mois dernier (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.285). C. − 1. [Avec compl. d'obj. désignant un obstacle] Qqn1/qqc.1passe qqc.2.Traverser, franchir. a) [Le compl. d'obj. désigne un obstacle naturel ou, ext., le moyen destiné à le franchir] Passer un col, un fossé; passer l'eau; passer la mer; passer un fleuve à gué, à la nage, dans un bac; passer la Dordogne, l'Elbe, le Rhin; passer les Alpes, les Andes; passer la Bérésina. Notre petit peloton passe le pont, grimpe des rues, des ruelles, arrive enfin devant un vieux porche endommagé (Colette, Cl. école, 1900, p.191).La pierre de Caen passait la Manche pour être livrée en Angleterre (Lambertie, Industr. pierre et marbre, 1962, p.83): 13. ... l'armée du prince royal de Prusse, après avoir passé la Seine à Villeneuve-Saint-Georges, se dirigeait sur Versailles, en contournant la ville au sud.
Zola, Débâcle, 1892, p.568. ♦ Passer le Rubicon. Et toi, César, qui haranguas tes troupes ici même, à Rimini, après avoir passé le Rubicon (Montherl., Malatesta, 1946, iv, 9, p.536).Au fig. S'engager dans une entreprise périlleuse au mépris des difficultés et des risques. Je suis très déterminé à passer le Rubicon et à avaler toutes les couleuvres qu'on voudra me servir, si le coeur me le permet (Chateaubr., Corresp., t.3, 1822, p.256). − Empl. factitif. Qqn3fait passer qqc.2à qqn1.Bourget: Pourquoi ne retournez-vous pas aux États-Unis? Kerley: Parce que mon père a eu la funeste idée de me faire passer la mare, comme nous disons, (...) quand j'étais encore un tout petit garçon (Bourget, Monique, Reconnaiss., 1902, p.185). b) [Le compl. désigne une ligne fictive, une limite admin., un front militaire] Passer la douane. La semaine précédente, des soldats fascistes avaient passé les lignes (Malraux, Espoir, 1937, p.572).V. démarcation ex. de Montherlant, fraude B 2 ex. de Stéphane. ♦ Passer la frontière. Quitter un pays pour un autre et, p.ext., s'expatrier. [Dumouriez] n'apercevait aucune force qui lui barrât la route de Paris. Mais son armée refusa de le suivre et, le 5 avril, il passa la frontière (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p.346). ♦ Passer les ponts. V. pont I A 1 a loc. et expr. c) En partic. Passer une grille, une porte, un seuil. Franchir une grille, une porte, un seuil pour entrer ou sortir. Ils traversèrent la salle à manger carrelée de rouge, passèrent une double porte capitonnée et s'enfermèrent dans une petite pièce où deux grands fauteuils de cuir les accueillirent (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.127). ♦ Expr. [Pour congédier qqn] Passez la porte; je vous prie de passer la porte: 14. cléopâtre [au Centurion]: Emparez-vous de cet idiot. antoine: Par Pollux! la chose est forte (...). le centurion: C'est bon! Pas d'observation! Passez, passez la porte!
Courteline, Conv. Alceste, Actium, 1926, p.259. − P. anal. Il parle d'une voix sans élan qui passe juste sa bouche, puis tombe le long de lui, et, il est au sein de ses paroles la personnification de son idée, comme un saint de bois dans son manteau (Giono, Colline, 1929, p.182). ♦ Absol. «(...) je sais très bien que Pierre est...» Le mot ne passa pas (Sartre, Mur, 1939, p.50). d) Spécialement − SPORTS. Passer le poteau. Franchir la ligne d'arrivée. La course elle-même ne l'intéresse que très faiblement. Peu lui importe que ce soit Laripette, Jiu-Jitsu ou Bastanac qui passe le poteau (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.142). − THÉÂTRE. Passer la rampe. Avoir du succès auprès du public, avoir les qualités requises pour l'obtenir. ♦ [Le suj. désigne une pièce] Mes interprètes servaient la pièce au mieux (...). Elle passait évidemment la rampe. Ce qui ne signifie pas qu'un autre soir, devant un autre public... (Mauriac, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p.205).Absol. Les bruits de coulisses sur la pièce d'Hermant ne sont pas bons. Ça ne passe pas. On proteste. Je sens un public dur (Renard, Journal, 1900, p.572). ♦ [Le suj. désigne un acteur] Elle avait une jolie voix, mais elle ne savait rien en faire; elle ne savait absolument pas tirer parti d'elle-même: elle n'a jamais passé la rampe (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.183). e) Au fig. Passer le pas*. Faire quelque chose à la suite d'une décision difficile à prendre (d'apr. Littré). 2. Au fig. a) Passer (un examen). V. aussi infra IV B 4 a.
α) Se présenter aux épreuves, subir les épreuves d'un examen. Passer le/son baccalauréat; passer une licence, une agrégation; passer l'oral; passer un examen avec succès. Quelques jours après (...) je passai ma thèse (Balzac, Gobseck, 1830, p.400).Bernard avait très brillamment passé son écrit (Gide, Faux-monn., 1925, p.1205). ♦ Absol. Je constate qu'on commence à s'agiter beaucoup à l'école, à cause des examens proches, nous voilà fin mai et «on passe» le 5 juillet! (Colette, Cl. école, 1900, p.165). ♦ P. méton. Passer (une matière). −Tu as passé quoi, déjà? −Le chant, l'histoire, la jographie (Colette, Cl. école, 1900, p.224). − Empl. factitif. Le professeur, avec les examens qu'il fait passer, a toujours un fort coup de collier à donner, et les chaleurs le fatiguent beaucoup (Proust, Sodome, 1922, p.965). − P. anal. Elle avait appris le rôle pour passer une audition (L. Schneider, Maîtres opérette fr., 1924, p.179).Vous croyez que c'est un accident, vous, M. Maigret? C'était le jour décidément. Chez le docteur Bellamy, déjà, c'est lui qui avait passé un véritable interrogatoire (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.72).
β) Vieilli ou littér. Passer un examen avec succès. −C'est un cauchemar cette chimie; sûr et certain que je vais me faire coller. −Tu as toujours passé tes examens... −Pas ce coup-ci; d'ailleurs collée ou reçue, c'est du pareil au même. Jamais je ne ferai une carrière dans la chimie (Beauvoir, op.cit., p.201). ♦ Passer un examen haut-la-main. V. haut1II A 3 c ex. de Pommier. b) Vx, JEUX. Passer. Gagner (plusieurs fois de suite) (d'apr. Littré). Georges joue crânement bien l'écarté, pariez pour lui (...). Il reçut de Florentine (...) mille francs en or, et vint parier pour son mystificateur. Georges avait déjà passé quatre fois, quand Oscar vint se mettre de son côté (Balzac, Début vie, 1842, p.464). D. − Souvent vieilli. [Avec compl. d'obj. désignant un repère, un point de comparaison] Qqn1/qqc.1passe qqn2/qqc.2Aller au delà, dépasser. 1. [Avec l'idée de mouvement] a) Laisser derrière soi, après l'avoir rejoint, quelque chose ou quelqu'un qui se déplace dans la même direction. Une voiture qui voulait passer la diligence accrocha et versa presque sur les enfants (MmeV. Hugo, Hugo, 1863, p.31).Le cotre filait encore assez vite. Il passa deux tartanes et une goélette faisant même route que nous (Maupass., L'Inutile beauté, Livre de bord, Paris, 1935 [1890], p.28).Lalanne aborda la ligne droite avec 20 mètres d'avance (...). Baudouin sprintant rageusement, le passa sur le fil (L'OEuvre, 27 janv. 1941). ♦ P. métaph. Quand j'ai quitté Grenoble, je connaissais trois jeunes filles plus instruites que toi; tu as déjà passé les deux premières, il n'y a plus que la troisième qui te soit supérieure (Stendhal, Corresp., 1803, p.44). − Au fig., littér. Surpasser; prendre le pas, l'emporter sur quelqu'un ou quelque chose. Jeunesse passe richesse. La noblesse des pensées vient de Dieu; celle des manières s'acquiert par l'exemple (...). Elle passe en beauté la noblesse du nom (A. France, Livre ami, 1885, p.107).Et votre couleur Fait se dépiter la cerise, et passe La rose en sa fleur (Moréas, Sylves, 1896, p.191).Plus spécialement doués pour le bien et pour le mal social (...) ces enfants passent de la tête leurs contemporains et deviendront des capitaines (Barrès, Déracinés, 1897, p.38). ♦ Passer de loin qqc. Un moulin à eau est une belle chose, si ce n'est qu'un petit moulin; cela passe de bien loin les eaux de Versailles (Alain, Beaux-arts, 1920, p.191). b) Laisser derrière soi, après l'avoir atteint, quelque chose qui reste fixe. ♦ [Dans l'espace] Quand elle eut passé l'angle de la dernière maison, Cosette s'arrêta (Hugo, Misér., t.1, 1862, p.466). ♦ [Dans le temps] Cette fièvre, quand elle est violente, fait périr le malade dans les quatre premiers jours; si elle passe ce terme, il y a lieu d'espérer qu'elle se terminera heureusement au septième jour (Geoffroy, Méd. prat., 1800, p.42).C'était un homme d'apparence encore jeune, quoiqu'il eût alors passé la quarantaine (Fromentin, Dominique, 1863, p.7).V. écrémer A ex. de Macaigne.Passer un cap difficile. V. cap3B 2 loc. fig.Au passif. L'heure du dîner était depuis longtemps passée (Proust, Guermantes 2, 1921, p.402).Passer fleur. Dépasser le stade de la floraison. V. fleur A 2 a. − Au fig. ♦ Aller, se situer au-delà d'un certain seuil, de certaines limites. Allons, monsieur, ceci passe la plaisanterie (Leclercq, Prov. dram., MmeSorbet, 1835, 6, p.154).Je compris aussitôt que notre entretien avait passé le point critique (Gracq, Syrtes, 1951, p.52).Loc. Passer les bornes (v. borne I B 2 a); passer la mesure (v. ce mot B 2 a), synon. forcer la note (v. ce mot C 3). ♦ Aller, se situer au-delà de ce que l'on peut concevoir ou exprimer au sujet de quelque chose. Passer les forces de l'esprit, l'intelligence; passer ce que l'on peut imaginer, ce que l'on peut dire. La révolution française a passé, et de bien loin, toutes les craintes et toutes les espérances (Bonald, Législ. primit., t.1, 1802, p.128).Le conflit de tant de sentiments contraires passait ma raison (Milosz, Amour. initiation, 1910, p.194).V. entendement B 1 a: 15. J'ai vu le temps où le moindre de mes désirs était un ordre pour vous. Je n'avais pas la peine de souhaiter; vous étiez d'un soin, d'une complaisance qui passait toute idée...
Leclercq, op.cit., 4, p.131. [P. méton.] Passer qqn.Dérouter, déconcerter quelqu'un. Il faut que vous soyez plus méchant qu'eux, puisque vous l'êtes avec désintéressement. Vous me passez, l'abbé! (A. France, Opinions J. Coignard, 1893, p.203):16. Je ne suis jamais entré quant à moi dans les raisons qui dressaient contre Jean Rostand certains de nos confrères chrétiens [de l'Académie] (...). Que la foi soit troublée, ou fortifiée par des arguments tirés de la biologie, cela me passe. Les profondes raisons de croire ou de ne pas croire sont d'un autre ordre.
Mauriac, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p.190. ♦ Outrepasser. Votre mère et l'imprudent missionnaire qui la dirigeoit, ont été plus coupables que vous; ils ont passé leurs pouvoirs en vous arrachant un voeu indiscret (Chateaubr., Génie, t.3, 1803, p.247).Mes serviteurs ne vous ont-ils pas bien traité en ennemi? Il est vrai qu'ils ont passé mes ordres (Toulet, Mariage Don Quichotte, 1902, p.29). 2. [Sans idée de mouvement] a) Sortir d'un alignement, être en saillie par rapport à quelque chose. Elle plaça soigneusement son poignard au milieu de son corset en laissant passer les rubis qui en ornaient le bout (Balzac, Chouans, 1829, p.276). b) Excéder en nombre, en quantité, en importance. Cela ne peut pas passer 600 francs (Chateaubr., Corresp., t.5, 1824, p.273).Tout ce bonheur n'est plus. Qui l'aurait dit? (...) Les hommes Sont ainsi; −leur toujours ne passe pas six mois (Gautier, Albertus, 1833, p.151). E. − 1. [Avec une indication de rang] Se placer, se mettre devant ou derrière, avant ou après quelqu'un ou quelque chose. a) Se situer d'une certaine façon par rapport à une autre personne qui se déplace dans la même direction ou exécute la même action que soi-même. Passant le premier pour lui montrer le chemin [il] poussa (...) la porte (Dumas père, Monte-Cristo, t.1, 1846, p.606).Il alla ouvrir la porte de l'arrière-boutique: −Entrez par ici. Il laissa l'homme passer devant (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.88). b) Au fig. Avoir une importance plus ou moins grande qu'autre chose. Elle m'aimait, elle me l'avait assez prouvé; mais elle avait des intérêts qui passaient bien avant moi (Duras, Ourika, 1824, p.64).L'honneur passe avant la fortune (Balzac, C. Birotteau, 1837, p.25).Quand je posséderai mon âme, c'est alors que je pourrai vous la donner. Jusque-là, c'est le devoir qui passe d'abord (Claudel, Père humil., 1920, iii, 2, p.541). ♦ Emploi factitif. [Si l'État s'exprimait ainsi], il aurait fait passer les questions générales qui intéressent réellement la société, avant les questions de personnes qui n'intéressent qu'un corps privilégié (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p.161). − Passer au premier, au second plan, à l'arrière plan; passer au premier, au dernier rang. Plusieurs causes qui avaient eu de grands effets sur les rapports réciproques des hommes et sur la tournure prise par la civilisation, ont ainsi passé à l'arrière-plan (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p.381).«L'étude du milieu» passe au premier plan des procédés en usage dans les classes nouvelles (Hist. instit. et doctr. pédag., 1947, p.438): 17. Le Japon, passé au premier rang comme pays producteur et se développant de plus en plus comme pays industriel de la soie; les États-Unis, devenus grand pays industriel et absorbant presque toute la soie exportée du Japon; tels ont été les deux faits majeurs qui ont transformé d'une manière décisive et accélérée la géographie traditionnelle de la soie.
Brunhes, Géogr. hum., 1942, p.162. 2. [Avec une indication de position] Arg. Passer à gauche. ,,Être frustré de sa part`` (Sandry-Carr. 1963). F. − Au fig. 1. a)
α) Qqn1passe sur qqc.2Ne pas s'y attarder (v. infra 1resection IV B 4 b passer sous silence). Synon. fam. glisser sur, négliger.Passer sur les détails d'une histoire. Arthur Young (...) s'étonne du vide des routes françaises à la fin du XVIIIesiècle (...) Mais il n'insiste pas. (...) Il passe sur cette remarque. Qu'il me permette de m'y arrêter un instant (L. Febvre, La Nationalité, [1926] ds Combats, 1953, p.189).Je passe vite sur cette période, car je crains, à force de chercher, de retomber dans des souvenirs qui m'accablent moi-même (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p.167): 18. ... il est rigoureusement impossible de prouver cette proposition: on a prié pour une guerre juste, et la guerre a été malheureuse. Je passe sur la légitimité de la guerre, qui est déjà un point excessivement équivoque; je m'en tiens à la prière: comment peut-on prouver qu'on a prié?
