| PARTICULARISER, verbe trans. A. − Vieilli. Exposer d'une manière détaillée, circonstanciée. Particulariser un fait (Ac.). Il est bon dans certaines affaires de particulariser jusqu'à la moindre circonstance (Ac.).Pour moi (...), sans trop particulariser mes prophéties, je ne doute pas un moment que l'invasion de la Finlande (...) ne soit la source d'une grande catastrophe pour la Russie (J. de Maistre, Corresp., t.3, 1808, p.176).Nous avons là [dans les Mémoires d'Outre-tombe] une autre édition de René (...) plus détaillée et avec des circonstances réelles qui particularisent le récit (Sainte-Beuve, Chateaubr., t.1, 1860, p.93). B. − Restreindre quelque chose de général à quelque chose de particulier. Son observation était générale, il n'a rien particularisé (Ac.).[Les Indiens] n'ont pas assez généralisé leurs idées, pour avoir des mots un peu abstraits; ils ne les ont pas assez particularisées, pour ne pas donner le même nom à des choses très-distinctes (Voy. La Pérouse, t.2, 1797, p.212).Sainte-Beuve, dans ses poésies, avait déjà particularisé l'amour général et lyrique et raconté ses sentiments au lieu de les chanter (Lemaitre, Contemp., 1885, p.42). − Empl. pronom. passif. Le substantif qui implique une idée de qualité, de manière d'être, tend naturellement à devenir un adjectif; c'est le passage du particulier au général. L'inverse est tout aussi fréquent; une idée générale de qualité se particularise en substantif; de là des mots comme baudet, renard, qui signifiaient d'abord, gai et rusé (Gourmont, Esthét. lang. fr., 1899, p.156).La vie se particularise en courants séparés (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p.186). − DR. Particulariser une affaire. ,,Poursuivre le châtiment d'un crime commun à plusieurs, contre un seul de ceux qui y ont eu part`` (Ac.). C. − Caractériser par une/des propriété(s) particulière(s). Synon. singulariser.Zola (...) entre avec cet air lugubre et hagard, qui particularise ses entrées (Goncourt, Journal, 1880, p.92).Pour accuser ces différences et particulariser ses personnages, l'artiste recourt à la caricature la plus audacieuse (Lhote, Peint. d'abord, 1942, p.79): . La maison natale est plus qu'un corps de logis, elle est un corps de songes. Chacun de ses réduits fut un gîte de rêverie. Et le gîte a souvent particularisé la rêverie. Nous y avons pris des habitudes de rêverie particulière.
Bachelard, Poét. espace, 1957, p.33. − Empl. pronom. ♦ passif. Le travail des hommes y est copié avec réalisme [à Sakarah]. Si le profil est d'un type unique (...) les corps et leurs attributs −sexuels entre autres −se particularisent parfois jusqu'à la charge (Cocteau, Maalesh, 1949, p.90). ♦ réfl. dir. C'est déjà être Anglais que de mépriser les idées et les moeurs adoptées par les autres pays; mais c'est l'être tout à fait que de se distinguer et se particulariser par des manies affichées (Lorrain, Phocas, 1901, p.268). REM. Particularisé, -ée, part. passé en empl. adj.a) Qui est restreint à quelque chose de particulier. Quant à l'intérêt défendu, on peut le concevoir général (patrons ou commerçants) ou particularisé (bouchers) (...). La tendance va incontestablement vers une spécialisation de plus en plus étroite (Meynaud, Groupes pression Fr., 1958, p.99).b) Qui est caractérisé par une/des propriété(s) propre(s), particulière(s). J'espère qu'il n'a aucune grippe particularisée, plantée ici ou là; mais la générale suffit à vous rendre peu de chose (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1913, p.432). Prononc. et Orth.: [paʀtikylaʀize], (il) particularise [-ʀi:z]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. Av. 1473 «faire connaître le détail de quelque chose» (Jean Jouvenel des Ursins, Hist. de Charles VI, éd. Denys Godefroy, Paris, 1653, p.248); 2. 1607 «distinguer quelqu'un en lui prêtant plus d'attention qu'à d'autres», ici «faire la cour (à une dame)» (Honoré d'Urfé, L'Astrée, 1repartie, IV, éd. H. Vaganay, t.1, p.149); 3. 1611 «rendre particulier» p.oppos. à généraliser (Cotgr.); 4. 1834 réfl. «se distinguer des autres, se singulariser» (Land.). Dér. de particulier* d'apr. l'étymon lat. particularis; suff. -iser*. Fréq. abs. littér.: 53. DÉR. Particularisation, subst. fém.Action de particulariser; p.méton., résultat de cette action. a) [Corresp. à supra B] La définition de la continuité donnée par Cauchy va apparaître comme une particularisation d'une définition plus générale; celle de la mesure de la discontinuité en un point (Gds cour. pensée math., 1948, p.185).b) [Corresp. à supra C] Il ne s'est jamais agi de «littérature européenne», ainsi qu'il [Gosse] le prétend; mais de «culture européenne», qui comporte une participation des diverses littératures de notre vieux monde, chacune puissamment individualisée. Et seule la particularisation de chaque littérature, seule sa nationalisation, permettrait l'européanisation de la culture (Gide, Journal, 1916, p.570).Les photographes (...) inventent la retouche, qui enlève à tout visage son caractère et substitue à la structure réelle (...) une image vaporeuse d'où toute particularisation est exclue (Lhote, Peint. d'abord., 1942, p.170).− [paʀtikylaʀizasjɔ
̃]. − 1resattest. a) «action de particulariser» [1575 d'apr. FEW t.7, p.678a, réf. abrégée non résolue»] 1645 (C. Oudin, Esp.-fr., Fr-Esp., 2epart.), ex. isolé, 1845 sociol. (C. Pecqueur ds Besch.: La particularisation en propriété absolue dans les mains des individus... des sources... matérielles de la richesse), b) 4equart xvies. «exposition détaillée» (Marnix, Ecrits, p.10 ds Hug.), ex. isolé; de particulariser, suff. -(a)tion*. |