| PARFILER, verbe trans. A. − Défaire fil à fil un tissu précieux pour en récupérer l'or ou l'argent qui recouvre les fils. Synon. effiler.Deux bras arrondis par l'amour étaient nuds jusqu'au coude, et des mains d'une blancheur éblouissante parfilaient des fils d'or (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p.1634).Sous Louis XVI, les femmes du plus haut rang parfilaient en compagnie (A. France, Pt Pierre, 1918, p.142): 1. ... le duc (...) tuait le temps à parfiler du galon d'or ou à faire des découpages qu'il tirait ensuite au sort, pêle-mêle.
Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p.36. ♦ Empl. abs. Bien travaillé, tisseuse! Nos mères de leurs doigts oisifs s'amusaient à parfiler, décousant broderies et galons, détachant chaque fil un par un. Ce qu'elles ont défait, vous le refaites (Claudel, Otage, 1911, i, 1, p.220). B. − 1. Tisser une étoffe ou un galon en entremêlant des fils de matières ou de couleurs différentes. Damas parfilé d'argent et bordé de martre (Huysmans, Là-bas, t.1, 1891, p.186): 2. Chaque soir, l'air de la lagune remonte jusqu'au canal Grande (...). Les rideaux de raphia voltigent devant les portes. Les Jésuites sont obligés de faire parfiler de fils d'acier les tentures qui pendent au porche de Sant' Apostoli.
Giono, Voy. Ital., 1953, p.122. − [Dans un cont. métaph.] Et vous qui avez parfilé la soie de ma vie, ô femme! S'il y a eu dans mon roman quelqu'un de trompeur, ce n'est pas moi, quelqu'un de trompé, ce n'est pas vous! (Bertrand, Gaspard, 1841, p.193). ♦ Empl. pronom.: 3. ... la musique et les enchantements de la scène [en Italie] sont purement accessoires, le grand intérêt est dans les conversations qui s'y tiennent [dans les loges des théâtres], dans les grandes petites affaires de coeur qui s'y traitent, dans les rendez-vous qui s'y donnent, dans les récits et les observations qui s'y parfilent.
Balzac, Massimilla Doni, 1839, p.409. 2. P. anal., CÉRAM. Décorer une céramique de filets d'or ou d'autres matières ou couleurs. (Dict. xxes.). Prononc. et Orth.: [paʀfile], (il) parfile [paʀfil]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1751 «défaire un tissu fil par fil pour recueillir et trier ceux-ci»; boëte à parfiler «boîte servant à recueillir et classer les fils» (Livre-journal de Lazare Duvaux, éd. L. Courajod, Paris, 1873, II, 84 ds IGLF). Dér. de fil* (à l'aide de la prép. par1* et de la dés. -er). On a pu y voir (DG) un dér. de parfilure conçu comme une altér. de l'a. fr. porfileure «bordure, ganse»; en fait, parfilure «endroit de l'ouvrage où se forment les contours du dessin marqués par des points blancs et noirs» et «résultat de l'action de parfiler, fils résultant du parfilage» n'est att. que dep. 1765 (Encyclop. t.11, s.v. parfiler et parfilure) et la leçon parfileure des éd. G.-B. Deppings et R. de Lespinasse du Livre des Métiers (titre XCIV, Fourreurs de chapeaus, interpolation du ms. Bibl. Nat. fr. 24069 [xives.]) est une mauvaise lecture de porfileure dans le ms. (cf. aussi parfileure en 1324 ds Gdf.), l'a. fr. porfileure étant un dér. de po(u)rfiler «garnir d'une bordure» (xiiies. ds T.-L.) lui-même dér. de porfil (v. profil); de même parfilé part. passé et adj. «tissé avec des fils d'or» (Ac. Compl. 1842), à partir duquel a été reconstitué parfiler (supra B), est une mauvaise lecture de porfilé (Rabelais, Gargantua, éd. R. Calder et M. A. Screech, VII, 81, p.60). On note aussi parfiler «tisser entièrement, achever de filer» (1600, Champrepus, Ulysse, III, p.39 ds Hug. et Cotgr. 1611) comp. de par2* et de filer*. DÉR. 1. Parfilage, subst. masc.Action de parfiler; résultat de cette action. a) [Corresp. à supra A] Le soir, quand nous n'étions pas en fête, il dessinait à côté de moi tandis que je faisais du parfilage, et nous nous faisions la lecture à tour de rôle (Sand, Hist. vie, t.1, 1855, p.44).b) [Corresp. à supra B 1] Elle virait brusquement et remontait l'allée sous prétexte qu'elle avait oublié son mouchoir, la passementerie à parfilage ou le manuel de monseigneur de Trélazé (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p.73).− [paʀfila:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1798. − 1resattest. [1765 (Encyclop. d'apr. DG)] 1772 (MmeDu Deffand, Lettre à Horace Walpole, lettre CXLVI ds Havard); de parfiler, suff. -age*. 2. Parfileur, -euse, subst.Personne dont le métier ou l'occupation est de parfiler. V. festonneur B ex.− [paʀfiloe:ʀ], fém. [-ø:z]. − 1reattest. 1818 parfileuse (MmeDe Genlis, Dict. des étiquettes de la cour, s.v. parfilage ds Havard); de parfiler, suff. -eur2*. BBG. −Gohin 1903, p.372. |