J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t.1, 1821, p.424. ♦ Empl. abs. Passons... Madame Fourchambault: Mon mari, et moi, nous ne faisons que notre devoir en vous protégeant... mais il est certain que vous avez été au moins bien imprudente. Marie: Au moins? que voulez-vous dire? Madame Fourchambault: Passons, mademoiselle! (Augier, Fourchambault, 1878, p.128): 19. Or, un jour de berlue,
J'avais, toi là, lorgné quelque minois passant.
Tu m'en fis l'observation en te gaussant,
C'est vrai, mais non sans quelque amertume latente,
Du moins pensais-je ainsi, moi toujours dans l'attente
De tous tes sentiments qu'ils soient bons ou mauvais,
Pour m'en désespérer ou m'en réjouir, mais
Passons.
Verlaine, Élégies, 1893, p.61.
β) Affecter de ne pas voir, tolérer, pardonner. Passer sur l'insignifiance de qqc. Êtes-vous très propre?... Moi, je suis exigeante sur la propreté... Je passe sur bien des choses... Mais sur la propreté, je suis intraitable... (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.28).Un cliché, même mauvais, intéressera la rédaction du journal s'il est original: sa rareté fera prime et l'on passera sur ses défauts techniques (Coston, A.B.C. journ., 1952, p.171). ♦ Empl. factitif. Il fallait vraiment une dot comme la mienne pour le faire passer sur tous mes défauts (A. Daudet, Jack, t.2, 1876, p.66). b) Qqn1laisse passer qqc.2
α) Ne pas réagir (à quelque chose). Julien s'était reproché trop souvent d'avoir laissé passer cette première insulte, pour souffrir ce regard (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.265).«Allons, me dit-il, ne faites pas l'enfant, rentrez une minute; qui aime bien châtie bien, et si je vous ai bien châtié, c'est que je vous aime bien.» (...) je laissai passer le mot «châtier» et suivis le baron (Proust, Guermantes 2, 1921, p.559). − Absol. J'ai souvent été exposé à de pareilles infamies (...) et on m'a toujours conseillé de laisser passer (Chateaubr., Corresp., t.5, 1823, p.21). ♦ Laissez faire, laissez passer. V. laisser2I A 1.
β) Ne pas intervenir sur quelque chose. Le tableau est dramatique, brutal, se présentant souvent comme une urgence gravissime, simulant volontiers une affection chirurgicale. On conçoit le dilemme: opérer ces malades, mais le choc opératoire serait mortel le plus souvent −ou laisser passer une affection réellement chirurgicale (Quillet Méd.1965, p.498).
γ) Ne pas saisir quelque chose au passage. Laisser passer une occasion. Élisabeth (...) remit [les clefs] dans son sac et il eut l'impression et presque la certitude d'avoir laissé passer la chance (Aymé, Travelingue, 1941, p.73).V. infra IV A 1 c γ
laisser passer son tour. ♦ Ne pas vouloir laisser passer qqc. sans. Tenir à saisir (une occasion), à profiter (d'un événement) pour. Je ne voudrais pas laisser passer cette occasion sans mentionner les contributions importantes apportées (...) par certaines personnes qui n'avaient pas eu la possibilité de participer à nos travaux dès leur début (Déclar. univ. dr. homme, 1949, p.16): 20. Mon cher ami, vous avez eu, avant-hier je crois, vos quatre-vingts ans. Nous n'avons pas voulu laisser passer cet anniversaire sans que (...) quelques-uns de vos amis les plus proches ne se réunissent et ne saisissent l'occasion de vous dire ce que, depuis si longtemps, ils pensent - et qu'il faut bien pourtant qu'ils vous disent une fois...
L. Febvre, Hommage à H. Berr, [1952] ds Combats, 1953, p.339. c)
α) Qqc.2passe.Être accepté. Le règlement exige (...) que vous ayez votre plaque militaire d'identité attachée au poignet. (...) Avoir ça au poignet, quand on est sous l'uniforme, bah! on n'y pense pas; ça passe avec le reste (Romains, Hommes bonne vol., 1938, p.243).
β) P. ext. Être acceptable, tolérable. Traduit sept ou huit pages de Memories of Happy Days, mais je ne sais si je continuerai. Certaines naïvetés passent en anglais qui ne sont pas supportables en français. C'est que je ne suis pas la même personne dans les deux langues (Green, Journal, 1944, p.155). ♦ P. ell. Passe (encore). C'est acceptable à la rigueur. Passe pour cette fois, mais que je ne t'y reprenne pas. Décrire ce qu'on voit, passe encore; voir ce qu'il faut décrire, voilà le difficile (L. Febvre, Examen de consc. hist., [1933] ds Combats, 1953, p.8).Que ces racontars courent les boutiques des barbiers, passe encore. Mais les entendre sur le trône de saint Pierre, c'est cela qui est décourageant (Montherl., Malatesta, 1946, iii, 5, p.503).Passe (encore) pour qqn/qqc. (de). Un imbécile avec de la tenue! Tu l'as poussé dans la politique. (...) Enfin, passe pour lui; mais pour Roger, c'est autre chose: il est intelligent, lui, il a du coeur ou il en aura... (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie, 1869, i, 7, p.26).Passe pour un piéton de se glisser, comme nous venons de faire, sur ces bancs de calcaire dénudé et sur ces lits de pierrailles! Quant à des troupes guettées, harcelées par des embuscades, jamais elles n'arriveraient jusqu'ici (Barrès, Pays Lev., t.1, 1923, p.241): 21. −Que le bonhomme Anthelme s'en aille ainsi tout seul, sans tambour ni trompette, je trouve ça quand même un peu discret. Passe encore pour les voisins qui sont de méchantes bêtes (...) Seulement, ni prêtre, ni médecin, ni notaire...
Bernanos, M. Ouine, 1943, p.1367. − Empl. factitif. Rendre quelque chose acceptable. Le dîner n'interrompit pas la conversation. On causa de l'affaire qui avait occasionné la visite, de la guerre qui faisait alors rage, des affaires du temps, des espérances de l'Église, et autres propos de table qui font passer un mauvais dîner et en embellissent un bon (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p.315).Leur excentricité fait passer leur misère, jette des fleurs sur leurs guenilles (Vallès, Réfract., 1865, p.8).Le célèbre adagio en la mineur de la VIIeSymphonie qu'on avait intercalé dans la deuxième pour faire passer le reste fut donc apprécié à sa valeur (Prod'homme, Symph. Beethoven, 1921, p.61).Expr. La sauce fait passer le poisson. V. poisson1A 5 a. d) [Avec valeur factitive] Qqn1passe qqc.2à qqn3.Excuser, pardonner, permettre. Comme on est sévère pour les personnages de roman! pensait Henri, on ne leur passe pas une faiblesse (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.267): 22. On lui passait son château, ses équipages et sa maîtresse, parce qu'il savait parler patois, acceptait volontiers une pipe de belge et appréciait le genièvre de Wambrechies.
Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.155. ♦ [P. méton.] C'est une femme de bon conseil, dans tout ce qui ne touche point à quelques rêveries assez bizarres dont elle s'est infatuée, mais que nous devons passer à son grand âge (Nodier, Fée Miettes, 1831, p.84). ♦ Rare. Passer à qqn de + inf.V. extraordinaire II B ex. de Fiévée. − Ne rien passer à qqn. Les laides seraient capricieuses tout autant que les jolies; mais, comme on ne les gâte pas, comme on ne leur passe rien, il faut qu'elles perdent leurs caprices ou qu'elles les cachent (A. France, Le Crime de Sylvestre Bonnard, Paris, Calmann-Lévy, 1900 [1881], p.48). ♦ Empl. pronom. réciproque. On ne se passe plus rien, on rapporte tout à un sentiment politique, et sous ce masque on exhale sa haine et sa vengeance (Sand, Indiana, 1832, p.149). − Passer (un caprice, une fantaisie) à qqn. Satisfaire le caprice, la fantaisie de quelqu'un. Sa mère (...) lui passait toutes ses volontés (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p.194).V. caprice ex. 3, fantaisie B 1 ex. de Alain-Fournier. ♦ Empl. pronom. réfl. indir. Quoique chanoine honoraire de la cathédrale de Tolède, je me passe de temps en temps un petit cigare. Dieu nous a donné le tabac pour endormir nos passions et nos douleurs (Balzac, Illus. perdues, 1843, p.703): 23. Ce Grandet ne dépense pas dix louis sans songer à la position qu'il occupe dans le monde. Ni lui ni sa femme ne se permettent les caprices que je me passe, moi, fils de famille.
Stendhal, L. Leuwen, t.3, 1835, p.349. − Loc. Passez-moi ce mot; qu'on me passe l'expression. Chacun, dans sa sphère, sent qu'il y a un effort à tenter, −qu'on me passe l'expression, −un grelot à attacher (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p.145).C'est, si vous me passez ce mot, à cette organisation d'amitié (...) que nous travaillons ensemble (Jaurès, Paix menacée, 1914, p.28). e) Vieilli. Passer condamnation. V. condamnation A 1. 2. a) Qqn1passe qqc.1Omettre, sauter. Il avait beaucoup lu, hâtivement, superficiellement, en passant la moitié des pages, en inventant ce qu'il n'avait pas lu, mais toujours talonné par une curiosité vive et fraîche (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1499).V. infra IV A 1 c γ
passer son tour. − Loc. J'en passe et des meilleures. V. meilleur I A 1. ♦ Var., p.plaisant. Failly, le bien nommé; Fleury, le proxénète; Canrobert, ce bandit au langage poissard; Le pion du petit Bonaparte, Frossard; Boyer... Que sais-je encor? J'en passe, et des plus sales, Pour qui Toulon trop plein manque de succursales (Glatigny, Fer rouge, 1870, p.69): 24. ... [les] ministres de Brisson (...) ont retourné leur veste gentiment. Viger, qui nous appelait «traîtres» et voulait nous poursuivre «jusque dans nos tanières»; Bourgeois, qui attendait de quel côté soufflerait le vent et qui envoie aux journaux des notes pour faire échouer la revision. J'en passe, et des pires, n'est-ce pas, Lockroy?
Clemenceau, Vers réparation, 1899, p.153. b) Populaire
α) [Avec valeur factitive] Qqn1passe qqc.2à l'as. ,,Subtiliser sans laisser de trace`` (Car. Argot 1977).
β) Qqn2passe à l'as. Ne pas être payé. Synon. passer à gauche (v. supra I E 2).Voir Bruant 1901, p.352, s.v. payer. 3. a) Vx. Qqn1se passe à/de qqc.2Se contenter de. (Ds Ac. 1798-1878). Il a vingt mille francs de rente; on se passerait à moins (Ac.1835, 1878). b) Usuel
α) Qqn1se passe de qqc.2/qqn2.Accepter, supporter de ne pas avoir, de vivre sans (ce qui est ou pourrait sembler nécessaire), y renoncer. Aussitôt qu'un homme a le nécessaire, il ne lui faut que de l'élévation dans l'âme pour se passer du superflu (Constant, Princ. pol., 1815, p.51).Il n'est pas naturel qu'un homme se passe de femmes! (Flaub., MmeBovary, t.2, 1857, p.189): 25. ... [lorsque les mères] voient (...) avec quelle facilité (...) [leur] fils se passe d'elles, lorsqu'elles comprennent brusquement qu'elles ne lui sont plus nécessaires, elles passent par une crise du même ordre que celle où les a jetées la trahison de l'amant, la désillusion de l'amour.
Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1532. P. anal. Il y a deux sortes d'athéisme: celui qui tend à se passer de l'idée de Dieu, et celui qui tend à se passer de son intervention dans les affaires humaines (Joubert, Pensées, t.1, 1824, p.118).♦ Pouvoir, ne pas pouvoir se passer de.Ne pas avoir, avoir besoin de. Ne pas pouvoir se passer des services de qqn. L'homme, en société, quelque progrès qu'il ait fait dans l'exercice de la vertu, ne peut se passer de considération (Nodier, Fée Miettes, 1831, p.87).P. anal. Être en mesure de fonctionner sans. Un appareil de ce genre (...) présente (...) l'avantage de pouvoir se passer d'aérodromes et d'être à même, par conséquent, d'opérer dans des parages dépourvus de pistes d'envol (Le Masson, Mar., 1951, p.30). ♦ Préférer ne pas avoir, n'avoir que faire de. Ah! pas d'attendrissement surtout, les attendrissements, les remerciements... je m'en passe (Cocteau, Parents, 1938, iii, 1, p.272).Au cond. Se bien passer de + subst.On se passerait bien de cette corvée. Je leur demandai comment elles avaient dormi. La sécheresse de leur réponse me prouva qu'elles se seraient bien passées de ma conversation (About, Roi mont., 1857, p.137). − Qqn se passe de + inf.Même sens que supra . Se passer de boire, de dormir. Nous ne pouvons pas nous passer de connaître nos droits politiques, et de nous en mettre en possession (Sieyès, Tiers État, 1789, p.85).Walstein ne tarda pas à s'ennuyer de cette solitude; il lui fallait le monde, il avait besoin de spectateurs; il ne pouvait se passer d'étaler magnifiquement toutes les qualités qu'il n'avait pas (Karr, Sous tilleuls, 1832, p.221).Elle se passait de dîner pour voir partir son gars (Hamp, Marée, 1908, p.31). ♦ Au cond. Se bien passer de + inf. Préférer ne pas (faire). Il n'est nullement dans mon esprit de vouloir attirer l'attention sur (...) [ces questions], au contraire. Je me serais bien passé de les débattre si, justement, elles n'avaient pas «fait question» (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.xvi). − Vieilli. Se passer que + subj.Même sens que supra
α. Le petit cheval blanc du moulin de la Bigne faisait ainsi tous les lundis le tour des villages (...). Toujours précédant son maître, il se passait à merveille qu'on lui indiquât son chemin (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.41).
β) Qqc.1(qqn1) se passe de qqc.2Ne pas avoir besoin de (ce qui est absolument superflu, ce qui constituerait une redite). [Le Titien] se passe de mes éloges (Delacroix, Journal, 1857, p.2).Cinq cent mille licenciés en Allemagne de l'Ouest, ce chiffre se passe de commentaires (Jeux et sports, 1967, p.1463): 26. Que les clauses de ce cahier des charges ne soient pas discutées utilement quand on manque de vues d'ensemble et de projets cohérents, de part et d'autre, se passe de démonstration.
Univ. écon. et soc., 1960, p.26-15. II. − [La destination est connue] A. − [Avec compl. prép. désignant (le point de départ et) le point d'arrivée] Qqn1/qqc.1passe.Aller, se rendre quelque part. 1. [Les deux extrémités du parcours sont désignées] a) Passer de... à...Passer d'une pièce à l'autre. Lecouvreur passait d'un groupe à un autre groupe, trinquait, cherchait à inspirer confiance à ses futurs clients et regardait autour de lui avec un plaisir attendri (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.26).Il passait d'un bord à l'autre de cette tranchée, y descendait, en remontait, fouillait du jet de sa lampe les moindres replis de terre (Vercel, Cap. Conan, 1934, p.208).V. feutré C 1 b ex. de Benjamin. − En partic. Faire la traversée de... à... Et vous m'avez aimée comme cela, en deux heures, en passant de Douvres à Calais? (Dumas père, Cachemire vert, 1850, vii, p.284). b) Passer de... dans/en...On monte quelques marches, et du jardin on passe dans le verger proprement dit (Hugo, Misér., t.1, 1862, p.373).Les automobiles passant de France en Allemagne étaient arrêtées et saisies (Joffre, Mém., t.1, 1931, p.222).Un rayon lumineux (...) passant d'un milieu dans un autre (...) est réfracté et s'infléchit (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p.105). ♦ Empl. factitif. Qqc.2fait passer qqc.1Un photon pénétrant dans un semi-conducteur peut faire passer un électron de la bande de valence dans la bande de conduction (Hist. gén. sc., t.3, vol. 2, 1964, p.306). − En partic. Passer de bras en bras, de bouche en bouche, de main en main. Quant à Luce, elle danse éperdument, −«je n'en manque pas une» −passant de bras en bras sans s'essouffler (Colette, Cl. école, 1900, p.315).V. bouche II B 2 c, main 1resection I D 1 b α ex. de Beauvoir, monnaie ex. de Bernanos. 2. a) [Seul le point d'arrivée est exprimé] V. buissonner ex. 1.
α) Passer à.Hé bien, as-tu été content de ta matinée? me dit mon père tandis qu'on passait à table (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p.456).
β) Passer dans/en.Après que l'escadre de Drake fut sortie du détroit de Magellan et eut passé dans la mer du Sud, le 6 septembre 1578, ses vaisseaux firent route au Nord-Ouest (Voy. La Pérouse, t.1, 1797, p.82).Après le dîner, on passait dans le salon (A. France, Vie fleur, 1922, p.490).V. cale ex. 7: 27. L'ovaire, outre qu'il produit des oocytes, est une glande endocrine, productrice d'hormones, qui, passant dans le sang, agissent puissamment sur le reste de l'appareil génital, et en particulier sur l'utérus.
Caullery, Embryol., 1942, p.97. ♦ Empl. factitif. En achevant ces mots, M. de La Mole faisait passer Julien dans un salon resplendissant de dorures (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.242). − P. métaph. L'écluse ne se perfectionna et n'acquit sa forme moderne que lorsqu'elle passa en Lombardie (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p.199).
γ) Passer sur.Passer sur le palier: 28. Il prend le quai des Grands-Augustins et traverse le quai Conti; au moment où il passe sur le quai Malaquais, il voit marcher sur le quai du Louvre, parallèlement à sa propre direction, un individu (...) qui paraît l'examiner avec attention.
Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p.350.
δ) À la forme interr. Où a/est-il passé? Où se trouve-t-il? Tandis que Nivoulas dormait, les bohémiens avaient décampé sans même songer à lui rendre sa valise. De quel côté étaient-ils passés maintenant? (Arène, J. des Figues, 1870, p.140).−Où est donc passé Jean? reprit-elle. −Il est à la mare avec Petitou (Estaunié, Vie secrète, 1908, p.2). ♦ Qu'est-il devenu? Est-ce qu'on sait, mon cher monsieur Godefroid, où ces gens-là sont passés! (Balzac, Initié, 1848, p.453). b) [Avec une idée de déplacement durable] Il la conduisit à Calais, d'où elle passa en Angleterre, pour demander asile et protection au roi Henri (Barante, Hist. ducs Bourg., t.4, 1821-24, p.391).Le jeune Del Dongo (...) restera coupable d'avoir passé à l'étranger sans passeport régulièrement délivré (Stendhal, Chartreuse, 1839, p.81). 3. [Seul le point de départ est exprimé] Loc. fam. Cela lui a complètement passé de la tête, de l'esprit. Il a complètement oublié (d'apr. Littré). B. − Au fig. [L'action se situant dans le temps ou dans un processus temporel] 1. a) [L'idée est celle d'une évolution, d'un changement, d'une transformation subis ou réalisés]
α) [Le point de départ et l'aboutissement sont exprimés] Passer de... à...Passer du printemps à l'été, de l'aigu au grave, du blanc cassé au jaune paille; passer de la grâce à la grandeur, de la servitude à la liberté; passer de la réalité au mythe; passer de la parole à l'action, de la théorie à la pratique. Ce fut dans le cours de l'hiver 1941-1942 que le ton passa du paternalisme à la menace. Deux discours du Führer au Reichstag expliquent à merveille cette évolution (Ambrière, Gdes vac., 1946, p.278).D'un million d'adhérents, (...) [la Confédération Générale du Travail] passe le 15 juin 1936 à deux millions cinq cent mille (Cacérès, Hist. éduc. pop., 1964, p.108).V. agile ex. 34, char ex. 2, état ex. 15: 29. ... l'on ne peut passer d'un état (...) à un autre, sans traverser des états intermédiaires et même une infinité d'états intermédiaires: ainsi ne peut-on passer du jour à la nuit sans la transition infiniment nuancée du crépuscule.
Couffignal, Mach. penser, 1964, p.51. ♦ Empl. factitif. L'ethnographe anglais [Malinowski] a le mérite d'avoir contribué à faire passer le problème du plan théorique au plan pratique (Hist. sc., 1957, p.1525). − En partic. Passer de vie à trépas. Mourir. Le pauvre alchimiste fut supplicié à minuit, sur une place publique. (...) Non seulement le savant imprudent mais même ses deux chiens passèrent de vie à trépas (Caron, Hutin, Alchimistes, 1959, p.59). ♦ Absol., vieilli ou région. Elle est passée, la pauvre demoiselle! dit enfin la garde (Mérimée, A. Guillot, 1847, p.145).Était-ce le dernier souffle, ce soupir que poussait Jeanne? était-ce le retour de la vie? Un instant, Hélène, la sentant se raidir, crut qu'elle passait (Zola, Page amour, 1878, p.936): 30. «S'il pouvait passer comme ça, en douceur...», se dit-il. La contradiction entre ce souhait et l'acharnement qu'il avait mis à lutter contre l'asphyxie ne le frappait pas encore.
Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1290.
β) [Seul l'aboutissement est exprimé] − Passer à.Nom qui passe à l'immortalité; otite qui passe à la chronicité. Le vent ayant passé au sud, il leva l'ancre (Voy. La Pérouse, t.1, 1797, p.83).Il ralentit, éteint l'allure, passe au pas; il fait halte (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p.66): 31. Un conducteur d'autobus, à un arrêt situé devant un carrefour, entend la sonnerie du receveur qui lui permet le départ. Mais le feu au carrefour est rouge. Il ne remet le véhicule en marche que lorsque le feu passe au vert.
Ruyer, Cybern., 1954, p.40. − Passer dans: 32. ... la révolte, si elle ne passe pas immédiatement dans des actes précis et efficaces, se change toujours en son contraire, à cause de l'humiliation produite par le sentiment d'impuissance radicale qui en résulte.
S. Weil, Pesanteur, 1943, p.158. ♦ Empl. factitif. La vie politique (...); c'est la lutte pour des réformes qui sont en voie de préparation plus ou moins avancée dans les esprits et qu'il s'agit de faire passer dans les faits (Clemenceau, 1885ds Fondateurs 3eRépubl., p.144). − Passer en.Dès le vivant de Jésus, plusieurs, sans être ses disciples, chassaient les démons en son nom (...) Il faut observer (...) que ces pouvoirs surnaturels étaient, si l'on ose ainsi dire, passés en métier (Renan, Vie Jésus, 1863, p.308).Le moteur marche très bien au ralenti, mais a de la difficulté à passer en régime accéléré (Chapelain, Techn. automob., 1956, p.338).La potasse est passée en solution (Cl. Duval, Verre, 1966, p.36). ♦ Empl. factitif. Le jeune homme (...) lui expliquait le mécanisme du nouveau commerce des nouveautés. Ce commerce était basé maintenant sur le renouvellement continu et rapide du capital, qu'il s'agissait de faire passer en marchandises le plus de fois possible (Zola, Bonh. dames, 1883, p.458): 33. ... on agite rapidement le tissu broyé pour faire passer en solution saline diluée le maximum d'impuretés, tandis que le DNA [sigle de l'angl. desoxyribo-nucleid acid (acide désoxyribonucléique)] demeure insoluble sous forme de «fils de chromatine».
Privat de Garilhe, Acides nucl., 1963, p.67. − Passer sur le plan de: 34. Soulevés par une sorte d'hystérie collective, les autochtones attaquèrent ensuite la mission. Leur violence réprimée, le complexe d'actes précédents ou le mythe joué, peut-être, passé sur le plan du langage, continue à être répété secrètement sans nul doute, avec la même puissance émotionnelle, et à déterminer des rites.
Philos., Relig., 1957, p.48-8. b) En partic.
α) Changer sans transition (d'attitude, d'activité, de sujet de préoccupation). Passer d'un extrême à l'autre, d'une idée à l'autre. Ils se consultaient mutuellement, ouvraient un livre, passaient à un autre, puis ne savaient que résoudre devant la divergence des opinions (Flaub., Bouvard, t.1, 1880, p.33).Lorrain s'arrête ici dans les déductions de Bauër et passe à autre chose (Goncourt, Journal, 1894, p.510).L'hyperthyroïdien passe allégrement d'un sujet à l'autre, tour à tour affirme et nie, lasse l'entourage par son humeur sautillante, querelleuse, et ses contradictions sans répit (Mounier, Traité caract., 1946, p.168).
β) En venir à, accéder à (une nouvelle phase dans une activité). Passer à l'action, à l'exécution (de qqc.); passer à l'attaque, à l'épreuve de force, à l'offensive; passer à l'ordre du jour, au scrutin, au vote. Messieurs, nous connaissons tous cet acte (...); il est donc inutile de lire les dix-huit articles dont il se compose; passez à la fin (Dumas père, Henri III, 1829, iv, 6, p.183).[Si] la résolution [de révision] obtient (...) [la] majorité (...) l'Assemblée peut passer à la seconde phase de la procédure de revision (Vedel, Dr. constit., 1949, p.536).Après avoir traité des végétaux benthiques, la plus évidente logique commande de passer à l'étude des animaux benthiques (J.-M. Pérès, Vie océan, 1966, p.97). ♦ Passer à l'acte. La bourgeoisie (...) eût trouvé avantage (...) à revenir sur la loi du 17 juillet 1793 pour récupérer les rentes foncières, devenues caduques lorsque le contrat contenait des expressions empruntées au vocabulaire féodal. On en délibéra sans oser passer à l'acte (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p.608): 35. Toute force, à l'état latent, provoque à la fois le désir et la crainte (...). Mais chaque fois qu'elle se manifeste, c'est dans un seul sens, comme source de bénédictions ou comme foyer de malédictions. Virtuelle, elle est ambiguë; en passant à l'acte, elle devient univoque.
Philos., Relig., 1957, p.32-7. PSYCHOL. V. passage1I B 2 b θ.Certaines obsessions impulsives semblent avoir le singulier privilège de passer à l'acte beaucoup plus régulièrement que les autres (Janet, Obsess. et psychasth., 1903, p.83).♦ Passer à la discussion des articles. V. passage1I B 2 b δ.La discussion générale se clôt soit par un vote rejetant le principe du texte proposé, soit par la décision de passer à la discussion des articles (Vedel, op.cit., p.483). ♦ Passer aux aveux. Je finis par m'en ouvrir à mes parents qui passèrent aux aveux (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p.23). − En partic. Passer à la ligne. Synon. aller à la ligne (v. aller I A 2 b): 36. J'allais chercher le tome «Pr-Z» du Grand Larousse. Je (...) l'ouvrais à la bonne page et copiais mot pour mot en passant à la ligne: «Les requins sont communs dans l'Atlantique tropical (...)» Je prenais tout mon temps pour transcrire l'article...
Sartre, Mots, 1964, p.119. c) AUTOMOB. Passer (en première, en seconde). V. changer de vitesse, s.v. changer III A 1 b.On dégage la deuxième vitesse, passe au point mort (Chapelain, Techn. automob., 1956, p.87): 37. La boîte de vitesses (...) rend possible la modification de la démultiplication entre l'arbre moteur et l'arbre de transmission: en termes clairs, cela signifie qu'ayant démarré en première vitesse, on peut passer en seconde, en troisième, etc.
Chapelain, Techn. automob., 1956, p.79. ♦ Passer une vitesse. Pour éviter les à-coups, il faut, au moment où le conducteur embraye, après avoir passé sa vitesse, que l'allure du véhicule corresponde à la vitesse permise par la nouvelle combinaison (Chapelain, Techn. automob., 1956, p.93).V. débloquer B 2 b ex. de Chapelain. ♦ Une vitesse passe. La «vitesse» passe difficilement à froid. L'huile de la boîte de vitesses est trop visqueuse et gêne le déplacement des pignons (Chapelain, Techn. automob., 1956, p.354). 2. [L'idée est celle d'intégration à un ensemble] Passer dans le folklore, dans l'histoire; passer dans les habitudes, dans les moeurs, dans l'usage. Des termes techniques ou scientifiques (...) tendraient (...), vu la généralité et l'importance des notions qu'ils expriment, à passer dans la langue usuelle des peuples instruits (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p.140).Ce moyen d'exploration (...) est certainement appelé (...) à passer dans la pratique courante (Quillet Méd.1965, p.158). 3. a) [L'idée est celle de transmission ou de transfert]
α) [Le point de départ et l'aboutissement sont exprimés] − Passer de... à/en...Passer d'une génération à l'autre. Le secrétaire de la mairie de Biarritz, qui y demeure, y a par sa femme une maison, qui depuis 1200 a toujours passé de mère en fille (Michelet, Journal, 1835, p.186).C'est une plaisanterie de ta famille qui passe de père en fils, comme la perruque à queue de rat et la culotte de velours à deux boucles (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p.27). ♦ Empl. pronom. passif. Cependant le travail change de caractère. Le temps ne comptait pas, jadis (...). Les procédés étaient de tradition. Il y avait quantité de secrets et de tours qui se passaient de maître à compagnon, de père en fils, du cédant au cessionnaire (Valéry, Regards sur monde act., 1931, p.261). − Passer de... sur...Emploi factitif. Il jugea nécessaire (...) de se donner un état-civil, en requérant (...) un jugement qui fît passer son acte de baptême des registres du presbytère sur ceux de la mairie (Balzac, C. Birotteau, 1837, p.57).
β) [Seul l'aboutissement est exprimé] − Passer à.Chez les Basques, la maison passe à l'aîné, quel qu'il soit, garçon ou fille (Michelet, Journal, 1835, p.187).Le plasma germinatif des parents passe à leurs descendants (Lalande, Raison et normes, 1948, p.63): 38. ... [Robespierre] dut se rallier à une démonstration menaçante qui obligerait l'assemblée à céder. Mais si elle tenait bon? Les Montagnards ne voulaient pas qu'on la dispersât et moins encore qu'on revît les scènes de septembre: en pareil cas, le pouvoir leur échapperait pour passer à la Commune et aux meneurs sans-culottes...
Lefebvre, Révol. fr., 1963, p.345. ♦ Empl. factitif. Chaque groupe (...) possède son système d'expression particulier. Or, tous les groupes n'écrivent pas ou n'écrivent pas autant, ou n'ont pas autant de chances de faire passer leurs écrits à la postérité (M. Bloch, Apol. pour hist., 1944, p.84). − Passer chez.Emploi factitif. Il est impossible que l'on ne fasse pas passer chez les autres la confiance que l'on a en soi-même, quand cette confiance éclate en toute occasion et ne se dément jamais (Reybaud, J. Paturot, 1842, p.358). − Locutions ♦ Passer à la charge de. Quand des chemins de fer, exploités un instant par l'État, ont été concédés à l'industrie privée, les dépenses de leur personnel, en cessant de figurer au budget, ont passé à la charge des compagnies (Vivien, Ét. admin., 1859, p.178). ♦ Passer au service de. Après l'arrestation de Fouquet, Vatel passa au service du prince de Condé, à Chantilly, où cet entremets fut baptisé (Gdes heures cuis. fr.,Éluard-Valette,1964, p.233). ♦ Passer aux mains de, entre les mains de. V. main 1resection I D 2 a α ex. de Proust: 39. En 1832, est créée l'entreprise Daubrée et Barbier qui, sur l'initiative de la femme du premier, nièce de Macintosh, fabrique également des balles élastiques: la maison passera bientôt entre les mains de la famille Michelin.
Industr. fr. caoutch., 1965, p.6. ♦ Passer du côté de. Emploi factitif. [L'organisation de la concurrence], continue M. Blanqui, tend à faire passer tous les profits du travail du côté des capitaux (Proudhon, Syst. contrad. écon., t.1, 1846, p.206). ♦ Passer sous l'autorité de, le contrôle de, la direction de, la domination de. Assez tôt, (...) [les collèges] se transformèrent en de véritables pensionnats, passant sous l'autorité des universités (Encyclop. éduc., 1960, p.14): 40. ... la crainte de passer sous une domination étrangère (...) détermina les Louisianais à s'assembler pour aviser au meilleur parti à prendre dans cette désespérante circonstance.
Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p.117. Empl. factitif. En 1945, les autorités politiques ont fait passer sous la direction de l'État, la Banque de France, quatre grandes banques de dépôt, certaines compagnies d'assurances (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1966, p.446):41. ... cette intervention totale de l'État fait passer toutes les libertés publiques sous le contrôle du pouvoir, et détruit la liberté elle-même et, avec elle, la démocratie.
Vedel, Dr. constit., 1949, p.184.
γ) Absol., empl. factitif. [Le fermage de la terre et l'intérêt de l'argent sont] au même titre la récompense du privilége, l'indemnité du prêt. Il fallut plus de quinze siècles pour faire passer cette idée (Proudhon, Syst. contrad. écon., t.2, 1846, p.130). b) En partic. [Avec une idée de reniement, voire de trahison] − Passer à + subst. désignant une catégorie de personnes ou un mouvement.Se rallier à. [N'est-ce pas odieux] d'avoir, Français d'adoption, passé aux Anglais; Espagnol de naissance, combattu contre les Espagnols (Dumas père, Ctede Morcerf, 1856, iv, 6, tabl. 2, p.86).Je crains que le cas de Frédé ne soit celui de beaucoup d'intellectuels bourgeois passés au communisme entre les deux guerres, à l'époque où les conversions étaient à la mode (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.163). ♦ Passer à l'ennemi. V. ennemi C 2 a synt. − Passer dans le camp de, dans le parti de. La dame de Giac et Jossequin, qui étaient dans le château, restèrent avec le Dauphin et passèrent dans son parti (Barante, Hist. ducs Bourg., t.4, 1821-24, p.275): 42. Je ne venais pas comme votre alliée, encore moins comme votre complice. J'ai le désir de l'être. C'est sans doute l'alliance de l'ordre contre le désordre. Toujours est-il que je passe dans votre camp.
Cocteau, Parents, 1938, II, 12, p.265. 4. a) [L'idée est celle d'un changement de catégorie, de l'accession à un nouvel échelon dans une formation ou une carrière]
α) [Le point de départ et l'aboutissement sont exprimés] − Passer de... à...V. capitalisable ex. de Schwartz, s.v. capitaliser. − Passer de... dans...Nul ne peut être admis à passer d'une année dans l'année supérieure s'il n'a obtenu aux examens subis en cours et en fin d'année une moyenne de points fixés par le règlement intérieur de l'école (Encyclop. éduc., 1960, p.227).
β) [Seul l'aboutissement est exprimé] Passer dans/en.L'étude de ces manuels (...) serait sanctionnée à l'examen de fin d'apprentissage, aussi bien qu'aux épreuves permettant au jeune compagnon de passer dans la catégorie des compagnons définitifs (Fillon, Serrurier, 1942, p.43): 43. Les élèves admis en classe de 5e(année préparatoire) sont autorisés à passer en classe de 4e(première année) sans subir d'examen d'aptitude ou de concours d'admission, à la condition qu'ils aient obtenu, au cours de cette année préparatoire, la moyenne pour l'ensemble des disciplines.
Encyclop. éduc., 1960, p.168. b) [Un attribut exprime le résultat du processus] Un amateur qui passe professionnel se lance dans des épreuves plus sévères (Comment parlent les sportifsds Vie Lang., 1953, p.327).Il va passer rapidement chargé de recherche et commencer à réfléchir aux problèmes de la physique d'une manière moins contractée (Leprince-Ringuet, Atomes et hommes, 1957, p.82). ♦ Passer maître (v. maître1II B 1 a). Le livre de Fernand Braudel est le livre d'un homme seul. Une thèse, donc un chef-d'oeuvre artisanal exigé par la corporation universitaire de tous ceux qui veulent passer maîtres (L. Febvre, Vers une autre hist., [1949] ds Combats, 1953, p.433). c) Absol. Passer (au choix, à l'ancienneté). Être promu (au choix, à l'ancienneté). [Pietri a de la] chance. À seize ans, à la gare de Cannes, il aide une vieille dame à traverser la voie. C'est la mère de Gambetta. Depuis, il passe au choix (Giraudoux, Siegfried, 1928, iv, 1, p.154). III. − [Le mouvement est provisoirement interrompu] A. − [Gén. avec compl. prép. ou adv. de lieu] Qqn passe 1. S'arrêter pour un court moment, séjourner quelque part provisoirement. Passer au bureau, chez le coiffeur. En rentrant à Paris, Lucien passa au ministère (Stendhal, L. Leuwen, t.3, 1835, p.406).En passant chez mon libraire, j'ai appris que les deux Claudel venaient de paraître (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p.164).V. collection ex. 11: 44. [Il loge dans l'appartement] Rodrigue qui est «réfractaire» et les agents de liaison qui, passant par Paris, ne veulent pas descendre à l'hôtel, pour n'avoir pas à remplir de fiche de police.
Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.7. ♦ Passer à la caisse. V. caisse II B 2 b expr. ♦ Passer chez le notaire. V. notaire A expr. − Absolument: 45. ... depuis que François Paradis avait passé, la longue veille hebdomadaire lui était plaisante et douce, parce qu'elle pouvait penser à lui et à elle-même sans que rien vînt interrompre le cours des choses heureuses qu'elle imaginait. Elles étaient infiniment simples, ces choses, et n'allaient guère loin. Il reviendrait au printemps...
Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p.101. ♦ Loc. Ne faire que passer. Ne pas s'attarder. V. faire3ex. 7. − Passer faire qqc., voir qqn. Je passe voir Gisette dans sa loge (Goncourt, Journal, 1861, p.894).Je vais prendre le thé chez les Mérissel. Je passerai vous dire bonjour en remontant (Flers, Caillavet, M. Brotonneau, 1923, iii, 2, p.19).Il passait donner des ordres, les sommes nécessaires, et revenait pour être sûr que ses ordres étaient exécutés (Cocteau, Enfants, 1929, p.61). 2. En partic. [À propos de la vie hum.] Passer sur terre. Il a passé parmi nous en faisant le bien. Ce sera sa glorieuse épitaphe: Pertransiit benefaciendo! (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p.1359). B. − P. ext. Qqn/qqc. passe 1. a) Exercer une activité, occuper une fonction, suivre une formation, subir un traitement de façon transitoire.
α) [Le compl. désigne l'activité] Passer par les affaires: 46. ... les critiques littéraires, qui savent que fatalement une «génération» arrivera par le simple jeu du temps, indépendamment de sa valeur et de ses idées, sont devenus très faciles, très coulants. C'est vrai en politique où tant de groupes ont passé au pouvoir que...
Valéry, Corresp.[avec Gide], 1897, p.301. − Empl. factitif, p.métaph. La nécessité de faire passer sous les drapeaux un très-grand nombre d'hommes fait réduire le temps de service effectif à deux ans au plus pour l'infanterie (Davout, Réorg. milit., 1871, p.52).
β) [Le compl. désigne le lieu de l'action] Entre mars-juillet-novembre 1941 et mars 1942, 187000 jeunes de la zone sud vont passer dans les Chantiers et revêtir la tenue verte (Cacérès, Hist. éduc. pop., 1964, p.123). ♦ Passer sur le billard. V. billard C 1. − Expr. Passer dans, entre, par, sous la main de qqn. J'ai frémi en tournant les pages de ces rapports impitoyables qui avaient passé sous la main de ces deux hommes (Nerval, Filles feu, Angélique, 1854, p.515).La vente de ces 20 quintaux cédés à un commerçant du bourg voisin, celle des quelque 10 à 15000 litres de lait, et cinq ou six veaux, nous procurent à peu près le seul argent qui nous passe dans les mains (Debatisse, Révol. silenc., 1963, p.25).V. directoriat ex. de Morienval, s.v. directeur et main 1resection I D 2 a ε ex. de Hugo: 47. ... les manuscrits (...) qui lui passaient entre les mains, ne comportaient jamais la moindre rature (...); les seules et uniques corrections étaient parfois quelques surcharges.
Gide, Journal, 1946, p.291. b) En partic. Passer par (un stade dans une évolution).Passer par un (plusieurs) état(s), par une (plusieurs) étape(s), par une (plusieurs) phase(s). Pour arriver à la synthèse, il faut nécessairement passer par l'analyse (Viollet-Le-Duc, Archit., 1863, p.463).Claude Terrasse (1867-1923) avait comme Messager passé par l'école Niedermeyer (Dumesnil, Hist. théâtre lyr., 1953, p.185): 48. ... dans divers groupes de parasites, l'individu, au cours de son développement, doit passer obligatoirement par deux hôtes successifs définis pour atteindre l'état adulte...
Hist. gén. sc., t.3, vol. 1, 1961, p.414. − Empl. factitif. Le théâtre (...) n'est plus ce moule par quoi on fait uniformément passer Sophocle, Shakespeare et Molière, mais un laboratoire d'expériences où l'on recrée Sophocle, Shakespeare et Molière (Cassou, Arts plast. contemp., 1960, p.381). c) P. anal.
α) Passer par (une crise, une épreuve). Subir (une crise, une épreuve). Cette démocratie (...) avait besoin de passer par l'épreuve des affaires (Gambetta,1874ds Fondateurs 3eRépubl., p.233).Hartknopf passe par les mêmes angoisses que Reiser; seulement, il les surmonte (Béguin, Âme romant., 1939, p.39).Les fibres externes passaient par des alternatives de traction et de compression (Campredon, Bois, 1948, p.39).V. accablement ex. 2. − Empl. factitif: 49. N'est-ce pas en faisant passer tous ces éléments par l'épreuve dialectique de la complémentarité, de l'implication mutuelle, de l'ambiguïté et de la réciprocité de perspective qu'on peut obtenir une image concrète de la réalité sociale et de ses types en train de se faire et de se défaire?
Traité sociol., 1967, p.25.
β) Locutions − (En) passer par là. Subir l'épreuve dont il a été question. V. là I B 4 b ex. de Hugo, de Flaubert. − Y passer. Subir le sort malheureux dont il a été question, celui auquel tout le monde pense (v. infra IV B 3 c passer à la casserole). Ma femme, fais attention à ton fils Alexandre: il va renverser le cabaret, et toutes les tasses y passeront comme les verres à patte! (Kock, Cocu, 1831, p.40).Que ça soit [la guerre] dans deux ans ou dans six mois, de penser qu'on y passera sûrement, ça n'encourage pas (Beauvoir, Invitée, 1943, p.124). ♦ En partic. Être pris dans un engrenage. Papa aussi te l'a bien répété: on y engage un doigt, et tout le bonhomme y passe. Et c'est ce qui est arrivé, et nous avec (Genevoix, Raboliot, 1925, p.333).Subir des violences sexuelles. Alors, il ne parla plus, ayant une revanche à prendre, se disant tout bas, crûment: «Toi, tu vas y passer!» (...) il la renversa brutalement au bord de la table; et elle se soumit, il la posséda (Zola, Pot-Bouille, 1882, p.76).Mourir, être anéanti. Cela va mieux, dit-il en arrivant vers Rieux, mais j'ai cru qu'il y passait (Camus, Peste, 1947, p.1229): 50. On est tous là, entiers... Mais... Mais on est tous là, parce que ça a fini juste à temps. Juste à temps; encore un peu, et on y passait. Ça durait encore dix minutes, et j'étais mort, et les Bastides y passaient. Il s'en est fallu de peu.
Giono, Colline, 1929, p.170. − (En) passer par (la volonté de qqn). Se soumettre à la volonté de quelqu'un. Mon cher ami, j'eus beau me débattre. Il fallut en passer par où elle voulait, comme toujours (A. Daudet, Pt Chose, 1868, p.280).Quoi que pussent faire dire l'Italie et l'Angleterre (...), on en passa par la volonté de Guillaume (Maurras, Kiel et Tanger, 1914, p.178). 2. a)
α) Qqn1/qqc1passe en/devant qqn2/qqc.2Se présenter, être présenté devant une instance, comparaître. Passer en conseil de guerre; passer devant le jury, un tribunal. [Des] journaux, consultés anxieusement, lui apprirent que l'affaire Greslou passait aux assises de Riom le vendredi 11 mars (Bourget, Disciple, 1889, p.223).J'ai refusé de montrer mes papiers, ça a fait toute une histoire, ils ont fait venir les flics, et voilà! je passe en correctionnelle (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.33): 51. Les prêts demandés par les collectivités publiques sont soumis à l'agrément du conseil d'administration de la Caisse d'épargne, puis passent devant un comité départemental présidé par le trésorier-payeur-général...
Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p.64. ♦ Loc. fam. Passer devant le maire (et le curé). V. curé A, maire B 2. − Empl. factitif. Faire passer qqn en justice. Vous garderez les arrêts forcés pendant un mois, monsieur, et je suis indulgent; car vous m'avez injurié chez moi, et je pouvais vous faire passer à un conseil (Sue, Atar-Gull, 1831, p.21).
β) Passer en jugement. Être traduit en justice. La Convention, à l'exemple du gouvernement de Sa Majesté britannique, faisait passer en jugement les généraux vaincus, à défaut des généraux traîtres, qui, ceux-ci, ne se laissaient point juger (A. France, Dieux ont soif, 1912, p.112).Il nous paraît inconcevable que, jadis, des milliers d'hommes en Europe aient pu passer en jugement et subir la torture, pour leurs convictions religieuses... (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p.536). ♦ Au fig. Passer au jugement de qqn. Être soumis au jugement de quelqu'un (d'apr. Littré). b) Expr. vieillie. Qqn2y passe. ,,Constater un fait par un acte en forme`` (Ac. 1878, 1935). V. notaire A expr. vieillie.M. Louis a fait la cour à cette vieille dame, l'a épousée quoique bien plus jeune qu'elle; (...) moi je trouvais ça très-bien et conforme à la plus saine morale puisque le maire et le curé y ont passé (A. Daudet, Nabab, 1877, p.191). 3. a) Spéc. Être présenté, présenter quelque chose, se présenter devant un public, un auditoire.
α) CINÉMA − Un film passe. Être projeté. La durée d'exécution d'un film −nous parlons ici de ce qu'on nomme un «grand film», c'est-à-dire du film qui passe en deuxième partie dans le programme d'un cinéma −est variable (Arts et litt., 1936, p.88-11).«Au loin une voile» est un film de 1937 (...). Il passe pour huit jours au Studio Montmartre (L'Humanité, 19 janv. 1952, p.6, col. 2). ♦ [P. méton.]: 52. En France, les producteurs de films d'art explorent assurément le domaine de la peinture: Rubens, Cézanne, Van Gogh sont passés avec succès sur nos écrans mais les préférences actuelles semblent aller à la sculpture et en particulier à la statuaire du M. A.*
Musées Fr., 1950, p.27. − Avec valeur factitive. Passer un film. Projeter. On s'était mis à table. (...) Pour prolonger cette réunion, on décida d'aller au cinéma. On passait justement un film gai (Camus, Env. et endr., 1937, p.40).Méliès, depuis 1900, avait une clientèle dans les grands music-halls anglais, organisés en circuit, qui passaient ses films comme clous de leurs programmes (Sadoul, Cin., 1949, p.35).
β) MUS., avec valeur factitive. Passer un disque. Faire tourner un disque: 53. 26 mai. J'ai obtenu, en faisant tourner à 33 tours un fragment enregistré à 78 tours, des transformations tout à fait remarquables. En passant le disque un peu plus de deux fois moins vite, on descend le tout d'un peu plus d'une octave et le tempo ralentit d'autant.
Schaeffer, Rech. mus. concr., 1952, p.23.
γ) RADIO, TÉLÉV. − Qqn/qqc. passe (à/sur l'antenne, en direct, en différé). Se produire dans une émission de radio ou de télévision; être diffusé (d'apr. Presse 1981). Valentina s'apprête à «passer en direct» à la télévision soviétique pour que son image soit diffusée de là vers toute la Terre (Paris-Jour, 18 juin 1963, p.7, col. 1 ds Guilb. Astronaut. 1967). ♦ Empl. factitif: 54. Adjonction à la cabine de programme: (...) d'une salle de transit dans laquelle sont préparés les disques ou bandes à faire passer à l'antenne et sont récupérés les disques ou les bandes déjà utilisés.
Matras, Radiodiff. et télév., 1958, p.53. − Avec valeur factitive. Passer qqc. (à l'antenne). L'auditeur cite souvent comme ayant passé de la publicité au cours du programme, des marques dont, en réalité, la publicité était diffusée à un autre moment de la journée (Weinand, Public. radioph., 1964, p.10).
δ) THÉÂTRE. Passer (sur scène). Jouer; exécuter un numéro. Grouille-toi! bon Dieu, grouille-toi! Jadin n'est pas là! (...) nous passons vingt minutes plus tôt! (Colette, Vagab., 1910, p.19).Hier, la répétition des Monstres était molle, désarticulée, pleine de trous. C'est ce soir qu'on passe. On tâchera de trouver le rythme de 3 heures à 6 heures (Cocteau, Maalesh, 1949, p.58). ♦ Empl. factitif. V. nuit ex. 13. b) P. méton. Être perçu par l'auditeur, le spectateur: 55. L'amélioration artistique, dénuée d'intérêt tant que la transmission était insuffisante, prend aujourd'hui une importance croissante: toutes les nuances, les finesses, les subtilités passent à l'antenne; les moindres défauts également.
Matras, Radiodiff. et télév., 1958, p.41. IV. − [Le mouvement est de l'ordre du geste; avec valeur factitive] A. − Qqn1passe qqc.2à qqn3 1. a)
α) [Le compl. d'obj. désigne une chose concr.] Remettre, donner (de la main à la main). Le chevalier passa sa lettre à sir Williams (Ponson du Terr., Rocambole, t.1, 1859, p.577).Passe-moi tes allumettes, que j'allume [ma lampe] (Gide, Faux-monn., 1925, p.1176).Devant l'évier, ma mère essuyait (...) les assiettes que la bonne lui passait (Nizan, Conspir., 1938, p.236).Le receveur: La monnaie s'iou plaît. (Des voyageurs lui passent la monnaie.) (Queneau, Exerc. style, 1947, p.81). − Proverbe. Passez-moi la rhubarbe et je vous passerai le séné. Faisons un échange de bons procédés. Ce que l'un demande, les autres l'accordent, à charge de revanche, bien entendu. C'est le «passe-moi la rhubarbe, je te passerai le séné» (L. Marcellin, Politique et politiciens pendant la guerre, av. 1918, p.242 ds Quem. DDL t.17). − Empl. factitif. [Implique un intermédiaire] Un de ses amis était chargé de venir tous les jours retirer sa correspondance pour la lui faire passer (Sand, Meunier d'Angib., 1845, p.23).D'heure en heure, général, fais passer un télégramme à Tomsk, et que l'on me tienne au courant (Verne, M. Strogoff, t.1, 1876, p.7).L'été venu, plus un rond (...). J'ai vécu, pendant six mois, avec vingt-cinq francs par mois qu'une de mes tantes me faisait passer (Colette, Music-hall, 1913, p.62).
β) Spécialement − SPORTS ♦ Passer la balle, le ballon. Envoyer. Un demi d'ouverture (...) doit faire le trou et alimenter ses trois-quarts, leur passer la balle fréquemment (Comment parlent les sportifsds Vie Lang.1952, p.233).V. ballon1ex. 3, passe1B 1 c ex. de Vie Lang.Absol. V. passe1ex. 4. ♦ Passer le témoin. V. passage1I D 1 ex. − TÉLÉPHONIE ♦ Passer l'appareil, le récepteur à qqn. Il passa le récepteur au médecin, qui le prit d'un air résigné (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.170). ♦ Passer (un correspondant à qqn). Mettre en communication. Allo... C'est vous, monsieur le juge?... Ici, Maigret... Comment dites-vous?... Mais non... Je suis dans son bureau et je vous le passe tout de suite... (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.170). ♦ Passer un coup de téléphone, un coup de fil. Téléphoner. V. fil I B 2 b. − FIN. Passer un billet, une lettre de change à l'ordre de qqn. Lui en transmettre la propriété par endossement. (Dict.xixeet xxes.).
γ) Fam. Passer une maladie à qqn. Donner, transmettre à quelqu'un de son entourage l'affection dont on est atteint. Il m'a passé son rhume. Il a passé sa grippe à tout le bureau (Lar. Lang. fr.).
δ) Loc. fig. (Se) passer le flambeau.
ε) Région. (Canada), expr. fig. Je vous/t'en passe un billet, un papier. Je vous/t'en donne l'assurance, je vous/te le garantis. Oui, mes enfants, j'vous en passe un papier que ça serait pus pareil si les Patriotes avaient gagné en 37 (Ringuet, Trente arpents, 1938, p.254 ds Rogers 1977, p.179). b)
α) [Le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] Transmettre. [Il écoutait] Gérard qui lui passait les ordres. −Rien de particulier, demanda-t-il? (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p.111).V. consigne2ex. 4 et commande ex. 10. ♦ Empl. factitif, absol. Faire passer.Transmettre un message, d'individu à individu, à toutes les personnes d'un groupe. Pas si vite, en tête!... Faites passer ça ne suit pas (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p.254): 56. Je vais me lever... Deuxième section... Pour un bond... Direction le pont... En tirailleurs à quatre pas... Première section, sur place, feu à volonté dans le marais... Faites passer...
Vercel, Cap.Conan, 1934, p.239. ♦ Empl. pronom. réciproque. Les îliens se passaient la consigne avec un drôle d'air. On aurait dit des sourds qui se parlaient (Queffélec, Recteur, 1944, p.213). − Qqc.2passe.Une consigne passa chez les officiers de compagnie: puis fut transmise par eux aux sergents: −Accélérer l'allure (Romains, Hommes bonne vol., 1938, p.109).
β) Fam. Passer le bonjour, ses amitiés à qqn. Adieu (...) je passe mille amitiés à tout le monde. Donne de mes nouvelles à notre bon grand-père (Stendhal, Corresp., 1812, p.381). c) En partic. Céder quelque chose à quelqu'un; renoncer à quelque chose, s'abstenir de quelque chose au profit de quelqu'un d'autre.
α) Passer la main. V. main 1resection I D 1 c , prêcher ex. 3.
β) Passer (la) parole (à qqn). Céder la parole (à quelqu'un), (le) laisser parler: 57. annette: Si j'ai un conseil à te donner, c'est de n'opposer (...) [aux] remontrances [de notre père] qu'un silence respectueux. lucien: Sois tranquille, je te passe parole.
Augier, Contagion, 1866, p.353. − JEUX DE CARTES. Donner son tour; ne pas ouvrir le jeu, ne pas relancer les enchères. Manille parlée. Le donneur (...) peut, au choix, parler, c'est-à-dire interroger son partenaire sur les cartes qu'il détient, ou lui demander ce qu'il doit jouer, ou, s'il n'a pas beau jeu, passer la parole à son partenaire (Alleau1964,p.310, s.v. manille).Le donneur a le premier la parole. Il peut soit passer parole, ce qui lui laisse le droit de parler ultérieurement, soit faire une enchère (G. Versini, Le Bridge, Paris, P.U.F., 1968, p.11). ♦ Absol. Cordenbois: Le dernier tour! Champbourcy: Oui, le tour des décavés et vivement. [À Colladan] Parle! Léonida: Je passe! Colladan: Je passe! Cordenbois: Je vois... cinq sous... Champbourcy: Tenu. Six sous (Labiche, Cagnotte, 1864, i, 1, p.16): 58. [Au début de l'histoire du bridge] (...) c'est le donneur qui choisit l'atout ou passe à son partenaire le droit de le choisir (...). Toutefois, le camp de l'ouvreur devant nécessairement déterminer l'atout, le seul problème qui lui est posé est de découvrir la meilleure couleur, non s'il faut annoncer ou passer.
Jeux et sports, 1967, p.974. Empl. subst. masc. Passe, Passe parole. ,,Annonce indiquant que le joueur ne désire pas pour le moment faire l'enchère`` (G. Versini, op. cit., p.8). [Les joueurs ont] intérêt, avant le «passe» final, à explorer toutes les possibilités de leur jeu (Jeux et sports, 1967, p.975).
γ) Passer (le) son tour. [Notamment dans les jeux de société] Le bridge, qui est en quelque sorte le fils du whist, fit son apparition vers 1850. La principale différence avec le whist était la possibilité, pour le donneur, de choisir l'atout ou de passer le tour à son partenaire (Alleau1964,p.68, s.v. bridge).Le joueur a, dans tous les cas, la possibilité de passer son tour (Domino chinois,Paris, éd. Gay-play,1973, règle du jeu). ♦ Absol. La partie prend fin: −soit lorsqu'il ne reste plus aucune lettre à la pioche, −soit lorsque les joueurs sont tous dans l'obligation de passer (Domino chinois,Paris, éd. Gay-play,1973, p.8). − Laisser, voir passer son tour. Elle était si profondément abattue qu'elle laissait passer son tour, à chaque nouvelle pénitente que l'abbé Faujas expédiait (Zola, Conquête Plassans, 1874, p.1063): 59. Le sous-officier de carrière figurant sur un tableau d'avancement (...) et voulant éviter une mutation dans une autre garnison peut déclarer par écrit (...) qu'il préfère voir passer son tour et attendre qu'une vacance s'ouvre dans sa garnison pour être nommé.
Lubrano-Lavadera, Législ. et admin. milit., 1954, p.104. − (Mon, ton, son) tour est passé. [Il arrêta] le jeune homme qui se précipitait. −Votre tour est passé... Je vous ai appelé, et comme vous étiez là derrière... −Mais, monsieur, je n'ai pas entendu. −Assez!... Inscrivez-vous à la queue... Allons, Monsieur Favier, c'est à vous (Zola, Bonh. dames, 1883, p.480). Rem. 1. Dans le synt. passer son tour, la notion d'abstention, de renonciation est plus nettement ressentie dans le sens commun que celle de transfert; donc à rapprocher de I E 2 a. 2. Il est difficile de savoir, lorsque l'on dit je passe si l'on sous-entend je passe parole ou je passe mon tour.
δ) Expr. Passer la mauvaise carte à qqn. V. carte II A 1 c ex. de Goldschmidt. 2. En partic. a) Distribuer. Ils soupaient (...). Fontan, couché sur le devant [du lit], passait les parts de gâteau, posées au bord de la table de nuit (Zola, Nana, 1880, p.1294). ♦ Empl. factitif. Les servants font passer les viandes froides, galantine, jambon, volailles, ainsi que les boissons (Lar. mén.1926, p.1103). b) Vieilli. Prêter, mettre à la disposition de quelqu'un. Il ne fallait pas s'asseoir devant la porte de la chaumière que la commune passait au marguillier (Stendhal, Lamiel, 1842, p.55). c) Fam. Céder, vendre: 60. dardard: Combien vos gants? pontbichet: Vingt-neuf sous. dardard: Trop cher! pontbichet: Je vous les passerai à un franc. dardard, calculant: C'est vendu!...
Labiche, J. homme pressé, 1848, 4, p.349. − P. anal. Jean Poupon: Voilà six mois, Pennec est venu me demander la plus jeune et la plus jolie de mes filles en mariage: «Oui volontiers, si tu as de l'argent. −J'ai mille écus, dit Pennec. −Oh! je ne demande pas tant, je te la passerai pour moitié moins...» (Stendhal, Mém. touriste, t.2, 1838, p.41): 61. dalila: Moi, j'ai choisi celui qui n'a jamais connu d'autres femmes. J'étais très bien avec sa mère. Elle me l'a passé. Elle me l'a passé avec ses souvenirs au complet, premiers pugilats et premières culottes, avec la liste de ses plats, de ses goûts; je n'ai qu'à l'entretenir dans cette enfance qui ne finira qu'à sa mort
Giraudoux, Sodome, 1943, II, 4, p.110. ♦ Péj. Se débarrasser de quelqu'un au détriment de quelqu'un d'autre. N'essayez pas de me (...) coller encore [ma femme] sur les épaules, c'est trop d'une fois (...) Passez-là à un autre, si elle vous embarrasse (Zola, Pot-Bouille, 1882, p.331). B. − 1. Qqn1passe qqc.2(à/dans/sur qqc.3).Faire aller, faire glisser, mettre. a) [Avec un adv. de lieu] On passe le fil en arrière pour arrêter la maille d'un tissu (Blondel, Action, 1893, p.196). ♦ Loc. fig. Passer l'arme à gauche. V. arme II D fam., gauche II D 1 b. b) [Avec compl. prép.] V. chas1ex. 1, passette ex.
α) [Le compl. d'obj. désigne une partie du corps] Passer tendrement la main dans les cheveux de qqn. L'Espagnol passa la main sous le bras de Lucien (Balzac, Illus. perdues, 1843, p.708).Il passa un doigt sur la table. Quelle poussière! Si je me plaignais à la patronne? (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.177).Soeur Aldegonde passait la tête par l'entrebâillement d'une porte (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.40).V. lunette A 2 b ex. de Daudet. ♦ Au part. passé. Étienne, âgé de quatre ans seulement, souriait, un bras passé au cou de son frère (Zola, Assommoir, 1877, p.376). ♦ Empl. pronom. réfl. indir. Zimmermann se passa la main sur le front (Mille, Barnavaux, 1908, p.76). ♦ Au fig. Passer la main dans les cheveux, dans le dos à/de qqn. V. cheveu I C ex. de Courteline, main 1resection I C 1 ex. de Zola et de L'Est Républicain. − DANSE, SPORTS. Contretemps sur les demi-pointes ou «passer la jambe»: Monter sur les demi-pointes, lever le pied gauche derrière en demi-hauteur, les genoux tendus −passer et poser la jambe gauche devant la droite en quatrième croisée à terre (Meunier, Danse class., 1931, p.177). ♦ Empl. factitif. Les croisés. Le croisé, d'une manière générale, permet d'accroître la vitesse de déplacement sur une courbe. Le principe consiste à faire passer le pied libre devant et au-dessus du pied porteur avant de le poser à l'intérieur. Il peut se faire en avant et en arrière (P. Pelissier, A. Billouin, Patinage, Paris, R. Laffont, 1976, p.42). ♦ Loc. en empl. subst. masc. Passer la jambe, passez le pied. L'enfant apprît [de ses maîtres en escrime] (...) ce célèbre passez le pied, saut vertigineux en avant du talon d'arrière (D'Esparbès, Roi, 1901, p.40).V. supra ex. de Meunier. − Arg. Passer la jambe à qqn. Faire un croc-en-jambe à quelqu'un. L'inconnu lui passa la jambe (sorte de croc-en-jambe) avec une dextérité merveilleuse (Sue, Myst. Paris, t.1, 1842, p.12).V. passement rem. 2.
β) [Le compl. d'obj. désigne un ustensile, un bijou; le compl. prép. désigne gén. une partie du corps ou du vêtement] Passer la bague au doigt; passer une chaîne, une médaille au/autour du cou; passer une fleur à la boutonnière; passer la corde au cou. Des jeunes filles (...) sortent d'une cage des oiseaux qu'elles laissent voler en l'air non sans leur avoir passé un fil à la patte (D'Allemagne, Récr. et passe-temps, 1904, p.168).Il se dépêcha, passa rapidement le peigne dans ses cheveux crépelés, et endossa une redingote (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.161).V. doigt I B 2 c ex. de Claudel et menotte B ex. de Van der Meersch, de Châteaubriant: 62. ... elle mit sa cape avec un col de fourrure, lissa sur la nuque ses cheveux raides et brillants, mit un chapeau fait d'une queue de renard argenté enroulée, qui lui descendait jusqu'aux sourcils noirs et luisants, passa une douzaine de bracelets sur ses poignets et s'en fut...
Triolet, Prem. accroc, 1945, p.142. ♦ Au part. passé. C'était un ouvrier zingueur (...). Il avait son sac passé à l'épaule (Zola, op.cit., p.377). ♦ Empl. pronom. à valeur passive. Sur les toutes petites manches, un noeud de ruban bleu plus étroit. Ces rubans se passaient habituellement entre l'étoffe et la peau, et se nouaient sur l'épaule, de façon à relever la manche en sabot (Gyp, Souv. pte fille, 1928, p.314). c) [Sans compl. prép.]
α) Passer (un vêtement). Synon. mettre, enfiler.Passer une chemise, un complet, un frac, un habit, une veste; passer des gants. Elle prit sa robe, la passa, s'examina dans le miroir (Balzac, Cous. Bette, 1846, p.387).Elle enfilait ses bas, passait sa blouse (Triolet, op.cit., p.172).Je dois aller traire. Je mets un vieux chapeau, comme mes parents, je passe le tablier pendu à un clou (Debatisse, Révol. silenc., 1963, p.22). ♦ Empl. pronom. réfl. indir., rare. Non! non! quand on vous le dit, reprit la belle, en se passant un corps de jupe (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p.234).
β) MAR. Passer les manoeuvres (v. manoeuvre1A 2 a p.méton.). ,,Mettre en place les différentes manoeuvres courantes; les passer dans leurs poulies`` (Gruss 1978). Une manoeuvre est passée à contre, lorsqu'elle est passée en sens inverse du sens qu'elle doit avoir (Gruss 1978).
γ) PASSEM. Passer (des fils): (les) entrelacer (d'apr. Bouillet 1859, s.v. passementerie). Or à passer. Fil d'or, fil d'argent ou de soie recouvert d'or, que l'on utilise à la fabrication des passements. V. or ex. 3. 2. a)
α) Qqn1passe qqc.2(sur qqc.3).Étaler, appliquer un produit, faire agir un instrument, généralement dans un mouvement de va et vient, sur quelque chose. Passer un rabot sur une surface de bois. On revêtit le corps d'une chemise fine (...). On serra dans des guêtres de soie rouge ses jambes, qui ne devaient plus courir. (...) On passa du carmin sur ses lèvres (About, Roi mont., 1857, p.227).Essuyer soigneusement [les chromes], si possible, à chaque rentrée, et y passer un chiffon légèrement gras (Chapelain, Techn. automob., 1956, p.361).On encolle le bois avec un savant mélange de colle de peau bouillante, de bouillon d'ail et d'absinthe auquel on ajoute du sel et du vinaigre. (...) On passe ensuite un apprêt à base de blanc d'Espagne et de colle chaude (Viaux, Meuble Fr., 1962, p.22).V. éponge1B 1 synt. ♦ Empl. pronom. réfl. indir. Rien ne me dégoûte comme le spectacle de cette idiote et de sa crème. Elle a lu dans un journal que les actrices américaines (...) se passaient de la pommade. Elle croit que ces conseils sont bons pour le cuir chevelu (Cocteau, Enfants, 1929, p.83). − Loc. fig. Passer l'éponge (sur qqc.). V. éponge1B 3 a. − Qqc.2passe sur qqc.3Au tirage, l'encre grasse «prend» (...) après mouillage sur les surfaces où passa le crayon, lesquelles restent sèches, tandis que les parties humides la refusent (Arts et litt., 1935, p.28-13). ♦ Emploi factitif. On fait passer sur la chaussée un léger rouleau compresseur de 3 à 5 tonnes pour bien tasser les briques (Bourde, Trav. publ., 1929, p.96).
β) P. métaph. Albertine (...) semblait une petite statue sur laquelle les minutes heureuses de Balbec avaient passé leur patine (Proust, Guermantes 2, 1921, p.389).
γ) Loc. fam., souvent fig. ♦ Passer de la pommade à qqn. ,,Le flatter`` (Car. Argot 1977). ♦ Passer un savon à qqn. Réprimander quelqu'un. Du temps (...) [du drame], il nous avait fait pas mal de discours, soit pour nous rassurer, soit pour nous «passer des savons» (Giono, Roi sans divertiss., 1947, p.84). ♦ Passer qqc. à qqn. Faire subir des violences verbales ou corporelles à quelqu'un. Non, mais, quel chahut! fit-il blessé dans son vieil instinct de silence. Si je vous avais emmené en patrouille, vous, qu'est-ce que je vous aurais passé! (Vercel, Cap.Conan, 1934, p.202).J'ai connu ainsi un romancier athée qui priait tous les soirs. Ça n'empêchait rien: qu'est-ce qu'il passait à Dieu dans ses livres! Quelle dérouillée, comme dirait je ne sais plus qui! (Camus, Chute, 1956, p.1542): 63. Ralph rigolait haineusement (...). Un mec de trente ans (...). Qu'est-ce que je lui ai passé! Un pain que je lui fous dans l'oeil pour commencer, et puis, au retour, je le mouche avec mon coude (...). En plein nase.
Sartre, Âge de raison, 1945, p.271. − Qqn3sent qqc.2passer.La sentir passer. Subir quelque chose de pénible, de douloureux. Marchetti: C'est enquiquinant pour Antoine, cette histoire-là... Si le mec clabote, il va la sentir passer... Lacoste: Il a l'habitude!... (H.-G. Clouzot et J. Ferry,Dialogue du film Quai des Orfèvres,1947, p.54 ds Rey-Chantr. Expr. 1979).Il l'a sentie passer, la note (Rob.1985). b) P. anal. Passer l'épée au travers du corps de qqn. Gérard, dit-il (...) au moindre mouvement suspect, soyez prêt à lui passer votre épée au travers du corps (Balzac, Chouans, 1829, p.25). 3. a)
α) Qqn1passe qqc.3à/dans/sur qqc.2Soumettre quelque chose à un traitement particulier, à l'action d'un produit ou d'un instrument. Passer (un aliment) à l'eau bouillante, au four, au gril, sur un feu modéré; passer des croûtons au beurre; passer un parquet à la paille de fer; passer des souliers au blanc; passer qqc. à l'autoclave, à l'étuve. La bonne femme nettoyait la poêle après l'avoir passée au feu (Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p.605).Cette coloration ne deviendra intense qu'en milieu basique (d'où la nécessité de passer la coupe dans un bain de carbonate de lithium...) (Husson, Graf, Biol. gén., 1965, p.15).On utilise (...) les harengs frais et non salés, en les passant dans une friture puis en les mettant en boîte avec une couverture de marinade (Boyer, Pêches mar., 1967, p.111). ♦ Au part. passé. Des yeux passés au noir. Pour dessert, de petits biscuits-macarons, des amandes passées à la poële et d'un goût exquis (Gautier, Tra los montes, 1843, p.24).Elle occupait, sous le toit, une chambre passée à la chaux (Zola, Rêve, 1888, p.21).V. aubergine ex. 2. ♦ Empl. pronom. réfl. indir. Nous ne saurions trop (...) recommander [à l'opérateur] de prendre toutes les précautions d'antisepsie avant et après l'intervention. Se passer les mains et les bras à l'alcool (Garcin, Guide vétér., 1944, p.121). − Passer au bleu. V. bleu II B. − Passer (un aliment) dans une casserole. Faire revenir. Vous faites une préparation de crème ainsi qu'il suit: passez dans une casserole, avec deux onces de bon beurre frais de Gournay ou d'Isigny, selon la saison, quelques champignons coupés en dés, un bouquet garni et une tranche de jambon (Gdes heures cuis. fr.,Grimod de la Reynière,1838, p.156).
β) TANN., TEXT. Passer une peau, une étoffe (à l'apprêt) [v. apprêt B 2]. Préparer, apprêter une peau, une étoffe (d'apr. Littré, Lar. 19e-20e). b) P. anal. Qqn1passe qqn3à/par qqc.2Quand une place est prise, il y fait maison nette Passant tout par le sabre et par la baïonnette! (Pommier, Russes, 1854, p.21).Ce ne fut pas un combat, ce fut une course, et dans le camp tout a été passé à la baïonnette (Jaurès, Guêpier marocain, 1914, p.304). ♦ Passer qqn au fil de l'épée. V. épée B 3 a ex. de Dumas. ♦ Passer qqn par les armes. V. arme II A 1. ♦ Passer qqn à tabac*. ♦ Arg. Passer qqn au tourniquet. Faire passer quelqu'un en conseil de guerre: 64. Maintes fois, il (...) [suffisait] de la mauvaise humeur, ou de l'antipathie d'un gradé, (...) pour qu'une peccadille courante reçut un nom terrible (...), et l'on vous passait au tourniquet, sans que vous ayez pu nier le fait, discuter sa qualification, son châtiment étiqueté d'avance...
Vercel, Cap. Conan, 1934, p.64. c) Qqc.3/qqn3passe à qqc.2La pâte tréfilée et tronçonnée passe ensuite au four tournant ou au four tunnel (Arts et litt., 1935, p.20-10). ♦ Passer à/par la casserole (au fig.). V. casserole C. ♦ Passer au gabarit (arg.). V. gabarit A 2 b. ♦ Région. (Canada). Passer au feu. Être incendié. Je rentre à la maison. J'ai les ouvriers qui viennent pour commencer à refaire la chambre qui a passé au feu (M. Cabay-Marin, Grande ville, 1975, p.86 ds Richesses Québec 1981, p.1138). 4. P. ext. a) Soumettre quelqu'un/quelque chose, se soumettre, être soumis à un examen.
α) Qqn1passe qqn2/qqc.2en revue.Inspecter (au cours d'une cérémonie militaire). Le roi avait passé la garde en revue (Delécluze, Journal, 1827, p.446). ♦ Au fig. Synon. de parcourir (v. ce mot II B 2 a).Pendant toute cette nuit il passa en revue les huit mois qu'il venait d'écouler auprès de cette jeune femme (Murger, Scènes vie boh., 1851, p.165): 65. Franz était trop préoccupé pour bien dormir. Sa nuit fut employée à passer et à repasser dans son esprit toutes les circonstances qui se rattachaient à l'homme de la grotte et à l'inconnu du Colisée, et qui tendaient à faire de ces deux personnages le même individu...
Dumas père, Monte-Cristo, t.1, 1846, p.470. − Qqn1passe la revue, l'inspection de qqn2/qqc.2Le général français passa la revue des troupes (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.347).Mise en garde contre la famine, MmeChantal passe l'inspection des restes, en prenant des notes sur un calepin (Maupass., Contes et nouv., t.2, MllePerle, 1886, p.626). − Vieilli. Qqn2passe en revue.Être soumis à une inspection. Cette compagnie, ce régiment a passé en revue (Littré).
β) Passer la visite − Qqn1passe la visite.Examiner les malades dans un service hospitalier, dans une infirmerie. Le chirurgien qui passe la visite n'écoute pas les plaintes de celui qu'il ausculte (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p.256). − Qqn2passe la visite.Se soumettre à un examen médical. Le service médical (...) assure l'examen médical des marins astreints à passer la visite avant chaque embarquement (M. Benoist, Pettier, Transp.mar., 1961, p.135). b) Passer qqc. sous silence. Ne pas faire mention de quelque chose (v. supra E 1 a passer sur qqc.). Nous voilà arrivés au bout de la galerie, non sans avoir été obligés de passer sous silence bien des artistes recommandables éteints par la gloire de Rubens, comme les étoiles par le soleil (Gautier, Guide Louvre, 1872, p.160).L'art antique avait divinisé la nature, l'art moderne l'a humanisée, tandis que notre art classique la passait tout simplement sous silence (Zola, Cap. Burle, 1883, p.199): 66. Si l'on tient compte du prix actuel du combustible liquide, on ne peut donc être surpris de l'abandon presque généralisé de ce type de moteurs. Nous ne pouvons cependant passer ce chapitre sous silence car il existe encore en fonctionnement des quantités importantes de moteurs semi-diesel.
Ambroise, Monteur mécan., 1949, p.89. 5. TAUROM. Passer le taureau. Donner une passe ou une série de passes au taureau: 67. −Qu'arriverait-il si, un taureau qui désarme, on le passait par le haut? −Mais, c'est par le bas, voyons, qu'il faut le passer! −Est-ce que la nécessité de donner le coup de tête très haut ne parviendrait pas à lui mettre la tête basse, par la fatigue des muscles du cou, aussi bien que des passes par le bas?
Montherl., Bestiaires, 1926, p.530. 2eSection. [Concernant le temps ou dans un déroulement temp.] Quand les beaux jours sont arrivés, je suis venu ici (...). Le temps a passé avec une rapidité prodigieuse; je n'en ai jamais passé aucun qui m'ait paru plus agréable (Tocqueville, Corresp.[avec Gobineau], 1855, p.243). I. A. − Qqc.1(se) passe.[Le suj. désigne le temps, une fraction du temps ou un événement considéré par rapport à son déroulement dans le temps] 1. a)
α) (Le temps) passe. S'écouler dans un mouvement continu. Trois jours passèrent, puis la mère dut repartir (Benjamin, Gaspard, 1915, p.98).Le temps passait, rien ne bougeait derrière les portes, le silence commençait à bourdonner aux oreilles de Juliette comme une grosse mouche noire, et elle allait s'assoupir, quand la porte s'ouvrit (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.40): 68. Les journées passaient sans autre, toutes aussi pleines, toutes aussi vides, et l'on ne sait jamais celle qui comptera, sinon on l'arrêterait! Mais c'est la vie. La joie, la tristesse, la santé, la maladie. Tout s'écoule.
Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.182. ♦ Passer comme.Cette journée passa comme un éclair (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.361).Enfin je reviens à moi, je rouvre les yeux. Janvier et février ont passé comme un tourbillon (Michelet, Journal, 1856, p.297).Le dîner passa comme un cauchemar (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p.73). − [Avec la notion de l'irréversibilité de l'action] On s'agite, on lutte, on espère, quand une seule chose est précieuse: savoir tirer de l'instant qui passe toutes les joies qu'il peut donner (Louys, Aphrodite, 1896, p.239).Ils n'ont rien à se dire, c'est pourquoi ils ne disent rien. Pourtant, chaque minute qui passe est une déception pour Juliette (Aymé, Jument, 1933, p.106): 69. Ce que nous cherchons est toujours là, qui nous attend. Mais toujours la même ignorance: où s'adresser? Et les êtres! À nos soupirs, quelque part, toujours des soupirs répondent. Mais nous ne savons où, et nul ne nous le dit, et nous restons avec notre soif, et la vie passe.
Montherl., Célibataires, 1934, p.825. − Au passé. [Avec la notion d'action révolue] Bien des jours ont passé depuis cette journée, hélas! et bien des ans! (Brizeux, Marie, 1840, p.34).Les années avaient passé. Plus tard, elle était partie. Bien entendu, elle n'était pas partie seule. «Je t'ai bien aimé, mais maintenant je suis fatiguée...» (Camus, Peste, 1947, p.1284).
β) Empl. factitif. Faire passer (le temps, un certain temps) à qqn. Faire paraître le temps plus court à quelqu'un; occuper quelqu'un pendant un certain temps. Blanche, la petite duchesse, est emmenée bon gré, mal gré, au couvent des dames de Lunéville (...). Quant au petit Duc, pour le consoler ou lui faire passer le temps, on le renvoie au régiment des dragons de Parthenay, dont il est le colonel par droit de naissance (L. Schneider, Maîtres opérette fr., 1924, p.192): 70. −Ce journal (...), peu à peu je m'en laisserai bien malgré moi ôter la direction par les ultra-furibonds. J'ai fait attacher de beaux appointements aux places de rédacteur. De tous côtés on va solliciter ces places: cette affaire va nous faire passer un mois ou deux, et l'on oubliera les périls que je viens de courir.
Stendhal, Chartreuse, 1839, p.118.
γ) (Le temps) passe à + inf./en + subst.Être occupé, utilisé à. Nos dernières heures de Mittelsinn, avant la nuit, passèrent à rassembler des provisions (Ambrière, Gdes vac., 1946, p.366): 71. le docteur: Vos informations à vous, d'où viennent-elles? knock, souriant: De bien des sources. C'est un très gros travail. Presque tout mon mois d'octobre y a passé.
Romains, Knock, 1923, III, 6, p.17. − P. anal. [Le suj. désigne un bien matériel] L'argent qui restait sur le prix du mobilier vendu, celui que Lucien gagnait, tout avait passé aux costumes, à l'arrangement de la loge, à tous les frais d'un début (Balzac, Illus. perdues, 1839, p.508).La Flandre souffre à son tour. (...) elle commence à sentir le poids du gantelet du Bourguignon. Tout son or passe à payer la fête ducale et la guerre française (Faure, Hist. art, 1914, p.468): 72. Comme il n'est pas de procès bien mené qui ne puisse durer vingt ans, nous aurons le loisir de nous connaître et de nous apprécier; nous en viendrons peut-être à nous aimer, et, le jour où notre château, notre parc, nos bois, nos champs, nos prés, nos fermes et nos métairies auront passé en frais de justice, ce jour-là, qui sait? nous nous embrasserons.
Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p.133. b) [En partic. dans le syntagme laisser passer] Suivre son cours, se dérouler jusqu'à son terme. Laisser passer la tourmente. Charles (...) se jeta en travers sur son lit en se mettant la face dans les draps pour pleurer à son aise loin de ses parents. −Il faut laisser passer la première averse, dit Grandet (Balzac, E. Grandet, 1834, p.109): 73. −Eh bien, mon fils, laissons passer l'orage, répondit Madame de Vaubert en se levant; puisque notre aimable voisin nous offre une hospitalité si cordiale, allons attendre sous son toit que le ciel nous permette de regagner le nôtre.
Sandeau, op.cit., p.49. 2. (Le temps) se passe a)
α) Vieilli ou littér. Synon. (le temps) passe (v. supra 1 a α).Émile, le temps se passe, abrégeons cette visite (Labiche, Chapeau paille Ital., 1851, i, 5, p.15).La femme préparait le dîner (...). Sept heures, huit heures; personne... À mesure que le temps se passait, sa voix changeait, roulait des larmes, devenait nerveuse (A. Daudet, Contes lundi, 1873, p.222).Une heure se passa, deux et trois heures se passèrent, et ils étaient toujours dans le feu d'une conversation politique (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.187). − Se passer sans que.Cinq ans se passèrent sans qu'aucun événement marquât dans l'existence monotone d'Eugénie et de son père (Balzac, E. Grandet, 1834, p.221). ♦ Tournure impers. Il se passait... sans que; il ne se passait pas... que. «Là seulement on sait vivre», se disait Lucien. Et il se passait quelquefois des semaines entières sans qu'il fût choqué par quelque propos bas (Stendhal, L. Leuwen, t.3, 1835, p.348).Il ne se passait pas de jour que je ne reçusse des lettres qui m'annonçaient une catastrophe (Chateaubr., Mém., t.3, 1848, p.246).Il ne se passait pas de jour que des demandes d'affectation à l'équipe des travaux ne parvinssent au capitaine (Gracq, Syrtes, 1951, p.138).
β) [Avec adv. ou loc. adv.] Nous prîmes des glaces et la soirée se passa gaiement (Delécluze, Journal, 1827, p.447).Les dimanches se passaient régulièrement en famille (Ambrière, Gdes vac., 1946, p.222).
γ) [Avec compl. de lieu] L'idée de revoir les lieux où s'était passée sa jeunesse l'exaltait sans doute, car tout le long du chemin il n'arrêta pas de discourir (Flaub., MmeBovary, t.2, 1857, p.130).
δ) (Le temps) se passe à + inf./en + subst. gén. au plur.Être occupé, utilisé à. La journée se passe à folâtrer, à peindre, à faire de la musique; les nuits se passent à pleurer; la soirée se passe à parler; les jours se passent en fêtes, en libations. Tout le reste de l'année se passa en négociations et en messages (Barante, Hist. ducs Bourg., t.4, 1821-24, p.280).Une demi-heure se passe en préparatifs (H. Bazin, Vipère, 1948, p.251): 74. Le fait est que la vie se passe à attendre quelque chose qui ne vient pas et à poursuivre quelque chose qu'on manque: le double désappointement, voilà l'histoire du désir et de l'homme de désir.
Amiel, Journal, 1866, p.298. b) Suivre son cours, se dérouler jusqu'à son terme. Il faut que jeunesse se passe (v. jeunesse II A 1 b). B. − 1. [Avec valeur factitive] a) Qqn2passe qqc.1Pour passer une soirée avec vous, madame, je manquerais à gagner des millions (Balzac, C. Birotteau, 1837, p.175).Ses journées entières, il les passait dans l'obscurité (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p.170).Réservant les interminables travaux de broderie pour le temps qu'elle passait en société, elle occupait à quelque traduction les longues heures de sa solitude (Gide, Si le grain, 1924, p.366). ♦ Ne pas passer (un jour) sans. Je n'ai pas passé un jour sans t'aimer; je n'ai pas passé une nuit sans te serrer dans mes bras; je n'ai pas pris une tasse de thé sans maudire la gloire et l'ambition qui me tiennent éloigné de l'âme de ma vie (Napoléon Ier, Lettres Joséph., 1796, p.21).Sais-tu que je ne passe pas un jour sans penser à ton pays avec un désir fou? (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p.311). ♦ Au part. passé. Une carrière passée au service de l'État. Est (...) compté pour une durée équivalente de services civils le temps légal passé sous les drapeaux par les hommes appartenant à une classe antérieure à la classe 1913 (J.O., Loi rel. recrut. arm., 1928, p.3810).La durée moyenne du temps passé dans chaque échelon est fixée à deux ans (Encyclop. éduc., 1960, p.340). ♦ Loc. fam., vieilli. (Se) la passer douce. Synon. se la couler douce (v. couler1III C).Il me paraît que vous la passez douce en prison! (Sand, Ctessede Rudolstadt, t.1, 1844, p.259).Gautruche, dit Gogo-la-Gaieté, quoi! Un joli garçon à la coule qui ne bricole pas de casse-têtes, un bon zig qui se la passe douce (Goncourt, G. Lacerteux, 1864, p.202). − [Avec compl. de lieu] Passer (le plus clair de) son temps, sa vie à la cuisine, à la fenêtre, dans sa chambre, sur une chaise longue; passer deux ans en prison; passer un congé à Paris, ses vacances à Toulon; passer le carnaval à Venise. Madame de Granville (...) avait été passer quelque temps pour affaires dans sa terre (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p.1592).J'ai passé dix jours à la campagne et deux ans en prison; je n'ai pas changé (Sartre, Mains sales, 1948, 7etabl., p.248).Il passait des heures devant sa table de travail (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.230).V. nuit ex. 6, ex. 10 et II B 2 ex. de Boylesve. − Passer (son temps) à + inf./en + subst. Occuper, utiliser (son temps) à/en. Marguerite et moi, nous passâmes toute la journée à nous redire nos projets comme si nous avions compris le besoin de les réaliser plus vite (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p.222).Je passe mon temps à me dire que je suis un idiot (Flaub., Corresp., 1861, p.441).V. désert II A 1 d ex. de Boylesve, journée ex. 1, nuit II B 3 ex. de Murger: 75. ... vois-tu, ma pauvre maman, j'éprouve un tel besoin de vivre! Est-ce que tu peux comprendre ça, toi qui as passé ton existence à te sacrifier aux autres, à ton mari, à tes enfants, à n'importe qui avait besoin de toi?
Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.131. ♦ Absol., vieilli. Passer la/les nuit(s). Passer la nuit à travailler, sans dormir; veiller. Ce petit procureur serait bien fier, s'il savait que ses paperasses remplies de mensonges, et arrangées pour procurer son avancement, ont fait passer la nuit aux deux plus grands personnages de l'État (Stendhal, Chartreuse, 1839, p.412).Elle passait les nuits, elle ne bougeait pas de cette chambre, où sa douceur active de cendrillon, ses soins légers et silencieux mettaient comme une caresse continue (Zola, Débâcle, 1892, p.631). b) En partic. Ne pas passer la journée, la nuit. Mourir avant la fin de la journée, de la nuit. V. journée A 1 ex. de Balzac, nuit II A 1 expr. 2. Passer un (mauvais) moment, un (mauvais) quart d'heure. Traverser un mauvais moment. Célimare: Parce que tu as été malheureux avec ta femme, tu vois des sinistres partout... Le fait est qu'on doit passer un mauvais quart d'heure quand on découvre la chose... Pitois: Oh! moi je m'y attendais (Labiche, Célimare, 1863, i, 3, p.8).Je ne vous garantis pas qu'on ne parle pas de nous. C'est un moment à passer (A. France, Pt bonh., 1898, 12, p.537). II. − P. ext. A. − Qqc.1passe 1. a) [Le suj. désigne une fraction du temps] Se terminer, cesser d'être, être révolu. Synon. finir (v. ce mot II A 1 a).Dormez. La nuit sera vite passée. Demain, nous aurons un beau soleil (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p.220).Les cinq minutes sont passées. Parle ou va-t'en (Sartre, Mains sales, 1948, 6etabl., 1, p.222). ♦ Le temps, la saison est passée de + subst. La saison est passée des amitiés faites dans les squares et les parcs (Mallarmé, Dern. mode, 1874, p.791).Les temps sont passés de l'universalisme (L. Febvre, Pour une hist. dirigée, [1936] ds Combats, 1953, p.59). b) P. anal. [Le suj. désigne une entité concr. ou abstr.]
α) Cesser d'exister, disparaître. −Mais elle va se trouver mal. −Non... Non... ce n'est rien... ça va passer... ce n'est rien (Maupass., Pierre et Jean, 1888, p.377).C'est cette odeur de sang que je voudrais qu'elle passe (Audiberti, Femmes Boeuf, 1948, p.112). ♦ Au part. passé. La surprise passée, il jugeait inévitable que Tchen fût là (Malraux,Cond. hum.,1933,p.283).22 avril. La première joie passée, je médite (Schaeffer, Rech. mus. concr., 1952, p.15).Une fois passée, la guerre laisse aussi ses traces (Meynier, Paysages agraires, 1958, p.145). − Qqc.1passe (à qqn2).Cesser d'avoir de l'importance, d'être un sujet de préoccupation (pour quelqu'un). Quelle voix mystérieuse m'appelait à Paris? La voix de la gloire, une soif de renom qui ne m'a pas passé (Vallès, Réfract., 1865, p.37).À treize ans déjà, elle nous avait déclaré son intention de se faire religieuse. Puis cela avait passé (Billy, Introïbo, 1939, p.248).Il m'a dit: «Moi aussi, dans mon temps, j'ai fait partie d'un groupe révolutionnaire; j'écrivais dans leur journal. Ça te passera comme ça m'a passé...» (Sartre, Mains sales, 19482etabl., 3, p.43).
β) Empl. factitif. On emploie [des topiques] pour faire passer les dartres (Geoffroy, Méd. prat., 1800, p.444). ♦ Fam. Faire passer le goût du pain à qqn. V. goût I A. ♦ (Le) faire passer (pop.), se faire passer le lardon (arg.). Se faire avorter. Elle est enceinte de trois mois (...). Et elle ne sait pas comment le faire passer (Druon, Gdes fam., t.2, 1948, p.135).Une paillasse à journaliers. Deux fois qu'elle s'est fait passer le lardon (Arnoux, Zulma, 1960, p.281).
γ) [Avec valeur factitive] − Qqn2passe qqc.1Éliminer, dissiper. J'ai reçu la lettre en question de Messieurs de l'Assemblée, qui nous marquent de prendre un peu de patience, jusqu'à ce que les factieux aient passé leur fureur (Marat, Pamphlets, Aux bons Fr., 1792, p.320). ♦ Qqn2passe qqc.1(sur qqn3).Éliminer, dissiper en prenant quelqu'un pour exutoire. Il me faut quelqu'un pour passer ma mauvaise humeur (Mérimée, Théâtre Cl. Gazul, 1825, p.133).Tous ceux qui m'ont voulue ont passé leur désir sur moi (Louys, Aphrodite, 1896, p.51).V. nerf A 2 ex. de Goncourt: 76. ... cette (...) conduite (...) ne laissait pas d'augmenter chez lui l'état de nervosité dans lequel tantôt il avait signifié la rupture. Et il était tout prêt à «passer sa colère», sinon (...) sur la jeune fille envers qui il gardait ce reste de crainte, dernière trace de l'amour, du moins sur le baron.
Proust, Prisonn., 1922, p.196. − Passer son vin. Synon. de cuver* son vin.Nous ne pouvons le laisser en cet état, aidez-moi, Cazador, à le coucher sur cette natte; il y sera mieux pour passer son vin (Borel, Champavert, 1833, p.52). 2. [Comme la conséquence ou comme la marque du temps qui passe] a) Ne pas durer, être éphémère. La beauté passe, un talent reste, On en jouit même en autrui (Florian, Fables, 1792, p.186). − Expr. Tout passe, tout lasse, tout casse. V. lasser A 2 a ex. de Duhamel. ♦ P. plaisant., var. La houille un assemblage de végétaux? −En la chauffant à je ne sais plus combien de degrés, on obtient de la sciure de bois, tellement que tout passe, tout croule, tout se transforme (Flaub., Bouvard, t.1, 1880, p.97). − Passer de mode. V. mode1II B 1 a ex. de Balzac et ex. 13. b) S'altérer, se flétrir; perdre sa couleur, pâlir. Cette chambre, tendue de perse (...) sans cesse frappée par le soleil ainsi que le tapis, avait passé (Balzac, Cous. Bette, 1846, p.194).Des dents très blanches éclataient au milieu de la peau basanée par l'altitude; le hâle du docteur n'était pas de la première fraîcheur et commençait à passer, par taches vertes (Morand, Homme pressé, 1941, p.13): 77. La peinture a quelque chose de mobile, de fugitif, d'aérien presque, qui répugne (...) au génie [du Romain]. Il la voit déjà pâlir et s'effriter sur les marbres des acropoles. Alors il l'incorpore à la matière, il fait un temple où les marbres multicolores, unis ou veinés, alternent avec les granits, les porphyres, les basaltes. L'harmonie n'importe guère: la couleur ne passera plus.
Faure, Hist. art, 1909, p.136. − [P. allus. à Ps. XC, 5-6]: 78. ... c'étoient des images tendres et poétiques empruntées de l'Écriture: elle a passé comme l'herbe des champs; ce matin, elle fleurissoit dans toute sa grâce, le soir nous l'avons vue séchée.
Chateaubr., Génie, t.2, 1803, p.329. c) LAIT. Faire passer du fromage. Amener un fromage à maturation, l'affiner. [Les cultivateurs du pays de Bray] vendent (...) leurs fromages blancs (...) à des cavistes qui les font passer (Pouriau, Laiterie, 1895, p.689).V. affiner ex. 11 et 12. B. − Qqc.1se passe.Même sens que supra A 1 b α. Oh Dieu! que ça pue! (...) c'est qu'elle ne se passe pas cette odeur (...) C'est de plus fort en plus fort (Vidocq, Mém., t.2, 1828-29, p.246).Il faut vous secouer, monsieur Bovary; ça se passera! (Flaub., MmeBovary, t.1, 1857, p.21).Elle dut (...) s'aliter. Cela se passa très vite, heureusement, juste une affreuse migraine sans conséquence (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.206). III. − Qqc. se passe.[Le suj. désigne un événement] A. − [En tant que fait ponctuel] Arriver, se produire, avoir lieu. Je me bornerai donc à fixer vos doutes par deux anecdotes qui vous amuseront, et dont vous pouvez acquérir la preuve très facilement, puisqu'elles viennent de se passer sous nos yeux (Marat, Pamphlets, Charlatans mod., 1791, p.294).Carlini mangeait et buvait comme si rien ne s'était passé (Dumas père, Monte-Cristo, t.1, 1846, p.441).Depuis des semaines on ne savait plus rien de ce qui se passait dans le monde (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.13).V. avancer ex. 10. ♦ [À propos des relations entre deux pers.] La jeune femme (...) fait-elle seulement semblant de ne pas reconnaître le bel étranger? Ou bien a-t-elle vraiment tout oublié de ce qui s'est passé entre eux? (Robbe-Grillet, Pour nouv. rom., 1963, p.165). − Tournure impers. Il paraît qu'il se passe de terribles choses là-bas (Reybaud, J. Paturot, 1842, p.366).Le matin, elle avait couru chez Madame Lerat, parce qu'il se passait du nouveau (Zola, Nana, 1880, p.1288).Il crut que des inspecteurs le suivaient et cacha les notes de Simon. Mais il ne se passa rien: les policiers n'étaient jamais que des passants (Nizan, Conspir., 1938, p.95). ♦ Locutions Il s'en passe de belles/de jolies. Il s'en est passé de jolies, cette nuit! Six types de chez nous qui ont pris d'assaut le palais de glace, revolver au poing. La caisse soulevée!... Il y a des blessés graves, paraît-il (Vercel, Cap. Conan, 1934, p.105).[À propos de relations entre deux pers.] Il ne s'est rien passé. Ils n'ont pas eu de relations intimes. [Un jour, Emma] vint à dire (...) qu'autrefois, avant lui, elle avait aimé quelqu'un, «pas comme toi!» reprit-elle vite, protestant sur la tête de sa fille qu'il ne s'était rien passé (Flaub., op.cit., t.2, 1857, p.118). − À la forme interr. Mais qu'est-ce qui se passe, Chrysis, nous le diras-tu? (Louys, Aphrodite, 1896, p.64).Amie, me voilà! Que s'est-il passé? Je suis désolé, vraiment (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p.655).−Qu'est-ce qui s'est passé à Paris depuis notre départ? −Rien de spécial; il faisait chaud, dit Henri (Beauvoir, Mandarins, 1954, p.218). B. − [En tant que fait s'inscrivant dans une durée] Se dérouler dans ses diverses phases. Tout se passait comme j'avais prévu (Aymé, Jument, 1933, p.57). ♦ Se passer bien/mal. −Alors, mon pauvre vieux, ça s'est mal passé... Il s'assombrit subitement, prend un air grave. −Eh oui, mon pauv' vieux, que veux-tu, ça a été affreux, cette fois-ci... Barbier a été tué (Barbusse, Feu, 1916, p.56).La première partie de l'expérience se passa bien (Traité sociol., 1967, p.441). − À la forme exclam. [Impliquant une menace] Cela/ça ne se passera pas ainsi/comme ça! Oh! soyez tranquille, cela ne se passera pas ainsi (Dumas père, Mllede Belle-Isle, 1839, iv, 2, p.74).Mais cela ne se passera pas comme ça! s'écria Zélie. Ah! vous croyez que je laisserai Désiré se battre avec vous, avec un ancien marin qui fait métier de tirer l'épée et le pistolet! (Balzac, U. Mirouët, 1841, p.231). − En partic. [Dans une oeuvre littér., une pièce de théâtre] La scène se passe au château de Moldar, en partie dans une forêt qui en est éloignée d'un quart de lieue, dans un canton de la Franconie (La Martelière, Robert, 1793, i, 1, p.viii).Le deuxième acte se passe sur les Boulevards du Sud, d'où l'on aperçoit Paris (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p.68).Elle se demanda si le livre se passait dans l'Île de France (Cocteau, Enfants, 1929, p.186). Rem. gén. Passer, dans ses empl. intrans., se conjugue avec avoir ou être selon que l'on veut exprimer l'action ou l'état, être semblant, d'une façon gén., l'emporter. REM. 1. Passer, subst. masc.,vieilli. Action de passer (supra I), passage. Le voyage de jour, le repos plus doux de la fin de la journée, le passer sur les flots, le dormir sur la mousse, tireront du coeur sa plus profonde tendresse (Chateaubr., Mém., t.1, 1848, p.305).La voix chuchotante, murmurante, pareille au passer du vent parmi les feuilles, reprend (Kahn, Conte or et sil., 1898, p.252).En partic. Pêche au passer. ,, Genre de pêche que l'on pratique dans les remous ou sous une chute, en faisant suivre à l'appât le sens du courant`` (Nouv. Lar. ill., Lar. 20e). Au passer, loc. adv. Le ciel qui fut d'un ocre triste est violet, Foyer mort et marais de cendres et de fange Qu'éparpille au passer l'aile d'un vent muet (Régnier, Prem. poèmes, Épis., 1888, p.197). 2. Passement, subst. masc.[Corresp. à supra 1resection IV B 1 b ] Action de passer. a) Gymn. Demi-renversement, passement de la jambe gauche sur le bras gauche, lâcher l'anneau (Encyclop. des Sports1961ds Petiot 1982).b) Lutte. Passement de jambe. ,,La jambe tendue fait obstacle au déplacement des jambes de l'adversaire`` (Petiot 1982). Prononc. et Orth.: [pɑse], [pa-], (il) passe [pa:s]. Martinet-Walter 1973 [ɑ], [a] (9/8). ,,L'a reste (...) plus ou moins fermé en devenant prétonique, dans casser, lasser, (...) passer`` (Martinon Comment prononce 1913, p.34). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.A. Intrans. 1. ca 1050 passer «traverser un lieu» (Alexis, éd. Chr. Storey, 517); 1370-72 au fig. passer outre «cesser de traiter un sujet» (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, t.1, p.184); 2. ca 1050 «s'écouler (du temps)» (Alexis, 51); 3. ca 1165 passer de ceste vie «trépasser» (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 4091); 4. ca 1220 «être agréé, convenir» (Simon, Trois Ennemis de l'Homme, 3295 ds T.-L.); 5. 1500 (Intern. Consol., III, XIII ds Gdf. Compl.: Tous les sainctz de Paradis sont passez par temptacions); 6. fin xves. «s'effacer, s'altérer» (Guillaume Coquillart, Complaincte de Eco ds OEuvres, éd. M. J. Freeman, p.115); 7. [fin xiiies. soi passer pour «être considéré comme» (Sone de Nansai, 20478 ds T.-L.)] 1604 passer pour (Montchrestien, David, Tragédies, éd. L. Petit de Julleville, p.208); 8. 1655 y passer «subir (une peine, un châtiment, la mort)» (Molière, L'Estourdy, éd. R. Bray, acte II, scène 3). B. Trans. 1. ca 1050 (Alexis, 515: le saint cors ne pourent passer ultra); 2. ca 1100 p.anal. temporel (Roland, éd. J. Bédier, 816: le jur passerent Franceis a grant dulur); 3. a) ca 1100 «dépasser» (ibid., 524: Men escient dous cenz anz ad passet); b) ca 1120 «aller au-delà (de la vue)» (St Brendan, éd. I. Short et B. Merrilees, 1652); 4. ca 1100 «faire traverser» (Roland, 1272: Sun bon espiet (...) par mi le corps li passet); 5. ca 1120 «subir, supporter» (St Brendan, 574); 6. 1130 «ne pas tenir compte de» (Lois de Guillaume, éd. J. E. Matzke, 4); 7. 1130-40 «surpasser» (Wace, Vie de Sainte Marguerite, ms. A, éd. E. A. Francis, 452); 8. ca 1245 «omettre» (Saint Auban, 1355 ds T.-L.); 9. ca 1330 passer souz silence (Girart de Roussillon, éd. E. B. Ham, 5507); 10. fin xives. «frotter quelque chose sur quelque chose» (Froissart, Chroniques, éd. Luce, t.2, p.171); 1694 en partic. «affiler (un couteau)» (Ac.); 11. ca 1393 «tamiser» (Ménagier de Paris, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p.131); 1530 en parlant de substances liquides (Palsgr., p.738); 12. fin xives. passer un traictié (Froissart, Chroniques, éd. G. Raynaud, t.9, p.87); 13. ca 1450 maître passé (Mistère du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 8730); 14. 1549 laisser passer une chose comme qui ne la voiroit point (Est.); 1580 passe! (Montaigne, Essais, I, 27, éd. P. Villey, p.181); 15. 1588 «satisfaire (une envie)» (Id., ibid., III, 6, p.899); 16. 1677 qui passe perd (Mmede Sévigné, Lettres, éd. M. Monmerqué, t.5, p.163); 1608 jeux (C.Oudin, Dialogues fort plaisans, p.63 ds Quem. DDL t.21); 17. 1690 passer debout (de marchandises) (ibid.); 18. 1684 passer en compte (Mmede Sévigné, op. cit., t.8, p.85). C. Pronom. 1. a) 1176-84 se passer de qqc. «se contenter de» (Gautier d'Arras, Ille et Galeron, éd. F. A. G. Cowper, 1228), également se passer à dans ce sens, att. jusqu'au mil. xviies., v. J. Orr, R. Ling. rom., t.20, pp.21-40; b) fin xives. se passer bien de qqc. «ne pas regretter l'absence de» (Froissart, Chroniques, éd. G.Raynaud, t.9, p.124); 2. fin xives. (Id., ibid., t.10, p.291: ceste cose se passa); 3. ca 1450 (Mistère du Viel Testament, 9225: la douleur tost se passera). D. Part. prés. 1. a) ca 1250 subst. «personne qui passe à un endroit» (Vie de St Jean l'Aumônier, éd. K. Urwin, t.1, p.88, vers 3024); b) 1345 «celui qui passe» (Archives de Reims, éd. P. Varin, t.2, p.971); 2. 1347 «anneau de boucle de ceinture» (Inv. de J. de Presles, Bibl. de l'Ec. des ch., XXXIX, 91 ds Gdf.); 3. 1464 adj. «où l'on passe» (A. Seine-Inférieure, G 3839 ds Gdf. Compl.: chemins passans). Du lat. vulg. *passare «traverser», dér. de passus «pas» (v. ce mot), cf. ital. passare, prov. pasar, esp. pasar, port. passar, v. REW3, no6267. |